La Presse Bisontine 125 - Octobre 2011

Mensuel d'informations de Besançon et du Grand Besdançon

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photo : Fotolia xxx Mensuel d’information de Besançon et des cantons d’Audeux, Boussières, Marchaux, Quingey et Roulans OCTOBRE 2011 N° 125 FRANC SUISSE ATTRACTIF p.46 et 47 CES BISONTINS QUI VONT TRAVAILLER EN SUISSE Ils sont désormais nombreux à prendre chaque jour la direction de la Suisse pour aller travailler. La valeur du franc suisse par rapport à l’euro renforce l’attractivité de nos voisins helvétiques. Témoignages. Kelly, martyre de Saint-Vit, la prise d’otages de Planoise, le petit Bilel, le “barbare” de Besançon, Céline et Sarah, les ex-prisonnières, le crash de La Vèze… SPÉCIAL FAITS-DIVERS LE DOSSIER en p. 20 à 26

ILS ONT VÉCU LE PIRE, AUJOURD’HUI ILS RACONTENT

Lundi 13 décembre 2010 : un forcené prend une classe maternelle en otage. Les hommes du G.I.P.N. interviendront en fin de matinée (photo SimonDaval.fr)

REPORTAGE L’ÉVÉNEMENT p. 6 et 7 Gens du voyage à Besançon : Une communauté à la croisée des chemins

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RETOUR SUR INFO - BESANÇON

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La Presse Bisontine n° 125 - Octobre 2011

Planoise : le panier solidaire inauguré rue de Cologne

L’actualité bouge, les dossiers évoluent. La Presse Bisontine revient sur les sujets

Périlleux En politique comme ailleurs, le coura- ge finit souvent par payer. En un sens, la primaire, cet exercice risqué auquel se livrent les socialistes en ce moment pourrait être assimilé à un certain cou- rage, cela justement parce quʼil est extrêmement périlleux et pourrait rédui- re à néant toute chance de reconquê- te du pouvoir au moindre dérapage. Dʼici le 16 octobre, ils auront en effet multiplié les risques de sʼentre-déchi- rer. Mieux : ils ont pris ce risque non pas seulement dans une université dʼété qui après tout nʼintéresse que les socia- listes eux-mêmes, mais à travers le filtre intransigeant de la télévision, devant la France entière. Quelle idée saugre- nue tout de même de sʼimposer un débat lorsque lʼon partage tous la même sensibilité et quand, mieux encore, on a tous adopté un programme commun ! Les socialistes le font et en le faisant sʼexposent chaque jour aux risques dʼimplosion. En créant ce concept inédit de primaire, ils ont certainement fran- chi un pas de géant vers leur tentative maintes fois infructueuse de reprendre les rênes du pouvoir. À droite, on a bien du mal pour lʼinstant à démolir cet exer- cice inédit de démocratie. Bien sûr les divergences pointent entre les six per- sonnalités de gauche mais cʼest juste- ment à lʼaune de ces divergences de forme ou de fond sur certains sujets sensibles que celui ou celle qui sortira vainqueur des urnes le 16 octobre impri- mera plus encore sa marque et par- tant, augmentera ses chances de vic- toire. Pour autant, il ne faut pas non plus que si cet exercice réussit, les socialistes se croient arrivés et tom- bent dans lʼeuphorie. Ils auront ensui- te à surmonter deux obstacles majeurs : le dernier, loin dʼêtre gagné, de battre un président sortant, lʼautre, deux semaines plus tôt, de ne pas être devan- cés par les partisans de Marine Le Pen, dont la contestation sourd en silence et qui pourrait aussi exterminer leurs espoirs. Localement aussi, on se pla- ce dans la course à la présidentielle en affichant son soutien aux principaux ténors de la primaire. Des personnali- tés politiques comme Jean-Louis Fous- seret, Pierre Moscovici plus encore, savent quʼils sortiront forcément gran- dis du soutien quʼils apportent à leur poulain. Après le naufrage de D.S.K. quʼils admiraient, ont-ils misé sur le bon cheval avec François Hollande ? Répon- se au soir du 16 octobre. Jean-François Hauser Éditorial

Les “médecine” regroupés en un seul site abordés dans ses précédents numéros, ceux qui ont fait la une de l’actualité de Besançon. Tous les mois, retrouvez la rubrique “Retour sur info”.

L’ inauguration officielle de l’U.F.R. Sciences médicales et pharmaceutiques (S.M.P.) s’est déroulée le 13 septembre dernier. Elle marque le - presque - aboutissement de 10 ans de travaux sur le site des Hauts-du- Chazal où sont désormais regroupés tous les étudiants de médecine et de pharmacie, soit près de 5 000 futurs docteurs. Près de 25 mil- lions d’euros ont été déboursés pour édifier les bâtiments de formation et de recherche. L’effectif des étudiants de médecine-pharma ne cesse d’augmenter depuis quatre ans, pas- sant de 3 677 au cours de l’année 2008-2009 à 4 925 cette année. L’ensemble immobilier de la nouvelle faculté de médecine-pharmacie ne sera complet que lorsqu’un dernier bâtiment sera construit, d’ici 2013. Ce troisième bâti-

ment d’enseignement comprendra deux nou- veaux amphis de 150 et 250 places. La filière médecine continue à se féminiser. En premiè- re année l’an dernier, 69%des étudiants étaient des étudiantes. La construction des bâtiments étant réglée, un autre souci risque de gâcher la fête dans les prochaines semaines : celui de la circulation. Aux heures de pointe, des files interminables de véhicules quittent le site des Hauts-du-Cha- zal et sont ralenties à hauteur du rond-point de Franois. La situation n’est guère meilleure en bus. À la sortie des premiers amphis, cer- tains étudiants ont dû attendre le quatrième bus pour regagner le centre-ville, soit près d’1 h 30 de délai. En attendant le tram… en 2015.

Des locaux plus vastes pour répondre à l’urgence sociale (photo J.-C. Sexe - Besançon).

L e “Panier solidaire”, épi- cerie sociale située dans le quartier de Pla- noise a inauguré jeudi 15 septembre ses nouveaux locaux, au 2, rue de Cologne. Cet espace répond à l’urgence et aide des familles dans le besoin en apportant un soutien au niveau alimentaire mais aus- si dans l’accompagnement. En 2010, 11 817 “passages” ont été enregistrés dans l’ancien local (situé non loin de la place Cassin) et 709 fois, le Panier solidaire a répondu à l’urgence en déli- vrant des colis à des per- sonnes dans le besoin. Les locaux situés 2, rue de Cologne sont flambant neufs. Plus vastes, ils offrent aux bénéficiaires une grande dis-

crétion. L’espace est ouvert les mardis après-midi, jeu- dis après-midi et vendredis matin. Pour bénéficier de cette aide, il faut au préa- lable avoir fait la démarche auprès du Centre commu- nal d’action social de Besan- çon. Produits secs (huile, riz, sucre…), produits frais (vian- de, légume, laitages…) et d’entretien sont délivrés aux bénéficiaires. Deux per- sonnes sont salariées. Une équipe de bénévoles s’occupe également de l’accompagnement et de l’inscription. Renseignements : Panier solidaire, épicerie sociale du quartier de Planoise, 2, rue de Cologne. Ouverte mardi après-midi, jeudi après-midi et vendredi matin.

