La Presse Bisontine 125 - Octobre 2011

L’ÉVÉNEMENT

La Presse Bisontine n° 125 - Octobre 2011

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LES GENS DU VOYAGE À LA CROISÉE DES CHEMINS Les gens du voyage font parfois parler d’eux à travers les faits-divers. Mais cela ne nous autorise pas à reléguer tout une communauté au banc des délinquants. Cette communauté qui étonne tant par son fonctionnement que par sa culture et sa diversité, semble être à un tournant de son histoire. Ces nomades sans attaches qui vivaient sur les routes tendent aujourd’hui à se sédentariser. Toute la difficulté pour les nouvelles générations est de trouver leur place dans la société sans renier leur culture. Mais la société doit également changer le regard qu’elle porte sur eux pour les aider à trouver leur place. Cela prendra du temps. Décryptage dans le Grand Besançon.

SOCIÉTÉ

voyage. Il ajoute que l’Agglo est atten- tive également aux riverains qui par- fois se plaignent de ce voisinage. Le Grand Besançon ne voudrait pas que cette externalisation soit inter- prétée comme une façon de botter en touche en se débarrassant de ce qui pourrait être considéré comme un poids. “Au contraire, nous voulons exercer notre compétence de façon plus effi- ciente en se recentrant sur le volet social et scolaire dans l’accompagnement des gens du voyage” insiste Fabrice Baud, responsable du service “habitat et poli- tique de la ville” à l’Agglo. Avec sa col- laboratrice Aurélie Kolmayer, ils effec- À partir du mois d’octobre Une société privée pour gérer les aires d’accueil Jusqu’à présent, la C.A.G.B. gérait en régie les cinq aires d’accueil des gens du voyage. Début octobre, elle déléguera cette

sons sanitaires comme le prétend Pas- cal, un homme de la communauté, qui a entendu dire “que la présence de trois virus y avait été détectée” , mais pour des motifs administratifs et techniques. La C.A.G.B. qui a la compétence “gens du voyage” s’apprête en effet à trans- férer la gestion des aires (y compris celle de grands passages de Thise) à un prestataire privé, la société Vago, qui gère aujourd’hui près de 200 aires d’accueil en France. Le transfert sera effectif début octobre. En vue de cette échéance, la collectivité a décidé de fermer non pas une, mais les quatre aires d’accueil réparties sur son terri- toire (Pirey, Saône, Mamirolle, Besan- çon). Elle veut les remettre à neuf afin de confier au nouveau prestataire des sites propres et opérationnels à leur réouverture. “Cette société va accueillir les gens du voyage, encaisser les paie- ments, faire respecter le règlement inté- rieur. Avant, ces missions étaient assu- rées par des agents de l’Agglo dans le cadre de la régie” précise BernardMoy- se, le maire de Thise, vice-président de la C.A.G.B. en charge des gens du

L’éducation et le social sont deux leviers sur lesquelles la collectivité prétend vouloir agir pour que de plus en plus de liens se tissent entre les gens du voyage qui obéissent à leurs propres règles, et l’environnement qui les entou- rent. Le tout est d’éviter que des familles ne se marginalisent, comme à Mami- rolle où l’aire d’accueil a été entière- ment saccagée. Fermée depuis plu- sieurs mois, elle ne rouvrira pas dans l’immédiat. Celle de Saône a elle aus- si été vandalisée. Deux familles sont concernées. Elles font l’objet d’un sui- vi particulier de la part des services de l’Agglo et de l’État. La délinquance existe aussi dans cet- te communauté. Néanmoins, selon Fabrice Baud il ne faut pas faire de cas particuliers une généralité. “Il faut bien distinguer les populations semi- sédentaires comme il y en a à la Mal- combe avec lesquelles les choses se pas- sent globalement bien, de ces quelques familles de délinquants. Il faut les dis- tinguer aussi du phénomène des grands passages que l’on observe pendant la période estivale” dit-il. Ces grands passages sont redoutés par les élus locaux, tant ils sont imprévi- sibles et difficiles à gérer. Pourtant, l’aire de Thise et ses 90 emplacements est prévue pour les accueillir. Mais les chefs de groupe ne prennent pas tou- jours la peine de réserver, comme cela est prévu par l’Agglo, ce qui ne les empêche pas de s’installer là où ils veulent. Les maires sont mis devant le fait accompli. “Ce sont des envahis- sements sauvages sur des terrains public ou privés” observe Bernard Moyse qui a déjà connu ça à Thise. “C’est un délit, mais quand il y a 200 caravanes et qu’on ne peut pas les faire partir, il faut transiger avec le droit” ajoute-t-il. Au mieux, en bon négociateur, le maire épaulé par le service de la C.A.G.B. compétent, réussit à les faire partir. Il peut aussi tenter de faire appliquer

une convention d’occupation comme ce fut le cas cet été à Saône où la muni- cipalité a obtenu un dédommagement de 5 euros par caravane. Au pire, le maire engage une procédure d’expulsion au Tribunal Administratif qui pren- dra au moins dix jours. “Quand le réfé- ré d’expulsion tombe, en général, les gens du voyage sont partis” déplore le vice-président de l’Agglo.Tous les frais sont à la charge de la commune. Les élus locaux se sentent démunis face à ce genre de situation, pas franchement soutenus par l’État, ni pas la justice. Pour mieux gérer ces grands passages, l’Agglo n’exclut pas d’étudier la pos- sibilité de trouver un terrain de déles- tage en plus de celui de Thise. Il fau- dra qu’il soit grand. T.C. Tarif aire de grands passages de Thise : 2 euros par jour et par famille Repères L’accueil en chiffres Thise : 100 places de caravanes Besançon-Malcombe : 20 emplacements Mamirolle : 5 emplacements Budget C.A.G.B. 2011 accueil gens du voyage : 434 000 euros Recettes liées aux usagers des aires : 211 280 euros Tarifs : 2,50 euros par jour et par famille (hors eau et électricité) Durée dʼoccupation de 3 mois renou- velables si les enfants sont scolarisés Saône : 5 emplacements Pirey : 5 emplacements

“L a Malcombe, elle rouvre quand ?” Enrobée d’impatience, la question adressée à l’Agglo est sur toutes les lèvres des occupants de l’aire de Thise qui ne sont pas à leur place sur ce site réservé aux grands pas- sages. Ces gens du voyage, semi-séden- taires pour la plupart, ont été invités à quitter Besançon pour ce lieu suite à la fermeture provisoire de l’aire de la Malcombe. Elle est actuellement interdite d’accès non pas pour des rai- compétence à un presta- taire privé, la société Vago.

tuent un travail de fond auprès de cette commu- nauté. “À Thise par exemple, nous avons cinq ou six enfants issus de familles de gens du voya- ge scolarisés. L’école Jules Ferry à Besançon en accueille aussi beaucoup. Notre action porte ses fruits” rappelle Bernard Moyse.

“Transiger parfois avec le droit.”

Bernard Moyse, vice-prési- dent de l’Agglo en charge de l’habitat, des gens du voyage et de la politique de la ville.

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