La Presse Bisontine 277 - Juin 2025
Mensuel d'informations de Besançon et du Grand Besançon
JUIN2025 - N° 277 - 3 €
Mensuel d’information de Besançon et du Grand Besançon - www.presse-bisontine.fr
Anne Vignot fait les yeux doux à la gauche Elle cherche l’union à tout prix
P. 22 Le terrain pour les gens du voyage fait débat La création d’un terrain familial pour gens du voyage sur d’anciennes terres agricoles crée des discussions. École-Valentin
P. 8 à 10
L’événement
Les forêts pansent leurs plaies
Les négociations vont bon train au sein des appareils politiques bisontins. À gauche, Anne Vignot cherche l’alliance à tout prix. Même scénario à droite.
P. 4 Secteur gare Viotte : la métamorphose d’un quartier Le secteur sud du quartier est terminé. Place à la reconfiguration du secteur nord jsuqu’en 2030. Urbanisme Après plusieurs années de souffrance, la forêt tente de résister. À Chailluz, après la tempête de l’été der nier, on expérimente de nouvelles plantations.
Le dossier en P. 24 à 32
3 782888 303004
2 Retour sur info
La Presse Bisontine - Juin 2025
Besançon, nouvelle destination touristique ?
Le Local Boxe Club de Besançon prend ses aises
À l’étroit dans ses locaux histo riques de Besançon, le club de boxe présidé par Philippe Haag a pris possession de nouveaux locaux rue Granvelle : 400 m² de salles aménagées par le club, et mises à disposition par le patron de la société bisontine S.M.C.I. Fabrice Jeannot (grand amateur d’arts mar tiaux) dans le cadre d’un partenariat de mécénat. “Le Local Boxe Club compte près de 300 licenciés. Avoir ce deuxième site nous permettra d’accueillir plus d’adhérents dans d’excellentes conditions. Le site Granvelle sera dédié à la boxe loisir, au sport-santé, au sport handicap, tandis que notre local rue Bersot sera réservé aux compétiteurs et aux écoles. Ces nouvelles conditions de pratiques vont nous changer la vie” commente Philippe Haag, le prési dent d’un club indissociablement lié à deux figures locales de la boxe :
Bellati et Morrade Hakkar. Ce dernier reste un des entraîneurs embléma tiques d’un club dont les deux frères Hakkar ont assuré la notoriété pour longtemps. “L’ouverture de cette salle pourra sans doute aussi per mettre aux curieux de découvrir ce qu’est vraiment la boxe. Ce sport est une excellente thérapie pour ceux qui veulent gagner de la confiance. Beaucoup plus efficace que tous les médicaments !” commente le multi médaillé international qui a fait rayon ner Besançon dans les années qua tre-vingt-dix et 2000. Des caves du quartier de Montrapon où Morrade réalise ses premiers combats avec son frère Bellati, au Spectrum de Philadelphie devant près de 18 000 personnes (c’était en 2003), les deux frères se sont élevés mutuellement vers le plus haut niveau mondial. Ils donnent aujourd’hui aux plus jeunes l’envie de briller et de s’épanouir. ■
A u moment où les élus de Grand Besançon Métropole lancent la sai son touristique d’été, quelques indi cateurs donnent à penser que, dans la mouvance du slow tourisme et des des tinations de proximité genre City breaks, Besançon commence à tirer son épingle du jeu. Un seul indicateur officiel confirme cette tendance : le montant de la taxe de séjour perçue l’an dernier. Il a atteint 803 000 euros, contre 564 000 euros en 2023. “Ce chiffre incontestable prouve que le nombre de nuitées a fortement augmenté à Besançon. C’est sans doute le fruit de nos efforts” se réjouit Benoît Vuillemin, le vice-président de G.B.M. en charge de l’attractivité touristique. Le suc cès de manifestations comme le Trail des forts - record de participation cette année avec 7 500 participants, et “il aurait pu y
en avoir plus de 10 000 si nous n’avions pas limité la jauge” ajoute la présidente de G.B.M. Anne Vignot -, ou les Grandes heures nature, ainsi que les efforts consen tis par l’office de tourisme pour renouveler son offre (voir en pages suivantes) expli quent sans doute ces hausses. Pour que l’essai soit confirmé, il manque cependant à Besançon une offre en matière d’hébergement. les élus annoncent la création prochaine de quatre nouvelles structures (hôtels ou chambres d’hôtes) sur le territoire de G.B.M. : “Un hôtel de très grande qualité sur le site de Saint Jacques à Besançon, un autre projet d’hô tel à Morre, sans doute sur l’axe de la R.N. 57, et une autre forme d’hébergement à Palise, dans la vallée de l’Ognon.” “Et un autre hôtel à Saône” ajoute Benoît Vuil lemin. Récemment labellisée “commune
touristique” par l’État, Besançon est aussi la nouvelle porte d’entrée officielle de la destination Montagnes du Jura et la vile porte du Parc naturel régional du Doubs Horloger. La ville poursuit aussi ses efforts pour l’accueil de congrès. Parmi les pro chains, il y a le congrès international des professeurs de français où 1 500 congres sistes sont attendus du 10 au 17 juillet, avec à la clé, 10 500 nuitées liées à ce seul congrès. ■ Les équipements d’hébergement se diversifient dans le Grand Besançon (photo G.B.M.).
