La Presse Pontissalienne 297 - Octobre 2024
4 L’interview du mois
La Presse Pontissalienne n°297 - Octobre 2024
THIERRY GAMOND-RIUS “Il manque des de santé dans mais pas tant Directeur général du C.H.U. de Besançon, Thierry Gamond-Rius a pris la direction par intérim de l’hôpital de Pontarlier en avril dernier, à la suite de la suspension de l’ancien directeur Jean-David Pillot. Après une sévère sanction de la Haute autorité de santé, il met en avant les projets qui vont dynamiser l’établissement pontissalien, notamment les postes partagés. Entretien. L a Presse Pontissalienne : Il y a quelques mois, l’hôpital de Pontarlier a subi deux coups durs : la suspension de son directeur et la non certification de l’établissement par la Haute autorité de santé. Pourquoi avoir accepté la direction par intérim ? Thierry Gamond-Rius : Il est vrai que la suspension a été un vrai sujet d’inquiétude. Elle est toujours d’actualité par ailleurs. On espère tout de même avoir un nouveau directeur au début de l’année prochaine. J’ai accepté l’intérim car dans notre symbolique, cela me semblait important. Quand je suis arrivé à Pontarlier, j’ai bien senti un contexte difficile, le personnel était inquiet pour l’avenir de l’hôpital. Et puis, le rapport de la Haute autorité de santé était sévère. L.P.P. : Dans quel sens ? T.G.-R. : La sanction est sévère par rapport à la réalité de la situation. Mais les deux derniers rapports de la H.A.S. avaient fait des remarques qui n’ont pas été suivies… Cette non-cer tification est vraiment désagréable pour les équipes qui s’in vestissent. Il y a des éléments qui nous forcent à aller de l’avant, cela a provoqué un électrochoc, on ne peut pas rester non-certifiés de toute façon. Le plan d’actions pour répondre aux exigences de la H.A.S. est en cours. Mais il n’y a pas de danger majeur en termes de sécurité. L.P.P. : Le projet d’extension des urgences de Pontarlier est-il un moyen de répondre aux demandes de la H.A.S. ? T.G.-R. : Évidemment, on n’arrête pas les projets. Le Ségur de la santé a permis un financement d’un nouveau bâtiment des urgences. Ce dernier va tenir compte des demandes de la H.A.S. Les travaux devraient débuter à la fin 2025. L.P.P. : Vous avez parlé des craintes du personnel de l’hôpital de Pontarlier de voir leur établissement fermé. Leur crainte est-elle fondée ? T.G.-R. : Pontarlier est un établissement particulier avec une belle activité, une palette de services : urgences, maternité, chirurgie, médecine… Et un bassin de population avec une forte identité. Je milite en faveur du maintien du niveau d’équipement qui est celui de Pontarlier mais c’est difficile par rapport à la taille de l’établissement. Notamment pour le recrutement. L.P.P. : C’est-à-dire ? T.G.-R. : Les médecins sont de plus en plus spécialisés, ils vien nent dans des établissements où le volume d’activité leur permet de faire leur spécialité. Et les professionnels sont de plus en plus attachés à l’équilibre professionnel-personnel. La charge de l’astreinte pèse sur les recrutements. L’envie d’hyperspécialisation et d’équipes un peu plus étoffées ne facilite pas les recrutements dans un hôpital comme Pontarlier. Et c’est un peu compliqué avec l’image que renvoie le Haut Doubs. Il manque des professionnels, mais pas tant que ça. L.P.P. : Quelles solutions avancez-vous ? T.G.-R. : En Franche-Comté, nous avons une chance : le C.H.U. est implanté au milieu de tous les autres hôpitaux, les distances ne sont pas insurmontables. Je souhaite développer les postes partagés. C’est une conviction profonde chez moi. Le principe est d’aider les autres plateaux techniques (Pon tarlier, Dole, Lons-le-Saunier, etc.) en permettant aux pro fessionnels de santé, notamment ceux ultra-spécialisés d’exercer dans les autres hôpitaux, plus petits. Nous sommes dans la complémentarité, pas la concurrence. On aurait pu
POLITIQUE
Sa première interview
“Ce ministère de l’Agriculture, c’est une responsabilité de cœur pour moi” La nouvelle ministre de l’Agriculture, de la Forêt et de la Souveraineté
L a Presse Pontissalienne : Où sont allées vos pensées au moment d’être nommée ministre ? Annie Genevard : Il y a eu plusieurs temps. Le premier moment vraiment émouvant a été vécu le samedi soir au comice de Mouthe. Michel Barnier m’avait appelé quelque temps avant mais j’ai tenu à rester le soir auprès des agriculteurs pour l’annonce officielle de ma nomination. Cela avait à mes yeux beau coup de sens d’être là au milieu des éleveurs du canton et des élus locaux. L’explosion de joie à l’annonce de cette nomination a été évi demment très touchante. J’ai évidemment eu aussi une pensée pour ma famille, ma maman bien sûr avec qui j’ai partagé l’engagement dans la vie publique. J’ai été maire en même temps qu’elle l’était dans sa commune, j’ai été députée alors qu’elle l’avait été quelques années auparavant dans une autre circons cription. Forcément j’ai pensé à tout cela aussi à l’occasion du premier conseil des ministres. L.P.P. : Ce poste de ministre est un aboutissement pour vous ? A.G. : Oui, dans