L’opération inaugurée par les élus le 13 septembre aura coûté 24,9 millions d’euros.

Les Vaîtes : une conciliation plutôt qu’un bras de fer judiciaire

nement du tram observe Éric Daclin, porte-parole de l’association Les Vaîtes. S’il veut que le projet avance, il faut que la Ville achète à un meilleur prix les terrains qu’elle préempte.” Cette association a de toute évidence un pouvoir de nui- sance. Cependant, elle préfé- rerait de loin la conciliation à un bras de fer judiciaire “dans lequel la Ville comme les pro- priétaires peuvent avoir à y perdre en fonction de la déci- sion du juge des expropria- tions” ajoute Éric Daclin. L’association ne demande pas à ce que les terrains incons- tructibles soient indemnisés 250 euros le mètre carré, un

L’ été n’a pas apaisé les esprits. Les propriétaires fonciers des Vaîtes concernés soit par l’aménagement du quartier porté par la Ville, soit par le chantier du tram piloté par l’Agglo ne sont pas prêts à lâcher leur lopin de terre à n’importe quel prix au nom de l’intérêt collectif. L’indemnisation de 8 euros confirmée par courrier en juillet pour un terrain inconstruc- tible est jugée insuffisante par beaucoup de propriétaires compte tenu des ambitions qu’ont ces deux collectivités pour les Vaîtes. “Pour l’instant, le maire s’intéresse aux pro- priétaires situés sur le chemi-

tarif que la municipalité aurait proposé pour un terrain constructible, mais environ 45 euros. À défaut d’une conci- liation, c’est au tribunal que les affaires se régleront. Des propriétaires se sont regrou- pés pour prendre un avocat, alors que la Ville a toute lati- tude pour engager la procé- dure d’expropriation.

est éditée par “Les Éditions de la Presse Bisontine”- 1, rue de la Brasserie B.P. 83 143 - 25503 MORTEAU CEDEX Tél. : 03 81 67 90 80 - Fax : 03 81 67 90 81 E-mail : redaction@groupe-publipresse.com Directeur de la publication : Éric TOURNOUX Directeur de la rédaction :

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La ville aurait proposé 250 euros le mètre carré pour des terrains constructibles aux Vaîtes.

Crédits photos : La Presse Bisontine, A.F.P.L., Cyril Daenekyndt, Simon Daval, GEEST, Ville de Besançon.

L’INTERVIEW DU MOIS

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SANTÉ

Taxe sur les mutuelles “Le gouvernement dupe les Français”

Président de la Mutualité Française Franche-Comté, Pierre Alixant revient sur la décision du gouvernement d’augmenter la taxe sur les conventions d’assurance. Ce sont les titulaires d’une mutuelle qui vont payer.

L a Presse Bisontine : Comment jugez- vous la hausse de la taxe sur les conven- tions d’assurance qui passe de 3,5 % à 7 % ? Pierre Alixant : Assez mal. Les mutua- listes commencent à être exaspérés du mépris gouvernemental dont ils font l’objet, lequel gouvernement s’appuie par ailleurs sur des mensonges pour justifier cette mesure. Dire par exemple que les mutuelles sont riches est faux. S’il y a des riches, c’est plutôt du côté des banquiers qui spolient leurs clients. Les mutuelles ne sont pas riches, elles ont des réserves qui appartiennent en totalité à leurs adhérents. Dire enco- re que cette taxe est une taxe sur les entreprises mutualistes est un men-

rien le déficit de la Sécurité sociale qui continue de se creuser. L.P.B. : Pourquoi répercuter cette taxe sur les adhérents ? Les mutuelles n’ont-elles pas les ressources nécessaires pour assumer son coût ? P.A. : Il y a deux solutions. Soit on bais- se le niveau des prestations, soit on augmente le coût des cotisations. Aujourd’hui, on s’aperçoit que des citoyens sacrifient des prestations pour diminuer le coût de leur cotisation. L.P.B. : Les cotisations des adhérents vont aug- menter, ils vont devoir payer plus, mais com- bien exactement ? P.A. : Sur 100 euros de cotisation, il y a désormais 11,72 euros de taxe. Tout cela pour produire 2,2 milliards d’euros de recettes pour l’État face à un défi- cit abyssal. Nous sommes dans un sys- tème où les mutuelles deviennent des collecteurs de taxe. Aujourd’hui, 95 % des gens ont une complémentaire san- té et 65 % sont assurés par des mutuelles. Le risque est que l’on conti- nue de faire supporter des charges de plus en plus lourdes sur des adhérents sans pour autant améliorer le fonc-

songe. Les mutuelles n’existent que par leurs adhérents sur lesquelles elles répercuteront auto- matiquement cette taxe. Le gouvernement dupe les Français dans cette affaire. Il ne considère pas que la santé est un produit de première nécessité. J’ajoute que cette hausse ne règle en

“Les mutuelles deviennent des collec- teurs de taxe.”

Pierre Alixant : “Cette hausse ne règle en rien le déficit de la Sécurité sociale qui continue de se creuser.”

prises et en particulier celles du C.A.C. 40 se chiffrent en centaine de milliards, tout cela pour rémunérer des action- naires. L.P.B. : Les mutuelles ne font-elles pas des économies notamment avec les patients en affection longue durée pris en charge par la Sécurité sociale ? P.A. : C’est un mensonge également. Un patient en A.L.D. est pris en charge à 100 % par la Sécurité sociale pour sa pathologie. Or, en général, ces patients ont d’autres problèmes de santé en dehors de cette maladie. Ce sont les mutuelles qui prennent en charge les frais inhérents au traitement des patho- logies qui surviennent en plus de la maladie pour laquelle ils sont pris en charge à 100 %. L.P.B. : Vous dites que les mutuelles ne sont pas riches. Pour autant, la Mutualité Françai- se a les moyens d’investir dans des cliniques et des E.H.P.A.D. Il y a donc bien une recherche de rentabilité ? P.A. : Nous sommes dans unmodèle éco- nomique social à but non lucratif. Cela signifie que nous devons avoir des ser- vices de soin d’accompagnement mutua- listes équilibrés. Notre but est de peser sur les coûts des prestations pour limi- ter le reste à la charge de nos adhé- rents. C’est le cas avec la Polyclinique de Franche-Comté où, grâce à un accord avec les professionnels libéraux, nous parvenons à limiter le reste à charge. Plus on pèse en amont sur le coût des prestations, plus on pèse sur l’évolution des cotisations. La totalité des excé- dents est réinvestie dans l’outil de tra- vail et ne sert en rien à rémunérer des actionnaires. La Polyclinique de Franche-Comté est la propriété de tous les mutualistes. L.P.B. : Cette taxe est donc une injustice socia- le ? P.A. : Le problème de cette taxe est qu’elle touche surtout les classes moyennes pour lesquelles la complé- mentaire santé est indispensable. Quand une famille doit faire contrô- ler l’état bucco-dentaire de deux ou trois enfants, il y a un reste à charge important. Sans mutuelle, des parents ne peuvent pas faire bénéficier de l’orthodontie à leurs enfants par

tionnement du système de lutte contre les déficits. Depuis 20 ans, on ne fait que du replâtrage. On se trompe de cible quand on sait que les exonéra- tions fiscales dont bénéficient des entre-

exemple.

