La Presse Bisontine 237 - Mars 2022
L’interview du mois 5
La Presse Bisontine n°237 - Mars 2022
l’obstaclemajeur : ces femmes sont terrifiées et sont convaincues qu’elles auront plus d’in convénients à engager une procédure judi ciaire qu’à ne rien faire. Elles refusent notre aide. L.P.B. : N’est-ce pas décourageant ? D.F. : C’est désolant parce qu’il existe une limite : la liberté individuelle.Vous ne pouvez pas forcer quelqu’un à porter plainte ou débarquer chez lui parce qu’il a évoqué de la violence.D’ailleurs, de nombreuses victimes reviennent sur leurs déclarations. L.P.B. : Vous semblez démunis ! D.F. : Les enfants peuvent être repérés comme des victimes. Ils peuvent être ainsi signalés par l’école ou ils peuvent eux-mêmes dénoncer les actes de violence. C’est tout de même assez rare car l’auteur des faits tient en silence la famille. Souvent, dans une fratrie, l’aîné prend d’ailleurs le parti du père et c’est lui qui va faire taire les autres enfants et faire respecter la loi du silence. L.P.B. : Pour briser cette loi du silence, quel message délivrez-vous ? D.F. : Si unemère ne veut pas faire la démarche pour elle, qu’elle le fasse pour ses enfants bien que ce message ait ses limites. France victimes a mis en place un site Internet (mémodevie) qui permet aux femmes d’ar chiver des preuves en vue d’une procédure comme une attestation médicale ou des témoignages qui l’aideront par la suite. Dés ormais les enfants sont considérés comme victimes à part entière de ces violences et non plus simples témoins. L.P.B. : Depuis 2019, des téléphones graves dangers et des bracelets anti-rapprochement sont déployés à Besançon. Sont-ils efficaces ?
D.F. : Ils ont permis à des femmes de reprendre confiance. Ils ont sauvé des vies. Il y a 14 téléphones graves dangers en service, dont 12 qui sont attribués pour le ressort du tri bunal de Besançon. Il y a 4 bracelets anti rapprochement, tous utilisés. L’auteur est prévenu s’il se rapproche géographiquement du domicile ainsi que la victime. Ce dispositif est àmon sens plus efficace que le téléphone grave danger. Si ce téléphone rassure la vic time, il ne la protège pas si l’auteur la sur prend et qu’elle n’a pas le temps de saisir le téléphone. Nous avons l’exemple de cette femme tuée par son mari en pleine rue à Besançon en 2018. L.P.B. : Votre métier de médecin vous conduit à ren contrer ces personnes violentées. Quel est le profil d’une victime ? D.F. : Ce sont souvent des femmes qui ont vécu un passé difficile, dès leur jeunesse, où elles ont été violentées voire violées par un père, un grand-père, un oncle… Elles sont vulnérables et choisissent un conjoint vul nérable en pensant qu’elles vont se “sauver”. Dans cette alliance improbable, c’est souvent
D.F. : Cela a permis de libérer la parole. Je note d’autres avancées. Un exemple : lorsqu’une femme est battue, ce n’est par exemple plus à elle de quitter le domicile familial en pleine nuit, parfois avec ses enfants, mais à son mari à qui l’association Altérité àBesançon propose un hébergement. Pour les enfants, des régions ont mis en place des protocoles pour les mettre à l’abri et sur tout qu’ils ne soient pas confiés au conjoint auteur du féminicide. L.P.B. : Qu’un père meurtrier puisse récupérer ses enfants paraît inconcevable ! D.F. : Jusqu’àmaintenant, l’autorité parentale n’était pas si claire puisqu’un père pouvait - après incarcération - demander un droit de visite bien que ses enfants soient protégés ou placés. Un projet de loi doit donner la possibilité de déchoir du droit parental un conjoint survivant d’un féminicide. L.P.B. : Un travail est-il réalisé avec les auteurs de ces féminicides ? D.F. : Oui, les auteurs ne sont pas laissés pour compte. Qu’ils soient condamnés pour les faits qu’ils ont commis, c’est normal. La nou veauté réside dans le fait que des obligations de soins leur sont proposées par l’intermé diaire de l’association Altérité qui travaille en direction de ce public ainsi que France victimes. Dans le cadre d’une alternative aux poursuites, ces auteurs paient une somme et sont tenus de participer à plusieurs séances pour parler des actes qu’ils ont commis… Ce travail est animé par une psychologue. Si je défends les victimes, je pense qu’il faut malgré tout aller chercher l’humanité des auteurs de violence. On ne peut pas les dia boliser complètement au risque de les condamner à récidiver avec le conjoint sui vant.Car cela se répète encore trop souvent ! n Propos recueillis par E.Ch.
la violence qui se déclenche. Si ce phénomène touche tous les milieux sociaux, il est encore plus difficile de dénon cer un acte de violence si l’homme violent est connu. Imaginons qu’il soit élu ou maire de sa commune, la femme possède une notoriété qui freine la dénonciation ou a parfois une dépendance matérielle. L.P.B. :Médiatiser les violences faites aux femmes a-t-il permis de faire évoluer positivement les lignes ?
“Ce n’est plus à une femme battue de quitter le domicile.”
NOUV & bus
tram
EAU
89 és 824 500 7 ançon Mobilit eolis Bes ock - K t eepik - iS s : Fr to com - Pho . artner .jpm-p artner - www ©JPM P
N’i
b i une carte avec i MpOrT
e
qU anca re
022. embre 2 ept artir de s aines à p ur les lignes périurb Service disponible s
age
peut valider son voy
www.ginko.voyage
Made with FlippingBook - Online magazine maker