Journal C'est à dire 313 - Février 2025
LA PAGE DU FRONTALIER
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Politique
“La Suisse a besoin de l’Europe et vice-versa” Interlocuteur privilégié des relations entre la Suisse et l’Union Européenne, Chris tophe Grudler qui effectue son second mandat de député européen a participé activement à l’élaboration du nouvel accord-cadre qui régit les relations entre les citoyens suisses et les citoyens européens.
C’ est à dire: Vous êtes aux premières loges des négociations avec la Suisse. Comment cela se tra duit-il ? Christophe Grudler: En tant que rapporteur permanent du Parlement européen pour la Suisse, je suis totalement investi dans ce dossier. Je suis en relation avec les autorités suisses, j’aide le commissaire. La Suisse a besoin de l’Europe à moyen terme et vice-versa. Donc on doit s’entendre et trou ver un accord qui convienne à chacun. Il n’est pas question de dérouler le tapis rouge à un pays non européen. Il faut trou ver un équilibre. Càd: Vous avez dû “mouiller la chemise” pour aboutir à ce nouvel accord ? C.G. : On a vécu un moment difficile quand le gouvernement suisse a suspendu les négocia tions en 2021 alors qu’on tra vaillait sur ce nouvel accord depuis plus de 10 ans. Cela pou vait remettre en cause les 120 bilatérales qui régissent les rela tions entre l’Union Européenne et la Suisse avec des consé quences non négligeables au niveau de la recherche, du maté riel médical, etc. C’était très compliqué pour moi au niveau du Parlement. À chaque fois qu’on insistait sur le fait d’aller renégocier avec la Suisse, mes collègues me demandaient pour commencé à réagir et la Confé dération a relancé le débat début 2022. Les négociations explo ratoires ont été longues pour qu’on puisse engager de vraies négociations et signer un accord en décembre 2024, lequel doit encore être validé par les deux parties. Càd : Comment va s’organiser la validation? C.G. : Les deux chambres de l’Union Européenne, à savoir le Conseil et le Parlement se prononceront. Cela prendra sans doute la forme d’une vota tion populaire en Suisse fin 2026 ou début 2027. quoi. On a beaucoup œuvré pour que cet accord revienne au dessus de l’agenda. Les milieux écono miques suisses ont
Au sujet de l’indemnisation des travailleurs frontaliers en chômage, Christophe Grudler annonce qu’une révision de la directive européenne sur le sujet est en cours pour faire passer le délai d’indemnisation de 3 à 6 mois à la charge du pays d’emploi.
Càd : Qu’est-ce qui va changer ? C.G. : De nouvelles règles seront mises en place pour une meil leure coopération dans diffé rents domaines comme l’élec tricité, la santé ou encore la sécurité alimentaire. Càd: Quelle forme prendrait la coopération énergétique? C.G. : La production d’électricité en Suisse est très dépendante de la ressource hydraulique qui n’est pas toujours stable. L’ac cord permettra de garantir une européennes auront accès au marché suisse et vice-versa. Quand les Suisses seront en surproduction, ils pourront aussi vendre sur le marché européen. Pour la santé, l’accord est encore à l’état embryonnaire. Dans les grandes lignes, il porte sur la prévention, la lutte contre les pandémies, la production de vaccins. Au niveau de la sécu rité alimentaire, il s’agit de défi nir des normes communes, d’être en phase sur la traçabilité des produits. Cela suppose aussi d’aller vers plus de simplifica tion notamment au sein de l’U.E. sécurité énergé tique. La Suisse pourra acheter de l’électricité au coût du marché commun. Les entreprises