L.P.B. : Les mutuelles n’ont pas été consul- tées dans ce projet gouvernemental. Com- ment peut réagir maintenant la Mutualité Fran- çaise qui représente près de 38 millions de personnes. Vous avez un vrai pouvoir de lob- bying ? P.A. : Cette mesure a été adaptée sans débat. Le président de la Mutualité a été informé par téléphone à 17 heures de cette réforme qui était adoptée à 18 heures. C’est une forme de mépris de la part de Xavier Bertrand,ministre de la Santé. La Mutualité ne va pas en rester là. Depuis 1994, nous faisons régulièrement des propositions. Nous allons produire une plate-forme de pro- positions afin que la santé, qui est le souci principal des Français, soit inté- grée dans le débat de la présidentielle. Le 28 novembre, Étienne Caniard, le président de la Mutualité Française, viendra défendre et expliquer cette pla- te-forme de propositions à Besançon. L.P.B. : Quel est le poids économique de la Mutualité Française en Franche-Comté ? P.A. : Dans le Doubs, la Mutualité c’est 1 300 salariés dont 700 à Besançon. En Franche-Comté, nous employons 3 000 personnes. Nous sommes là pour gérer nos entreprises. Il est préférable d’augmenter les excédents que de creu- ser les déficits. Nous n’avons d’ailleurs pas d’actionnaires pour les renflouer. Propos recueillis par T.C. La Mutualité Française en Franche-Comté 1 300 salariés dans le Doubs dont 700 à Besançon Chiffre dʼaffaires 80 millions dʼeuros 30 sites 2 cliniques (Besançon et Dole) 120 lits dʼhospitalisation à domicile 13 établissements pour personnes âgées dépendantes, un quatorzième est en projet 6 espaces dentaires 8 centres optiques 5 centre dʼaudition 4 relais assistantes maternelles

BESANÇON

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CIRCULATION Conséquence du tramway 830 places de

Le parking baptisé “Robelin” situé vers

stationnement supprimées La Ville de Besançon promet de nouvelles places de parking pendant les travaux du tramway pour compenser celles qui seront supprimées. Les nouvelles se situeront surtout en périphérie. Le point.

la place Leclerc

deviendra en grande partie payant.

D es parkings gratuits qui vont passer payants, des places de stationnement suppri- mées aux abords du par- cours emprunté par le futur

de-Chazal. Puis àMicropolis où l’actuel parking-relais devrait être augmenté de 150 places et avec la création d’un nouveau parking de 200 places en contrebas de Micropolis, sur la butte située entre la Malcombe et le palais des congrès. 195 places seront aussi ajoutées dans la continuité du parc- relais de Témis. Ainsi que 150 autres nouvelles places à côté de l’actuel par- king de la Rodia, qui sera lui aussi étendu. “Avec la passerelle, on est à 5 minutes à pied du centre-ville” estime M me Weinman. Trois derniers sites seront dotés de nouvelles places de parking gratuit : Fort Benoît (en haut de la rue de Belfort) avec 60 places dans un premier temps, Casamène avec 200 nouvelles places dès cet autom- ne et les Vieux Glacis avec une cin- quantaine de places, mais “essentiel- lement réservées aux résidents.” Au total, pendant la durée du chantier, 900 places nouvelles seront donc créées. On l’aura compris, l’idée, logique, pour- suivie par la ville est d’inciter au maxi- mum les automobilistes à rejoindre l’intérieur de la Boucle à pied, en vélo ou par les transports en commun. J.-F.H.

Mais dans le même temps, c’est vers la périphérie que la Ville souhaite orien- ter les automobilistes. Le nouveau plan de stationnement prévoit en effet la suppression de 830 places de station- nement sur le parcours du tram (exemples quaiVeil-Picard, avenue Fon- taine-Argent) mais celles-ci, “seront compensées à l’unité près” promet Nico- le Weinman, l’adjointe bisontine à la voirie. Comment ? Par deux parkings payants en centre-ville qui ne sont autres que la transformation de parkings gra- tuits en parkings dits “réglementés.”À Rivotte d’abord où 90 places payantes seront proposées et vers la place Leclerc où l’actuel parking en “tout-venant”, jusqu’alors gratuit, sera également réaménagé et transformé en parking de 125 places payantes. “L’idée est la même qu’à Chamars : il faut impérati- vement supprimer ce phénomène de voi- tures-ventouses” argue l’élue qui préci- se néanmoins qu’un “bon tiers de ce parking Robelin restera gratuit.” La nouvelle offre gratuite, il faudra donc aller la chercher “hors les murs”. Route de Franois d’abord où un par- king-relais provisoire de 200 places sera aménagé sur le secteur des Hauts-

renforcement du dispositif Free Pass (les jetons distribués par les commer- çants) puisque “50 000 jetons supplé- mentaires sont en cours de fabrication” indique la Ville.

tram… L’automobiliste bisontin ne sera plus le bienvenu au centre-ville de Besançon, bien que les services de la Ville fassent tout pour rassurer les usagers en annonçant notamment le

Pendant les travaux du tram, on sera fortement encouragés à se garer sur les parkings- relais.

L’ÉVÉNEMENT

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LES GENS DU VOYAGE À LA CROISÉE DES CHEMINS Les gens du voyage font parfois parler d’eux à travers les faits-divers. Mais cela ne nous autorise pas à reléguer tout une communauté au banc des délinquants. Cette communauté qui étonne tant par son fonctionnement que par sa culture et sa diversité, semble être à un tournant de son histoire. Ces nomades sans attaches qui vivaient sur les routes tendent aujourd’hui à se sédentariser. Toute la difficulté pour les nouvelles générations est de trouver leur place dans la société sans renier leur culture. Mais la société doit également changer le regard qu’elle porte sur eux pour les aider à trouver leur place. Cela prendra du temps. Décryptage dans le Grand Besançon.

