La Presse Bisontine 224 - Janvier 2021

LE PORTRAIT

39 La Presse Bisontine n°224 - Janvier 2021

BESANÇON

Une profession presque disparue

De globe-trotteur à globe-créateur, le parcours d’Alain Sauter Géographe de métier, ce Bisontin a décidé de se lancer dans la fabrication artisanale de globes terrestres. Ses pièces en plâtre, entièrement faites main, sont confectionnées rue du Cercle aux Chaprais. ça ne s’invente pas !

I l est l’une des rares personnes qui peut se vanter d’avoir fait plusieurs fois le tour du monde, et de le faire même chaque jour. Alain Sauter a fait des méridiens, des tropiques et des continents son quotidien, après avoir enseigné la géogra-

phique pendant six ans à l’Uni- versité Paris-1 à la Sorbonne. Une lassitude de l’urbanité parisienne et “le besoin de faire quelque chose de ses mains” l’ont amené à chan- ger de cap. Une orientation finalement assez naturelle pour cet Alsacien d’ori-

Le cercle d’amis acheteurs s’est très vite élargi autour du Bisontin, qui sauvegarde un ancien savoir-faire.

Bio express

À l’heure de Google Maps et des G.P.S., cet artisan géographe a fait le pari de l’objet de valeur qui fait rêver, au-delà de son côté utilitaire. Personnalisable à souhait (avec l’emplacement d’une île à son nom, d’une ville ou d’animaux), il propose une gamme de sept nuances de cou- leur baptisée au nom d’une des loca- lités qu’il a visitées comme Chilime, découvert lors d’un trek au Népal. La passion des voyages, insufflée par son épouse, l’a déjà mené dans plus d’une dizaine de pays. “Et il pourrait bientôt y avoir une nuance bisontine, inspirée de la pierre de Chailluz” , glisse-t-il. Unmariage avec l’horlogerie et Phi- lippe Lebru pourrait aussi faire naî- tre d’autres projets comme un pla- nétarium, pour l’heure en suspens. Il a, en attendant, un carnet de com- mandes bien rempli et diverses demandes comme ce globe en verre réalisé pour un film norvégien ou ce globe, façon XVI ème siècle, livré en juin dernier au château d’Am- boise. Une vraie fierté pour Alain Sauter, qui a joué un peu “le rôle de cosmographe du roi.” n S.G

gine, venu faire ses études à Besan- çon. “J’ai toujours eu un marteau dans les mains. On bricolait beau- coup de choses avec mes parents.” Il a ainsi fabriqué plusieurs meubles chez lui, dont le berceau de son fils durant le premier confinement. “J’aime beaucoup travailler le bois” , avoue-t-il. On retrouve d’ailleurs son côté menuisier dans la réalisa- tion des supports de ses globes. Car c’est bien lui qui les confectionne aussi. Seuls des matériaux bruts arrivent finalement dans son atelier (rouleaux de papiers, bois en pro- venance d’une scierie de Quingey… ) Ce touche-à-tout a conçu lui-même ses moules ainsi que la cartographie (régulièrement remise à jour). Non sans tâtonnement. “Il m’a fallu des mois d’expérimentation et plusieurs allers-retours à la déchetterie pour arriver à la forme souhaitée. Sachant que toute approximation, ici, est multipliée par π .” C’est après avoir vu une vidéo sur l’entreprise anglaise Bellerby, pré- sentée comme le dernier fabricant artisanal de globes au monde, que cette passion dévorante l’a gagné. “Je trouvais bête que cela ne se fasse

plus, j’ai essayé d’en faire un.” Des premiers essais en papier mâché vite aban- donnés à cause de l’humidité de sa cave, Alain Sauter est passé au plâtre en reprenant les techniques des XV ème et XVI ème siècle dont on ne trouve plus de traces nulle part. Le savoir-faire s’est perdu. Ce qui explique qu’ils ne soient plus qu’une poignée de fabricants dans le monde. Aidé depuis peu de Cécile, qu’il a employée,Alain réalise chacune des étapes : de l’association du plâtre et de la toile de jute aux fuseaux en papier collés minutieusement, jusqu’à la peinture à l’aquarelle et au vernis. Les matériaux utilisés sont d’une qualité dite “musée” pour que ses globes (de 21, 32, 50 ou 80 cm) traversent le temps. “J’ai cette image du globe un peu bijou qui renvoie au fait que la Terre est précieuse.” Personnalisable à souhait.

l 37 ans l Originaire d’Alsace, il suit des études de géographie à l’Université de Franche-Comté, rattaché au laboratoire ThéMA l Ancien maître de conférences à l’Université Paris 1 Sorbonne de 2012 à 2018, il a aussi enseigné à l’école du paysage de Versailles.

Les différentes étapes de création demandent beaucoup de minutie.

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