La Presse Pontissalienne 267 - Avril 2022
24 Le dossier
La Presse Pontissalienne n°267 - Avril 2022
l Association Manque de bénévoles “Je lance un appel au peuple, un appel à de la disponibilité humaine” ET LES AUTRES RÉFUGIÉS ? L’association Repair a vu le jour en 2016 pour accueillir dans le Haut-Doubs des réfugiés venus d’Afrique ou du Moyen-Orient. Retour d’expérience avec Patrick Colle, le co-président.
L a Presse Pontissalienne : Êtes vous mobilisé sur la question ukrainienne ? Patrick Colle : On a reçu beaucoup de sollicitations.Techniquement, on pourrait répondre à une demande urgente. On aurait les moyens économiques d’accueillir une famille ukrainienne mais on n’a pas les moyens humains pour les accompagner. Je lance un appel au peuple, un appel à de la disponibilité humaine. Cela ne représente pas forcément beaucoup de temps à consacrer aux personnes mais c’est surtout une question de régularité et d’assiduité sur des périodes
manque 5 à 6 personnes. Consé quence : on ne s’est pas inscrit sur la plateforme de parrainage des réfugiés ukrainiens. On s’est contenté de mettre en contact des personnes qui étaient prêtes à en héberger. L.P.P. : Peut-on revenir sur les origines de l’association ? P.C. : Repair est née en octo bre 2016 suite au conflit syrien. L’association regroupe des per sonnes de tous horizons qui vou laient réagir et agir collective ment car on sait très bien que l’entraide individuelle ne peut pas se pérenniser. On était axé sur le Moyen-Orient et aussi surprenant soit-il, les premières personnes qui nous avons pris en charge venaient du Soudan et du Congo. Notre objectif prio ritaire consiste à trouver d’abord un logement pour se recons truire et avancer vers l’autono mie qui est notre second objectif. On refuse toujours d’accueillir les personnes chez nous. Elles
ont des logements indépendants dont les loyers sont réglés par le biais du financement parti cipatif en sollicitant nos adhé rents. On est en capacité de louer trois logements par an. L.P.P. : Combien de personnes ont été accueillies depuis six ans ? P.C. : 43 personnes, soit 10 foyers de 1 à 7 personnes. Elles ont toutes obtenu leur statut de réfugiés sauf trois qui ont fait l’objet d’une Obligation de Quit ter le Territoire Français. Les situations évoluent au fur et à mesure qu’avance l’apprentis sage de la langue. Les plus jeunes poursuivent leurs études à l’école, au lycée, à l’université. Avec le statut et la maîtrise du français, on arrive peu à peu à l’autonomie économique. Cer tains touchent le R.S.A., d’autres partent en apprentissage, pas sent le permis de conduire. À partir de là, Repair commence à se retirer pour se mettre au service d’une nouvelle famille.
s’étalant au moins sur six mois. Chaque famille prise en charge par Repair est associée à un binôme de référence. L’un se charge de l’accompagnement au quotidien : déplacements, rendez-vous,
“On a appris à gérer des publics très différents.”
courses et l’au tre assure plu tôt le suivi administratif. Repair fédère 150 adhérents dont une quin zaine d’actifs. C’est insuffi sant. Il nous
“En six ans, on a professionnalisé notre façon de faire tout en gardant notre sensibilité humaine”, explique Patrick Colle le co-président de Repair.
Zoom Baptême de France pour Aziz et Rosi
études ou qui maîtrisent déjà l’anglais sont évidemment mieux armés. À la grande différence des Ukrainiens, les familles arri vaient entières. Elles ont sur monté l’éloignement et les épreuves ensemble. n Propos recueillis par F.C.
L.P.P. :Avez-vous gagné en efficacité ? P.C. : En six ans, on a profession nalisé notre façon de faire tout en gardant notre sensibilité humaine. On a appris à gérer des publics très différents. L’in tégration varie en fonction de la capacité à s’adapter au sys tème. Ceux qui ont fait des
Zoom Intégration réussie pour la famille Zawari
I l y a quatre ans, Diana et Mahmoud Zawari fuyaient les bombardements d’Alep en Syrie pour venir s’installer dans le Haut Doubs avec leurs cinq enfants. “On est ravi d’être en France dans ce pays qui nous apporte la paix et offre la protection pour les enfants”, explique très reconnaissante Diana Zawari si bien intégrée qu’elle est devenue référente pour les familles d’accueil. Celle qui maîtrisait bien l’arabe, sa langue maternelle, et l’anglais affiche désormais de sérieuses facilités en français. Elle n’a pas hésité une seconde à mettre ses talents lin guistiques au service de Repair pour servir d’interprète aux nouvelles familles prises en charge par l’association. La famille Zawari est arrivée le 30 janvier 2018 dans le Haut-Doubs pour y être héber gée dans une ancienne ferme à La Rivière Drugeon. Le séjour chez les R’virats a duré jusqu’en août 2019 avant de trouver un loge ment aux Pareuses. Le couple a eu le temps de tisser de très solides liens d’amitié avec leurs voisins. De là à dire que la campagne facilite aussi une intégration en douceur, on peut le croire. La ville apporte néanmoins ses commodités surtout pour la prise en charge médicale de Mohamed, l’aîné des
cinq enfants qui souffre de sclérose en plaques. Issam, son cadet suit une formation de magasinier cariste. Fatmi, la plus grande des filles est à l’université d’Arras en licence de Langues Étrangères Appliquées. Ahmed, le troisième garçon effectue son apprentissage en coiffure au salon Why Not à Pontarlier. “Il défend toujours les couleurs de l’équipe de foot de La Rivière” , sourit sa maman. Roua, la petite dernière est scolarisé au lycée Xavier Marmier en Bac pro Commerce avec l’envie
de continuer jusqu’en B.T.S. Après des expé riences professionnelles dans l’agriculture et le bâtiment, Mahmoud, maçon de formation est toujours engagé dans les cycles d’ap prentissage du français. Il a obtenu son permis de conduire en décembre dernier. Les Zawari ont maintenant un véhicule et Diana qui a déjà passé le permis avec sa fille Fatmi compte bien elle aussi décrocher ce précieux sésame synonyme d’une liberté bien méritée. n
A près deux longues années d’attente en Turquie, ce jeune couple syrien est arrivé à Pontarlier le 13 janvier avec Karam leur petit garçon de trois ans. “On a entendu parler de Pontarlier et de Repair par des amis syriens qui connaissaient d’autres syriens pris en charge par l’association en 2018. Aujourd’hui, ils sont à Lyon” , explique en “franglais” Aziz. En Syrie, cet animateur culturel initiait des jeunes et des ados au théâtre. Rosi sa compagne est archéologue de formation. “En Turquie, je travaillais dans une O.N.G. qui avait pour mission de rechercher des personnes disparues à cause de la guerre” , indique la jeune maman. Ravis d’être en France et à Pontarlier, l’un comme l’autre mettent les bouchées doubles pour pouvoir communiquer en français. “Pour nous, c’est le plus difficile. On essaie d’apprendre la culture française. Entre deux cours, on se balade en ville. Quand on aura de bonnes bases, on cherchera du travail. C’est possible qu’on reprenne des études un peu plus tard” , évoque Rosi sereinement. n Aziz et Rosi sont arrivés à Pontarlier en janvier avec leur fils Karam.
Diana et Mahmoud entourent Mohamed l’aîné de leurs enfants qui est atteint d’une sclérose en plaques.
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