La Presse Bisontine 226 - Mars 2021
4 L’interview du mois
La Presse Bisontine n°226 - Mars 2021
UNIVERSITÉ
Les premiers pas de la nouvelle présidente
“La science est utilisée comme un outil de désinformation” Le quotidien de la nouvelle présidente de l’Université de Franche-Comté ? Le retour progressif des étudiants en présentiel sur les bancs de la faculté mais pas que… Macha Woronoff évoque les grands enjeux qui attendent l’U.F.C.
L a Presse Bisontine : Lors de vos vœux en ligne, vous avez appelé à une vaccination des étudiants afin qu’ils puissent reprendre les cours. Vous avez d’ailleurs écrit au Premier ministre à ce sujet qui ne vous a pas répondu. Pourquoi ? Macha Woronoff : Cette génération a vécu une année 2019-2020 très difficile et vit à nouveau en 2020-2021 une année solitaire, isolée. Personne ne peut dire à ces étudiants quand cela va se terminer. Je réfléchis en vertu du principe de “bénéfice-risque”, et au-delà du risque sanitaire, mon ana- lyse me fait dire que les étudiants ris- quent l’isolement, la perte de sens. La seule réponse est la vaccination. J’ai écrit à cet égard au Premier ministre. Ma position est personnelle. C’est une façon de démontrer que cette généra- tion représente l’avenir de notre société, que nous devons prendre soin d’elle comme nous prenons soin de nos anciens. Ce n’est pas antinomique même si effectivement nous avons un nombre de vaccins insuffisants. Je sou- haite que nos étudiants soient priori- taires ainsi que nos enseignants.
sans doute pas envie d’être vaccinés. Que répond la pharmacienne que vous êtes face aux covido-sceptiques ? M.W. : La science est utilisée comme un outil de désinformation. Je le regrette. Nous voulons lever les obs- tacles liés au complotisme, aux anti- vaccins, c’est pourquoi j’ai demandé à deux professeurs (John Dudley et Samir Jemei) de travailler sur une présentation juste des faits scienti-
questions. On parle des déplace- ments sur le campus, la possibilité depuis le 8 février d’avoir 20 % des 25 000 étudiants francs-com- tois en présentiel, la possibilité d’avoir pu proposer des examens en présentiel en décembre et jan- vier, avoir pris en compte la frac- ture numérique. Les directeurs des établissements ont réalisé un énorme travail pour organiser le retour des étudiants au moins un jour par semaine. La réouverture des restaurants universitaires fut un grand combat mené avec les autres présidents, les asso- ciations étudiantes. C’est un sou- lagement de les savoir rouverts. Nous avons maintenu durant la crise le service de bibliothèque, l’accès aux salles informatiques et nous essayons de maintenir du sport… L.P.B. : L’accès aux bibliothèques demeure compliqué, voire impossible disent des étudiants… M.W. : Effectivement, nous n’avons pas d’autre choix que de limiter les places car nous sommes tenus par les gestes barrières, mesures qui se sont renforcées avec la dis- tanciation à 2 mètres. Ce sont toutefois ces myriades d’actions qui nous permettent de renouer les liens et d’offrir une meilleure qualité de vie aux élèves. Des pro- fessionnels de santé sont acces- sibles, nous recrutons un psycho- logue qui sera à 40 % en Nord Franche-Comté, 60 %à Besançon, nous avons également mis en place des séances de dépistage Covid. Lors d’un test, 60 élèves ont été dépistés à Besançon. Tous étaient négatifs. L.P.B. : Comment toucher les étudiants et les informer ? M.W. : Tout ce que l’on met en place, c’est bien, mais si on ne les informe pas, cela ne sert à rien. Avec Anne Tatu, vice-présidente à la vie étudiante, nous avons mis
Bio express l Macha Woronoff a 61 ans l Diplômée de l’université de Franche-Comté, elle est professeure de pharmacie clinique et membre de l’unité médicale de recherche I.N.S.E.R.M.- U.F.C.-E.F.S.-1 098. l Présidente depuis novembre de l’Université de Franche-Comté, elle a remplacé Jacques Bahi. l Dans sa carrière, la Bisontine a été notamment doyenne de pharmacie de l’U.F.R.-Santé, présidente de la conférence nationale des doyens de pharmacie de France et vice-présidente du Conseil d’administration de l’Université de Franche- Comté.
