La Presse Bisontine 152 - Mars 2014

AGENDA 46

La Presse Bisontine n° 152 - Mars 2014

LITTÉRATURE La Grande Guerre autrement Guerre 14-18 : dans l’intimité d’une famille paysanne de Morre Professeur d’histoire-géographie, Agnès Côte donne à la première guerre mondiale un autre sens en publiant la correspondance entre Charles, envoyé au front, et sa sœur Jeanne restée à Morre pour cultiver les terres. Ce livre, alimenté par de nombreuses images souvent inédites, rétablit la vérité de “l’arrière”.

La sœur envoie une photo de Besançon… où l’on aperçoit le tram en face du pont Battant.

Chronologiquement, le lecteur suit le jeu- ne paysan de ses débuts dans l’Aisne (1914), en 1915 dans la Marne, à Verdun (1916), dans la Somme (1916), l’Oise (1918) et enfin la Moselle (1919). Sa sœur, peut-être pour lui remonter le moral, n’oublie pas de lui donner des nou- velles de la famille ou de la ferme. Elle lui glisse des images de Morre ou de Besan- çon. Superbe photo que ce pont Battant… avec un tram en fonction, la passerelle des Prés-de-Vaux à Besançon, près de la por- te taillée. “Ce livre est aussi un moyen de réhabiliter ce qui se passait à l’arrière. On voit que Jeanne gérait la ferme” témoigne l’auteur qui réside à Franois. Au retour de la guerre, Charles reprit ses activités à la ferme, fut maire de Morre. Il mourut en 1972. Ce livre permet à la petite his- toire de rejoindre la grande. E.Ch.

Agnès Côte. Je le fais souvent avec mes élèves lorsqu’il s’agit d’évoquer certains sujets” fait remarquer cette enseignante d’histoire-géographie, qui au- delà de la simple transcrip- tion, remet chaque image dans le contexte de la guerre et du moment présent. Par l’intermédiaire de la sœur, on apprend par exemple “qu’il y a du fourbi à Besançon.” Il s’agit en fait des grèves aux

T out est parti d’une boîte à chaussu- re abandonnée. Il y a une vingtaine d’années, le père d’Agnès Côte,maçon de profession, découvre dans une maison qu’il rénove une boîte à chaussures dans laquelle près de 200 cartes postales sont entreposées. Elles sont, pour la plu- part, d’une remarquable qualité. Très sou- vent, des commentaires y sont inscrits comme des tranches de vie publiées sur des pages cartonnées. Cette correspon- dance est celle d’un frère et d’une sœur. Charles Loriguet, paysan à Morre, est mobilisé. Sa sœur, Jeanne, reste dans le berceau familial. Entre les deux, les lettres racontent la séparation, le combat, l’attente des Poilus, les inquiétudes des familles. Une fois l’autorisation d’utiliser et de publier les images trouvées par son père, Agnès Côte les a traitées puis mises en valeur dans ce livre “Je suis toujours en bonne santé” publié aux éditions Sékoya. “Je me suis toujours intéressée aux témoi- gnages. C’est une manière d’accrocher le lecteur. Et cela offre une authenticité, dit

Une photo inédite de Besançon.

soieries de Besançon. Le frangin, lui, deman- de des colis, et remercie (le 27 janvier 1915) “d’avoir reçu le colis complet et en bon état.” Très souvent, il n’oublie pas de préciser la météo du jour ou de demander des nou- velles du pays. Chaque correspondance de Charles se termine par la formule “je suis toujours en bonne santé” , principe régu- lièrement utilisé par les soldats pour ne pas inquiéter leur famille. Il leur arrive parfois de s’épancher. C’est le cas le 15 février 1915, moment où Charles confie à sa sœur de “n’avoir pas le filon.” Il vient en effet d’apprendre qu’il n’aura pas de permissions pour les foins et les moissons.

Jeudi, 8 avril 1915. Charles écrit à sa sœur : “Chère frangine, tu verras sur cette carte des obus de 22 centimètres de diamètre et de 80 de longueur. Quand ils passent dans lʼair, tu dirais un petit chemin de fer aérien. Je nʼai pas encore reçu mon colis. Ici, les arbres sont en fleurs et ces jours, il pleut toutes les nuits.”

Agnès Côte publie un livre différent des autres qui évoque la Première guerre mondiale d’une façon originale.

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