La Presse Bisontine 277 - Juin 2025
10 L’événement
Juin 2025
l Besançon Un an après la tempête La forêt de Chailluz fait sa mue La Ville de Besançon, une des plus boisées de France, est propriétaire de 2 200 hectares de forêt, dont 1 700 rien que pour la forêt de Chailluz qui doit allier sa vocation forestière celle de lieu de promenade préféré des Bisontins.
Après la tempête de
juillet dernier, il a fallu plus de six mois pour dégager et exploiter les près de 7 000m 3 de bois tombés. Et ce travail n’est pas terminé (photo Ville de Besançon).
L es services de la Ville ont encore en mémoire ce 20 juillet dernier où des rafales de vent à plus de 100 km/h avaient balayé la forêt de Chailluz et décimé quelque 6900 m 3 de bois, tombés à terre en quelques minutes. Fermée entièrement jusqu’au 31 juillet, puis rouverte par tiellement ensuite et totalement depuis le 10 février dernier après des mois de travaux de dégagement et d’exploitation des bois tombés, la forêt des Bisontins continue à panser ses plaies. Entre 1 500 et 2 000 arbres avaient subi les foudres du vent. Cette tempête n’est hélas pas la seule assaillante pour la forêt de Chailluz qui subit, comme tous les massifs fores tiers de la région, les agressions du cli mat et des parasites comme la chalarose du frêne présente depuis 2019. “Et la série de sécheresses subies en 2020, 2021 et 2022 a provoqué de gros dépé rissements sur le hêtre. Le scolyte de l’épicéa touche aussi les parties de la forêt plantée en résineux. Tous ces évé nements combinés font que la forêt de Chailluz souffre beaucoup” résume Samuel Lelièvre, directeur de la bio
diversité et des espaces verts à la Ville de Besançon. Le défi de la Ville, associée à l’O.N.F. à qui elle a délégué la gestion de sa forêt communale, est donc de “chercher à trouver les meilleures solu tions possible pour que dans un siècle nos choix d’aujourd’hui s’avèrent les bons.” Plusieurs actions ont été engagées pour tenter de maintenir en état la forêt de Chailluz. D’abord la création de ce que les spécialistes appellent des “îlots de sénescence” où on laisse la nature faire
plus en plus pointilleuse, la forêt de Chailluz “restera toujours accessible aux Bisontins” promet la Ville. Les ser vices travaillent actuellement sur un nouveau plan d’accès de Chailluz pour le public. “On va revoir les parkings, les panneaux d’information et les modes de circulation pour continuer à assurer une fréquentation de cette forêt dans les meilleures conditions. Et avec l’O.N.F., on commence à travailler pour mettre en place des dispositifs d’infor mation beaucoup plus réactifs à des tination des usagers en cas d’événements imprévus” annonce le service des espaces verts qui affirme que la forêt de Chailluz restera bel et bien celle des Bisontins. n J.-F.H.
de bois. Avec les quantités industrielles de bois que Besançon a dû exploiter après la tempête de juillet dernier, et un marché du bois actuellement très porteur, les ventes ont permis à la Ville de Besançon d’encaisser 450 000 euros bruts de recettes. Cette manne est très variable d’une année sur l’autre. En 2023-2024, les conditions climatiques défavorables n’avaient permis de faire que 371000 euros de recettes alors que la Ville en espérait 500000. “La plupart des recettes du budget forêt sont réinvesties dans les replantations” observe le responsable. L’autre vocation de cette forêt commu nale située à la lisière de la forêt est donc le loisir. Bien que soumise aux aléas climatiques et à une gestion de
enrésinés. 200 hectares de Chailluz étaient jusqu’ici plantés en résineux. Très sujettes au dépérissement à cause des attaques de scolytes, ces parcelles sont peu à peu remplacées par d’autres essences. Dont certaines qu’on trouve habituellement à la latitude de la région lyonnaise. “On passe ainsi du chêne pédonculé, courant ici, au chêne sessile. On passera progressivement également au chêne pubescent. L’idée est également de mixer les essences. La diversité géné tique est sans doute la bonne conduite pour résister à une pathologie” ajoute M. Lelièvre. Derrière cette gestion qui devient de plus en plus méticuleuse, il s’agit aussi pour Besançon d’assurer l’autre voca tion de cette forêt de Chailluz : la vente
son œuvre, sans plus d’in tervention humaine, afin de renforcer les trames de vieux bois, de gros bois et de bois mort et ainsi créer de nouveaux puits de car bone. “Ces îlots s’étalent désormais sur 188 hec tares, soit 18 % de la sur face de Chailluz” indique Catherine Lehoux, cheffe du service forêt et boise ment urbain à la Ville. La deuxième action enga gée à Chailluz est la trans formation des secteurs
On plante désormais des essences de la latitude de Lyon.
l Collectivités 107 communes ont subi des pertes de recettes Les communes forestières très attentives au maintien des aides de l’État
L’aisance qui caractérisait les communes forestières a sérieusement pâli au fil des crises sanitaires, remettant en cause le modèle de gestion financière de ces collectivités. Difficile de se projeter sereinement dans l’avenir.