SOCIÉTÉ

voyage. Il ajoute que l’Agglo est atten- tive également aux riverains qui par- fois se plaignent de ce voisinage. Le Grand Besançon ne voudrait pas que cette externalisation soit inter- prétée comme une façon de botter en touche en se débarrassant de ce qui pourrait être considéré comme un poids. “Au contraire, nous voulons exercer notre compétence de façon plus effi- ciente en se recentrant sur le volet social et scolaire dans l’accompagnement des gens du voyage” insiste Fabrice Baud, responsable du service “habitat et poli- tique de la ville” à l’Agglo. Avec sa col- laboratrice Aurélie Kolmayer, ils effec- À partir du mois d’octobre Une société privée pour gérer les aires d’accueil Jusqu’à présent, la C.A.G.B. gérait en régie les cinq aires d’accueil des gens du voyage. Début octobre, elle déléguera cette

sons sanitaires comme le prétend Pas- cal, un homme de la communauté, qui a entendu dire “que la présence de trois virus y avait été détectée” , mais pour des motifs administratifs et techniques. La C.A.G.B. qui a la compétence “gens du voyage” s’apprête en effet à trans- férer la gestion des aires (y compris celle de grands passages de Thise) à un prestataire privé, la société Vago, qui gère aujourd’hui près de 200 aires d’accueil en France. Le transfert sera effectif début octobre. En vue de cette échéance, la collectivité a décidé de fermer non pas une, mais les quatre aires d’accueil réparties sur son terri- toire (Pirey, Saône, Mamirolle, Besan- çon). Elle veut les remettre à neuf afin de confier au nouveau prestataire des sites propres et opérationnels à leur réouverture. “Cette société va accueillir les gens du voyage, encaisser les paie- ments, faire respecter le règlement inté- rieur. Avant, ces missions étaient assu- rées par des agents de l’Agglo dans le cadre de la régie” précise BernardMoy- se, le maire de Thise, vice-président de la C.A.G.B. en charge des gens du

L’éducation et le social sont deux leviers sur lesquelles la collectivité prétend vouloir agir pour que de plus en plus de liens se tissent entre les gens du voyage qui obéissent à leurs propres règles, et l’environnement qui les entou- rent. Le tout est d’éviter que des familles ne se marginalisent, comme à Mami- rolle où l’aire d’accueil a été entière- ment saccagée. Fermée depuis plu- sieurs mois, elle ne rouvrira pas dans l’immédiat. Celle de Saône a elle aus- si été vandalisée. Deux familles sont concernées. Elles font l’objet d’un sui- vi particulier de la part des services de l’Agglo et de l’État. La délinquance existe aussi dans cet- te communauté. Néanmoins, selon Fabrice Baud il ne faut pas faire de cas particuliers une généralité. “Il faut bien distinguer les populations semi- sédentaires comme il y en a à la Mal- combe avec lesquelles les choses se pas- sent globalement bien, de ces quelques familles de délinquants. Il faut les dis- tinguer aussi du phénomène des grands passages que l’on observe pendant la période estivale” dit-il. Ces grands passages sont redoutés par les élus locaux, tant ils sont imprévi- sibles et difficiles à gérer. Pourtant, l’aire de Thise et ses 90 emplacements est prévue pour les accueillir. Mais les chefs de groupe ne prennent pas tou- jours la peine de réserver, comme cela est prévu par l’Agglo, ce qui ne les empêche pas de s’installer là où ils veulent. Les maires sont mis devant le fait accompli. “Ce sont des envahis- sements sauvages sur des terrains public ou privés” observe Bernard Moyse qui a déjà connu ça à Thise. “C’est un délit, mais quand il y a 200 caravanes et qu’on ne peut pas les faire partir, il faut transiger avec le droit” ajoute-t-il. Au mieux, en bon négociateur, le maire épaulé par le service de la C.A.G.B. compétent, réussit à les faire partir. Il peut aussi tenter de faire appliquer

une convention d’occupation comme ce fut le cas cet été à Saône où la muni- cipalité a obtenu un dédommagement de 5 euros par caravane. Au pire, le maire engage une procédure d’expulsion au Tribunal Administratif qui pren- dra au moins dix jours. “Quand le réfé- ré d’expulsion tombe, en général, les gens du voyage sont partis” déplore le vice-président de l’Agglo.Tous les frais sont à la charge de la commune. Les élus locaux se sentent démunis face à ce genre de situation, pas franchement soutenus par l’État, ni pas la justice. Pour mieux gérer ces grands passages, l’Agglo n’exclut pas d’étudier la pos- sibilité de trouver un terrain de déles- tage en plus de celui de Thise. Il fau- dra qu’il soit grand. T.C. Tarif aire de grands passages de Thise : 2 euros par jour et par famille Repères L’accueil en chiffres Thise : 100 places de caravanes Besançon-Malcombe : 20 emplacements Mamirolle : 5 emplacements Budget C.A.G.B. 2011 accueil gens du voyage : 434 000 euros Recettes liées aux usagers des aires : 211 280 euros Tarifs : 2,50 euros par jour et par famille (hors eau et électricité) Durée dʼoccupation de 3 mois renou- velables si les enfants sont scolarisés Saône : 5 emplacements Pirey : 5 emplacements

“L a Malcombe, elle rouvre quand ?” Enrobée d’impatience, la question adressée à l’Agglo est sur toutes les lèvres des occupants de l’aire de Thise qui ne sont pas à leur place sur ce site réservé aux grands pas- sages. Ces gens du voyage, semi-séden- taires pour la plupart, ont été invités à quitter Besançon pour ce lieu suite à la fermeture provisoire de l’aire de la Malcombe. Elle est actuellement interdite d’accès non pas pour des rai- compétence à un presta- taire privé, la société Vago.

tuent un travail de fond auprès de cette commu- nauté. “À Thise par exemple, nous avons cinq ou six enfants issus de familles de gens du voya- ge scolarisés. L’école Jules Ferry à Besançon en accueille aussi beaucoup. Notre action porte ses fruits” rappelle Bernard Moyse.

“Transiger parfois avec le droit.”

Bernard Moyse, vice-prési- dent de l’Agglo en charge de l’habitat, des gens du voyage et de la politique de la ville.

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AIRE DE THISE

Ils viennent de toute la France

Rencontres sous les auvents des caravanes Il y a parfois de la méfiance de la part des gens de cette communauté à l’égard du visiteur. Mais quand le dialogue s’engage, les langues se délient.

