La Presse Pontissalienne 243 - Janvier 2020

La Presse Pontissalienne n°243 - Janvier 2020 23

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Alexandre Moine “On est sur un système faussement gagnant-gagnant”

L’universitaire géographe français Alexandre Moine est président du Forum transfrontalier Arc jurassien qui anime un espace de réflexion et de mise en perspective de projets communs dans le territoire transfrontalier.

L a Presse Pontissalienne :Contrairement aux apparences où beaucoup consi- dèrent le Haut-Doubs comme un eldo- rado, vous considérez, vous, qu’on n’est pas dans une relation gagnant-gagnant entre voisins suisses et français ? Alexandre Moine : La vérité n’est en effet pas celle-là. Il suffit de gratter un peu pour découvrir une tout autre réalité. Quand on pré- sente les zones frontalières, on présente toujours les mêmes indicateurs, à savoir les salaires élevés, les belles voitures et un marché de l’immobilier floris- sant. L.P.P. : C’est bien le cas ? A.M. : Oui, mais une autre réalité sans doute moins visible existe. Il suffit d’imaginer la vie d’un smicard français. Ici, les personnes pauvres sont plus pauvres qu’ailleurs. Un smicard gagne la même chose ici que dans une autre région française mais il se trouve plus en difficultés ici du fait notamment des loyers élevés et du coût moyen d’un panier, plus élevé ici. Côté suisse, le système économique n’est pas forcément non plus gagnant pour le territoire. Les plus-values des

entreprises horlogères ne profitent que très peu au territoire car ces entreprises ne paient pas leurs impôts localement. Pour preuve, pour la quatrième fois consécutive, les finances d’une ville comme La Chaux-de-Fonds sont dans le rouge. On voit là la phase émergée de lamondialisation avec une horlogerie qui part à l’export et qui vient rému- nérer d’autres comptes que les comptes locaux. En plus, ces entreprises sont un coût pour les communes, en termes d’infrastructures, de voirie notamment, et représentent des revenus très faibles. Enfin, le différentiel monétaire est très défavorable aux com- merces suisses.

Alexandre Moine,

universitaire français, est le président du Forum transfrontalier Arc jurassien, une association suisse.

“Ici, les personnes

L.P.P. :Le rapport serait donc perdant-perdant ? A.M. : Une strate mino- ritaire de la popula- tion, même si elle atteint 45 % à certains endroits, tire bien son épingle du jeu. Mais qu’en est-il du reste de la population qui vit à une vitesse normale mais dans des condi-

pauvres sont plus pauvres qu’ailleurs.”

tème interconnecté en local ? C’est à toutes ces solutions innovantes locales et de proximité qu’il faut réfléchir sur ce territoire si particulier. Mais il y a tant d’autres expérimentations àmener. L.P.P. : Lesquelles par exemple ? A.M. : Pourquoi ne pas jouer sur la complémentarité de nos produits locaux ? On a d’un côté de la frontière le comté et de l’autre le gruyère et ces deux-là ne se parlent pas. Si on mettait ces deux produits côte à côte dans une idée de circuit court franco-suisse ? Une fois encore, il faut sortir ce terri- toire de l’esprit de compétition et entrer dans une vraie coopération. Retrou- vons-nous ensemble dans une zone protégée, échangeons et osons ! Pour- quoi ne pas, au vu des différences de valeurs monétaires entre nos deux pays, instaurer des tarifs préférentiels pour les Français dans les piscines suisses ? Essayons, fécondons, échan- geons ! n Propos recueillis par J.-F.H.

tions où les prix du foncier et du com- merce s’envolent ? J’affirme donc qu’on est sur un système faussement gagnant-gagnant. Quand j’affirme cela, c’est aussi pour attirer l’attention sur les fragilités de ce territoire frontalier également en termes de consommation foncière, d’urbanisation, de ressources en eau qui deviennent de plus en plus fragiles. L.P.P. : Que préconisez-vous pour améliorer le système ? A.M. : Il est nécessaire d’instaurer un modèle de coopération de proximité plutôt que d’être dans la compétition. Je prône une sorte de “coopétition”. Sans évidemment faire sauter la fron- tière, on peut imaginer la mise en place d’un territoire d’expérimentation où on aurait la possibilité d’appliquer des règles différentes qu’ailleurs en France. Un petit exemple concret : les sentiers transfrontaliers de randonnée sont très difficiles à promouvoir auprès des opérateurs touristiques à cause des

formalités douanières trop contrai- gnantes. On peut imaginer aussi des expérimentations sur le plan des trans- ports, ferroviaires notamment car les normes suisses et françaises n’étant pas les mêmes, certains cadencements de trains sont impossibles à mettre en place actuellement. Avec le Conseil économique, social et environnemental, on a interpellé la Région pour pousser ce genre d’expérimentations plus loin. C’est nécessaire pour promouvoir les transports en commun sur cette bande frontalière. L.P.P. : La question des mobilités pourrait être un vrai champ d’expérimentations ? A.M. : Une illustration récente : certains frontaliers de Villers-le-Lac vont dés- ormais travailler au Locle à vélo élec- trique ! Rien n’est encore fait pour ce genre de mobilités et je fais le parallèle avec le projet Chemin des rencontres qui a du mal à démarrer. Ne pourrait- on pas croiser ces deux éléments pour créer à partir de cette question un sys-

Zoom Une plateforme web transfrontalière sur l’urbanisme

C’ est un des projets innovants porté par le Forum transfrontalier que préside Alexandre Moine. Il s’agira du premier outil d’aménagement du territoire transnational qui permettra de mesurer l’impact d’un projet d’urba- nisme des deux côtés de la frontière franco-suisse. Cette plateforme permettra notamment aux collectivités porteuses

de projets de consulter les documents d’urbanisme en cours dans les com- munes voisines de part et d’autre de la frontière. Ce futur outil financé en partie par les fonds Interreg V sera dévoilé lors du colloque du Forum transfrontalier le 23 janvier au Club 44 de La Chaux- de-Fonds. “Ce sera un outil inédit en France” promet Alexandre Moine. n

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