14 lits de psychiatrie vont fermer à Novillars
L’ information avait été dans un premier temps démentie en mars par la direction du centre hospi
travail ne cesse d’augmenter et le personnel (infirmiers, A.S.H., aides-soignants, psy chologues, secrétaires, assis tantes sociales) continue de partir.” Pour la direction, cette fermeture est une anticipation du projet de transformation de l’établissement pour pallier le manque de personnel, et notamment de psychiatres. Le dialogue entre syndicat et direction s’est encore plus crispé à cause de banderoles affichées par le syndicat, puis retirées par la direction. Sud dénonçant une entrave à la liberté d’expression quand la direction argue qu’il y a des espaces prévus pour ces ban deroles. ■
talier spécialisé de Novillars qui affirmait que l’unité d’hos pitalisation au long cours E.T.A.P.E., ne fermerait pas,
en réponse aux craintes et alertes du syndicat Sud. Mi mai, finalement, la fermeture d’étape a été officialisée pour le 4 juillet prochain, en raison d’un problème d’effectif médi cal. 14 lits de psychiatrie vont fermer. Pour le syndicat, “il est insupportable pour les agents travaillant au Pôle C, Pôle dont dépend l’unité E.T.A.P.E., d’en tendre que la fermeture du ser vice ne serait liée qu’à un pro blème d’effectif médical! Depuis le mois de septembre, le syndicat Sud avertit la direc tion du centre hospitalier de Novillars et demande une enquête sur les risques psy chosociaux dans ce Pôle. Faute de réactivité, la souffrance au
La banderole de la discorde, retirée par deux fois, a fait réagir le syndicat Sud qui parle d’entrave à la liberté d’expression. Éditorial Caricatures C omme l’a justement souligné la présidente de Région Marie Guite Dufay lors de la dernière assemblée plénière du Conseil régional, “un fromage de qualité mérite des débats de qualité.” La polémique qui a agité pendant plusieurs jours la sphère des réseaux sociaux et des médias au sujet du comté, lancée sur la base d’un article pour moins orienté voire men songer du Figaro Magazine mérite en effet beaucoup mieux que ces caricatures lues ou entendues ici et là, et amplifiées par des réseaux sociaux qui décidément ont perdu - s’ils l’ont eu un jour ?… - tout sens de la nuance, du débat et de l’ar gumentation. Comme il est inacceptable d’entendre les défenseurs du comté et la profession agricole affirmer que le comté n’a aucun impact sur son envi
La nouvelle salle a été inaugurée en présence du président Philippe Haag et des deux frères Hakkar, Morrade et Bellati.
Ce débat tronqué n’est évidemment pas le premier ni le dernier à être relayé par les réseaux sociaux par lesquels en une phrase sentencieuse on estime devoir résumer sa pensée, bien courte, et où la désinformation et la culture du buzz , où le nombre de clics et les performances d’un site deviennent plus crédibles qu’un discours scientifique argumenté et éclairé par les faits, les chiffres et l’expérience. La filière comté est et devra rester un modèle du genre, porté par un esprit de coopération séculaire, et rémunérateur pour ses agriculteurs. Cela n’empêche pas pour autant d’évoquer sans tabou les enjeux environnementaux que pose cette filière prospère. Ses acteurs n’ont d’ailleurs pas attendu ce mauvais procès pour réviser le cahier des charges du comté, limiter fortement l’apport de fer tilisants, et décider de désintensifier la production pour réduire l’impact sur les sols et la biodiversité. ■ Par le directeur de la rédaction Jean-François Hauser
ronnement et accuser ceux qui soulèvent de vraies questions d’être des “Khmers verts” ou de vouloir pratiquer “l’écologie punitive” pour reprendre les expressions faciles de ceux qui sont à court d’argu ments, il est tout aussi inadmissible d’af firmer, qui plus est sur des radios publiques à forte audience, qu’il serait dangereux voire criminel de continuer à manger du comté alors que la filière tout entière défend un modèle exigeant. Et tout comme sont caricaturales et mini malistes les affiches “Touche pas au comté” qui ont aussitôt fleuri sur les réseaux sociaux à la manière d’un “Je suis Charlie” décliné désormais à toutes les sauces, parfois indigestes. Oui, le comté mérite mieux que cela comme débat. Non, un militant écologiste et anti-spéciste qui a son avis propre et ne représente pas l’ensemble des défenseurs de l’environnement, pas plus qu’il est à assimiler à tous les militants écologistes.
Directeur de la publication : Éric TOURNOUX Directeur de la rédaction : Jean-François HAUSER Rédaction : Frédéric Cartaud, Thomas Comte, Jean-François Hauser, Laurine Personeni. est éditée par la société “Publipresse Médias” S.I.R.E.N. : 424 896 645 Rédaction et publicité: 0381679080 E-mail: redaction@publipresse.fr
Directeur artistique : Olivier Chevalier.
Conception pubs : Éloïse Perrot.
Crédits photos : La Presse Bisontine, D.R.A.A.F.- B.F.C., Famille Boichard, G.B.M.,, Groupe B.J.M.V., N.G. Productions, O.N.F. Pontarlier, O.T. du Grand Besançon, I.O.E.W., Syndicat Sud, Ville de Besançon. équipe commerciale : Maëliss Aumaitre, Anne Familiari, Anthony Gloriod. Imprimé à Nancy Print - I.S.S.N.: 1623-7641 Dépôt légal : Juin 2025 Commission paritaire : 0225 D 80130
4 Besançon
La Presse Bisontine - Juin 2025
URBANISME
Un chantier jusqu’à 2030
Secteur Viotte : la mue du quartier se poursuit
Après la partie sud quasiment terminée, l’aménagement du Nord de la gare va débuter avec la création de logements et d’un bâtiment mixte alliant bureaux, habitat et une crèche publique. Au Nord de la gare, un grand bâtiment résidentiel et de services, conçu par l’architecte alsacien Alain Friedrich (image I.O.E.W.).
I Il aura fallu dix ans de travaux pour que le quartier de la Viotte change de visage, il faudra encore cinq ans pour que la métamorphose soit complète. Le 7 mai dernier, les autorités et l’aménageur public Terri toire 25 inaugurait la fin des dix pre mières années de chantier, marquant la réalisation du secteur situé au sud des voies de chemins de fer qui a vu se construire, autour de la voie Gisèle Halimi, plusieurs bâtiments emblé matiques abritant des services admi nistratifs (le pôle État et le pôle Région) ainsi que l’ensemble immobilier Génius mené par la société S.M.C.I. et com prenant des logements et une résidence services intergénérationnelle. Ou com ment en dix ans une ancienne friche S.N.C.F. a été transformée en un nou
publique de 1000 m 2 (pour 60 ber ceaux), conçu par un architecte alsacien, Alain Friedrich. Ce bâtiment abritera également des bureaux et un immeuble d’une douzaine de logements complète l’ensemble. En haut de ce plateau inférieur, le long de la rue Nicolas-Bruand, un ensemble d’une cinquantaine de logements sera construit en trois bâtiments. Espaces végétalisés, connexion piétonne et cycliste, passerelle métallique équipée d’un éclairage Led compléteront les aménagements de ce futur secteur Nord qui devrait être terminé d’ici 2030. Le bâtiment crèche, lui, dont le chantier doit débuter avant la fin de cette année, devrait être livré dès 2027. n J.-F.H.
