La Presse Pontissalienne 167 - Septembre 2013

ÉCONOMIE

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La Presse Pontissalienne n° 167 - Septembre 2013

TOURISME Communauté de communes de Morteau L’étude à 23 000 euros qui nous apprend que le Doubs est un fleuve… La communauté de communes a missionné un cabinet d’études parisien pour dresser un diagnostic du tourisme dans le Val de Morteau. Le rapport de 92 pages cumule les approximations et les erreurs. Florilège.

C omment peut-on laisser passer de telles énormités ? Comment ne pas s’apercevoir, au fil de l’étude menée par ce cabinet parisien nommé “MaHoc” que les personnes qui en sont responsables ne connaissent pas grand-cho- se, sinon rien du tout, au territoire qu’elles dia- gnostiquent ? À la lecture de ce document inti- tulé “Étude de stratégie de développement touristique du territoire de la communauté de communes du Val de Morteau” rendu en juin dernier aux élus, on ne peut qu’être effaré par tant d’amateurisme. On passera sur les nom- breuses coquilles et fautes d’orthographe com- me ce “s” au bout de Grand’Combe(s) en page 5 du document. On tolère encore que page 36, le cabinet d’études cite qu’il y a deux cours cou- verts de tennis (et non pas deux courts), ou que page 44, il écrive le mot “départemantal” avec un “a”… Page 48, on évoque dans un titre mal relu la “situtation” de Morteau au lieu de “situa- tion”. Passons. Mais là où les résultats de cette étude, disons, bâclée, irritent franchement, c’est quand on lit, dès le début du rapport, que le Doubs est un fleu- ve ! Dans quelle mer se jette-t-il ? Les enquê- teurs ne l’ont pas précisé. Un peu plus loin, page 11, parmi les fleurons de l’industrie mor- tuacienne, le cabinet d’études cite notamment la société Altitude, ignorant certainement que cette fabrique de baromètres qui a fermé ses portes en décembre dernier a rapatrié depuis, toute sa production au Danemark. Page 13, le nom des habitants des huit communes de la com- munauté de communes est cité, sauf un, on se demande pourquoi, ceux du Bélieu. Plutôt que de puiser leurs informations sur le site Wikipé- dia comme cela est mentionné, les enquêteurs auraient aisément trouvé que les riverains du Bélieu s’appellent les Mange-lard. Sans doute était-il trop compliqué d’interroger le maire.

Les choses se corsent et deviennent franchement grotesques quelques pages plus loin au chapitre de la desserte ferroviaire. On apprend avec stu- péfaction page 18 du rapport, qu’entre Morteau et Pontarlier, “il n’y a seulement trois trains dans la journée” (sic) et que durant le week-end, il y en a “deux le samedi et trois le dimanche.” Nous avons interrogé la responsable de l’étude, Mar- tine Malaganne, pour savoir si le voyage avait été agréable dans le train qui l’a conduite de Morteau à Pontarlier. Nous attendons toujours sa réponse… Le summum est atteint toujours page 18 quand le cabinet MaHoc affirme qu’entre Montbéliard et Morteau, “la semaine, les trains sont plus fréquents, même s’il reste une lacune dans la matinée entre 9 heures et 12 heures où la desserte n’a pas lieu. Le week-end, au contrai- re les visiteurs pourraient être privilégiés mais dans ce cas les heures de pointe restent privilé- giées : entre 8 heures et 9 heures, à 12 heures et entre 17 heures et 18 heures” Peut-être le cabi- net fait-il allusion à la ligne du tacot Morteau- Trévillers disparue il y a plus de 50 ans ?… Page 19, le cabinet décortique les liaisons aériennes proches du Val de Morteau. Il cite logiquement

Le cabinet d’étude affirme que les liaisons ferroviaires entre Morteau et Montbéliard sont “plus fréquentes la semaine que le week-end.” Édifiant.

prend sa source dans le Val de Mouthe à près de 950 m d’altitude, avant de se jeter dans la Saône à Besançon ! Bravo au premier qui trouvera les quais de Saône à Besan- çon. De page en page, les bourdes et les erreurs s’accumulent. Ainsi tou- jours page 20, le cabinet d’études mentionne que la G.T.J. (Grande Traversée du Jura) peut être par- courue sur 400 km, dont 125 sur le territoire du Val de Morteau ! Rien que ça. Qu’à cheval, cette même G.T.J. est praticable de Pontarlier à Crosey-le-Petit. C’est bien connu, Crosey-le-Petit, à côté de Clerval, se situe sur le territoire de la com- munauté de communes du Val de Morteau.

