La Presse Bisontine 255 - Sepetmbre 2023

L’événement 7

l Explications La “Madame routes” du Département “Nous voulons faciliter les déplacements du quotidien”

La vice-présidente du Département du Doubs Florence Rogeboz, en charge des mobilités et des infrastructures, justifie la décision prise par la collectivité et le choix des sections de routes retenues.

L a Presse Bisontine : Pourquoi avoir décidé, plusieurs mois après la Haute Saône et le Jura, de repasser une partie des routes départementales à 90 km/h ? Florence Rogeboz : D’abord parce que la loi d’orientation des mobilités nous don nait la possibilité d’avoir ce regard sur les routes départementales et ensuite, parce qu’au sein de la collectivité dépar tementale, nous avions pris un engage ment fort avec deux objectifs : faciliter les déplacements du quotidien aux habi tants de ce département, et apporter justement une homogénéisation par rap port à nos deux départements voisins qui étaient repassés aux 90 km/h, et ainsi éviter les ruptures dans les secteurs limitrophes. On avait souvent des remarques d’automobilistes des cantons frontaliers aux autres départements qui mettaient en avant l’incohérence du sys tème. Il était difficile de comprendre que d’un côté on pouvait rouler à 90 km/h et pas de l’autre. L.P.B. : Les risques en matière d’accidentologie ont-ils été bien pris en compte ? F.R. : Entre septembre 2022 et juin der nier, un travail très fin a été mené sur cette question avec les services du Dépar tement sur la base des travaux du C.E.R.E.M.A. (Centre d’études et d’ex pertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement) avec une prise en compte de l’accidentologie pour chaque section de route, sur le réseau structurant comme sur le réseau de des serte. Ce qui a motivé le fait que toutes les portions de route n’aient pas été rete

nues pour un retour à 90. Par ailleurs, avant de prendre la décision, nous avons consulté l’ensemble des 571 maires du département, près de la moitié ont répondu à nos questions et tout cela nous a permis d’identifier quels itiné raires il serait opportun de relever à 90 km/h. L.P.B. : Quel a été le résultat de ces analyses ? F.R. : Au final, 36 itinéraires ont été rete nus. Sur ces itinéraires, si on exclut les zones à 70 km/h et les zones en ville, on arrive à 788 km d’itinéraires, soit 28 % des 3 680 km composant le réseau routier départemental. Le relèvement à 90 km/h sur ces portions de route est effectif à partir du moment où les nouveaux pan neaux ont été posés. Ce qui est désormais fait partout. L.P.B. : Difficile tout de même de s’y trouver sachant que les routes nationales restent à 80 km/h… F.R. : Les routes nationales sont du ressort de l’État, il conviendrait à l’État de répondre à cette interrogation…

Florence Rogeboz est vice présidente du Département du Doubs chargée des mobilités et des infra structures.

évalué à 2 000 tonnes. Ce qui peut paraî tre beaucoup à première vue mais c’est à peine 0,15 % des émissions totales liées au trafic. Et ces 2 000 tonnes, nous nous sommes engagés à les compenser par des mesures qui seront prises dans les prochains mois. Un opérateur privé va nous accompagner pour prendre les bonnes mesures qui pourront par exem ple être du reboisement à certains endroits en lien avec l’O.N.F., ou encore d’autres aménagements favorisant la biodiversité. L.P.B. : Si l’accidentologie devait augmenter sur les portions repassées à 90 km/h, vous pourriez revenir en arrière ?

passées à 90 km/h, du marquage au sol, des balises dans les virages… Autant d’éléments complémentaires pour accom pagner ce retour des 90 km/h. L.P.B. : Qu’en est-il de l’impact de cette mesure du point de vue des émissions de gaz à effet de serre ? F.R. : Sur cette question, nous nous sommes rapprochés de l’association Atmo-B.F.C. qui a réalisé des études précises au moment où on était passé à 80 km/h. Le C.E.R.E.M.A. affirmait déjà que l’impact était faible mais nous avons voulu aller plus loin en faisant ce travail avec Atmo. Le volume sup plémentaire de gaz à effet de serre est