veau quartier de la ville pour “une ville verte et ouverte” selon les mots de la présidente de Région Marie-Guite Dufay venue couper le ruban ce jour là. Mais le secteur Viotte n’en a pas pour autant terminé avec les travaux. La partie nord est sur le point de démarrer. “Le projet se développe sur 1,1 hectare d’une parcelle assez contrainte, étirée
Le secteur sud du nouveau quartier Viotte comprend le bâtiment des services de l’État (à gauche), des immeubles d’habitation (au fond) et le bâtiment des services de la Région (à droite). L’inauguration du secteur sud a été faite le 7 mai dernier. Exposition Le peintre bisontin Bruno Medjaldi expose à la galerie Diderot de Besançon à partir du 14 au 29 juin. Tous les renseignements nécessaires figurent sur le document. Ouverture tous les jours de 15 heures à 19 heures. L’ensemble de solistes Allegri chante les plus beaux Ave Maria du monde le jeudi 26 juin à 20 h 30 en la cathédrale Saint-Jean de Besançon. Réservation dans les points de vente habituels. Le Département du Doubs a engagé des travaux de réparation et d’entretien d’ouvrage d’art à l’intersection de la rue de Vesoul et du boulevard Léon Blum à Besançon. D’un montant de 125000 euros, le chantier a été confié à l’entreprise Eurovia Plus d’infos au 06 81 95 74 97. Ave Maria Plus d’infos au 06 66 12 21 12. Boulevard EN BREF
le long de la rue Nico las-Bruand et traversée dans le sens de la lon gueur par un front rocheux” détaille la Ville de Besançon. Aux abords de la voie ferrée sera construit un long bâti ment qui abritera en rez de-chaussée une crèche
Le bâtiment crèche livré dès 2027.
NATURE
Haro contre le retour des pesticides Les abeilles ont Duplomb dans l’aile La proposition du sénateur L.R. Laurent Duplomb prônant le retour de certains néonicotinoïdes dans l’agriculture fait notamment bondir les apiculteurs bisontins qui s’en offusquent.
céréaliers et les producteurs de betterave à sucre, on sacrifie toute une filière, celle de l’api culture. C’est désolant de voir ça” s’insurge cette autre apicul trice qui estime que cette pro position de loi a été prise par populisme, “pour calmer la grogne agricole.” Un appel à peine voilé à notre ministre de l’Agriculture Annie Genevard à ne pas céder aux lobbies au détriment du maintien de l’agri culture paysanne et des petits producteurs. n J.-F.H.
ans, désormais c’est à peine 3 ans, et elles pondent de moins en moins d’œufs: 3000 œufs par jour la première année, 2 000 la deuxième et à peine 1000 la troisièmes.” “La logique écono mique prend le pas sur la logique humaine” déplore de son côté Gabriel Viennet, président de l’association des Amis de la Confédération paysanne qui ajoute que “le nombre d’insectes s’est effondré de 61 % en quatre ans.” “Pour répondre à la demande d’une profession, les grands
seule cause. La météo est un facteur primordial, comme l’est le frelon asiatique. Les pluies abondantes de l’automne dernier expliquent en partie ces pertes. Cet autre apiculteur présent à la mobilisation bisontine est tout aussi inquiet: “Avant, les reines vivaient sans problème 6
A uteur d’une proposition de loi visant à “lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur” , doux euphémisme pour dire le retour de certains pesticides interdits depuis 2018 (les fameux néonicotinoïdes), le séna teur de la Haute-Loire Laurent Duplomb propose d’autoriser à nouveau leur utilisation, sou tenant ainsi la demande des grands céréaliers et des produc teurs de betteraves qui se disent désavantagés par rapport à cer tains de leurs collègues euro péens. Ces mêmes néonicoti noïdes, un fléau pour la diversité et la survie des pollinisateurs comme les abeilles, avaient été interdits en France en 2018. Face à cette proposition de loi qui acterait un retour en arrière,
les apiculteurs se mobilisent. Le 7 mai, le syndicat apicole du Doubs (qui réunit 400 produc teurs de miel) organisait un ras semblement devant son siège bisontin. “Si les abeilles conti nuent à disparaître, c’est toute la biodiversité et au final l’hu manité qui est menacée. Auto riser à nouveau ces pesticides
est un non-sens écologique” pré vient Michel Mesnier, le prési dent du syndicat apicole du Doubs. Il précise : “Entre 2024 et 205, nous avons perdu 60 % des colonies d’abeilles.” Bien sûr, les pesticides ne sont pas la
Pour qu’Annie Genevard
Le syndicat apicole du Doubs a manifesté sa colère début mai contre la loi Duplomb.
ne cède pas aux lobbies.
B.F.C.-T.P.R.E. Ces travaux s’étaleront jusqu’au 27 juin.
Vous êtes commerçant(e) ?
Commerçants
Restaurateurs
Instituts/boutiques
Activités touristiques
Un outil simple, rapide et performant pour accumuler de la trésorerie tout au long de l’année ! Pas besoin de site internet,
Pâques arrive, adhérez dès maintenant !
www.ckdo.pro
Une solution de l’agence de communication
6 L’interview du mois
Juin 2025
TOURISME
Le président de B.F.C. Tourisme Patrick Ayache
“Nous avons une vraie carte à jouer pour cet été” Bourgogne-Franche-Comté Tourisme vient de tenir son assemblée générale annuelle. Les commentaires à chaud de son président Patrick Ayache, vice-président de la Région Bourgogne-Franche-Comté.
C omment se porte le tourisme dans notre région ? Patrick Ayache : Tous hébergements confondus, on a connu encore l’an dernier une légère augmentation de la fréquentation touristique de notre région et notamment, grâce à des personnes de la région qui visitent la région. Le marché des visiteurs français a été en léger recul mais celui des clien tèles lointaines, notamment des Chinois, est bien reparti à la hausse. La catégorie d’héberge ments qui a le plus progressé est celle des particuliers à particuliers avec une hausse de + 11 % l’an dernier, tandis que les hôtels, campings et hébergements col lectifs avaient accusé une légère baisse. Un indicateur est très révélateur de cette tendance : le nombre de logements proposés sur les plateformes type Airbnb a augmenté de + 10 % par rapport à l’année précédente, et de + 30 % par rapport à 2022 ! On remarque d’ailleurs que depuis le début de l’année et pour cet été, le nombre de réservations sur ces plate formes continue à augmenter: + 14 % pour juin, + 16 % pour juillet et + 29 % pour août. Justement, comment s’annonce cette saison touristique 2025 ?
les Eurocks, ou la Paille dans le Haut-Doubs. Quelle est votre stratégie pour promouvoir la destination Bourgogne-Franche Comté ? P.A. : Nous misons sur nos trois marques porteuses que sont la Bourgogne, les Montagnes du Jura et les Vosges du Sud. C’est sur ces trois marques que l’on porte l’essentiel de nos efforts.