A ire de grand passage à Thise, une fin d’après- midi. Les tables sont sor- ties. Les femmes s’affairent aux fourneaux. Elles préparent le repas sous les auvents des caravanes où sont aménagées des cuisines som- maires. Des enfants jouent dans le soleil couchant autour des machines à laver qui tournent à l’extérieur, bien calées sur des palettes de bois. Un jeune gar- çon bricole une arrivée électrique qui fonctionne mal, un autre rentre de la pêche dans le Doubs qui borde l’aire. Plus loin une jeune maman appuyée dans l’embrasure de la porte de sa

l’œil sa popote qui fume sur le réchaud à gaz. “Hier nous étions à Montbéliard. Nous resterons là une quinzaine de jours au maximum et puis nous reparti- rons. Nous sommes des gens du voyage dit-elle avec une certaine fierté. Notre vie, c’est la route.” Partir, mais pour aller où ? Elle ne le sait pas encore. Peut-être vers la vallée du Rhône. Avec l’augmentation des prix du carburant, beaucoup de ces familles de nomades se dépla- cent moins. Pour des raisons éco- nomiques, certaines abandon- nent petit à petit le voyage afin de se sédentariser, au grand dam des anciens qui redoutent que leur culture ne finisse par se dis- soudre dans le temps. Pascal vit désormais à Besan- çon presque huit mois de l’année. Le soir approche,comme d’autres hommes, il rentre du travail. “C’est dur en ce moment. La cri- se…” lâche le gaillard en des- cendant de sa camionnette.Alors que d’autres sont ferrailleurs, empailleurs de chaises, lui sillon- ne le Grand Besançon pour pro- poser aux particuliers des petits travaux d’élagage et de maçon- nerie. Il sonne aux portes pour

caravane raconte qu’elle a reçu la veille au soir la visite de S.O.S. Médecins pour son enfant mala- de. C’est un jour ordinaire dans un campement de gens du voya- ge avec ses va-et-vient. On y res- sent plus de laméfiance à l’égard du visiteur, le gadjo, que de l’agressivité. Mais les humeurs sont changeantes en fonction des situations. Paris, les Vosges, le Doubs, laDrôme et même la Cor- se, les occupants viennent de tou- te la France à lire les plaques d’immatriculation des maisons ambulantes aux jantes parfai- tement lustrées qui sont ici. “Nous sommes arrivés cematin” explique Maria en surveillant du coin de

vendre sa prestation de service avec plus ou moins de succès. Pascal paraît las de cette jour- née qui s’achève. L’avenir semble préoccuper cet homme qui sent bien qu’en se sédentarisant, il délaisse la grande famille des gens du voyage même s’il veut continuer à vivre en caravane. Il sait aussi que la sédentarisa- tion n’est pas un gage d’intégration et qu’il faudra plus que cela pour changer le regard des gens sur la communauté à laquelle il appartient.Une socié- té dans la société. “Pourtant, je suis Français. Je suis né en Fran- ce et je n’ai pas le droit de vote. Contrairement à vous,moi, je n’ai pas de papiers d’identité, mais un livret de circulation. Je ne suis rien” rappelle-t-il. Ce carnet, tous les gens du voyage sont censés en posséder un. Ils doivent le fai- re viser régulièrement par les autorités pour se déplacer libre- ment à travers l’Hexagone. Les associations qui luttent contre la stigmatisation de la commu- nauté des gens du voyage qui fonctionne pourtant avec ses propres codes, ses us et ses cou- tumes, qualifient ce livret com- me étant un fait de discrimina- tion. T.C.

Objectif du département du Doubs Mettre l’accent sur le volet social L e Conseil général du Doubs engage actuellement la révi- sion du schéma départemental d’accueil des gens du voyage qui a été mis en place en 2006. “Le but est de fai- re le bilan et d’identifier les points à renforcer” indique Éric Fai- vret, directeur de l’économie et des collectivités locales du Conseil général. Notre département compte 13 aires d’accueil (soit 296 places), 4 aires de grands passages (soit 300 places) et quelques terrains familiaux qui s’adressent à des familles en cours de sédentarisation. Côté équipement, le Doubs est dans les clous. 5,3 millions d’euros ont été investis par les collectivités locales et l’État pour aménager ces aires. “C’est pourquoi la révision du schéma se fait moins dans une logique d’équipement que d’accompagnement social” ajoute-il. L’accent devrait cependant être mis sur les terrains familiaux pour favoriser la sédentarisation des familles qui le souhaitent. Patrick Mila, le directeur de l’association Gadgé, y est favorable. “L’accueil sur les aires est totalement dépassé. Les voyageurs ne voyagent plus. Il ne faut plus raisonner en terme d’emplacement mais d’habitat. On se bat pour que dans les Plans Locaux d’Urbanisme des espaces soient réservés pour des terrains fami- liaux comme il y a des obligations pour les logements sociaux. Plutôt que de concentrer les gens sur des aires d’accueil au risque de créer des problèmes il serait préférable d’avoir deux terrains familiaux dans chaque commune.”

Les caravanes de Thise vont bientôt rejoindre la Malcombe.

COMMENTAIRE

Sédentaires et nomades

“L’enjeu est de trouver le moyen de vivre ensemble” Directeur de l’association franc-comtoise des gens du voyage-gadjé, Patrick Mila explique les enjeux à venir pour cette communauté qui est en pleine mutation.

toire. D’un côté leurs parents savent qu’ils doivent apprendre à lire et à écri- re, mais a minima pour préserver la cultureTzigane qui se transmet à l’oral. Par ailleurs, chez les gens du voyage, jusqu’alors il n’y avait pas d’adolescence. On passait de l’enfance à l’âge adulte auquel il faut gagner sa vie.Cette concep- tion des choses qui est en train de chan- ger ne laissait pas de place au collège. L.P.B. : Où en est-on dans le processus de sco- larisation de ces enfants en Franche-Comté sachant que différents dispositifs existent comme des camions-écoles qui sillonnent les départements ? P.M. : En Haute-Saône, en six ans, nous sommes passés de 20 % des enfants des gens du voyage scolarisés, à 100 % ! Il y a désormais quelques scolarisa- tion en collège et un début en lycée. Nous essayons de faire le même tra- vail dans le Doubs et dans le Jura. Depuis deux ans, un camion-école se déplace sur ces deux départements pour prendre en charge ces enfants. L.P.B. : Quel visage aura selon vous cette com- munauté dans dix ans ? P.M. : La communauté des gens du voya- ge est à la croisée des chemins. Jamais elle n’a été confrontée à un risque aus- si fort de disparition. Dans dix ans, la culture Tzigane ne sera pas la même. Elle ne doit pas nager à contre-cou- rant, mais dans le courant tout en essayant de rejoindre la berge. Cette communauté peut s’adapter au contex-

te actuel, comme elle a eu à le faire par le passé. Les gens du voyage ont été contraints parfois de se sédenta- riser à travers les siècles, comme ils le font aujourd’hui. Mais cela ne veut pas dire que dans quelques années ils ne reprendront pas la route. L.P.B. : Les gens du voyage sont rarement les bienvenus dans les communes. La cohabita- tion est difficile avec les autochtones qui les assimilent parfois à des délinquants. De quels outils disposez-vous pour créer des espaces de dialogue ? P.M. : Il y a des délinquants dans ces peuples comme dans les peuples de sédentaires. Lorsqu’un peuple est en difficulté, alors oui il y a plus de délin- quance. Des voyageurs se sentent per- sécutés par le monde actuel, ils n’y voient pas d’espoir, ce qui génère de la violence. Le fait de les regrouper dans des aires d’accueil comparables à de nouvelles Z.U.P. ne facilite pas les choses. Il y a toujours cette crainte du séden- taire vis-à-vis du voyageur, la crainte du “voleur de poules”. Toute la diffi- culté est d’essayer d’apporter des solu- tions à ces gens dont on ne connaît pas le mode de vie. On fait fausse route en considérant qu’il y a d’un côté une société bonne et de l’autre des sau- vages qui méritent d’être éduqués. Il faut parvenir à ce que chacun regar- de chez l’autre ce qu’il y a de bien et l’accepte. Le but est de trouver le moyen de vivre ensemble. Propos recueillis par T.C.