Càd : Ces accords entreront en vigueur après la ratification ? C.G. : Pas systématiquement. Il y aura des accords provisoires dans certains domaines. Depuis le 1 er janvier, la Suisse est asso ciée au programme de recherche Horizon Europe. La participa tion de la Suisse à d'autres pro grammes européens comme Erasmus, ou Iter est déjà en cours. Càd: On entend souvent dire que la Suisse prend ce qu’il y a de bien dans l’Europe sans s’en combrer des contraintes induites. Quel est votre senti ment sur la question? C.G. : En anglais, on parlerait de cherry picking qui consiste à sélectionner seulement ce qui nous plaît. L’Europe a été assez forte pour faire entendre sa voix. Un bon accord implique des concessions des deux côtés. Chacun a mis de l’eau dans son vin. Les Suisses s’étaient retirés des négociations car ils ne sou haitaient pas que l’accord-cadre repose sur un chapeau global. Le nouvel accord a été conçu pour que chaque domaine ait son propre chapeau. Càd : La liberté de circulation des personnes est toujours d’ac tualité ? C.G. : Tout à fait et on y tient beaucoup. Il y a quand même
France. Il faut réfléchir à des systèmes vertueux. Càd: La question de l’indem nisation des frontaliers au chô mage alimente aussi les débats. Quel est votre point de vue? C.G. : Pour le coup, ce n’est pas la faute à la Suisse mais à une directive européenne sur les droits sociaux précisant que c’est bien le pays de résidence qui indemnise le chômage au bout de trois mois. Ce système coûte très cher à l’Unedic. Cette direc tive est en cours de révision pour faire passer le délai d’indemni sation de 3 à 6 mois. Tous les États membres de l’U.E. ne sont pas d’accord sur cette révision mais j’ai bon espoir d’y arriver. Càd : La Suisse verse une contri bution financière à l’Europe pour assurer la cohésion sociale et économique. Quel est le mon tant de cette contribution ? Va t-elle évoluer avec l’accord? C.G. : Le montant n’est pas fixé définitivement. Il est question de 130 millions d’euros jusqu’en 2030. Puis il augmenterait dans une fourchette de 300 à 350 mil lions d’euros. C’est un sujet très sensible. Les pays pauvres de l’U.E. estiment que la Suisse doit payer davantage. On a essayé de trouver quelque chose d’équitable. n Propos recueillis par F.C.
une clause de sauvegarde pour protéger ce petit pays qu’est la Suisse en limitant la migration au marché du travail. Une autre concession très importante a été faite. Elle concerne la fin du protectionnisme suisse, notamment pour les entreprises européennes qui ne pouvaient pas intervenir en Suisse ou alors au prix de démarches très compliquées. Il fallait par exem ple un délai de 28 jours pour examiner toute demande d’une entreprise européenne qui vou lait venir travailler en Suisse. Ce délai de déclaration a été ramené à quatre jours. Cela permettra par exemple d’ouvrir de nouveaux marchés pour de nombreux artisans. Càd: Les entreprises fronta lières avec la Suisse sont souvent confrontées aux problèmes d’une main-d’œuvre attirée par les salaires suisses? C.G. : J’en suis conscient. Il fau drait arriver à générer du co développement économique entre les territoires. Comme cela se fait avec des entreprises françaises qui fournissent des composants horlogers. Peut être que les Suisses pourraient aussi cofinancer certaines for mations ou instaurer en France des obligations de travailler un certain temps en France pour ceux qui ont été formés en
l Santé Le Parc régional naturel du Doubs Horloger organise l’opé ration “Bougez à tout âge” : des cours d’activité physique adaptés pour les personnes de plus de 65 ans. Ces cours sont encadrés par des enseignants en activité physique adaptée, Morgane Can gero et Cyril Billod. Aspect original de ce programme : la participation active des lycéens du lycée Saint Joseph des Fontenelles qui aident à organiser les séances et les événements. Ces séances ont lieu: Aux Écorces le mardi de 14 heures à 15 heures (salle d’honneur de la mairie), au Rus sey le mercredi de 9 heures à 10 heures (salle d’honneur de la mairie), à Montlebon : le mardi de 9 heures à 10 heures (mairie), à Villers-le-Lac le mardi de 10h15 à 11h15, à Morteau le mardi de 16 heures à 17 heures (8, avenue Charles de Gaulle). Les inscriptions sont ouvertes à toute personne âgée de plus de 65 ans. Inscriptions et informa tions au 0381685332 ou en écrivant à info@parcdoubshorloger.fr En bref…
“C’est la fin du protectionnisme suisse.”
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