P.A. : Les premiers mois de l’année ont montré une légère baisse de la fréquentation de notre région : le nombre de nuitées est en légère baisse de - 3 % par rapport à 2024 et c’est notamment la clientèle française qui est en recul. Mais on enregistre une progression des clientèles étrangères de + 1,5 %, avec des signaux très encoura geants comme la forte progression de la clientèle allemande (+ 28,5 %), la hausse continue de la clientèle suisse (+ 9,7 %) et le retour de la clientèle britannique qui avait déserté après la crise sanitaire et le Brexit. Dans notre communication, on se concentre notamment sur cette clientèle britannique. Pour eux, partir en voyage reste très important, quitte à se priver sur d’autres postes de dépenses. Nous sommes plutôt optimistes pour la suite de la saison car plus des deux tiers des Français ont déclaré une intention de départ pour cet été et la France reste une destination privilégiée pour 85 % d’entre eux. Nous avons donc une vraie carte à jouer. Nous aurons des événements qui devraient amener beaucoup de monde, notamment cette étape du Tour de France le 26 juillet à Pontarlier, et des festivals comme
désormais tout sur le numérique. L’an dernier, nous avons enregis tré 5 millions de visites sur notre système digital. C’est 40 % de plus par rapport à l’année précé dente. Je ne crois plus à ce qu’on faisait beaucoup avant, à savoir des grandes campagnes d’affi chage à Paris, dans le métro ou dans les gares. 1,2 million de visi teurs étrangers ont visité notre site, c’est en hausse de 80 %. Notre choix d’un système digitalisé a fait ses preuves, il permet en plus de mieux cibler la clientèle poten tielle selon les régions ou les pays. Nous essayons aussi de suivre les tendances du digital, raison pour laquelle nous nous intéres sons actuellement aux réseaux comme TikTok ou Youtube. En revanche, nous avons stoppé les collaborations avec certains influenceurs, cette forme-là a perdu beaucoup de sa crédibilité. Quelles autres actions mettez-vous en place pour mieux faire connaître notre région qui souffre encore d’un déficit de notoriété par rapport aux grandes régions touristiques françaises ? P.A. : Une des nouveautés de 2024 a été d’accueillir au sein même de B.F.C. Tourisme un Bureau d’Accueil des Tournages. Ce rap prochement stratégique marque
Dans nos actions de communication, nous misons sur l’accessibilité de nos territoires, à deux heures de Paris et à deux heures de Lyon, ainsi que sur la diversité des expé riences que les visi teurs peuvent vivre dans notre région : le patrimoine, la gastronomie, la pleine nature, l’iti nérance, la randon née, le tourisme flu vial. Quelle est votre stra tégie de communica tion ? P.A. : Nous misons
“Les logements proposés sur les plateformes en forte hausse.”
des figurants pour leurs films. On ne mesure pas ce phénomène qui existe pourtant de plus en plus: les touristes se déplacent souvent pour découvrir et visiter des paysages quand ils les ont vus dans un film. En 2024, notre région a ainsi pu accueillir 19 sor ties nationales dont deux films
une nouvelle étape dans la valo risation de notre territoire en positionnant la Bourgogne Franche-Comté et ses trois des tinations comme une vraie terre de cinéma. La fonction de ce Bureau est d’aider un réalisateur, un régisseur, un producteur à trouver des paysages, des lieux,
Zoom Besançon mise sur l’originalité
“N ous avons souhaité donner à voir Besançon de façon diffé rente” résume Véronique Mari zier-Bouhelier, la directrice de l’office de
tourisme de Besançon arrivée l’été dernier et qui a missionné l’ensemble des guides conférenciers de la ville - ils sont une dou zaine - pour qu’ils imaginent de nouveaux
parcours de visite. Parmi les nouveautés validées et inscrites dans le nouveau programme des visites guidées bisontines, il y a par exemple ce concept des “visites surprises”. “Le visiteur s’inscrit mais il ne sait pas ce qu’il va visiter. Les premières visites de ce type ont démarré. Les visiteurs avaient rendez vous devant la statue de Jouffroy-d’Abbans sur le pont Battant. Le guide les a emmenés visiter le quartier Battant et ils ont terminé la visite par la découverte des Ateliers des Pianos Gaëtan Leroux avec une petite prestation musicale du patron, agrémenté d’un petit buffet régional préparé par le G.P.P.R. Ce concept semble plaire beau coup” note la directrice. D’autres visites originales sont au pro gramme comme cette découverte de Besançon depuis le Doubs en naviguant et en ramant sur un dragon-boat en col laboration avec le S.N.B. Cette autre visite baptisée “Besançon en toute fraîcheur” permet de découvrir la ville à travers ces îlots de fraîcheur et ses espaces verts, avec des horaires adaptés aux jours d’été,
Découvrir Besançon en bus décapotable, c’est la proposition de la société bisontine B.G. Voyages (photo Groupe B.J.M.V.).
en fin d’après-midi pour éviter les grosses chaleurs. Des visites en randonnée ou à vélo, des visites qui se terminent par une petite séance dégustation au Marché Beaux Arts, une visite “Frissons à Besançon” avec à la clé quelques récits fascinants et légendes locales complètent ce programme
estival. Les grands classiques, mais revisité eux aussi, ne sont pas oubliés. Le bus décapotable lancé par la société bisontine B.G. Voyages fait partie de ces autres innovations récentes qui permettent aux touristes, “mais aussi aux locaux” insiste Véronique Marizier-Bouhelier, de découvrir ou de redécouvrir Besançon. n
Découvrir Besançon au fil du Doubs, une des nouveautés proposées par l’office de tourisme (photo O.T. du Grand Besançon).
