La Presse Bisontine 134 - Juillet-Août 2012

DOSSIER

La Presse Bisontine n° 134 - Juillet-août 2012

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PORTRAIT Un des plus fins connaisseurs Jean-Paul Grosbois, passion Chailluz Agent patrimonial de l’O.N.F., le Bisontin Jean-Paul Grosbois connaît par cœur la moindre parcelle de cette forêt dans laquelle il travaille depuis plus de 25 ans et où il a longtemps habité.

I l en parle presque comme d’une personne aimée. Pour Jean-Paul Grosbois, la forêt de Chailluz est son quotidien depuis 1985. Vingt-sept ans qu’il l’arpente tous les jours, la respire, la touche et l’entretient. Bien sûr il n’est pas seul et il aime justement à rappeler que sans un travail d’équipe, il lui aurait été impossible d’en saisir toutes les subtilités. Un an après son arrivée comme garde-forestier à Chailluz, il a eu l’opportunité de plonger dans l’histoire de cette forêt à l’occasion d’une exposi- tion montée par la ville de Besançon, consacrée justement aux forêts de Besançon. “C’est là que j’ai acquis la passion de l’histoire, en me plon- geant notamment dans les XVII ème et XVIII ème siècles, depuis la grande réformation des forêts voulue par Colbert, jusqu’aux plus récents plans d’aménagement de la forêt ” explique Jean-Paul Grosbois. Cette passion ne l’a plus quitté et elle complète les connaissances du technicien déjà acquises enmatière de sylviculture, de botanique, de géologie ou encore d’archéologie. Car ce métier est en fait à la croisée de toutes ces disciplines. C’est d’ailleurs lui qui a largement contribué à l’élaboration de la cartographie com- plète et précise de la forêt de Chailluz, parcelle par parcelle. L’attachement de Jean-Paul Gros- bois à cette forêt est donc presque viscéral. “Je me suis construit dans cette forêt” avoue-t-il avec

une pointe d’émotion. Il se décrit comme “une espèce d’artisan, car on est à la fois autonome dans le travail et assez éloignés de notre hiérar- chie.” Et c’est à eux, techniciens forestiers, que revient la délicate tâche de mettre en application les recommandations des plans d’aménagement forestier. “Le martelage des arbres se fait toujours en équipe. On pense toujours de façon cartésien- ne mais mieux vaut toujours recouper nos impres- sions avec celle des autres membres de l’équipe, car on a chacun sa sensibilité et sa façon de voir les choses.” Jean-Paul Grosbois aura aussi été pendant des

Jean-Paul Grosbois insiste : “Cette connaissance de Chailluz est vraiment due à un travail d’équipe.”

années chargé du volet animation en lien avec la petite école dans la forêt. C’est lui également qui aura eu la charge de la brigade de sur- veillance équestre qui a longtemps fonctionné à Chailluz. Il connaît aussi mieux que quiconque les habi- tudes des habitants à quatre pattes de la forêt, les renards, blaireaux, chats sauvages et autres chamois, ces derniers présents dans la côte de Bonnay. Il sait aussi que si les forêts “étaient véritablement rui- nées par une surexploitation à la fin du XVIII ème siècle” , elles sont aujourd’hui mieux gérées. Mais il

“Je me suis construit dans cette forêt.”

n’ignore pas qu’on “entre dans une nouvelle pério- de où il y a une pression de plus en plus forte sur la ressource.” La preuve : le bois de Chailluz ne suffit plus à alimenter la chaufferie bois de Pla- noise qui s’approvisionne déjà en forêt de Chaux. Presque arrivé au terme d’une carrière qu’il a débutée en 1974 enHaute-Saône, Jean-Paul Gros- bois devra quitter sa chère forêt de Chailluz cer- tainement l’année prochaine. Il n’en sera pour- tant jamais très éloignée. D’abord parce qu’après avoir longtemps habité aux Grandes baraques, il loge désormais dans une maison située à la lisière de Chailluz. Et aussi parce que malgré la

retraite, il continuera sans doute à l’arpenter sou- vent. Ne serait-ce que pour animer auprès des communes concernées, la réserve biologique inté- grale qu’il a lui-même initiée dans le secteur de la Dame Blanche. Une soixantaine d’hectares qui seront totalement protégés à partir de l’an prochain, où aucune cou- pe ne se fera plus, histoire de laisser au milieu le soin de se renouveler tout seul et observer l’évolution naturelle de cette érablaie à scolo- pendres, mini-biotope à lui tout seul. Jean-Paul Grosbois aura vraiment laissé sa trace en forêt. J.-F.H.

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