La Presse Bisontine 148 - Novembre 2013

La Presse Bisontine n° 148 - Novembre 2013

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PLANOISE Des actions spontanées Dix pétitions pour dénoncer les problèmes du quartier

CLAIRS-SOLEILS

Boulangerie rue Mirabeau

Fermeture définitive pour cause de vandalisme Lorsque la porte de sa boulangerie a été une nouvelle fois fracassée à son retour de vacances au mois d’août, Christophe Gigon a été conforté dans sa décision de quitter le quartier.

Dans le quartier de Planoise, plusieurs pétitions ont été lan- cées en un an par les habitants du quartier. Une manière d’exprimer leur ras-le-bol. C es derniers mois, dix pétitions ont circu- lé ou circulent encore dans le quartier de Planoise. Elles disent l’exaspération des habitants du secteur qui sont las de l’insécurité, des difficultés de stationnement, de la zone piétonne qui n’est pas respectée, des cages d’escaliers squattées, des problèmes de cohabitation, de loyer, de chauffage, des cam- briolages, des carreaux cassés, bref tout y pas- se. “Dans un hall aux Époisses, les vitres ont été remplacées par des tôles percées” s’indigne Jean- Claude, un habitant investi dans le quartier qui a recensé ces pétitions spontanées. Il n’en a

jamais vu autant. Elles ont été transmises au maire, à la préfecture, aux bailleurs sociaux qui ont tous, à leur niveau, des moyens pour amé- liorer une situation qui se dégrade. “Ces péti- tions ne sont pas suivies d’effets. C’est le problè- me” regrette-t-il. Avec le temps, Planoise est devenu un quartier à éviter. Selon nos informations, près de 80 % des gens qui demandent un logement auprès d’un organisme logeur ne veulent plus venir à Planoise. “Des dizaines de logements sont vides. Je suis indigné. Entre s’attaquer aux problèmes et les résoudre ou ne rien faire, nos élus ont choi- si de ne rien faire. Il y a des réunions qui ont un résultat nul” dit Jean-Claude. Il est “abasour- di” lorsque des militants syndicaux qu’il connaît lui confient être prêts à voter Front National lors des prochaines élections. Les habitants de Planoise attendent des réponses concrètes à leurs préoccupations. Le 10 septembre, une réunion publique avait lieu aux Époisses en pré- sence d’élus de la majorité municipale. E.Ch.

Christophe Gigon est dépité. La vitrine de sa boulangerie a été cassée à huit reprises. Le propriétaire des lieux fait installer des rideaux de fer.

L e 15 septembre 2010,c’est plein d’entrain que Christophe Gigon a ouvert une bou- langerie rue Mirabeau dans le quartier des Clairs-Soleils. Trois ans plus tard, l’artisan déchante au point de décider de fer- mer boutique. “Les affaires n’étaient pas flo- rissantes, mais on vivait” explique l’entrepreneur. Le 29 septembre, il a mis la clé sous la porte, découragé par les attaques successives contre son commerce. “Ils sont rentrés quatre fois dans le magasin et ont cas- sé huit fois ma vitrine. La première fois, ils ont volé la caisse. Ensuite, comme je la retirais, ils dégradaient.Ces actes étaient gratuits” explique Christophe Gigon, dépité.

Il y a six mois, l’artisan a rendu son bail. Le boulanger a été conforté dans sa décision lorsque la porte de son magasin a été fracas- sée une nouvelle fois au mois d’août, à son retour des vacances d’été. Début octobre, Christophe Gigon a déména-

gé sa boulangerie pour aller s’installer dans un autre dépar- tement franc-comtois, aspirant à une vie plus tranquille. “Pour moi, le bilan ici est négatif. C’est un échec par rapport aux habi- tants et aux clients avec lesquels je n’ai jamais eu de problèmes. D’autant qu’il y a besoin de ce service ici” soupire l’artisan.Un échec pour lui, mais une vic- toire pour les délinquants du quartier qui semblent prendre la main sur les Clairs-Soleils comme pour y faire régner leur loi.

“C’est un échec par rapport aux habitants”

La configuration même du quartier engendre d’inévitables problèmes.

BRAQUAGES

Les commerçants développent des stratégies Braqués, des commerçants réagissent

Gérant d’une pompe à essence à Besançon, cet entrepre- neur victime de deux vols à main armée se dit prêt à jeter à l’éponge. Il n’est pas le seul dans ce cas. Mais certains ne se résignent pas, à l’image de la boulangerie “La Craquante” à Besançon qui s’est dotée d’un appareil “anti-braquage”.

