La Presse Bisontine 270 - Décembre 2024

12 Besançon

La Presse Bisontine n°270 - Décembre 2024

PROJET URBAIN DES VAÎTES

Acte II

La régularisation à l’amiable des jardiniers “illégaux” fait grincer Bon an, mal an, la municipalité a bien l’intention de lancer la construction du quartier des Vaîtes après des années d’attente, de recours, et d’opposition. Parmi de nombreux points avancés, celui de la régularisation à l’amiable des jardiniers occupant les terrains de Territoire 25 fait grincer des dents.

C’ est entourée de nombreux adjoints et conseillers muni cipaux délégués (Pascale Billerey, Marie Zéhaf, Aurélien Laroppe, Élise Aebischer et Christophe Lime) qu’Anne Vignot a marqué le départ, pourtant plusieurs fois avorté, du projet des Vaîtes, acte II. Une manière d’appuyer l’importance de ce projet urbain fortement décrié et l’urgence de démarrer rapidement. “Le 11 avril 2024, le tribunal admi nistratif a rejeté les recours, attaque d’emblée la maire éco logiste. Nous avons perdu deux ans pour le logement, le quartier et la future école Tristan-Ber nard. C’est devenu une urgence d’avancer rapidement.” Si, sur le papier, rien n’est nou veau à l’horizon 2024 pour les

Depuis 20 ans, l’aménagement du quartier des Vaîtes a connu des remous. Zoom 600 logements d’ici 2038 S’appuyant sur des données de 2021 - l’analyse du Groupe d’experts pour l’environnement et le climat de 2021 et le résultat de la convention citoyenne - la municipalité avait revisité la même année le projet des Vaîtes. Ce dernier reste le même en 2024. Un nombre de loge ments limités passant des 1 150 logements prévus initialement à 600 sur 23 hectares afin “de préserver un environnement naturel.” Ils devraient voir le jour d’ici 2038. “Le Plan local de l’habitat montre un besoin immédiat de rénovation et de construction” , croit bon de préciser Anne Vignot. 30 % seront dédiés aux logements sociaux, 15 % en accession abordable et 55 % en accession libre. La construc tion se démarquera par ses qualités écologiques. Christophe Lime n’a pas manqué de souligner la grande satisfaction des communistes sur ce projet. “Le beau est pour tous, c’est vraiment notre marqueur d’une collectivité de gauche. Je suis le seul à avoir connu en 2001 l’opération qui commençait. À l’époque, on avait déjà expliqué aux parents qu’on n’allait pas refaire l’école car il y aurait une nouvelle école avec un nouveau quartier.” La future école Tristan-Bernard qui remplacera l’actuelle devrait ouvrir à la rentrée 2028 avec 5 classes de maternelle et 5 d’élémentaire et deux classes d’inclusion (U.E.E. I.M.E.). Un restaurant scolaire et une salle poly valente s’ajouteront. Par ailleurs, la fréquence des trams sera améliorée dès l’année prochaine, a annoncé Marie Zéhaf, offrant au quartier une desserte de qualité. Enfin, la Ville souhaite “sanctuariser” l'espace naturel urbain et “diversifier les vocations et les usages du lieu.” En l’espèce, avec notamment un espace de préservation naturelle floristique et fau nistique, un espace naturel accessible au public pour des activités de détente et pédagogiques, un espace productif potager en gestion partagée et un espace productif maraîcher sous statut professionnel. Sur les 23 hectares de la Z.A.C., l’espace naturel urbain s’étend sur 16,8 hectares avec 15,3 hectares de terrains à l’état naturel ou de friches semi-naturelles, et 1,5 hectare de jardins potagers informels. 4,2 hectares seront bâtis et 1,6 hectare dédiés à la voirie et aux stationnements. n

faut faire une place aux futurs résidents du quartier.” La muni cipalité propose ainsi aux occu pants actuels un droit d’occu pation du domaine public. “Certains se sont approprié illé galement ces terrains de Terri toire 25” , poursuit Anne Vignot. Plusieurs hypothèses de régu larisation sont évoquées comme l’attribution d’une parcelle indi viduelle de 100 m 2 au maximum pour 5 ans reconductibles taci tement, ou l’intégration d’un jardin partagé associatif, ou encore la conversion en activité professionnelle maraîchère régu lière. En cas de refus, la mairie hausse le ton : “L’exploitant ne pourra pas prétendre se maintenir sur le site et encourt à terme une expulsion.” Elle souhaite mener cette démarche de régularisation d’ici la fin 2024. Cette proposition de régulari sation à l’amiable n’a pas man qué de faire réagir l’association Jardins des Vaîtes. Les co-pré sidentes Claire Arnoux et Marie Hélène Parreaux ont convoqué une conférence de presse après avoir été sollicitées par les médias qui les invitaient à réagir aux propositions de la mairie. Elles dénoncent une honte et un mépris des jardiniers et un coup de communication. Vingt ans après la première déli bération concernant l’aména gement des Vaîtes, la poursuite (ou pas) du projet d’écoquartier ne s’annonce toujours pas dans un climat d’apaisement et de consensus. n L.P.

