La Presse Bisontine 251 - Mai 2023

22 Le dossier

La Presse Bisontine n°251 - Mai 2023

l Syndicat intercommunal des eaux de la Haute-Loue Tarifs de l’eau

“Jusqu’où peut-on aller pour un prix acceptable de l’eau ?” Le syndicat intercommunal des eaux de la Haute-Loue (S.I.E.H.L.) n’a pas attendu les annonces d’Emmanuel Macron dans son plan Eau pour travailler sur la tarification du prix de l’eau. Philippe Bouquet, président du syndicat, Marie-Christine Robert, vice-présidente et Matthieu Caprani, technicien, éclairent les méandres - politiques, administratifs et techniques - de la production et de la distribution d’eau.

L a Presse Bisontine : Dans son plan Eau, Emmanuel Macron a insisté sur une tarification progressive de l’eau. Quel est votre avis ? Philippe Bouquet : À ce stade, nous sommes un peu réservés sur ce sujet. Les tarifs de Gaz et Eaux pour les abonnés du S.I.E.H.L. se découpent en trois tranches, les tarifs devenant plus intéressants pour les gros consommateurs. Depuis trois-quatre ans, nous sommes engagés pour qu’il ne reste plus qu’une tranche en 2025. Il faut rester attentifs à la façon de rendre disponible la ressource pour les gros consommateurs. On peut imaginer des périodes où on pourrait être incitatif, un tarif qui augmente en période de grosses consommations, à l’image des heures creuses-pleines pour l’électricité. Mais cela nécessiterait des compteurs télé-relevés.

L.P.B. : En 2023, 4 millions d’euros en investis sement sont budgétés. Sur quoi portent ces investissements ? Matthieu Caprani : Notre réseau compte 920 km de canalisations, la moitié pour les réseaux de distribution, l’autre pour les réseaux d’adduction, et 88 réservoirs. On renouvelle 1 % de notre réseau par an, soit 10 km. En 2021, le réseau avait un rendement de 75 %, ce qui n’est pas si mal car c’est un réseau plutôt rural. On travaille aussi sur les fuites et le rendement, la connaissance du patri moine, le renforcement des pompages, et sur de nouveaux ouvrages. On conforte les captages actuels et on essaie de trou ver de nouvelles ressources avec des forages dans le karst profond. P.B. : Il y a la recherche de ressources nouvelles mais il faut économiser. Nous pompons environ 15 000 m 3 d’eaupar jour. L’été 2022, pour la première fois, on est monté jusqu'à 23 000 m³ par jour pour répondre aux besoins. C’est excep tionnel mais si cela devait se répéter et devenir récurrent, voire la norme, il faudrait changer les équipements, les réservoirs, les pompes, etc., et cela impac terait donc le prix de l’eau. Marie-Christine Robert : Nous avons d’ailleurs un projet pour responsabiliser les gens sur l’eau et notamment via les écoles. L.P.B. :Aujourd’hui, quel est l’état des ressources en eau du S.I.E.H.L., en qualité et en quantité ? M.C. : Nous avons six ressources propres en eau dont une source karstique à la production très aléatoire, ça peut aller de 10 000m 3 par jour au printemps à 400m 3 en été. Nous avons également deux puits à Lods et un champ captant

Philippe Bouquet, président du syndicat, Matthieu Caprani, technicien

etMarie Christine

Robert, vice présidente.

à Montgesoye. Aujourd’hui, nous pompons en moyenne 15 000 m 3 par jour. Les nappes phréatiques sont dans des moyennes plutôt basses par rapport aux années précédentes. Mais

800 mètres d’altitude, cela coûte 700 000 euros par an d’énergie, princi palement de l’électricité. Au 1 er octobre 2022, la part du délégataire (Gaz et Eaux, qui a obtenu la Délégation de service public jusqu’en 2027, N.D.L.R.) a augmenté de 8 %. Il faut savoir que les investissements sont liés au prix de l’eau, à savoir 2,76 euros le m 3 (pour une consommation annuelle de 120 m 3 ). Le schéma directeur a estimé à 60 mil lions d’euros sur 15 ans les investisse ments pour répondre aux besoins indis pensables. Il faut pouvoir assumer ces 60 millions. Un débat est en cours entre les élus du S.I.E.H.L. pour déterminer jusqu’où aller pour un prix acceptable. n Propos recueillis par L.P.

