La Presse Bisontine 121 - Mai 2011
24 DOSSIER
La Presse Bisontine n° 121 - Mai 2011
CHÂTILLON-LE-DUC Une opportunité possible Profiter de la notoriété des groupes de luxe français
P.D.G. de la société S.M.B. Horlogerie, Philippe Bérard, estime que les P.M.E. auraient intérêt à profiter du prestige français véhiculé par les grands noms du luxe tricolore. Pour cela, il fau- drait que les entreprises horlogères réfléchissent ensemble à une stratégie commune.
1 30 salariés, 30 millions d’euros de chiffre d’affaires dont 6 réalisés à l’export, l’entreprise S.M.B. Hor- logerie de Châtillon-le-Duc est un des rares piliers de l’économie horlogère du Grand Besançon. Présente sur la place depuis 30 ans, cette société est efficace sur le marché d’entrée de gam- me qu’elle occupe avec différentes marques de montres (dont Go Girl Only) vendues au prix de 39 à 100 euros. Il y a un peu plus d’un an, S.M.B. a accroché le haut de gamme avec la grif-
L’entreprise S.M.B. Horlogerie emploie 130 salariés.
fe Certus Paris. Philippe Bérard, le P.D.G. de la société trace son sillon, faisant fi du “swiss made” que tant d’horlogers voient comme le sésame qui va asseoir leur crédibilité. “Ce n’est pas le swiss made qui fait la marque, mais la marque qui fait le swiss made. Une Rolex restera une Rolex, swiss made ou pas” estime le responsable qui en revanche, souhaiterait voir émer- ger une sorte de “label France”. La Chambre Française de l’Horlogerie a lancé une réflexion à ce sujet à laquel-
le Philippe Bérard a participé active- ment avec quelques autres. Mais mal- gré les réunions pour mettre au point une stratégie qui aurait pourtant pu servir à tous les acteurs français de l’horlogerie, la démarche n’a abouti à
rien. Le P.D.G. le déplore. “L’idée de ce label France était de se doter d’un outil qui nous permette de nous positionner dans le sillage des grandes marques de luxe françaises. Il nous semblait opportun que des P.M.E. telles que les nôtres puis- sent bénéficier de la notoriété de ces grands groupes.” Ce sont d’ailleurs ces groupes tels que L.V.M.H. qui ont dans leur giron quelques-unes des plus luxueuses marques horlogères suisses. Même si la France n’a jamais vu se structurer une filière horlogère de luxe, cela ne signifie pas que la montre ne peut incarner un raffinement à la fran- çaise plébiscité par la clientèle étran- gère dans beaucoup d’autres domaines tels que la maroquinerie. “Malheu- reusement, je pense que la démarche engagée par la Chambre Française de
l’Horlogerie n’aboutira pas” déplore M. Bérard. Cet échec serait une nouvelle preuve de la difficulté des acteurs de l’horlo- gerie tricolore à se fédérer pour envi- sager une stratégie commune. Depuis les années soixante, cet individualis- me a déjà coûté cher à cette industrie qui n’a pas cessé de décliner depuis 40
ans, voyant disparaître marques et sous-traitants. Ceux qui restent, comme S.M.B., mènent leur barque (plutôt bien) contre vents et marées. Mais il faudra du temps et sans doute une ambition col- lective pour remettre d’aplomb une industrie horlogère française. T.C.