L’interview du mois 7
Juin 2025
Une saison hivernale mitigée dans les Montagnes du Jura A près des vacances de Noël très enneigées et ensoleillées, et donc très fréquentées, les touristes ont peu à peu déserté le massif jurassien jusqu’au 20 février, avant de décrocher sensiblement au cours des deux dernières semaines des vacances d’hiver. Pour l’ensemble de la saison hiver nale, les nuitées sont donc en rempli de 6,6 % par rapport à l’hiver pré cédent. Cette tendance à la baisse des nui tées sur les derniers jours des vacances a pesé sur le niveau de satisfaction déclaré par les profes sionnels. qui a sensiblement chuté lui aussi. Sur le périmètre à neige, seuls 42 % d’entre eux expriment une opinion positive sur leur activité hivernale. 58 % des répondants ont même considéré qu’il s’agit de leur plus mauvaise des quatre saisons écoulées. Métabief et Les Rousses s’en sont pourtant plutôt bien sorties : à elles deux, les stations de ski ont enre gistré cet hiver 308000 journées skieurs, contre 157 000 seulement lors de la saison 2023-2024. n
emblématiques qui ont rencon tré un énorme succès et ont été récompensés aux César : Vingt Dieux et Le Roman de Jim. Au total, 55 projets ont été tournés et accompagnés dans notre région l’an dernier, pour un total de 479 jours de tournage. Il y a une vraie dimension économique autour de ce thème car il est établi qu’1 euro investi locale ment pour un tournage apporte 3,40 euros de retombées écono miques sur le territoire. Sur les 55 tournages de 2024, 7 ont été réalisés dans le Doubs. Les Francs-Comtois et les Bourguignons connaissent-ils bien leur propre région ? P.A. : Pas tant que cela. C’est la raison pour laquelle nous restons fidèles au slogan que nous avions lancé après la crise sanitaire et qui disait “Sortez chez vous!”. Il faut bien reconnaître que, même dix ans après la fusion des Régions, l’identité de cette région Bourgogne-Franche Comté est encore loin d’être faite, y compris sur le plan du tou risme. C’est tout l’intérêt des marques que l’on promeut, en invitant les Bourguignons à visi ter les Montagnes du Jura par exemple et les Francs-Comtois le vignoble bourguignon. De quels moyens financiers dispose B.F.C. Tourisme, le comité régional du tourisme de Bourgogne-Franche
Comté ? P.A. : La structure dispose d’un budget de 6,5 millions d’euros, elle emploie 45 salariés. Certains citoyens se posent la question de l’éventuelle redondance entre des structures comme B.F.C. Tourisme et Doubs Tourisme, dont l’objectif est également de promouvoir le tourisme à l’échelle du département. En quoi sont-elles complémentaires ? P.A. : Avec Doubs Tourisme, nous avons construit notre schéma touristique ensemble à tel point que Doubs Tourisme n’a pas construit son propre schéma car il a décidé de s’appuyer sur notre schéma régional. Il n’y a donc pas de redondance. Les cam pagnes de B.F.C. Tourisme sont à vocation régionale, nationale et internationale tandis que Doubs Tourisme oriente ses cam pagnes vers la proximité et les labels qu’il met en avant, à des tination par exemple des pêcheurs, des cyclistes ou des motards. Il y a une vraie com plémentarité entre les struc tures. Les départements ont éga lement fait le choix d’accompagner les habitants, avec plus de responsabilités sur les itinéraires, l’offre de randon née par exemple, alors qu’un C.R.T. se charge de la promotion touristique en France et à l’étranger. n Propos recueillis par J.-F.H.
Vice-président de la Région Bourgogne Franche-Comté, Patrick Ayache est le président de B.F.C. Tourisme.
Zoom Les chiffres du tourisme dans la région l 826 700 lits touristiques dont 27,2 % de lits marchands. l 120 309 résidences secondaires. l 33,4 millions de nuitées françaises extra-régionales en 2024. l 12,4 millions de nuitées intra-régionales. l 31,5 millions de nuitées étrangères. l Les trois principales provenances étrangères : Allemagne, Pays-Bas, Suisse.
8 L’ÉVÉNEMENT
Juin 2025
LA FORÊT DU DOUBS : entre souffrance et résilience
Particulièrement malmenés depuis quelques années, les massifs forestiers locaux, que ce soit les feuillus dans le Grand Besançon ou les résineux dans le Haut-Doubs, donnent de sérieux signes de faiblesse, de dépé rissement, quand ce n’est pas de mort. Face à ces phénomènes climatiques et sanitaires qui touchent nos forêts, quelles réponses peuvent être apportées ?
l Nature Forêts de plaine et forêts d’altitude Les forêts du Doubs pansent leurs plaies Depuis 2018, un cumul d’événements climatiques et sanitaires décime les forêts du Doubs, particulièrement en altitude.
Dans certains secteurs du massif forestier dans le Haut-Doubs, plus de 50 % des arbres sont scolytés et morts (photo D.R.A.A.F.- B.F.C.).
Le phénomène est aussi palpable en plaine. Une note d’espoir semble cependant émerger.
L es sécheresses et canicules à répétition depuis 2018, associées à l’arrivée de bio-agresseurs exo tiques (pyrale du buis, chalarose du frêne, etc.): le cocktail a été fatal pour de nombreux massifs forestiers locaux. “Tout n’est pas lié au réchauffe ment climatique tempère Mathieu Mira bel, responsable du département de la santé des forêts à la D.R.A.A.F. Bour gogne-Franche-Comté. Les bio-agresseurs sont liés à la mondialisation et aux échanges. Le dernier exemple en date est l’arrivée à l’automne dernier dans notre région de la punaise réticulée du chêne, originaire des États-Unis, qu’on a détectée à proximité des aires d’autoroutes. Typi quement, c’est un insecte qui est arrivé avec des voyageurs.” Si les forêts franc-comtoises sont si fra giles depuis quelques années, c’est sans doute aussi “parce qu’elles ne sont pas habituées jusqu’ici, contrairement aux forêts du Sud, à subir de tels stress hydriques. Avec moins d’eau depuis plu sieurs années, les arbres font plus de
racines, moins de croissance et moins de feuilles” détaille l’ingénieur de la D.R.A.A.F. Ce qui ne présume pas for cément de la suite car “les forêts ont aussi une force de résilience et d’adap tation.” Le plus connu de ces insectes - et le plus ravageur depuis plusieurs années - reste le scolyte pour les forêts de résineux, qui cause non seulement des dépérisse ments mais plus grave, des mortalités de massifs entiers. Il suffit d’aller se pro
“Une autre stratégie consiste à ne pas changer d’essence par exemple dans une forêt de hêtres, mais à faire venir du hêtre du sud de la France qui aura peut être un patrimoine génétique plus adapté aux fortes chaleurs.” On appelle cela de la “migration assistée”. Dans les forêts d’altitude, on aura désormais tendance à mélanger un peu plus les essences. La gestion forestière étant celle du temps long, les spécialistes de la question restent très modestes par rapport à l’adaptation des massifs à ces récentes évolutions climatiques et sanitaires. Les efforts qu’ils déploient aujourd’hui pour diver sifier les essences seront visibles dans plusieurs décennies. La sylviculture n’est pas une science de l’immédiat. n J.-F.H.
