La Presse Bisontine 151 - Février 2014

BESANÇON 18

La Presse Bisontine n° 151 - Février 2014

LE FEUILLETON DU TRAM La question de l’emploi Le tram et les travailleurs étrangers

On connaissait le plombier polonais. Voilà les travailleurs détachés, source de craintes de concurrence déloyale. Vraie concurrence ? Sont-ils présents sur tous les chantiers, notamment celui du tram à Besançon ? L’Inspection du travail du Doubs, va en 2014, cibler ses contrôles pour contrecarrer ce qu’elle appelle “des dérives et dysfonctionnements.”

D aniel Petitjean, le président de la C.G.P.M.E. du Doubs, est perplexe. Pile au moment où il nous reçoit pour évoquer la question de la concurrence des tra- vailleurs dits “détachés”, ces salariés européens qui peuvent travailler tem- porairement dans un autre pays de l’Union européenne, le chef d’une socié- té d’équipement de bureau basée à Besançon qu’il est reçoit un mail sans équivoque. Une société d’intérim rou- maine lui propose de recruter du per- sonnel qualifié avec l’assurance de payer beaucoup moins cher ce salarié, sans les tracas administratifs. Pourquoi moins cher ? Une directive (datant de 1996) permet - en effet - le détache- ment de travailleurs, dont les cotisa- tions sociales restent payées dans le pays d’origine. Elles sont, pour certains, les préludes à un dumping salarial. En clair, le salarié “dit” étranger perçoit un salaire d’environ 700 à 900 euros alors que la même tâche effectuée par un Français est payée le double (en salaire brut). De quoi susciter de l’interrogation chez le représentant de la Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises qui se bat face à cette concurrence, qui rappelons-le, n’est pas déloyale d’un point de vue législatif. S’il admet que son domaine d’activité (le commerce) n’est pas concur- rencé par cette main-d'œuvre dite “bon marché”, Daniel Petitjean admet que les entreprises de B.T.P. de notre région sont largement plus confrontées à cet- te concurrence. 44 % des travailleurs détachés sont en effet engagés dans le B.T.P., 17 % dans l’industrie. L’Europe a bien statué (le 9 décembre)

afin de limiter les effets et les abus en multipliant les contrôles. Cela ne convainc pas le Bisontin Daniel Petit- jean qui estime qu’elle n’est pas allée assez loin pour atténuer le problème. “Si les dégâts restent limités, le pro- blème n’est pas résolu” , dit-il. Selon la C.G.P.M.E., appuyée par le sénateur du Doubs Claude Jeannerot (P.S.), le “ dumping social ne cessera pas tant que la législation autorisera le paiement des cotisations sociales dans le pays d’origine des travailleurs détachés en France.” Sur le chantier du tram à Besançon, des cas de travailleurs détachés ont été répertoriés, notamment des salariés portugais spécialisés dans la pose des pavés. Ils sont intervenus sur la par- tie ouest et dans le centre-ville pour réaliser la mise en place des pavés et des bordures. Rien d’illégal, encore une fois, mais des questions notamment au

lâcheMarcAmeil, responsable de l’unité territoriale du Doubs. Avec les quatre agents inspecteurs du travail qu’il diri- ge, le responsable va donc s’intéresser “aux conditions de travail, de rémuné- ration. Nous ciblerons sur le secteur du B.T.P. et des transporteurs routiers eu égard au fort enjeu social et économique que représente le développement de ces prestations. Dans ce genre de cas, on arrive très souvent dans les dissimu- lations d’heures et au non-respect des conventions collectives” explique le res- ponsable qui ne cache pas la difficul- té, parfois, à constater l’infraction. Face à la complexité de la réglemen- tation relative au détachement et aux montages juridiques en matière de prestations de services transnationales, “des formations initiales et continues aux agents” ont été proposées rappel- lent les services de l’État. La Police aux frontières (P.A.F.) du Doubs réalise éga- lement des contrôles dans le Doubs. Pour l’instant, aucun contrôle n’a été réalisé sur le chantier du tram. E.Ch.

Daniel Petit- jean, président de la C.G.P.M.E. 25, opposé aux travailleurs

détachés même s’il

sein de l’organisme chargé d’effectuer les contrôles sont posées. La D.I.R.E.C.C.T.E. (Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du tra- vail et de l’emploi) espè- re bien apporter des réponses : “Si en 2013 nous avons été mobili- sés sur la sécurité des personnes sur le chan- tier du tram, nous mènerons en 2014 des actions de contrôle veillant au respect des règles applicables aux entreprises étrangères”

avoue que les “dégâts sont limités.”

De la dissimulation d’heures de travail.

Sur le chantier du tram, la pose de pavés a été réalisée (en

partie) par une société portugaise.

1 134 salariés transnationaux dans le Doubs L e nombre de déclarations de prestations de services transnationales est également en très forte progression dans notre département : 260 déclarations ont concerné 1 134 salariés en 2012 dans le Doubs. Les secteurs professionnels concernés sont majoritairement le B.T.P. (36 %), le travail temporaire (20 %), le secteur industriel (17 %). La grande majorité des infractions relevées dans le cadre de ces procédures concernent des infractions au travail dissimulé (81 %), même si les infractions relatives aux prêts de main-dʼœuvre sont en augmentation dʼune année sur lʼautre. (Source : plan départemental de lutte contre le travail illégal 2013-2015)

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