le sens où c’est le résultat de l’engagement que j’ai auprès du monde agricole depuis douze ans. Je dirais plutôt que c’est une continuité. J’ai énormément appris à leurs côtés, sur le plan professionnel, humain. Ce portefeuille de l’Agriculture, c’est une responsabilité de cœur pour moi. C’est un grand ministère qui concerne tous les Français, sans exception, car il touche aussi bien à des activités ancestrales qu’à l’avenir de ce pays, sa souveraineté ali mentaire, l’identité de ses terroirs, etc. L.P.P. : Certains vous voyaient à l’Éducation, d’autres à la Culture. L’Agriculture était un ministère auquel vous aviez songé ? A.G. : D’une certaine façon, ce n’a pas été une surprise pour moi car c’est tellement identifié à ce que je fais depuis plus de dix ans. J’ai souvent dit jusque-là que je me considérais comme la députée des agriculteurs. Je suis fière aujourd’hui d’être leur ministre. L.P.P. : Depuis votre installation, les dossiers se sont sans doute accumulés sur votre bureau. Comment allez-vous les empoigner ? A.G. : J’avoue que depuis le 23 septembre, je suis un peu comme dans une lessiveuse avec énormément de choses à prendre en main. Mes journées commencent à 6 heures du matin, elles se terminent à minuit, mais c’est bien dans la continuité de ce que j’ai toujours fait, je n’ai jamais rechigné au travail, c’est dans ma nature. J’ai toujours estimé que la vraie légitimité était dans le sérieux du travail. alimentaire nous a accordé sa toute première interview depuis sa prise de fonction. Son installation, les dossiers prioritaires qu’elle devra gérer, elle livre ses premiers sentiments.
(photo ministère de l’Agriculture)
Annie Genevard à son bureau du ministère de l’Agriculture à Paris.
je ne tomberai pas dans les petites phrases. Ceux qui me connaissent savent très bien que je ne fonctionne pas comme ça. L.P.P. : Le sujet du loup, notamment dans le massif du Jura, préoccupe au plus haut point les éleveurs. Que pouvez-vous en dire pour l’instant ? A.G. : Ce sujet capital est en ce moment au cœur des discussions européennes. Ce dossier appartient aux États membres et la Commis sion a demandé un affaiblissement du niveau de protection du loup. Même s’il faut toujours la protéger, cette espèce n’est plus à mon sens totalement menacée. Personne ne demandera l’éradication du loup, évidemment! Mais il faut désormais rendre sa protection compatible avec les activités d’élevage. C’est une espèce qui menace clairement l’avenir du pastora lisme, il faudra savoir faire bouger la législation sur le sujet. L.P.P. : Sur le plan plus politique, comment imaginer que ce gouvernement pourra travailler sereinement et dans la durée, avec des profils si différents ? A.G. : J’en appelle clairement au sens des res ponsabilités de chacun. Ceux qui se livrent à des petits jeux politiques inutiles ne feront que renforcer le dégoût des Français vis-à vis de la politique. Il faut revenir à l’essentiel. Les petites phrases, les règlements de compte, personnellement je ferai tout pour qu’il n’y en ait pas. Le moment est assez grave pour que tout le monde ne se mette pas au travail. L.P.P. : Reviendrez-vous souvent dans le Haut-Doubs dont vous avez vanté les attraits lors de la passation de pouvoir ? A.G. : Forcément, j’y serai moins présente. Mais j’y reviendrai chaque fois que l’occasion se présentera, c’est aussi essentiel pour moi. n Propos recueillis par J.-F.H.
A.G. : Il y a en ce moment en France des ter ritoires qui souffrent beaucoup. Toute l’agri culture française n’est pas forcément à l’image de la filière comté, loin de là. Ma priorité immédiate est donc de répondre aux territoires touchés par la fièvre catarrhale ovine et par la fièvre hémorragique. Je me devrai d’apporter des premières réponses à ces filières à l’équi libre économique très fragile, j’ai prévu de le faire à l’occasion de ma venue au Sommet de l’élevage à Cournon en ce début du mois d’oc tobre. L’autre actualité compliquée, c’est celle des récoltes de blé et des récoltes maraîchères qui ont subi des déficits en eau dans le Sud pour les secondes, et un trop-plein d’eau dans le Nord pour les premières, avec des rende ments en chute libre. Il faudra là aussi apporter des réponses rapides. Je n’oublie évidemment pas la colère du monde agricole qui s’est mani festée en début d’année et qui n’a pas obtenu toutes les réponses à ses inquiétudes. Il y a
encore beaucoup d’attentes d’autant que cette parenthèse de trois mois depuis la dis solution avait congelé l’action du gouvernement. En paral lèle, je prévois de rencontrer dès les prochains jours l’en semble des syndicats agri coles. L.P.P. : À ce propos, certains vous accusent déjà d’être le futur “passe plat” de la F.N.S.E.A. Que leur répon dez-vous ? A.G. : Je recevrai les quatre syndicats avec la même attention. Je n’attache pas beaucoup d’importance à ces préjugés et ces propos qui ne reposent pas sur grand-chose,
“Personne ne demandera l’éradication du loup !”
L.P.P. : Quels sont les dossiers prioritaires ?
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