CRÉATEUR
“Cela n’aboutira pas…”
Conjonction de plusieurs facteurs Pour un super-label “Besançon France” Il est la preuve de la diversité des savoir-faire horlogers qui subsistent à Besançon. Créateur, designer, Philippe Lebru qui redonné à l’horloge comtoise une seconde jeunesse, est un des rares à croire à l’opportunité de vendre des produits sous un label Besançon. P hilippe Lebru est un peu l’élec- tron libre de l’horlogerie locale. Cela fait 18 ans qu’il a créé l’en-
NOUVEAUTÉ Montres Louis Jean Sol “Besançon est un label qui a du sens” Installé en région parisienne, Jean-Louis Moulard a choisi Besançon pour fabriquer ses montres Louis Jean Sol. La première série compte 500 exemplaires. Sur le cadran figure le made in “Besançon-France”. La Presse Bisontine : Pourquoi Besançon ? Jean-Louis Moulard : C’est vrai, j’aurais pu fabriquer ces montres en Suis- se, mais j’avais envie de rester en France. J’ai commencé par contac- ter différents fabricants de composants et je me suis vite rendu comp- te que ce serait compliqué compte tenu du fait que je ne suis pas horloger. Lors du concours Lépine, j’ai rencontré Philippe Lebru. J’ai finalement décidé de me lancer avec lui. L.P.B. Avant de rencontrer Philippe Lebru qui fabrique vos montres, quelle image aviez-vous de cette ville ? J.-L. M. : Je la connaissais comme étant celle de l’horlogerie française. Plusieurs de mes amis ont d’ailleurs fait l’école d’horlogerie ici. Pour moi, Besançon est un label, peut-être ancien, qui ne parle sans doute pas aux jeunes générations, mais qui a du sens. J’ai préféré mettre ce label sur mes montres plutôt que Paris. Pour ne rien cacher, je suis
treprise Weal’s Concept, plus connue sous le nom d’Utinam Besançon, sa marque phare. Dans ce domaine d’ac- tivité, elle est sans doute la dernière née de la capitale régionale. Ce qua- dragénaire qui se considère comme un artisan dépense son énergie à créer et à fabriquer des montres et des hor- loges comtoises contemporaines.Actuel- lement, il met au point l’horloge monu- mentale qui sera installée dans la future gare T.G.V. d’Auxon. Cet hom- me est un inventeur, et il considère qu’il a vocation à rester une petite entreprise, même si ses produits ont un potentiel industriel. Philippe Lebru va également fabriquer une montre pour les 110 ans du Concours Lépine dont il fait désormais partie des admi- nistrateurs. De son atelier situé aux Prés-de-Vaux, l’entrepreneur observe avec satisfac- tion que s’amorce un nouveau dyna- misme horloger à Besançon. “Leroy va devenir la locomotive du luxe. C’est ce
qui manquait. Festi- na crée des emplois et c’est important. Breitling en inves- tissant dans un bâti- ment va donner du crédit à la ville. C’est une caution néces- saire” explique-t-il. Selon Philippe Lebru, c’est le bon moment pour redon- ner à la ville ses lettres de noblesse horlogères. “Il faut qu’elle devienne l’écrin du temps. Ce que je souhaiterais, c’est que l’on puisse mettre en place un super-label “Besan- çon France” protégé.” Ce garçon a toujours cru au potentiel du
Philippe Lebru : “Sur les salons, j’observe que les gens de 45 ans et plus associent le nom de Besançon à la montre.”
“Nous sommes au début d’une histoire.”
nom “Besançon” comme vecteur de notoriété pour l’horlogerie française. Il a pu le vérifier à de nombreuses reprises. “Sur les salons, j’observe que les gens de 45 ans et plus associent le nom de Besançon à la montre. Ils font le lien. En revanche, les jeunes géné- rations ne le font pas, car elles ne connaissent pas notre histoire horlo- gère. C’est pour cette raison que nous devons agir vite pour assurer une conti- nuité” estime Philippe Lebru. La réussite du projet passerait par la conjonction de plusieurs facteurs dont une volonté politique forte “qui est là” , et l’émergence de symboles “comme Leroy.” Il faudrait aussi que Besan- çon assume sont histoire horlogère et la raconte. “Un touriste qui arrive ici doit sentir qu’il est dans une capitale
horlogère. La cité doit transpirer cet- te culture, d’autant qu’elle devient une ville d’art de vivre qui se marie bien avec l’image de l’horlogerie.” L’enjeu de tout cela est de générer une dynamique suffisamment forte pour provoquer un regain d’intérêt pour Besançon la belle horlogère. Philippe Lebru qui se bat depuis longtemps pour exister sur le marché n’est pas un doux rêveur. Il sait bien qu’une tel- le mutation aux accents industriels ne fera pas d’un claquement de doigts. “On voudrait construire une cathé- drale, mais nous avons les moyens de réaliser une chapelle” résume-t-il. “Nous sommes au début d’une histoi- re” qui espérons-le, ne restera pas sans suite. T.C.
même tenté de m’installer à Besançon. On se sent plus dans l’ambiance horlogère ici qu’ailleurs en France. L.P.B. : Ces montres qui ont la particularité de donner l’heure solaire ont été créées à partir d’un brevet que vous avez dépo- sé. Quand seront-elles disponibles et à quel prix ? J.-L. M. : Elles sont en fabrication. Il reste un détail technique à régler. Elles seront disponibles dès le mois de mai à partir de 490 euros T.T.C. pour le premier prix. Pour commencer, elles seront commercialisées par Internet (www.louisjeansol.com). Il s’agit pour l’instant de montres à quartz. En fonction des résul- tats, je n’exclus pas de fabriquer des montres méca- niques. Recueilli par T.C.
“Tenté de m’installer à Besançon.”
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