La Presse Bisontine 47 - Septembre 2004

LE DOSSI ER

8

Inondations : prévenir le risque dans la vallée du Doubs

Une crue du Doubs pire que celle de 1910. Le scénario est possible. Mais pas d’affolement car pour l’instant, il ne s’agit que d’une hypo- thèse qui résulte d’une étude menée par un cabinet parisien spécialisé dans la question. C’est d’abord pour prévenir les effets sur les biens et les populations de cette crue dite cen- tennale que la préfecture a demandé la mise en place d’un plan de prévention des risques d’inondation (P.P.R.I.) sur 55 communes de la vallée du Doubs. Pour l’instant, ce dossier est à l’étude est doit encore être discuté avec les élus puis soumis à enquête publique. Mais déjà sur le terrain, les résultats de ce rapport inter- pellent les maires qui voient le développement de leur commune remis en cause à partir de la simulation d’une crue “hypothétique.”

LE DOSSI ER

I NONDATION

Encore en phase d’étude

La préfecture joue la carte de la sécurité en programmant lamise en place d’un plan de prévention des risques d’inondations dans la vallée du Doubs. Les pre- miers résultats des études qui accompagnent ce plan sont beaucoup discutés. Une crue hypothétique beaucoup discutée

Pierre Bour : “Nous allons essayer de soumettre le P.P.R.I. à enquête publique en 2005.

sier tempère en rappelant tout d’abord que “le P.P.R.I. n’est en aucun cas arrê- té à ce jour. Il reste encore différentes étapes dont l’élaborationde la carte des enjeux économiques et humains. Ce tra- vail sera défini et discuté avec les com- munes. À la suite de cela, nous pour- rons dresser une cartographie précise de l’ensemble des zones concernées par le P.P.R.I. commune par commune. Cependant, le plan de prévention des risques doit être finalisé le plus vite pos- sible. Nous allons essayer de le sou- mettre à enquête publique en 2005.” Mais d’ores et déjà, les maires et la Direction Départementale de l’Équi- pement doivent tenir compte des pre- mières indications fournies par cette étude avant d’attribuer un permis de construire. La réaction des élus n’étonne pas cer- tains observateurs spécialisés dans l’en- vironnement qui constatent que “la cul- ture du risque d’inondation est peu marquée en Franche-Comté qui a pris beaucoup de retard dans la prévention des risques, contrairement à d’autres régions traversées par la Saône par exemple.” S’entêter àvouloir poursuivre les aménagements dans le lit majeur du Doubs, donc potentiellement sub- mersible, reviendrait en montagne “à vouloir construiredansuncouloird’ava- lanche.” Mieux vaut alors prévenir. ! T.C.

tise qui va être engagée dès septembre. L’affaire est sérieuse, car c’est tout le développement à venir des com- munes situées sur le Doubs qui est conditionné par cette crue hypothé- tique. Le cas échéant, si le P.P.R.I. devait s’appliquer sur la base de ces données, un certain nombre de ter- rains passeraient en zone incons- tructible alors qu’ils le sont encore. Ce plan change aussi la donne pour le particulier, dont lamaisonqui se retrou- ve dans un secteur potentiellement inondableperdrasansdoutedesavaleur. “Nous avons un vrai chantier sur tou- te la vallée duDoubs. Si j’en crois l’étu- de, cela veut dire qu’on ne pourra plus rien faire le long de la vallée duDoubs” indique Yves Tardieu, maire de Deluz. Un représentant de la direction régio- nale de l’environnement rétorque en indiquant “que le but duP.P.R.I. est d’ar- rêter les bêtises. L’urbanisation est un phénomène irréversible. Onne peut pas la laisser se développer sans la corréler à un risque d’inondation évalué.” Car de toute évidence, l’imperméabilisation des sols a des conséquences sur le phé- nomène de crue. Il est probable que si la crue de 1910 devait se reproduire, elle n’aurait de toute façonpas lemême impact aujourd’hui, compte tenu de tous les aménagements réalisés pen- dant cette longue période. Pierre Bour, directeur délégué dépar- temental de laD.D.E. en charge dudos-

L es crues à Besançon, on connaît. LeDoubs sortant de son lit après de fortes précipitations n’est pas unévénement, à l’exceptiondequelques années comme1983, 1990, 1999et 2001, où le niveau d’eau atteint lors de ces débordements a frappé la mémoire populaire.Mais la capitale régionale et plus globalement toute la vallée de Doubs central pourraient vivreune crue bien supérieure à toutes celles-ci, et mêmeà cellehistoriquede janvier 1910. C’est ce que prétendune étude hydrau- lique récente réalisée par le cabinet I.S.L. deNanterre qui s’est attardé sur le sujet dans un but bien précis. Par conventionavec l’État, le syndicatmix- te Saône et Doubs, chargé de suivre les évolutions de la rivière, amandaté cet- te société spécialisée dans ce genre de mission. Son travail va servir de base à l’élabo- rationduPlandePréventiondesRisques d’Inondations : le P.P.R.I. Ce dispositif établi sur la base de la loi Barnier du 2 février 1995, a été instauré par l’É- tat auniveaunational (et décliné ensui- te auniveau local) en réaction à de vio- lentes crues dévastatrices comme en 1999.C’est pour limiter les conséquences

tions jamais rencontrées de mémoire d’homme. On parle de la crue centen- nale qui a une “chance” sur cent d’ar- river tous les ans. Son débit est esti- mé à 1 750 m 3 /s contre 1 650 m 3 /s en 1910. Si un tel scénario devait se produire, la plupart des rues de laBoucle seraient sous les eaux. Dans des communes

des inondations sur les biens et les per- sonnes que l’État a légiféréafinde régle- menter strictement tous les aménage- mentsdansdes zones reconnues comme submersibles, voire potentiellement submersibles. Onne peut plus construi- re n’importe quoi n’importe où au nom de ce grand principe de précaution. Dans la vallée duDoubs, le risque exis-

te. Voilàpourquoi leP.P.R.I. aétéprescrit par arrêtépré- fectoral du8 juin2001, pour un secteur qui s’étant de Colombier-FontaineàSaint- Vit, en passant par Besan- çon.Au total, 55 communes sont concernées par ceplan. Le 9 juillet dernier àBesan- çon, le préfet Jean-Marc Rebière accompagné des représentants de différents

comme Chalezeule, des maisons qui n’ont pour- tant jamais été inondées le seraient. Mais il ne s’agit que d’une hypothè- se qui résulte d’un savant calculmathématique pour définir à quoi pourrait cor- respondre une crue cen- tennale. C’est ce côtéhypo- thétique des faits qui suscite le doute dans l’es-

“La culture du risque d’inondation est peu marquée en Franche-Comté.”

services d’État, du cabinet I.S.L. et du syndicat mixte Saône et Doubs, a pré- senté à un parterre d’élus attentifs, les premières conclusionsde l’étudehydrau- lique. Graphique, film, et cartes à l’appui, l’exposé était suffisamment bien argu- menté pour comprendre que la Doubs peut entrer en crue dans des propor-

prit des élus. Avec une pointe d’hu- mour, le maire de Baume-les-Dames parle de sa ville comme “feue Baume- les-Dames l’engloutie.” Sur le même ton, Jean-LouisFousseret déclare “envi- sager de se retirer à la Citadelle.” La crue centennale ? Difficile à croire. Sans attendre, le maire de Besançon a d’ailleurs demandé une tierce exper-

Made with FlippingBook HTML5