L.P.B. : De quoi vivent les gens du voyage ? P.M. : Ceux qui font de la vannerie ou de l’empaillage de chaises sont désor- mais à la marge car ces activités néces- sitent de beaucoup voyager. Compte tenu des difficultés économiques, ils voyagent moins. Beaucoup se sont tour- nés vers d’autres métiers de service comme l’élagage, le jardinage, le ramo- nage ou l’entretien de toitures. À quelques exceptions près, tous ces gens sont déclarés, et sont installés en auto- entrepreneurs pour exercer légalement leur activité. Ils sont entrés majori- tairement dans le droit commun. Nous travaillons actuellement avec le Conseil régional sur une formation qualifian- te pour les gens du voyage afin qu’ils puissent créer leur micro-entreprise. L.P.B. : Pourquoi dans cette communauté les enfants quittent l’école à la fin du primaire ? P.M. : Le peuple Tzigane a une culture orale. Ces gens sont dans un monde où ils sentent une pression pour les assi-

L a Presse Bisontine : Qui sont les gens du voyage ? Patrick Mila : Par définition, ce sont des gens dont l’activité dépend du voyage. Ce terme générique englobe les Tzi- ganes, les bateliers autant que les Cir- cassiens. Ceux dont vous parlez sont les Tziganes qui se répartissent en quatre ethnies : les Gitans, les Manouches, les Roms et les Yéniches. Mais je rappelle que les Roms Tziganes n’ont rien à voir avec ceux désignés comme étant des Roms par la com- mission européenne, et qui sont des réfugiés économiques originaires de Bulgarie ou de Roumanie, arrivés en France au début des années 2000. L.P.B. : Les gens du voyage ont-ils ou non la nationalité française ? P.M. : Les Tziganes sont arrivés en Fran- ce en 1430. Certaines familles ont donc des racines françaises beaucoup plus anciennes que la plupart d’entre nous. Oui, ces gens ont la nationalité fran- çaise. Mais ils “jouissent” d’une légis- lation qui leur est propre. Par exemple, ils n’ont pas de carte d’identité mais un carnet ou un livret de circulation qu’ils doivent faire viser régulièrement par les services de gendarmerie.Actuel- lement, ce système est remis en cau-

se au niveau national, car le livret est considéré comme étant discriminatoi- re. Le problème, et c’est toute l’ambiguïté du propos, c’est que ce livret est aus- si le moyen pour les gens du voyage de marquer administrativement leur appartenance à cette communauté. Ces populations ont également le droit de vote. En revanche, pour le faire valoir, une personne doit être déclarée comme résidant dans une commune depuis plus de trois ans. L.P.B. : Ces communautés semblent aussi pro- fondément attachées à la religion. Pouvez- vous l’expliquer ? P.M. : Chez les gens du voyage, la reli- gion est très importante, mais elle génère des modes de vie différents. D’un côté, il y a les catholiques qui se déplacent par petits groupes de cinq ou dix caravanes et qui participent à de grands rassemblements comme celui des Saintes-Marie-de-la-Mer. Ils s’installent dans les aires d’accueil. Puis il y a les évangélistes protestants, qui se déplacent par grands groupes d’une centaine de caravanes. Ce sont les grandes missions auxquelles on assiste pendant la période estivale. Les aires de grand passage sont faites pour eux.

miler et les rendre sédentaires.Cela pas- se par l’école. Or, quand les enfants vont en classe, ils apprennent une cul- ture écrite qui est la nôtre, et ils sortent ainsi de la cultureTzi- gane. L’enjeu identi- taire est là. Ces enfants reçoivent un discours contradic-

“La communauté est à la croisée des chemins.”

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EN BREF

L’Union des commerçants sans domicile fixe ? La ville s’apprête à vendre l’immeuble dans lequel est abritée l’association des commerçants bisontins. Estimé 460 000 euros, le bien est vendu à un promoteur bordelais pour 1,2 million. PATRIMOINE Défiscalisation Malraux

Architecture La Maison de l’architecture de

Franche-Comté (1, rue des Martelots) présente une exposition jusqu’au 19 octobre intitulée “La Cité des arts et de la culture : un chantier, deux lieux, trois expositions”. Rens. d’improvisation fait sa rentrée. En ouverture de la saison, un match d’impro exceptionnel : France-Québec le 13 octobre. Et trois nouveaux ateliers sont créés à Devecey, Rochefort-sur-Nenon et 03 81 83 40 60. Improvisation Le théâtre

L’immeuble sera cédé 1,230 million d’euros par la Ville.

prévoit d’aménager trois com- merces. Mais avant, il faudra régler le sort du siège de l’Union des commerçants de Besançon, hébergé dans l’immeuble. L’Union jouissait jusqu’ici d’un loyer mensuel dérisoire - de l’ordre de 130 euros. Le nou- veau propriétaire de l’immeuble a proposé à l’Union de récupé- rer le local voisin, beaucoup plus exigu, qui était occupé par la Prévention routière. Une solu- tion qui reste à peaufiner d’après Jérôme Cart, le président de l’Union des commerçants, qui ne cache pas son irritation d’avoir été mis devant le fait accompli. “On savait qu’un jour la Ville voulait vendre cet immeuble, mais on l’a appris officiellement par une lettre

se des Domaines. À travers cette acquisition, la société France Pierre Patrimoine met un premier pied à Besan- çon. Spécialisée dans la res- tauration d’immeubles anciens, elle peut se prévaloir d’un bilan flatteur selon laVille : “30 000m 2 restaurés par an en moyenne et 400 immeubles réhabilités en 25 ans.” Étrangement pourtant, cette société que nous avons tenté de joindre à Bordeaux res- te injoignable…Selon nos infor- mations, France Pierre Patri- moine prévoit de restaurer intégralement le bâtiment, via le dispositif de défiscalisation Malraux (sous réserve de l’approbation du plan de sau- vegarde du centre ancien), et de faire une douzaine de loge- ments, dont 3 logements sociaux pour donner suite au souhait de la Ville. Au rez-de-chaussée, le projet

recommandée au début de l’été. On a étémis devant le fait accom- pli et à aucun moment la mai- rie nous a proposé une solution alternative. On finit par être habitué, c’est la méthode mai- rie…” soupire Jérôme Cart. Si l’Union reste hébergée dans l’immeuble de la rue Jean-Petit, le loyer sera multiplié sera sans doute au moins “par 5. Résul- tat, nous ne pourrons plus ver- ser d’aide à l’Office du commerce rétorque Jérôme Cart. L’Union des commerçants n’a pas des moyens illimités.” Le prochain conseil d’administration de l’Union, le 4 octobre, risque d’être houleux. L’adjoint au commer- ce Jacques Mariot y est atten- du de pied ferme. J.-F.H.