Zoom Pour Noël, les forces de l’ordre mettront le paquet P olice et gendarmerie disposent de deux personnes qui vont à la rencontre des commerçants ou des industries. Ce sont les “référents sécurité”. Leur métier : donner gratuitement des conseils aux entrepreneurs afin quʼils se protègent des vols ou attaques à main armée. “Il y a les conseils de sécurité passive comme bien fermer les portes, installer des digicodes, la télésurveillance” témoigne le maréchal des logis chef Christophe Pontanier qui intervient dans le Doubs. Cʼest simple mais efficace. De son côté, Stéphane Mallet, brigadier, intervient en zone poli- ce à Besançon. “On sʼintéresse à toutes les activités : bijouterie bien sûr, buralistes, boulangeries…” dit-il. Leur travail paye. Mais personne ne fanfaronne. À lʼapproche des fêtes de fin dʼannée, le risque augmentera. En zone police, le plan anti hold-up sera activé : les patrouilles, plus nombreuses, sécuriseront les espaces les plus exposés. Pour la première fois, lʼopération tranquillité vacances va être prolongée toute lʼannée, indépendamment des vacances scolaires. En zone gendarmerie, des forces (réservistes et mobiles) pour- raient être mobilisées avant noël. Lʼalerte S.M.S. fonctionne tou- jours : elle diffuse rapidement certains faits en alertant les com- merçants sur leur téléphone. De source policière, le nombre de vols à main armée aurait baissé de 40 % à Besançon avec 14 faits (contre 26 en 2012). Un chiffre à relativiser car la période de Noël nʼest pas comptabilisée.

I l entame sa troisième année comme gérant d’une station-service, route de Lyon à Besançon. Trois petites années, et déjà, une forme de lassitude : “Dans moins d’un an, je pense que je serais par- ti” dit Lotfi Belaïd. Ce jeune entrepreneur ne cache pas son ras-le-bol face aux nom- breuses incivilités répétées. Cela commence par la grivèlerie d’essence : “Quand je dépo- se plainte après un vol de carburant en don- nant le numéro de plaque d’immatriculation, il n’y a pas de suite” dit-il. Mais ce n’est pas le plus usant. Victime de trois bra- quages, il est désabusé. Le premier, c’était un vol à main armée en février 2011. Le second en novembre 2011. “Deux personnes sont arrivées encagoulées sur un scooter, sont entrées et ont braqué mon employé qui était à la caisse. Depuis, il est parti. Une autre fois, ils étaient arri- vés à pied” explique Lotfi Belaïd. Puis, on a tenté de lui couper les barres en acier stockant ses bouteilles de gaz. Récemment, le 6 juillet, en fin de journée, c’est la por- te d’entrée de sa vitrine qui a été fracas- sée. “J’aurais presque préféré qu’ils me bra- quent plutôt que de me défoncer la porte. Cela m’a coûté 10 000 euros. J’ai dû prendre

un service de sécurité avant qu’elle ne soit refaite. Je pense que l’année prochaine, j’arrêterai” conclut-il. Toujours à Besançon, cette fois dans une boulangerie, le climat est plus serein après que trois individus armés de couteaux et d’un pistolet ont braqué une des employés. C’était le 1 er décembre 2012, à 18 h 40. Depuis le 29 août, la boulangerie “La Cra- quante” s’est dotée d’un monnayeur. Un investissement important. Concrètement, toutes les pièces ou les billets ne sont plus données à la boulangère mais introduits dans l’appareil qui centralise le numérai-

re dans un coffre-fort qui n’est accessible à personne. “La vie de notre personnel n’a pas de prix. Chez nous, plus personne n’a donc accès à l’argent. Nous avons fait cela pour protéger nos salariés” témoigne Corin- ne Lhomme, épouse du res- ponsable de la boulangerie depuis le 8 mars 2002. La gérante y voit un autre avan- tage : l’hygiène. “On ne touche plus les pièces.” Et, c’est la machine qui gère les rendus.

Les clients le comprennent et s’y habituent. Contrairement à la région parisienne où ce type de procédé est financé, ce com- merçant a investi seul sans aides. Une tran- quillité qui n’a pas de prix… à l’approche des fêtes de fin d’année. E.Ch. aux pièces ni aux billets. Ils sont mis dans cette machine et envoyés dans un coffre-fort. Corinne Lhomme, de la boulangerie La Craquante, ne touche plus

“Nos salariés n’ont pas de prix.”

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