prendre sa part dans le fonctionnement. Leprixdum 3 sur le plateau des Combes est à 3,66 euros, soit 1 euro de plus qu’au S.I.E.H.L. Ainsi, le plateau des Combes peut financer l’interconnexion sur ses réserves financières et un emprunt. Ce dernier sera transféré au S.I.E.H.L. mais assuré grâce aux abon nés et à la vente d’eau. L’objectif n’est pas de faire des dividendes mais d’être autonomes en matière d’eau. Néan moins, il faut savoir que remonter l’eau depuis la source vers Les Combes va nécessiter beaucoup d’énergie. L.P.B. : Justement, l’inflation du coût énergétique va-t-elle se répercuter sur le prix de l’eau ? P.B. : Pour faire remonter l’eau de 300 à elle décide de quitter le syndicat des eaux de la Haute-Loue et d’assurer direc tement la production et la distribution de l’eau potable. 16 communes quittent alors le S.I.E.H.L. Si ce dernier continue d’alimenter ces communes à hauteur d’1,4 million de m3 par an, pour Philippe Bouquet, une question de fond se pose : “On revient à un périmètre beaucoup plus rural, et les coûts ne sont plus les mêmes. En 2027, se posera la question de la renégociation du contrat de la délé gation de service public (D.S.P.). Deux communes sur 16 avaient souhaité rester au S.I.E.H.L. mais G.B.M. a fixé un prix

“60 millions d’euros d’investissement sur 15 ans.”

les épisodes pluvieux de mars et avril ont permis de remonter le niveau. Nous allons modifier aussi le traitement de l’eau potable et utiliser le chlore gazeux au lieu du dioxyde de chlore. Ce dernier générait des résidus de traitement. P.B. : C’est un traitement pour le trans port et la circulation dans les tuyaux, en prévention, car elle est stockée dedans une journée. Mais les ressources que nous captons sont naturellement très bonnes. L.P.B. : En janvier, Ouvans et Landresse sont devenues adhérentes au S.I.E.H.L. qui compte désormais 74 communes. Et Fournets-Luisans, Fuans et Les Combes ont demandé à leur tour d’entrer au S.I.E.H.L. en 2025. Arc-sous-Cicon a entamé les démarches d’adhésion. Quel est l’impact de ces nouveaux arrivants sur la res source en eau ? P.B. : Depuis 2017-2018, les élus du pla teau des Combes s’interrogent sur les difficultés de la ressource en eau. Pour alimenter leurs réservoirs, il faut parfois des camions-citernes, notamment en période de sécheresse. Donc ils trouvent un intérêt à s’interconnecter à notre réseau. Nous avons vocation à être soli daires mais nous déterminons les condi tions pour que les communes puissent adhérer. Aujourd’hui, ce n’est pas possible d’accueillir une commune qui n’a pas fait d’investissement. Chacune doit

Grand Besançon Métropole et le S.I.E.H.L., une solidarité qui n’est plus E n 2018, Grand Besançon Métropole prend la compétence eau au niveau de son intercommunalité. En 2019, de l’eau beaucoup plus bas. La solidarité urbain-rural a pris un coup, la solidarité n’existe pas” , regrette le président du S.I.E.H.L.

Afin de détecter de nouvelles ressources, des travauxde prospection en karst profond sont actuellement à l’œuvre.

Pour 2027, le syndicat étudie plusieurs options : soit la D.S.P. comme actuelle ment, soit une régie, soit encore une S.E.M.O.P., une société d’économie mixte d’opérations ponctuelles. En attendant, il réunit en juin les E.P.C.I. tels que les communautés de communes en vue de 2026 et la prise de la compé tence en eau de ces intercommunalités au détriment des communes, ainsi que le prévoit la loi N.O.T.R.E. Au niveau du S.I.E.H.L., ce seront donc les commu nautés de communes qui deviendront les abonnés. n

L’interconnexion de Landresse a u S.I.E.H.L. sera

inaugurée le 25mai.

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