La Presse Pontissalienne 298 - Novembre 2024
18 Pontarlier et environs
La Presse Pontissalienne n°298 - Novembre 2024
Napoléon Avec le concours de EN BREF
SOCIAL
Les agents du Département La protection de l’enfance
l’Association des Amis du Musée de Pontarlier, des Gars de Joux et de la Commune de La Cluse-et Mijoux, l’historien indépendant Gérard Tissot Robbe donnera une conférence intitulée “Napoléon et la Franche Comté”, vendredi 22 novembre à 20 heures à la salle des fêtes de La Cluse et Mijoux. Entrée libre. Hommage Les Insoumis du Haut Doubs ont tenu à rendre hommage à leur amie Martine Ludi, décédée mi octobre, qui résidait à la Ferrière-sous-Jougne. Elle qui appréciait la littérature et les rencontres d’auteurs avait été à l’initiative de la création du café littéraire de Pontarlier “L’Esperluète”. Femme engagée, elle avait rejoint le groupe A.T.T.A.C. de Pontarlier, association altermondialiste dans laquelle elle militait déjà depuis longtemps. Militante très active, elle avait été candidate dans la Vème circonscription du Doubs, aux élections législatives de 2017 et de 2022. “Avec son franc-parler, Martine était généreuse, en toute simplicité et avec discrétion, elle a apporté sans relâche son aide et son soutien à celles et à ceux qui en avaient besoin” témoigne Matthieu Cassez, le responsable des Insoumis du Haut-Doubs. entière dans tous ses combats. Femme très
crie au secours La protection de l’enfance est en souffrance et ne protège plus grand-chose. Les agents de la protection de l’enfance, et plus globalement des services du social au Département, ont exprimé leur ras-le-bol.
on arrive dans 6 mois.” Ou encore “Le Haut-Doubs est à bout” , “Se faire agresser, ce n’est pas les risques du métier” , “Pro tégeons la protection de l’enfance.” “Cela fait un moment que l’on alerte sur la souffrance au travail. Il y a les agents de la protection de l’enfance mais aussi les travailleurs sociaux des autres services, note Sonia Pretet, déléguée syndicale C.G.T. au Département. Depuis plusieurs mois, on travaille en mode dégradé pour les usagers mais aussi les agents. On demande une adaptation de notre travail à ce mode dégradé, ce qu’on peut faire, ne pas faire. Mais depuis six mois, on n’a pas pu lancer cette réflexion. Il faut revoir notre organisation du travail. Le travail social déclenche une pression, un stress consacré à la protection de l’enfance a augmenté de 21 millions d’euros. l Budget total : 81 millions d’euros 108 agents du Département travaillent exclusivement avec les enfants Zoom Les chiffres dans le département l 1 597 enfants placés au 31 août 2024 • 150 enfants en plus par rapport à 2023 soit une augmentation de 10 % par an l 371 mineurs non accompagnés • 28 enfants en plus par rapport à 2023. Entre 2021 et 2024, le budget
C a craque. De partout. Les agents de la protection de l’enfance sont à bout. À bout de forces, à bout de nerfs, désespérés de ne plus pouvoir exercer correctement leur métier. À l’image des soignants du monde hospitalier qui déplorent des manques de moyens, financiers, humains face à des arrivées qui augmentent. L’agression de l’un de leurs collègues, poignardé par un parent, à Valdahon en septembre, a mis le feu aux poudres de la colère. “C’est tout le système qui est en train de claquer, estime un éducateur spécialisé du Pôle enfant placé du Haut Doubs. Depuis le Covid, le nombre d’en fants placés a explosé. On ne peut pas faire de suivi qualitatif de l’enfant.” Pour cette personne qui travaille dans le social depuis de nombreuses années, il relève et dénonce un changement de paradigme. “Le placement est devenu la solution. Si déjà, on arrive à placer le gamin, à le mettre à l'abri, c’est une réus site en soi, mais ce n’est pas normal. Nor malement, c’est là que le projet commence et évolue, l’enfant est en sécurité, c’est un soulagement mais sa situation n’est pas réparée, n’avance pas. Le pire, quand un enfant arrive, on se pose la question de
son vécu, de sa fratrie, ce qu’il a l’habitude pour pouvoir trouver le meilleur placement possible, vers l’assistant familial qui lui conviendrait le mieux. Mais par manque de place, on le met là où on trouve de la place.” L’éducateur spécialisé estime pouvoir prendre en charge entre 15 et 20 enfants pour travailler confortablement. “On arrive parfois jusqu’à 30 enfants à un instant T.” Outre des heures supplémen taires importantes, il faut aussi compter sur un climat de tension, parfois teinté d’agressions, au quotidien. “Il faut recevoir la détresse et l’urgence dans l’immédiat. Les parents qui viennent sont frustrés, sur la défensive, il y a une forme d’agres
qui empêche la réflexion. On travaille dans l’urgence. Notre métier de base est d’accompagner. Des temps de réflexion avec un psychologue pour soutenir les enfants, ça fait longtemps que ça n’existe plus. On perd notre cœur de métier” , souffle la travailleuse sociale pour qui les services publics qui se réduisent à peau de chagrin contribuent au problème. “La C.A.F. est peu ouverte, la Sécurité sociale, c’est pareil. Nous, on récupère tout.” La souffrance des services de la protection de l’enfance et du social entre en résonance avec tous les services publics, eux aussi en crise, rabotés financièrement depuis plusieurs années, de même que la santé. “L’État va se désengager de plein de spé
sion présentielle. On fait face naturellement mais dans le temps, ça fatigue. On absorbe cette tension.” Face à cette situation, les agents de la protection de l’enfance ont donc décidé de sonner l’alarme et de manifester le 30 septembre dernier devant l’hôtel du Département. Sur les pan cartes, on pouvait lire “Allô le 119, il y a danger. O.K.,
“On perd notre cœur de métier.”