muniqué. Deuxième point, une volonté de démarche de participation citoyenne la plus active. À l’issue de ce dialogue avec Bisontins et Grand-Bisontins, “une sorte de plan guide issu de ces ren contres sera soumis au conseil municipal”, souligne Anne Vignot. Une réunion de lance ment de ces rencontres est pro grammée le 11 décembre. Dès janvier, des temps de rencontres sont organisés pour permettre des réflexions collectives autour de différents aspects du projet. Enfin troisième point, qui risque de faire souffler un vent de contestation et faire d’ores et déjà grincer les dents de l’asso ciation Jardin des Vaîtes (voir ci-dessous), le processus de régu lation à l’amiable des occupants du potager. “Reconnaissant à la fois la valeur écologique de l’es pace naturel urbain des Vaîtes et la tradition maraîchère et potagère qui caractérise le site depuis des décennies, la Ville de Besançon souhaite trouver une issue positive à l’occupation infor melle du site qui s’oppose aujourd’hui partiellement à la réalisation du projet” , poursuit, diplomate, la mairie dans son communiqué. “C’est une marque d’apaisement, confirme la maire. Cela confirme que l’activité pota gère est une activité bienvenue aux Vaîtes mais pas de manière sauvage et illicite. La culture potagère est maintenue mais sous une gestion collective et transparente, un unique mode de gestion mutualisée confiée à une association spécifique. Il

Vaîtes (voir ci-contre), plusieurs points dans l’élaboration du pro jet sont mis en évidence. Le pro cessus d’élaboration du projet est mené par l’agence Ville ouverte qui regroupe des concep teurs multidisciplinaires (pay sagistes, urbanistes, architectes, écologues, sociologues). Le travail de ce groupement de maîtrise d’œuvre s’inscrit “dans la suite des réflexions menées par la convention

Une urgence d’avancer

citoyenne et aura pour objectif de les intégrer et les approfondir pour aboutir à la réali sation d’un projet urbain sobre et res pectueux du site” , précise la munici palité dans un com

Anne Vignot a lancé le 5 novembre dernier le top départ de l’acte 2 du projet des Vaîtes.

Trois questions à… Claire Arnoux “C’est honteux ce qu’ils proposent” La régularisation des jardiniers des Vaîtes proposée par la mairie ne passe pas. Claire Arnoux, co-présidente des Jardins des Vaîtes dénonce un plan social des jardiniers.

Claire Arnoux et Marie Hélène Parreaux, les deux co présidentes (photo archive L.P.B.).

L a Presse Bisontine : Quelle est votre réaction par rapport à une possible régu larisation des jardiniers ? Claire Arnoux : C’est un plan social qui vise les jardiniers. La mairie se com porte comme une boîte qui rachète des entreprises. Certains jardiniers étaient là avant que la mairie ne rachète les terrains. On les a traités de squatteurs mais certains louaient des parcelles aux anciens propriétaires, certains sont là depuis plus de 50 ans. Nous ne sommes pas des pions, c’est très violent socialement. Un jardin pour des personnes âgées, c’est de l’ordre du vital. Et 100 m 2 maximum, ce n’est pas possible. La moyenne des jardins partagés et familiaux est de 160 m 2 . À Aubervilliers, en région parisienne,

où la densité est plus forte, les jardins sont entre 300 et 400 m 2 . Là, c’est hon teux ce qu’ils proposent. Les jardins, ce sont des années d’entretien, on ne peut pas les déplacer ni compenser. Pour une mairie écologiste, c’est juste la honte. En été, certains viennent vivre dans leur jardin, 100 m 2 , c’est trop petit. Socialement, c’est l’équiva lent d’un plan social. L.P.B. : Que pensez-vous de cet acte II du projet des Vaîtes ? C.A. : Ce n’est pas un acte II. C’est le même projet que voté en 2021 mais là, ils n’avancent pas les mêmes chif fres, c’est juste de la communication. L’autre problème, ce sont les plans qu’ils présentent : en l’état actuel, ce

n’est pas un plan-masse, on est sur rien du tout. Ils proposent le classement des terres dans le P.L.U. en zone N mais ça ne veut pas dire que ce ne sera pas constructible à l’avenir (la mairie rend inconstructible par un classement en zone N un périmètre élargi au-delà du périmètre de la zone d’aménagement concertée, “étendant ainsi la préservation de l’espace naturel péri-urbain voulue par la conférence citoyenne” , N.D.L.R.). Tant que l’on n’a pas un plan-masse cadastrable avec le classement des parcelles, c’est juste de la communication. Quant à la question des logements, là aussi c’est de la com’. On a des friches artificialisées pour la rénovation de logements, la vacance est en augmen

tation constante, elle augmente plus vite que nationalement. Entre 2015 et 2021, Besançon a eu 2 521 habitants en plus contre 2 749 logements en plus. Avec ce qu’on a, on peut déjà dégager des logements. Et selon ser vicepublic.fr, Besançon n’est pas en zone tendue. Et nous considérons qu’il est préférable de réhabiliter l’école existante. L.P.B. : Avez-vous toujours espoir de voir échouer ce projet ?

C.A. : Ce projet ne verra pas le jour. 6 hectares bétonnés sur des jardins, c’est trop. On va continuer à mobiliser, on prévoit la modification du P.L.U. Le projet a été jugé illégal par trois ins titutions judiciaires différentes. S’il y a des gens dans l’illégalité aux Vaîtes, c’est la mairie, pas nous. Le projet, tel qu’ils l’ont maintenu, ils ne peuvent pas le faire. Il y a des millions d’euros à économiser, l’abandon coûte moins cher que la poursuite. n Propos recueillis par L.P.

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