en place une plate-forme d’envoi de S.M.S. à tous les étudiants. Cela fonctionne bien… même si cela coûte cher (N.D.L.R. : environ 25 000 euros). Pour l’instant, nous sommes la première univer- sité à le faire. L.P.B. : L’État a annoncé le repas à 1 euro pour tous. Le gouvernement a-t- il pris la mesure des difficultés ? M.W. : Cela me fend le cœur d’en- tendre que des étudiants vont aux Restaurants du cœur. Com- ment voulez-vous que je le vive ? Je le vis avec désespoir ! Cette annonce permet deux repas à 2 euros : c’est essentiel. L’Université qui n’est pas opérateur de res- tauration a mis en place un ser- vice de repas à Montjoux. Je remercie le C.R.O.U.S. et les asso- ciations étudiantes qui sont for- midables. L.P.B. : L’État n’a-t-il pas assez fait confiance aux universités sachant que les étudiants de B.T.S. peuvent par exem- ple se rendre en cours ? M.W. : J’aimerais que les univer- sités soient considérées comme l’avenir de la nation. Pour nous, c’est douloureux. L.P.B. : Cette gestion du quotidien vous empêche-t-elle de lancer les premiers projets de votre mandat ? M.W. : J’avais des projets sur des valeurs, sur la prévention des dis- criminations, sur la diffusion de la culture scientifique : c’est en cours. On continue à penser la réforme du bachelor universitaire de technologie (B.U.T.), la réforme des études de santé. Nous n’avons pas pris de retard.
L.P.B. : Pas de regret d’être présidente dans ce contexte ? M.W. (rires) : Aucun regret. juste la compréhension de l’immensité de la responsabilité, mais je ne suis pas seule. J’ai une équipe exceptionnelle. L.P.B. : Quelles sont vos relations avec les élus bisontins ? M.W. : L’Université a conscience de l’énorme place qu’elle a sur le territoire à Besançon comme sur le Nord Franche-Comté, à Vesoul et Lons, mais elle n’a pas à s’in- troduire dans un jeu politique, nous sommes avec des partenaires que nous remercions de leur inves- tissement pour l’Université. Les contrats métropolitains récem- ment signés nous permettent d’améliorer un patrimoine extrê- mement vieillissant (55 millions d’euros seront investis). Quand je me rends sur le campus de Dijon, je suis un peu jalouse car c’est un beau campus. Bientôt, on aura sur le Nord Franche-Comté un beau campus et ce sera la même chose à la Bouloie et au centre-ville. Dans cinq à six ans, nous aurons à Besançon un cam- pus à l’anglo-saxonne ! L.P.B. : Le projet de bibliothèque uni- versitaire à Besançon pourrait être remis en cause par la municipalité. Qu’en pen- sez-vous ? M.W. : Ce n’est pas moi qui décide. L’U.F.C. a besoin d’une biblio- thèque universitaire de lettres. L.P.B. : Justement, existe-t-il une rivalité avec Dijon ? Irez-vous dans une véritable collaboration pour établir une offre de service intégrée en enseignement supé- rieur et en recherche avec les Bourgui-
fiques pour expli- quer que la Covid n’est pas une arnaque, qu’elle est une réalité, qu’elle tue. L.P.B. : Que fait concrètement l’Uni- versité pour aider “ses” élèves à traver- ser cette crise ? M.W. : Nous avons mis en place une foire aux ques- tions (F.A.Q.) où les étudiants peu- vent trouver énor- mément de réponses à leurs
“Que les universités soient considérées comme l’avenir de la nation.”
L.P.B. : Parmi les étudiants, certains n’ont
Fédéralisme “On a passé la crise d’adolescence”
son président. Pourquoi ? Parce que des crises intestines, et un jeu de pouvoir politique entre Dijon et Besançon, ont attisé des ran- cœurs les années passées. “Nous sommes sortis de cette crise d’adolescence, nous sommes passés à l’âge adulte” assure le nouveau président. Parmi l’un des chantiers : le renouvellement de l’I-Site pour devenir une référence internationale dans trois domaines (matériaux avancés et systèmes intelligents pour la société, transition socio écologique, santé). En juin, un jury international évaluera les avancées du site bourguignon-franc-comtois. Au-delà du finan- cement important, sa pérennisation maintiendrait la région dans les catégories des sites qui comptent. n
Le président d’U.B.F.C. et son équipe sont prêts à relever les défis nationaux et internationaux. L’un d’eux arrive en juin. M ercredi 10 février, Dominique Grevey, nouveau président d’Université Bourgogne-Franche- Comté (U.B.F.C.) et sa nouvelle équipe ont présenté les enjeux pour l’enseignement supérieur et la recherche de la Bourgogne-Franche-Comté à Besançon. Pour l’Université fédérale U.B.F.C. et ses établissements fondateurs que sont l’université de Bourgogne, de Franche-Comté, l’U.T.B.M., l’E.N.S.M.M., AgroSup Dijon, B.S.B. et les Arts et Métiers, “ 2021 est l’année du renouveau” annonce
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