Zoom Des travaux d’exploitation loin de faire l’unanimité A vec l’urgence de cou per assez rapidement de gros volumes de bois scolytés, les conditions d’exploitation et leur impact paysager ont beaucoup évo lué. “On a bien conscience que cela perturbe les usagers de la forêt. Les gens se plai gnent des coupes rases, de l’état des chemins… Il y a tout un travail de communi cation à engager sur cette problématique de l’accepta bilité de l’exploitation fores tière. Il faut aussi penser aux entreprises de travaux fores tiers qui souffrent aussi” , tem porise Dominique Maillot. n
“L e contexte de crise sanitaire se bana lise depuis 2018. Dans ces circons tances, on a une incertitude très forte sur l’avenir, ce qui rend dif ficile les prises de décision” , indique Dominique Maillot, vice président délégué de l’association des communes forestières du Doubs. Le temps des concessions et des paradoxes. En 2021-2022 pour sauver l’O.N.F. de la banqueroute, l’État annonce ses intentions de deman der des contributions supplé mentaires aux communes fores tières. Le montant de cette participation s’élevait à 7,5 mil lions d’euros en 2023 puis à 10 millions d’euros pour 2024 2025. “On s’est opposé à cette requête. Il nous a alors été proposé de contractualiser les mises en marché de bois publics à hauteur de 35 %. On a respecté cet enga gement.” Face à l’ampleur des volumes de
Les communes forestières n’ont pas manqué d’alerter les pouvoirs publics qui leur ont accordé une dotation de soutien d’1 million d’euros en 2022 avant d’être por tée à 2 millions en 2024 puis reconduite au même niveau en 2025. Dans le Doubs, 21 com munes ont bénéficié de ce dispo sitif pour un montant global de 150 000 euros. “La Direction Régionale des Finances Publiques a mis en place en 2021 ou 2022 un observatoire de la dépendance des communes aux recettes fores tières.” Comment évolue cette dépen dance dans le Doubs ? “Je ne le sais pas. La centaine de com munes dépendantes ne sont pas toutes en difficulté mais leur capa cité d’autofinancement est indu bitablement affectée. On aimerait que cette dotation de 2 millions d’euros soit maintenue.” La seconde revendication concerne les aides de l’État au renouvellement forestier accordé
bois scolytés, décision a été prise de réduire l’état d’assiette des communes de 30 % à 50 %. “On a diminué la mise en marché des bois verts pour permettre l’écou lement des bois scolytés. Cette stratégie avait un double objectif : éviter l’effondrement du marché et rester en adéquation avec les capacités de sciage des scieries locales. Malgré tout, face à l’am pleur de la crise, une partie des volumes a dû être exportée ailleurs en France voire à l’étranger.” Les efforts demandés ne sont pas anodins, sachant qu’une com mune sur cinq dans le Doubs dépend des recettes forestières. “On parle de dépendance quand le revenu forestier représente plus de 22 % des recettes réelles de fonctionnement. Le maintien d’un certain équilibre impose parfois aux communes d’appliquer des solutions pas très populaires” , précise Dominique Maillot en faisant référence aux augmen tations d’impôts.
“On doit maintenant privilégier un avenir incertain avec beaucoup d’humilité par rapport aux choix de renouvelle ment forestier qui seront faits”, estime Dominique Maillot, vice-président délégué de l’association des communes forestières du Doubs.
pliquée à mettre en œuvre. On demande aux communes de jouer cette carte de la solidarité depuis bientôt 6 ans. Je pense qu’on n’a pas trop à se plaindre de l’enga gement des communes. Globale ment, ça fonctionne. Aujourd’hui mieux vaut être une commune qui aide car cela signifie qu’elle a encore du potentiel forestier. Quand on gérait la forêt avec ces crises sanitaires, on était dans un domaine de certitude. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Quelles que soient les décisions prises, il est impossible de savoir si la forêt sera toujours aussi resplendis sante dans 40 à 50 ans.” n F.C.
dans le cadre de France 2030, dispositif remplacé par France Nature Verte. “Ce soutien repré sentait un montant de 150 mil lions par an. Là aussi, nous demandons que cette dotation reste identique jusqu’en 2030. Tout le monde est bien conscient que ces aides sont insuffisantes pour couvrir les pertes de recettes.” Estimant que toutes les com munes ne jouaient pas l’effort de solidarité au même niveau, l’État a suggéré de mutualiser les recettes avec des clefs de répar tition. De quoi rendre sceptique Dominique Maillot. “Sur le papier, c’est une idée novatrice sauf qu’elle me semble très com
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