F.R. : Nous travaillons étroitement sur ce point avec la commission départe mentale de la sécurité routière. Nous serons très vigilants sur ce point. L.P.B. : Quel est le coût du retour des 90 km/h ? F.R. : L’installation des 1000 panneaux aura coûté 250 000 euros. Il y avait très peu de panneaux avant, parce que les 90 km/h et les 80 km/h étaient alors des mesures nationales qui s’appliquaient partout. Des panneaux n’existaient que quand on sortait d’une route à 110 km/h. D’où la nécessité cette fois d’acquérir près de 1 000 panneaux pour ces 788 km de chaussée. n Propos recueillis par J.-F.H.

“Nous serons très vigilants sur la question de l’accidentologie.”

L.P.B. : Des mesures d’ac compagnement de ce retour des 90 km/h sont censées être prises. De quoi s’agira-t-il ? F.R. : C’est par exem ple de la signalétique renforcée dans des zones sinueuses, des précisions sur la lon gueur des portions

l Politique Un manque de recul Pour l’opposition, il n’y a pas d’urgence à accélérer sur ce sujet Le groupe Doubs social écologique et solidaire s’est prononcé en majorité contre

le retour des 90 km/h sur certaines routes départementales. Pour la minorité départementale, ce sujet n’était pas prioritaire.

L a sécurité routière, et notamment le thème de la vitesse, est un sujet qui irrigue toutes les strates de la société et en crispe plus d’un. Il a fait l’objet d’intenses débats au sein du groupe minoritaire au département le Doubs social éco logique et solidaire. Sur les 12 élus qui le composent, 10 se sont prononcés contre le relèvement de la vitesse à 90 km/h sur cer taines routes départementales, un s’est abstenu et un a voté pour. “C’est une question très conflic tuelle, remarque Raphaël Krucien. Mais franchement, ce n’était pas urgent. Ce n’était pas un sujet prioritaire, il n’y avait pas nécessité d'accélérer sur cette question. Et c’est beaucoup d’argent public, plus de 220000 euros.” Ce qui chiffonne l’élu ? Le manque de recul depuis l’instauration des

la majorité n’avait pas été réceptive. Mais elle les a quand même inté grés par la suite, ce qui est pour nous une satisfaction” , souligne l’élu. Ce dernier a en revanche eu la mauvaise surprise de perdre son siège au sein de la commission départementale de la sécurité rou tière en tant que membre de la minorité. “J’ai appris ça par sur prise un mois avant l’été. C’est une chose qui m’a déplu, j’aurais aimé être autour de la table avec tous les acteurs de la sécurité routière.” Pour autant, le groupe Doubs social écologique et solidaire se rassure à la suite des propos de Christine Bouquin. Celle-ci a assuré que si le département fai sait face à une vague d’accidents sur les portions relevées à 90 km/h, elle ne s’interdirait pas de réduire à nouveau la vitesse. n L.P.

80km/h. “Nous avons seulement trois années, donc deux de Covid qui faussent un peu les chiffres de la sécurité routière. Cela ne nous laisse pas le temps d’observer les bienfaits de la mesure des 80km/h.” Pour rappel, l’instau ration des 80 km/h se basait sur des études démontrant qu’à 90 km/h, les dégâts étaient plus graves lors d’accidents. “Et puis, vu les conditions environnemen

tales, relever la vitesse est la cerise sur le gâteau” , constate amèrement Raphaël Krucien. Pour autant, la mino rité et la majorité ont failli tomber d’accord au début des discus sions. “Nous avons demandé des com pensations carbone,

La mauvaise surprise de perdre son siège.

Raphaël Krucien, chef de file du groupe Doubs social écologique et solidaire au Département, regrette le manque de recul pour analyser les bienfaits des 80 km/h.

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