MAJORITÉ DÉPARTEMENTALE
nier, trois agents ont renforcé les équipes sur Besançon, deux sur Montbéliard et un sur le Haut Doubs. Concernant les assistants familiaux, la collectivité a recruté cette année 40 assistants fami liaux, pour une fois plus que ceux qui partent. “Là aussi, ce sont des dépenses supplémentaires. Ce n’est pas parfait mais on fait le maximum avec les moyens que l’on a” , souligne Emmanuel Fai vre. Il est vrai que le Départe ment assume seul le budget de l’enfance, sur ses fonds propres. “Nos agents veulent être rassurés sur notre capacité et notre volonté à mettre en œuvre le plan Enfance voté en mars. Au bout de six mois, on a fait énormément de boulot, les engagements seront tenus. Ils veulent aussi être plus étroitement associés pour changer les pra tiques et les process internes.” Parmi toutes les mesures voulues par le Plan Enfance, dont 10 places supplémentaires en M.E.C.S. (maison d’enfants à caractère social) à Montbéliard, l’externalisation des visites médiatisées et des placements éducatifs à domicile, sont des sujets d’importance. “Ça ne se fait pas en cinq minutes, c’est du budget” , relève le D.G.S. “Il y a également les tiers de confiance qui proposent différentes moda lités d’accompagnement, renché
Enfance
L’enfance, premier budget de la politique sociale Le Département fait face à une augmentation du nombre d’enfants placés. Si la collectivité alloue des moyens plus conséquents, la situation reste tendue. Le Plan pluriannuel 2024-2027 de la protection de l’enfance est lancé.
À l’issue de la manifestation des agents de la protection de l’enfance, fin septembre, le directeur général des services Emmanuel Faivre et Cyril Car bonnel, directeur général adjoint en charge des solidarités, ont reçu une délégation. “Au-delà de la manifestation, il faut recon textualiser, attaque d’emblée Emmanuel Faivre. Il y a une aug mentation exponentielle du nom bre d’enfants placés. Aucune ins titution en France n’est capable de prendre sereinement le choc de + 10 % par an. C’est compliqué. En 8 mois (jusqu’au 31 août), le nombre d’enfants placés est passé de 1 494 à 1 597, 103 supplémen taires en 8 mois, il y en aura + 150 cette année. Déjà l'an dernier, on a pris 10 %. L’explication est prin cipalement sociétale, peut-être
aussi que l’on détecte mieux. C’est la même chose sur les mineurs non accompagnés.” Au 31 août, 371 mineurs non accompagnés étaient accompa gnés par le Département, contre 343 fin 2023. “À un moment, l’ins
compter sur l'arrivée prochaine de deux villages d’enfants aux haras de Besançon et à L’Isle sur-le-Doubs. Ces deux structures vont offrir 100 places supplé mentaires courant 2026. “En 2027, il faudra compter 7 millions d’euros en plus pour assurer ces 100 places supplémentaires”, remarque Emmanuel Faivre. La protection de l’enfance est le pre mier budget du social du Dépar tement devant les personnes âgées, le handicap, le R.S.A. Si les moyens humains ont aug menté mais pas suffisamment par rapport au flux, le Départe ment s’est engagé à titulariser un certain nombre d’agents. “On fait tout ce qu’on peut sur les métiers de l’enfance pour offrir de meilleures conditions, de sta tuts, de salaires.” En mars der
titution est obligée de bricoler, d’inven ter des solutions, reprend le D.G.S. Et les moyens sui vent cette courbe là.” Concrètement, l’aide sociale à l’en fance a vu son bud get augmenter de 35 %, soit plus de 21 millions d’euros pour un budget total de 81 millions d’euros à l’heure actuelle. Il faut
“On perd notre cœur de métier.”
Cyril Carbonnel, D.G.A. en charge des solidarités et Emmanuel Faivre, D.G.S. du Département.
Enfin, les élus du Département ont travaillé une M.I.E., une mis sion d’information et d’évaluation qui sera rendue publique en décembre. De cette M.I.E. sorti ront des préconisations qui pour ront nourrir la politique de la protection de l’enfance, voire la réformer. n L.P.
rit Cyril Carbonnel. On peut aussi faire appel à la société civile pour du mentorat, du tutorat. Ce sont des bénévoles qui viennent nous épauler, on peut augmenter les indemnités pour les tiers dignes de confiance afin d’en attirer plus.” “Le plan avance et il sera intégralement mis en place” , conclut Emmanuel Faivre.
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