net MaHoc n’en recense pas moins de 1 125 sur tout le territoire, avec un total de 1 125 lits, com- me si chaque résidence ne possédait qu’un cou- chage. Bizarre, bizarre. On passera sur le fait que l’étude ne recense que quatre restaurants sur Morteau (page 34 du document). Les res- taurateurs oubliés vont être contents. Concernant les loisirs, incapable de recenser les offres sur le territoire de la communauté de com- munes, le cabinet n’a pas cherché plus loin en se basant sur les données fournies par le syn- dicat mixte du Pays Horloger. Et il a le toupet d’affirmer dans une phrase définitive que “ce tableau recense les offres touristiques du terri- toire. Il se base sur les brochures du Pays Hor- loger. Ainsi, il rend compte de l’offre touristique de l’actuel périmètre de la Communauté de Com- munes du Val de Morteau.” Il fallait oser. Terminons la litanie avec ces quelques perles. Page 37, les érudits parisiens affirment que l’église de Morteau a été achevée en 1420. Les historiens apprécieront. Page 43, que le cinéma L’Atalante à Morteau organise un festival inter- national du film. Celui-ci n’existe plus depuis plusieurs années. Parmi les manifestations popu- laires, on trouve LA Flambée de la Morteau, alors que cela fait cinq ans que ses organisa- teurs s’échinent à faire comprendre qu’il faut dire LE Flambée, au masculin. La suite vaut également la peine. En page 48, au chapitre des équipements touristiques qui permettent d’apprécier le patrimoine historique spécifique du Val de Morteau, les Parisiens de MaHoc nous conseillent de visiter les ateliers d’artistes, dont celui d’Yves Cupillard qui “per- pétue la fabrication artisanale et la restauration d’horloges comtoises.” Fermé depuis 2008, ce der- nier appréciera néanmoins le compliment. L’auteur de ce croustillant rapport cite aussi le savoir- faire des frères Simoni à Montlebon (ce n’est pas plutôt Simonin ?). Sur le plan de la gastronomie, les experts de MaHoc ont visiblement apprécié l’absinthe du Val de Morteau qu’ils citent sans vergogne, avant de conseiller vivement la visite à Morteau du “musée de la chocolaterie” … Pas farouches, ils conseillent également la cave d’affinage du Fort Saint-Antoine et le Hameau du fromage. Allez, on n’est pas à 80 km près pour circonscrire le territoire du Val de Morteau ! Les nouvelles technologies n’ont pas été négli- gées par le cabinet d’études qui affirme avec aplomb que le terme le plus recherché par les internautes lorsqu’ils veulent se renseigner sur Morteau, c’est le club de handball local (C.A. Morteau) qui apparaîtrait 90 500 fois par mois sur le moteur de recherche Google. Mais où sont- ils allés chercher tout cela ? Pour terminer, on ne peut pas s’empêcher de sou- ligner les connaissances pointues du cabinet d’études en matière d’architecture quand il affir- me que les “tuiles des clochers comtois sont en tavaillons.” Le rapport présenté aux élus de la communau- té de communes du Val de Morteau en juin der- nier a été facturé 19 700 euros hors taxes à la collectivité, soit 23 500 euros T.T.C. Cette enquê- te poussée est censée poser les grandes lignes stratégiques du tourisme dans le Val de Mor- teau pour les cinq prochaines années. On peut être soulagé, l’avenir du tourisme est assuré. J.-F.H.

Une visite aux frères Simoni à Montlebon.

les aéroports de Bâle-Mulhouse, Genève et Dole, oubliant au passa- ge le plus proche, celui des Épla- tures à La Chaux-de-Fonds. Et on se pince en lisant que, “à une heu- re de route de Morteau, à Besançon, on trouve un petit aérodrome qui assure des liaisons avec le Portu- gal.” Que le voyageur qui a déjà emprunté la ligne régulière LaVèze- Lisbonne se manifeste à notre rédac- tion, il aura droit à un aller-retour gratuit ! Nous ne sommes pas au bout de nos surprises. Page 20 du document, on lit avec effarement que le Doubs

Sur le plan des hébergements, les erreurs sont tout aussi nombreuses. Pêle-mêle, on y apprend qu’à Montlebon il y a un hôtel. Peut-être le Bel- levue, fermé depuis deux ans et bientôt trans- formé en appartements ? Et où le cabinet d’études a-t-il bien pu trouver les 45 gîtes de France qu’il recense à Montlebon ou les 32 gîtes de France à Villers-le-Lac ? Tout comme il n’y a pas 6 meu- blés Clé-Vacances à Morteau, mais un seul. La chargée d’étude n’oublie pas au passage de men- tionner les qualités indéniables des Greniers du Meix-Lagor, photos personnelles à l’appui. Nor- mal, c’est là qu’elle était hébergée à chacune de ses venues dans le Val de Morteau… Au chapitre des résidences secondaire, le cabi-

32 gîtes de France à Villers- le-Lac ?

Toujours selon le cabinet, la G.T.J. traverse le territoire du Val de Morteau sur… 125 km.

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