M ais comment raisonne France Domaine ?À croi- re que le service d’État chargé d’estimer le prix des biens immobiliers appartenant aux collectivités locales a dix ans de retard sur la réalité du marché. Édifié à la fin du XVIII è- me siècle, l’immeuble des 2 et 2 bis, rue Jean-Petit (à côté du marché beaux-arts) est une

suivante : 460 000 euros, soit à peine 561 euros du mètre car- ré, dans une ville où les prix de l’ancien ne se négocient pas à moins de 2 000 euros le mètre carré. Certes, “les neuf logements sont en très mauvais état” sou- ligne Michel Loyat, l’adjoint bisontin à l’urbanisme. Cette estimation a – heureuse- ment pour les finances com- munales – été largement dépas- sée par l’acquéreur futur qui déboursera finalement 1,230mil- lion d’euros, “la proposition la plus élevée” ajoute la mairie. Soit 1 500 euros du mètre car- ré. C’est la société bordelaise France Pierre Patrimoine qui a remporté la mise, tous les autres candidats, dont des Bison- tins, avait fait une offre large- ment inférieure, plus proche de l’estimation étonnamment bas-

Montagney. Rens. François Aviles au 03 81 80 79 12 ou 06 50 62 34 62.

Rhodia Lundi 3 octobre à

20 h 30, une réunion publique (qui devrait avoir lieu à la Rodia) évoquera l’avenir de la friche industrielle de la Rhodiaceta en présence du maire, de l’adjoint à l’urbanisme, du conseil consultatif d’habitants, des riverains…

noble bâtisse de quatre étages d’une surface glo- bale de 820 m 2 , au cœur de la ville et à deux pas du futur tramway. Chargé par la Vil- le de Besançon d’en estimer la valeur, France Domaine est arri- vé à la conclusion

“400 immeubles réhabilités en 25 ans.”

PATRIMOINE Un rendez-vous avec l’histoire Éclatante Porte Noire ! Les Journées du Patrimoine ont eu une saveur particulière à Besançon. Samedi 17 septembre, un peu avant 22 heures, le rideau qui cachait la Porte Noire est tombé, laissant apparaître un monument d’une splendeur éclatante.

L es Bisontins ont bravé la pluie pour venir assister au dévoilement de la Porte Noire. La foule était massée entre le square Castan et le pied de l’édifice, attendant avec impatience que tombe le rideau. “Nous allons découvrir cette porte comme aucun Bisontin ne l’a jamais vue depuis quinze siècles” a rap- pelé Jean-Louis Fousseret dans un bref discours, ajoutant encore que “ce monu- ment majeur est, en dépit de son prestige, un de ces rescapés de l’histoire. La Porte Noire gardera son nom de façon à piquer la curiosité de ceux qui la découvrent.”

Percevant l’empressement de la foule, Marie-Guite Dufay, la présidente de Région ne s’est pas éterni- sée au pupitre. Elle a confié être venue en “voisine” , pas- sant par là quotidiennement pour se rendre à l’Hôtel de Région. “Je ne peux être que très heureuse de voir ce fleu- ron du patrimoine renaître” a-t-elle déclaré. Claude Jean- nerot, président du Conseil

“La Porte Noire gardera son nom.”

général, n’a pas traîné non plus : “C’était un devoir sacré que de réaliser sa restau- ration.” Le député Jacques Grosperrin a parlé lui de “passage de témoin” à propos de la valorisation de ce patrimoine collec- tif. Le préfet Christian Decharrière a signé la conclusion : “Il y a six arcs de ce type en France. Besançon peut s’enorgueillir d’en avoir un.” Samedi 17 septembre, un peu avant 22 heures, le rideau est enfin tombé, lais- sant apparaître une porte d’une blancheur éclatante sous les projecteurs. Clameurs et applaudissements de la foule qui s’est pressée sous l’arc monumental, comme si elle le découvrait pour la première fois. La scène était comparable à un pèlerinage. Les badauds avançaient pas à pas, les yeux levés vers la voûte sculptée, s’émerveillant devant ce travail de restauration. La Por- te Noire a retrouvé son éclat, espérons-le pour longtemps. La foule s’est massée sous l’arc comme si elle le découvrait pour la première fois.

BESANÇON

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ÉDUCATION Besançon, Belfort, Vesoul, Lons-le-Saunier Les I.U.F.M. dans l’attente d’un plan de sauvetage Les Instituts Universitaires de Formation des Maîtres sont menacés de fermeture. La réforme des métiers de l’enseignement les a amputés d’une grande partie de leurs prérogatives. Aujourd’hui, il faut les habiller d’autres missions, mais lesquelles ?

L a réforme des métiers de l’enseignement entrée en vigueur il y a deux ans a amputé les I.U.F.M. d’une grande partie de leurs compé- tences. Avant la réforme, l’Institut Universitaire de For- mation des Maîtres accueillait des étudiants d’un niveau Bac + 3 qui se destinaient à une car- rière d’enseignant dans le pre- mier ou le second degré. Une fois leur concours en poche, les futurs profs étaient formés et suivaient des stages pendant un an avant d’hériter d’une clas- se la rentrée suivante. Depuis la réforme, les candidats à l’enseignement doivent avoir le niveaumaster (Bac + 5). Ceux qui se destinent au second degré ne passent pas par la case I.U.F.M. Ils suivent une filière universitaire classique à la facul- té dans laquelle ils choisissent l’option “métiers de l’enseignement”, passent un concours en dernière année de master, et après 19 jours de for-

mation seulement, ils sont cata- pultés devant les élèves la ren- trée suivante. “En revanche, l’I.U.F.M. joue encore un rôle déterminant pour la formation des maîtres car c’est lui qui orga- nise le master qui les concerne. Mais cet institut a perdu les ¾ de ses prérogatives” déplore Nathalie Faivre, professeur d’allemand à Besançon, res- ponsable du secteur “Entrer dans le métier” au syndicat S.N.E.S. Alors une double question se pose : comment faire pour ren- tabiliser ces établissements ?

que nos politiques se rendent compte qu’avec cette réforme de la mastérisation des formations nous allons dans le mur” lance Claude Condé, président de l’Université de Franche-Comté qui a entre ses mains l’avenir des quatre I.U.F.M. de l’académie (Besançon, Belfort, Vesoul et Lons-le-Saunier). Pour l’instant, la question de la fermeture d’un ou plusieurs de ces établissements qui se vident de leurs étudiants ne se pose pas. “Nous n’avons pas intérêt à ce que les I.U.F.M. disparais- sent car ce sont des lieux qui ont accumulé des compétences fortes” ajoute Claude Condé. À moins que la réforme ne soit remise à plat, l’enjeu actuel est d’habiller les Instituts Universitaires de Formation des Maîtres de nou- velles missions. “À Vesoul, un des sites les plus menacés de fer- meture avec celui de Lons-le- Saunier, on envisage d’accueillir dans les locaux des cours de l’I.U.T. et de l’Institut de For-

Nathalie Faivre du syndicat S.N.E.S. : “L’enjeu est de recréer une formation digne de ce nom.”

