Le Doubs Agricole 45 - Mars 2025
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“La première pierre d’une ère de reconquête agricole et alimentaire” i N t e r v i e w la ministre de l’agriculture a passé plutôt tranquillement son baptême du feu pour son premier salon de l’agriculture à Paris où elle nous a accordé une interview. Pour répondre, notamment, aux critiques des défenseurs de l’environnement et aux interrogations de la profession agricole.
L e Doubs Agricole : La Loi d’orientation agricole (L.O.A.) adoptée juste avant le salon place l’agriculture comme une activité “d'intérêt général majeur”. Concrètement, que signifie cette avancée pour les agriculteurs fran çais ? Annie Genevard : Notre agriculture, notre pêche et notre forêt reprendront le rang qui est le leur, celui d’intérêt général majeur de la nation. L’agri culture est également inscrite dans le champ de protection des intérêts fon damentaux de la Nation définis dans le Code pénal. C’est une vraie recon
et moi-même avons signée en décembre dernier. Des mesures sont essentielles : la compréhension mutuel le du rôle de chacun, la discrétion de l’arme, irritant majeur, le contrôle admi nistratif unique et la désescalade des tensions par l’usage de caméra pié ton notamment. LDA : Comment concrètement l’agri culture française pourrait-elle être autosuffisante, et à quel horizon ? AG : J’ai annoncé le lancement pro chain des conférences de la souve raineté alimentaire. Chaque filière construira son plan pour retrouver sa souveraineté avec l’appui de l’état en se fixant des objectifs de souveraine té, tant en matière de production que d’intrants stratégiques. Mon objectif : mettre tout en œuvre à très court ter me pour que nous soyons souverains dans toutes les filières à horizon dix ans. LDA : Vous déplorez que la moitié des fruits et légumes français consommés en France ne soient pas cultivés en France et la moitié des poulets consommés ne soient pas élevés en France. Mais com ment peuvent lutter les agriculteurs par rapport aux prix de revient ? AG : Ce sera l’objet des conférences de la souveraineté alimentaire lancées prochainement. C’est aussi un enjeu plus large. Souhaitons-nous laisser une dette alimentaire à nos enfants ? Perdre toute capacité à nourrir notre population ? Pour moi, la réponse est sans appel. Et il en va aussi de la pro motion des produits français et de la préférence des consommateurs pour des productions françaises. LDA : L’article 13 de la L.O.A. enté rine une dépénalisation des infrac tions, ce qui a fait bondir les asso ciations environnementales. Que
LDA : Au sujet du Mercosur qui inquiète la profession, de quels autres moyens de pression dispo se la France pour faire basculer l'ac cord ? Sur quels autres pays comp tez-vous pour faire pencher la balance et la France ne se berce t-elle pas d’illusions dans ce dos sier ? AG : Les accords de libre-échange sont bons quand ils sont équilibrés. Ce n’est pas le cas avec le projet d’ac cord du Mercosur. Nous ne laisserons pas la Commission se jouer des états et faire de l’agriculture la variable d’ajus tement. La fermeté française, renfor
Annie Genevard a passé les neuf jours du dernier salon de l’agriculture dans les allées pour des rencontres avec les différentes filières.
leur répondez-vous pour les ras surer ? AG : Permettez-moi de rappeler quelques éléments sur ce sujet où la passion l’emporte souvent. La dépé nalisation des atteintes non intention nelles et non définitives à l’environne ment était une revendication forte du monde agricole mis face à un certain nombre d’injonctions contradictoires de l’état et à l’inflation normative qui nuit à l’intelligibilité de la loi. Ainsi, mon prédécesseur, Marc Fesneau, s’est emparé du sujet et cette évolution juri dique a été inscrite dans le projet de loi à l’Assemblée Nationale. J’ai ensui te défendu cette avancée majeure au Sénat. En effet, les agriculteurs se trouvaient parfois exposés à des injonctions contradictoires : obligations de débroussaillement au regard de la réglementation de prévention des incendies et interdiction de le faire au regard de la réglementation de pro tection des habitats potentiels d’es pèces patrimoniales. Cette insécurité était une source de problèmes insolubles. La loi clarifie : quand il y a une injonction de la loi ou qu’une autorisation administrative est donnée, il ne peut y avoir de pour suites judiciaires. Ainsi, quand nos agriculteurs risquaient peines de pri son et amendes de plusieurs dizaines de milliers d’euros rarement appli quées par les juridictions car exces sives, pour des atteintes accidentelles à l’environnement, commises sans intentionnalité et de bonne foi, désor mais la loi ramène les choses à plus juste proportion : amende réduite ou
naissance du métier d’agriculteur, du carac tère vital de ce que font les agriculteurs français pour la nation. Avec cet te loi, nous affirmons un cap clair, celui de la sou veraineté alimentaire, qui doit être atteinte à l’heu
cée par le vote du Par lement, est totale. Ce n’est pas être protec tionniste que de vou loir défendre nos inté rêts et d’avoir des accords équilibrés et justes. Je ne ménage donc aucun effort pour
“Que nous soyons souverains dans toutes les filières à horizon dix ans.”
re des grandes inquiétudes interna tionales et alors que deux défis histo riques s’offrent à nous, celui du renouvellement des générations et celui du changement climatique. LDA : Vous avez affirmé que ce S.I.A. 2025 était une “édition charnière”. Pour quelles raisons ? AG : Ce 61 ème Salon de l’agriculture n’a pas été un salon comme les autres. Il a permis de confirmer sans ambi guïté que les Français, et l’état avec eux, aiment les agriculteurs. Ce ren dez-vous entre les Français et ceux qui les nourrissent est avant tout une grande fête populaire. Il fait suite à une année terrible pour la Ferme France et il est aussi le premier rendez-vous après les suffrages des chambres. Je conçois ce salon comme la première pierre d’une ère de reconquête agri cole et alimentaire.
aller convaincre mes homologues des autres états membres lors de mes rencontres à Bruxelles et comme je l’ai fait avec mon collègue polonais auquel j’ai rendu visite. Ils se sont pro noncés contre ce projet. Nous pour suivrons ardemment le travail de convic tion. LDA : L’Office français de la biodi versité (O.F.B.) est attaqué de toutes parts par certains syndicats agri coles. Affirmez-vous votre soutien clair à l’O.F.B. ? AG : Je rappelle que les agents de l’O.F.B. sont des agents de l’état et ne doivent être la cible de personne. Des propos outranciers d’individus isolés, de part et d’autre, ont été pro noncés ces derniers mois et doivent cesser. Il est nécessaire de recons truire des relations pacifiées. C’est le sens de la circulaire que la ministre chargée de la Transition écologique
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