poir : la présence du clairon des fourmis qui est lui-même un prédateur des sco lytes. Une étude à son sujet a été com manditée par la D.R.A.A.F. L’épidémie en baisse concernant le sapin pectiné, lui aussi touché, mais par une espèce de scolyte moins agressive, est aussi une note d’espoir. “On revient à une endémie pour le sapin, c’est la bonne nouvelle de l’année” note M. Mirabel. Face à la récurrence des phénomènes climatiques et sanitaires, comment réa gissent les spécialistes de la forêt ? Par tout une série d’expérimentations qu’on appelle des “îlots d’avenir”. Ces îlots d’expérimentation réalisés par l’O.N.F. sont implantés en forêt sur de toutes petites parcelles de 0,5 à 2 hectares, avec d’autres essences que celles déjà plantées.
ou récoltées. Les attaques de ces scolytes dits typographes sont d’autant plus importantes en cas de fortes chaleurs. “Ce sont des parasites de faiblesse pour suit Mathieu Mirabel. Ils prolifèrent dès lors qu’un arbre est fragilisé.” Depuis 2022-2023, l’épidémie de scolytes s’est propagée au-delà de 1000 m d’al titude. Les dégâts en forêts n’ont jamais été aussi importants qu’en 2024, provo qués par les attaques en 2023. Les spé cialistes entrevoient un petit espoir pour cette année grâce à un automne 2024 particulièrement arrosé qui permettra sans doute aux arbres de nos massifs de retrouver de la vigueur. “S’il n’y a pas de sécheresse ou de canicule cette année, on peut espérer un déclin des phases épidémiques.” Autres lueurs d’es
mener du côté de Cha pelle-des-Bois ou de Mouthe pour se rendre compte, grandeur nature, des dégâts subis par les forêts de résineux avec dans cer taines parcelles plus de 50 % des épicéas scolytés. Depuis 2018, 20 % de la surface forestière du massif jurassien franc-comtois ont ainsi été scolytées
Tout une série d’expérimenta tions qu’on appelle des “îlots d’avenir”.
L’événement 9
ONT Des difficult raccorder à la fib C TACTEZ
tés à vous bre optique ? Z-NOUS !
Juin 2025
l O.N.F.
Un espoir d’accalmie de la crise sanitaire
“Il faut réinventer des méthodes de gestion forestière” Tous les massifs forestiers du département du Doubs sont impactés par le réchauffement climatique, ce qui remet en cause les méthodes de gestion, les techniques d’exploitation et les orientations sur le renouvellement forestier. Explications avec Jean-Luc Felder, responsable du service forêt à l’agence O.N.F. du Doubs.
egards télécoms Détection de r iFi Extension et optimisation W Raccordements complexes es bouchées Réparation de gain g
sos-fibre.fr 7 04 84 83 09 6
C omment mesurer l’impact du réchauffement climatique sur la forêt du Doubs ? Jean-Luc Felder : La forêt subit de plein fouet l’impact du réchauffement clima tique. Depuis 2018, on estime que 20 % de la surface résineuse a disparu suite aux problèmes sanitaires. Les consé quences sont très visibles dans le pay sage. Avant cette crise qui n’a plus rien d’une crise, on essayait d’avoir une ges tion planifiée s’appuyant sur des coupes sylvicoles. Cette approche n’est plus possible, c’est le sanitaire qui guide aujourd’hui l’organisation des coupes. Que peut-on dire de la situation sanitaire ? J.-L.F. : Il est utile de rappeler qu’une année forestière s’étale de septembre à juin. On a engagé les premières réflexions pour le programme de coupe 2026. Les discussions vont débuter avec les communes en rappelant le rôle de conseiller technique de l’O.N.F. qui est là pour faire des propositions. La situa tion sanitaire tend à s’améliorer par rapport à 2024. On a eu une année 2024 bien arrosée donc avec peu de stress pour les végétaux et les arbres. Les pré cipitations du printemps 2025 ont permis un bon démarrage de la végétation. Les récoltes sanitaires en épicéa sont encore au même niveau qu’en 2024. Les attaques qui touchaient initialement les peuplements d’épicéa sur les premiers plateaux affectent maintenant des mas sifs plus élevés, au-delà de 1 000 m d’al titude. C’est surtout au niveau du sapin que la situation s’améliore avec beaucoup moins de dépérissement qu’en 2024. En résineux, on était à 80 % de récoltes subies et grâce à la résistance du sapin, on est maintenant autour de 65 %. Pour déterminer les orientations de la pro chaine année forestière, on prend éga lement en compte la conjoncture éco nomique.
des attaques sanitaires. C’est très hypo thétique et les communes qui auront gardé du bois vert le valoriseront beau coup mieux en raison de sa rareté. Le réchauffement climatique bouleverse aussi la gestion forestière ? J.-L.F. : 60 à 70 % des plans de gestion forestière établis sur 20 ans sont devenus caducs. Il faut réinventer des méthodes en définissant des plans de gestion réno vés plus flexibles reposant sur la vul nérabilité. Cette notion prend en compte le sol, l’âge des peuplements et les essences. Le croisement de ces trois para mètres permet d’obtenir un indice de vulnérabilité qui va déterminer la gestion et les aménagements. J.-L.F. : L’office privilégie la régénération naturelle en favorisant la diversité et si cela ne fonctionne pas, il est possible de faire des plantations d’essences plus résistantes à la sécheresse. Il peut s'agir d’essences locales comme le chêne qu’on trouve aussi naturellement sur le Haut Doubs. J.-L.F. : Oui bien sûr. On a constaté de gros dépérissements de hêtre entre 2019 et 2021 sur le faisceau de Besançon et Baume-les-Dames. Au point qu’au jourd’hui, l’enjeu pour certaines com munes c’est de maintenir un état boisé, une ambiance forestière. Cette année, le hêtre va mieux. Les chênes qu’on pen sait épargnés souffrent également par endroits. Pratiquement toutes les essences feuillues comme le frêne, le charme ont été touchées ou le sont encore. Que préconise l’O.N.F. en matière de renouvel lement forestier ? Les forêts feuillues en zone basse subissent elles l’impact du réchauffement ?
