La Presse Pontissalienne 291 - Avril 2024

Le dossier 21

La Presse Pontissalienne n°291 - Avril 2024

l Métabief Pas tenable économiquement Métabief face à la mutation climatique

pour les générations futures à avoir une vision responsable. Notre travail est d’abord d’être prêts quand la neige arrive, en entreprenant un gros travail d’en tretien des équipements. Pour cela, nous pouvons compter sur nos équipes hyper-pointues qui travaillent aussi bien la neige naturelle que la neige artificielle.” Car quand même le territoire de Métabief est certes en transition, il subit le changement climatique de plein fouet, mais son économie dépend encore principalement de la neige. Les autres activités ne l’ont encore pas supplantée. Pourtant il faut s’y préparer. “Le défi est d’essayer de trouver un modèle alternatif à l’économie du ski” poursuit Philippe Alpy. “Le ski représentait la moitié de

Depuis plusieurs années, la station de Métabief mène une transition touristique liée à la transition climatique. Grâce à des activités de pleine nature. Le point avec le président du Syndicat mixte du Mont d’Or Philippe Alpy.

notre économie. Et pour cela, les solutions ne viendront pas que de la station mais émergeront du territoire tout entier. Hier la station faisait le territoire, aujourd’hui c’est le territoire qui fait la station. Même si le trail, la randonnée ou l’accrobranche ne remplaceront jamais une belle saison de ski alpin. Au niveau financier, nous passerons, en termes de rentabilité, de 100 à 30 quand il n’y aura plus de neige. Économiquement ce n’est pas tenable.” Alors le Syndicat mixte du Mont d’Or s’adapte en créant, entre autres, des passerelles avec les stations hautes suisses. “Nous récupérons une quote-part de leur chiffre d’affaires à travers le Magic Pass, un abonnement annuel été-hiver valable dans 69 stations de ski et 31 destinations estivales” détaille Philippe Alpy. l 70 jours d’ouverture en 2023 l 11 pistes sur 19 ouvertes cet l 40 employés à temps plein l 140 employés en pleine saison hivernale Zoom l 3 millions d’euros : le manque à gagner pour le S.M.M.O. dû au manque de neige l 2 millions d’euros : le surcoût financier dont a dû s’acquitter le S.M.M.O. à cause d’un prix de l’électricité à la hausse La station de Métabief en chiffres :

M oins de neige l’hiver, la pro blématique ne date pas d’hier. À Métabief, le problème est posé depuis de nom breuses années. Dès 2016, la sta tion de moyenne montagne a répondu à la proposition de l’État de participer aux Ateliers du ter ritoire sur l’adaptation de la sta tion au changement climatique. Et dès 2020, le Syndicat mixte du Mont d’Or (S.M.M.O.) qui gère

la station de ski alpin de Métabief a pris la décision politique de lancer un plan de transition cli matique qui est développé aujourd’hui. Philippe Alpy, le pré sident du S.M.M.O., Olivier Érard le directeur de l’époque, les élus, les techniciens et le Département ont engagé ce processus complexe avec le concours des acteurs socio professionnels. “Oui, ce sont des hivers avec moins de neige” recon naît Philippe Alpy. “Alors ce chan gement climatique nous oblige

Aux côtés deClaire Leboisselier, cheffede transition tourisme et loisirs au S.M.M.O. et de

Tous ces efforts d’innovation ont été salués par la Chambre régio nale des comptes. “Quand ils nous ont audités, ils ont vu que dès 2015 nous avons entamé une réflexion qui s’est traduite par des choix d’investissement. Pour transformer tout ce que l’on peut en activités toutes saisons. La luge 4 saisons bien sûr pour son côté modernité, mais surtout le gros travail engagé avec Avenir Montagnes, le programme d’État piloté par l’Agence nationale de la cohésion des territoires qui est un booster de nos ambitions” poursuit Philippe Alpy avant de conclure : “Transformer un ter ritoire est une affaire complexe.

Pour y arriver, il faut employer une méthode systémique. Et nous avons une obligation morale de trouver des solutions car il ne faut pas oublier que nous gérons de l’argent public. En résumé mon leitmotiv aujourd’hui est de dire : si on a de la neige, on peut travailler. Cette année, nous avons eu les conditions de neige suffi santes pour fabriquer de la neige artificielle. Nous avons pu passer les vacances de Noël et les écoles de ski nous ont remerciés. Mais on ne peut pas continuer à enga ger de l’argent public de façon déraisonnable.” La situation ne serait pas tenable. n A.A.

touteune équipede personnes engagées,

Philippe Alpy travaille sur

le futur de Métabief.

Zoom “Entre 40 et 50 % de chiffre d’affaires en moins”

D epuis 15 ans, Danielle Biesse tient le magasin Skiset Sports Neige à Métabief (3, place Xavier-Authier). Elle a aussi le magasin Adrénaline depuis 4 ans. À la tête d’une dizaine d’employés qui vendent et louent du matériel de ski durant la sai son hivernale, elle doit elle aussi se projeter dans l’avenir. Un bilan plus que mitigé. Pour la res ponsable des magasins Skiset Sports Neige et Adrénaline place Authier à Métabief, le verdict est acté. “Comme il y a eu moins de neige, logiquement il y a eu moins de passages dans nos magasins de Métabief” détaille Daniele Biesse. “Les gens n’allaient skier qu’une fois par semaine. Je n’ai pas encore fait les comptes en détail mais nous devons en être à entre 40 et 50 % de chiffre d’affaires en moins.”

Si la commerçante ne veut pas parler d’un bilan désastreux, elle sait bien qu’à l’avenir elle devra s’adapter au mieux. “Nous nous adapterons au réchauffement climatique” relate-t-elle. “Aujourd’hui, les gens viennent encore à Métabief principalement pour le ski.

comme beaucoup d’autres commer çants de Métabief, a pu compter sur un appui : celui des canons à neige qui ont permis quand même aux ama teurs de skier un peu. Un des éléments qui rend le bilan moins désastreux. Finalement, une des principales diffi cultés sera de se projeter dans les pro chaines années. “On ne sait jamais sur quel pied danser” regrette-t-elle. “Il y a seulement deux ans, j’avais fait mais plus belle saison en 15 ans. Mais en ce moment la situation est plus dif ficile et il ne faut pas oublier que j’ai une dizaine de personnes à employer, ça fait du monde. C’est pour cela que nous avons besoin d’avoir le plus long temps possible de neige pour résister.” Histoire de pouvoir travailler sur les projets des prochaines décennies moins enneigées avec plus de séré

Mais ça ne sera plus la même chose quand il n’y aura plus de neige. Car même si nous avons des V.T.T., quand il fait 0 °C, c’est beau coup moins agréable. Et puis cette année, nous n’avons vraiment pas été gâtés, nous n’avons jamais eu autant de pluie.” Durant cette saison déli cate, Danielle Biesse,

“Une dizaine de personnes à employer, ça fait du monde.”

Danielle Biesse, elle aussi, salue le travail réalisé par les professionnels du tourisme à Métabief qui ont mis en œuvre les canons à neige.

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