Et comment assurer l’avenir de l’emploi des collaborateurs de l’I.U.F.M. si désormais la for- mation est prin- cipalement assu- rée par l’Université ? “J’espère qu’une seule chose, c’est

mation en Soins Infirmiers” note Nathalie Faivre.À Lons-le-Sau- nier, on parle de créer un Mas- ter franco-suisse d’enseignement. Pour les syndicats, non seule- ment cette réforme crée la pagaille dans les I.U.F.M., mais plus grave encore, elle dégrade surtout la formation des ensei- gnants. Cette rentrée, beaucoup de jeunes profs titulaires ont fait

part de leur angoisse à l’idée de se retrouver pour la première fois face à des élèves en y étant mal préparés. Pour Nathalie Faivre, il ne fait aucun doute que cette réforme confirme “le déni des compétences de notre profession de la part du minis- tère. C’est une casse du système de formation à laquelle on assis- te” estime l’enseignante. Pour

sortir de l’impasse, il n’y a pas beaucoup d’autres solutions selon elle que de remettre sur pied un organisme de formation à la hau- teur de l’I.U.F.M. “Peu importe le nom de la future structure, l’enjeu est de recréer une forma- tion digne de ce nom qui arme- ra les jeunes collègues pour fai- re face à une vie d’enseignant.” T.C.

“Nous allons dans le mur.”

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SOCIÉTÉ

Un lieu, un endroit, une histoire Les rendez-vous des Bisontins Professionnels du bâtiment, cyclistes, boulistes ou basketteurs… se retrouvent une fois par semaine à la même heure et au même endroit à Besançon. Voilà des décennies que cela dure. Chaque mercredi (14 heures), le rendez-vous des cyclistes à La Passerelle À Besançon, les amoureux de la Petite Reine se retrouvent à La Passerelle, le pont enjambant

cycliste amateur auVélo-club d’Ornans. C’est Martial qui concocte les itiné- raires allant de 90 à 140 km. D’autres professionnels se joignent parfois à cette joyeuse troupe à l’instar de Fran- cis Mourey, Thibault Pinot, Geoffrey Soupe ou encore Arthur Vichot (tous professionnels à la Française des Jeux). Via la Passerelle, ils utilisent la piste cyclable pour quitter Besançon. Les cyclistes bisontins réunis tous les mercredis à La Passerelle.

le Doubs au niveau du faubourg Maza- gran. Parfois, ils sont plus d’une tren- taine où se mêlent les amateurs et les professionnels. Jour de notre rencontre, c’est le champion du Monde sur piste Morgan Kneisky qui roule avec ses anciens amis de l’Amicale cycliste bison- tine. Le cycliste professionnel au sein de l’équipe Roubaix-Lille Métropole vient retrouver Martial, son papa,

Le vendredi à 11 h 30 chez “Tata Huguette” pour le bâtiment L e bar se remplit doucement rue Rivotte. Derrière le zinc, Franck le gérant du bar “Chez tata

se retrouvent. On discute boulot, météo… Voilà près de 20 ans que ça dure. “Si les entrepreneurs et surtout des retraités du bâtiment viennent ici, c’est parce qu’ils retrouvent un bistrot qui n’est pas une enseigne. Il retrouve une ambiance, un lieu pour discuter” explique le patron qui fêtera le 1 er octobre, sa treizième année à la tête de l’établissement.

Huguette” prépare une de ses fameuses recettes : des sardines marinées. Un mets spécifique qu’il prépare pour ses clients habituels venus chaque ven- dredi trinquer avant le début du week- end. Ici, une partie des professionnels du bâtiment de Besançon et sa région

Les mercredis et samedi après midi, ça “dunk” à Isenbart L e parquet lustré du Palais des Sports ne reluit plus sous les lumières de la Pro A depuis

mum deux fois par an les filets des cercles : “Avec la pluie, le soleil, et les ballons, ils s’usent vite” explique Mathieu, un habitué de 18 ans. À Isenbart, on court, on jump , on dunk . “C’est la bonne ambiance. Parfois, tous les terrains sont pris… J’ai 18 ans et j’ai toujours vu des matches ici” ajoute le jeune basketteur venu s’entraîner avec Christophe (30 ans), Mustapha (22 ans) et Léon (23 ans). “L’été, on joue jusqu’à 23 heures” ajoute Christophe.

deux ans mais les basketteurs ama- teurs sont toujours là, à Besançon. Chaque mercredi et samedi après- midi, le terrain de basket “Isenbart” situé devant l’immeuble “Le Prési- dent” est le théâtre de nombreuses parties. Tellement nombreuses que laVille de Besançon change aumini-

Les basketteurs à Isenbart.

Le “Twunch”, rendez-vous des fans “Twitter” C omme une trentaine d’autres villes en France, les fans du réseau social et de micro- blogging se réunissent au “Twun- ch”, sorte d’apéro où les partici- pants quittent un instant leur écran de téléphone portable ou d’ordinateur pour se rencontrer autour d’un verre. L’endroit varie. À Besançon, le mouvement prend forme : déjà deux réunions et une prochaine prévue en octobre. Pour Les boulistes à Micaud D e cinq à douze. Parfois plus. Maurice, Pierre,Michel,Aldo, Bernard, Robert, Patrice, Mireille… viennent tous les jours - dès 14 heures - réserver le même banc sous les platanes du Parc Micaud pour des parties de pétanque

en faire partie : http://twun.ch. “Nous sommes en moyenne 20 à 30, âgés entre 15 à 65 ans, tous ins- crits sur Twitter” explique Nico- las, consultant T.I.C. qui réside et travaille à Besançon. Il twitte sous le pseudo “@nkgl”. On retrouve aussi des politiques, à l’instar de Philippe Gonon. L’homme du MoDem est avec Emmanuel Dumont (P.S.) celui qui “twitte” le plus sur la toile.

de plusieurs heures. “Nous sommes une équipe de copains, dit Michel. Vient qui veut. Après, tout dépend de la météo mais nous faisons sou- vent une triplette et deux doublettes” explique le bouliste qui vient ici depuis sept ans. Mireille est la seu- le femme et dernière “recrue” de cette équipe.

Les boulistes au parc Micaud.

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