Comment se porte le marché du bois ? J.-L.F. : C’est assez encourageant. Les scieries ont de l’activité. Il y a une forte demande de bois. Des grosses scieries à l’extérieur de la Franche-Comté recher chent aussi de l’épicéa jurassien. Le marché du bois-énergie s’envole. Ce qui suscite des inquiétudes sur la ressource. Grâce à l’évolution des paramètres sani taires et économiques, on devrait pouvoir desserrer l’étau de 30 % de récolte de bois vert résineux négocié avec les com munes forestières en 2024. Il est impor tant de dire qu’on se garde toujours une marge sur ce taux qui peut varier en fonction de la demande sur certains pro duits. Sur l’année 2024, on était finale ment plus proche de 50 %. J.-L.F. : Les communes forestières et l’O.N.F. ont décidé en 2020 la mise en place de ce dispositif consistant à réduire l’exploitation des bois verts pour favoriser la vente des bois secs. C’est un choix politique, stratégique et de solidarité de filière. On s’est basé sur les références des coupes avant crise. Chaque année, on évalue l’état sanitaire de la forêt et la conjoncture économique pour fixer ce pourcentage qui était de 30 % l’an dernier. Ce qui signifie que les communes pou vaient couper 30 % de la référence de coupe de bois vert résineux en place avant 2018. Toutes les communes ne jouent pas forcément cette carte de la solidarité ? J.-L.F. : En effet, car cela relève d’une démarche volontaire où rien n’est imposé. Au départ, les communes du haut étaient peu impactées et aujourd’hui la situation s’est inversée. La crise s’est banalisée. Certaines communes préfèrent couper du bois vert avant qu’il ne soit victime Depuis quand fonctionne ce mécanisme de régu lation ?
Depuis 2018, 20 % de la surface résineuse du Doubs a disparu suite aux
problèmes sanitaires (photo
Agence O.N.F. de Pontarlier).
pour favoriser un renouvellement en essences plus adaptées. C’est une tout autre approche ! J.-L.F. : On est face à un changement de paradigme complet. On s’engage vers une nouvelle sylviculture en mosaïque, très diversifiée. Le dépérissement soulève aussi d’autres problématiques. La fragilité des arbres remet en question l’accès au milieu forestier, la sécurisation des usa gers, des bords de route, des lignes élec triques… Les conditions d’exploitation sont également en pleine évolution avec le souci, par exemple, de limiter le tas sement du sol pour protéger leur réserve en eau. Sur une parcelle, on concentre la sortie des bois sur un ou deux chemins de vidange. On évite de sortir des bois quand les sols sont gorgés d’eau. n Propos recueillis par F.C.
impactées que les communes du haut à domi nante résineuse ? J.-L.F. : En forêt feuillue, on est sur un rendement de 100 euros par hectare contre 400 euros par hectare en forêt résineuse avant la crise. La dépendance est forcément moins importante dans ces communes qui ont appris à fonction ner sans la forêt alors que les recettes forestières dans les communes résineuses suffisaient parfois à financer les inves tissements. J.-L.F. : On proposera aux communes de reprendre la sylviculture sur les zones les moins vulnérables. Sur les parcelles les plus sensibles au réchauffement cli matique, on décapitalisera les peuple ments concernés de façon progressive Comment va s’organiser l’aménagement fores tier ?
Pourquoi les communes du bas semblent moins
ANS LE DOUBS TS PUBLIQUES D LTES DE BOIS EN FORÊ ORIQUE DES RÉC HIST OL
) 3 (M
Répar
tition Feuillus/résineu
oupe ux pa famille de c résineu Feuillus/r r f
800 000
700 000
600 000
500 000
Feuillus erts Bois v Résineux erts Bois v Feuillus es Sanitair Résineux es anitair S
400 000
300 000
200 000
100 000
0
“Il faut réinventer des méthodes en définissant des plans de gestion rénovés, plus flexibles reposant sur la vulnérabilité”, explique Jean-Luc Felder, responsable du service forêt à l’O.N.F. du Doubs.
2017
2018
2019
2020
2021
2022
2023
2024
10 L’événement
Juin 2025
l Besançon Un an après la tempête La forêt de Chailluz fait sa mue La Ville de Besançon, une des plus boisées de France, est propriétaire de 2 200 hectares de forêt, dont 1 700 rien que pour la forêt de Chailluz qui doit allier sa vocation forestière celle de lieu de promenade préféré des Bisontins.
Après la tempête de
juillet dernier, il a fallu plus de six mois pour dégager et exploiter les près de 7 000m 3 de bois tombés. Et ce travail n’est pas terminé (photo Ville de Besançon).
L es services de la Ville ont encore en mémoire ce 20 juillet dernier où des rafales de vent à plus de 100 km/h avaient balayé la forêt de Chailluz et décimé quelque 6900 m 3 de bois, tombés à terre en quelques minutes. Fermée entièrement jusqu’au 31 juillet, puis rouverte par tiellement ensuite et totalement depuis le 10 février dernier après des mois de travaux de dégagement et d’exploitation des bois tombés, la forêt des Bisontins continue à panser ses plaies. Entre 1 500 et 2 000 arbres avaient subi les foudres du vent. Cette tempête n’est hélas pas la seule assaillante pour la forêt de Chailluz qui subit, comme tous les massifs fores tiers de la région, les agressions du cli mat et des parasites comme la chalarose du frêne présente depuis 2019. “Et la série de sécheresses subies en 2020, 2021 et 2022 a provoqué de gros dépé rissements sur le hêtre. Le scolyte de l’épicéa touche aussi les parties de la forêt plantée en résineux. Tous ces évé nements combinés font que la forêt de Chailluz souffre beaucoup” résume Samuel Lelièvre, directeur de la bio
diversité et des espaces verts à la Ville de Besançon. Le défi de la Ville, associée à l’O.N.F. à qui elle a délégué la gestion de sa forêt communale, est donc de “chercher à trouver les meilleures solu tions possible pour que dans un siècle nos choix d’aujourd’hui s’avèrent les bons.” Plusieurs actions ont été engagées pour tenter de maintenir en état la forêt de Chailluz. D’abord la création de ce que les spécialistes appellent des “îlots de sénescence” où on laisse la nature faire
plus en plus pointilleuse, la forêt de Chailluz “restera toujours accessible aux Bisontins” promet la Ville. Les ser vices travaillent actuellement sur un nouveau plan d’accès de Chailluz pour le public. “On va revoir les parkings, les panneaux d’information et les modes de circulation pour continuer à assurer une fréquentation de cette forêt dans les meilleures conditions. Et avec l’O.N.F., on commence à travailler pour mettre en place des dispositifs d’infor mation beaucoup plus réactifs à des tination des usagers en cas d’événements imprévus” annonce le service des espaces verts qui affirme que la forêt de Chailluz restera bel et bien celle des Bisontins. n J.-F.H.
de bois. Avec les quantités industrielles de bois que Besançon a dû exploiter après la tempête de juillet dernier, et un marché du bois actuellement très porteur, les ventes ont permis à la Ville de Besançon d’encaisser 450 000 euros bruts de recettes. Cette manne est très variable d’une année sur l’autre. En 2023-2024, les conditions climatiques défavorables n’avaient permis de faire que 371000 euros de recettes alors que la Ville en espérait 500000. “La plupart des recettes du budget forêt sont réinvesties dans les replantations” observe le responsable. L’autre vocation de cette forêt commu nale située à la lisière de la forêt est donc le loisir. Bien que soumise aux aléas climatiques et à une gestion de
enrésinés. 200 hectares de Chailluz étaient jusqu’ici plantés en résineux. Très sujettes au dépérissement à cause des attaques de scolytes, ces parcelles sont peu à peu remplacées par d’autres essences. Dont certaines qu’on trouve habituellement à la latitude de la région lyonnaise. “On passe ainsi du chêne pédonculé, courant ici, au chêne sessile. On passera progressivement également au chêne pubescent. L’idée est également de mixer les essences. La diversité géné tique est sans doute la bonne conduite pour résister à une pathologie” ajoute M. Lelièvre. Derrière cette gestion qui devient de plus en plus méticuleuse, il s’agit aussi pour Besançon d’assurer l’autre voca tion de cette forêt de Chailluz : la vente
son œuvre, sans plus d’in tervention humaine, afin de renforcer les trames de vieux bois, de gros bois et de bois mort et ainsi créer de nouveaux puits de car bone. “Ces îlots s’étalent désormais sur 188 hec tares, soit 18 % de la sur face de Chailluz” indique Catherine Lehoux, cheffe du service forêt et boise ment urbain à la Ville. La deuxième action enga gée à Chailluz est la trans formation des secteurs
On plante désormais des essences de la latitude de Lyon.
l Collectivités 107 communes ont subi des pertes de recettes Les communes forestières très attentives au maintien des aides de l’État
L’aisance qui caractérisait les communes forestières a sérieusement pâli au fil des crises sanitaires, remettant en cause le modèle de gestion financière de ces collectivités. Difficile de se projeter sereinement dans l’avenir.
Zoom Des travaux d’exploitation loin de faire l’unanimité A vec l’urgence de cou per assez rapidement de gros volumes de bois scolytés, les conditions d’exploitation et leur impact paysager ont beaucoup évo lué. “On a bien conscience que cela perturbe les usagers de la forêt. Les gens se plai gnent des coupes rases, de l’état des chemins… Il y a tout un travail de communi cation à engager sur cette problématique de l’accepta bilité de l’exploitation fores tière. Il faut aussi penser aux entreprises de travaux fores tiers qui souffrent aussi” , tem porise Dominique Maillot. n
“L e contexte de crise sanitaire se bana lise depuis 2018. Dans ces circons tances, on a une incertitude très forte sur l’avenir, ce qui rend dif ficile les prises de décision” , indique Dominique Maillot, vice président délégué de l’association des communes forestières du Doubs. Le temps des concessions et des paradoxes. En 2021-2022 pour sauver l’O.N.F. de la banqueroute, l’État annonce ses intentions de deman der des contributions supplé mentaires aux communes fores tières. Le montant de cette participation s’élevait à 7,5 mil lions d’euros en 2023 puis à 10 millions d’euros pour 2024 2025. “On s’est opposé à cette requête. Il nous a alors été proposé de contractualiser les mises en marché de bois publics à hauteur de 35 %. On a respecté cet enga gement.” Face à l’ampleur des volumes de
Les communes forestières n’ont pas manqué d’alerter les pouvoirs publics qui leur ont accordé une dotation de soutien d’1 million d’euros en 2022 avant d’être por tée à 2 millions en 2024 puis reconduite au même niveau en 2025. Dans le Doubs, 21 com munes ont bénéficié de ce dispo sitif pour un montant global de 150 000 euros. “La Direction Régionale des Finances Publiques a mis en place en 2021 ou 2022 un observatoire de la dépendance des communes aux recettes fores tières.” Comment évolue cette dépen dance dans le Doubs ? “Je ne le sais pas. La centaine de com munes dépendantes ne sont pas toutes en difficulté mais leur capa cité d’autofinancement est indu bitablement affectée. On aimerait que cette dotation de 2 millions d’euros soit maintenue.” La seconde revendication concerne les aides de l’État au renouvellement forestier accordé
bois scolytés, décision a été prise de réduire l’état d’assiette des communes de 30 % à 50 %. “On a diminué la mise en marché des bois verts pour permettre l’écou lement des bois scolytés. Cette stratégie avait un double objectif : éviter l’effondrement du marché et rester en adéquation avec les capacités de sciage des scieries locales. Malgré tout, face à l’am pleur de la crise, une partie des volumes a dû être exportée ailleurs en France voire à l’étranger.” Les efforts demandés ne sont pas anodins, sachant qu’une com mune sur cinq dans le Doubs dépend des recettes forestières. “On parle de dépendance quand le revenu forestier représente plus de 22 % des recettes réelles de fonctionnement. Le maintien d’un certain équilibre impose parfois aux communes d’appliquer des solutions pas très populaires” , précise Dominique Maillot en faisant référence aux augmen tations d’impôts.
“On doit maintenant privilégier un avenir incertain avec beaucoup d’humilité par rapport aux choix de renouvelle ment forestier qui seront faits”, estime Dominique Maillot, vice-président délégué de l’association des communes forestières du Doubs.
pliquée à mettre en œuvre. On demande aux communes de jouer cette carte de la solidarité depuis bientôt 6 ans. Je pense qu’on n’a pas trop à se plaindre de l’enga gement des communes. Globale ment, ça fonctionne. Aujourd’hui mieux vaut être une commune qui aide car cela signifie qu’elle a encore du potentiel forestier. Quand on gérait la forêt avec ces crises sanitaires, on était dans un domaine de certitude. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Quelles que soient les décisions prises, il est impossible de savoir si la forêt sera toujours aussi resplendis sante dans 40 à 50 ans.” n F.C.
dans le cadre de France 2030, dispositif remplacé par France Nature Verte. “Ce soutien repré sentait un montant de 150 mil lions par an. Là aussi, nous demandons que cette dotation reste identique jusqu’en 2030. Tout le monde est bien conscient que ces aides sont insuffisantes pour couvrir les pertes de recettes.” Estimant que toutes les com munes ne jouaient pas l’effort de solidarité au même niveau, l’État a suggéré de mutualiser les recettes avec des clefs de répar tition. De quoi rendre sceptique Dominique Maillot. “Sur le papier, c’est une idée novatrice sauf qu’elle me semble très com
Made with FlippingBook Learn more on our blog