La Presse Pontissalienne 306 - Juillet 2025
30 Culture
Juillet 2025
ORNANS
Un été avec Courbet “Renoir, Rodin, Cézanne… : des prêts exceptionnels de chefs-d’œuvre”
Le pôle Courbet a officiellement lancé sa saison culturelle, placée sous le signe de la nature. Jusqu’au 19 octobre, le musée Courbet accueille l’exposition Paysages de marche, dans les traces de Rousseau, Courbet, Renoir, Cézanne et les autres. L’artiste plasticienne à la renommée internationale Éva Jospin installe ses œuvres à l’Atelier Courbet.
B enjamin Foudral, depuis que vous êtes arrivé comme directeur et conservateur du pôle muséal Courbet, la thématique de la marche a été remise en lumière. Vous avez notamment exhumé des réserves du musée le bâton de marche de Gustave Courbet. Aujourd’hui, une exposition est consacrée aux Paysages de marche. Pourquoi ? Benjamin Foudral: Gustave Courbet était un peintre profondément attaché à sa terre, c’était un grand marcheur. Son
pays, comme il disait, est à la source de son art et de sa révolution picturale. Le rapport des artistes à la marche est un prisme assez inédit et très peu traité, alors qu’énormément d’expositions tour nent autour des paysages. Mais là, on ne s’intéresse pas seulement à ce que les artistes ont vu mais aussi à ce qu’ils ont vécu, leur rapport à la nature. Autour de Courbet, on retrouve des œuvres d’autres grands maîtres de la peinture, comme Renoir, Rousseau ou encore Cézanne… B.F. : Toutes les expositions tournent autour de l’idée que Courbet ne soit pas tout seul et dialogue avec d’autres artistes et ces contemporains. Autour de Courbet, de nombreux artistes ont eu le paysage comme fer de lance de leur modernité. Nous avons énormément de chefs-d’œuvre prêtés grâce à nos partenariats. On a un magnifique Renoir, du matériel de marche et d’alpinisme, les premières photogra phies en plein air. L’exposition se conclut sur une sculpture de Rodin, L’homme qui marche. C’est un prêt exceptionnel. Comment se découpe l’exposition ? B.F. : Il y a plusieurs salles thématiques qui ne sont pas vraiment chronologiques. On part sur les pas de ces artistes et on explore différentes modalités de marche : éloge de la lenteur, marcher dans l’in
mée internationale. Elle entretient des liens assez étroits avec l’art ancien et Courbet en particulier. Son univers est très imprégné de l’imaginaire, de l’histoire de l’art. C’est aussi une artiste avec un goût pour l’architecture, les lieux chargés d’histoire. On souhaitait un artiste capa ble d’investir par des pièces impression nantes cet écrin exceptionnel qui mal heureusement, de par son histoire, est assez vide. Éva Jospin a créé spécialement pour l’Atelier Courbet 6 œuvres inédites pensées en lien avec Courbet. Quelle a été la réaction d’Éva Jospin quand vous lui avez proposé cette carte blanche ? B.F. : Elle m’a répondu dans la journée en me disant que c’était son rêve. Il y a un vrai bel engagement d’Éva Jospin. Faire venir dans notre musée situé dans une petite ville et un territoire rural une artiste de renommée internationale, c’est tout ce qu’on porte au Pôle Courbet.
connu, marcher sur l’histoire, marche laborieuse, marcher dans le familier, etc. Dans Marcher dans l’inconnu, on décou vre le premier peintre alpiniste, Gabriel Loppé, qui a peint au sommet du Mont Blanc en 1860. On découvre différents environnements, différents paysages, comment l’expérience phy sique influence l’art.
Le fameux bâton de marche de Courbet.
80 000 visiteurs par au pôle Courbet.
Pierre Wat, historien de l’art, et professeur à la Sorbonne, raconte avec passion l’exposition, ici devant l’œuvre d’Auguste Renoir, Chemin montant dans les hautes herbes.
L’exposition au musée Courbet se distingue par des chefs-d’œu vre que l’on n’aura pas forcément l’occasion de revoir ensemble à Ornans. Et à quelques centaines de mètres, à l’Atelier Courbet, c’est une autre artiste de grande renommée qui s’installe avec une carte blanche. L’artiste plas ticienne Éva Jospin, c’était une évidence pour vous ? B.F. : C’était un souhait très vif de ma part. Éva Jospin est une artiste de renom
ATELIER COURBET Art contemporain La chambre d’écho d’Éva Jospin Une deuxième exposition à l’Atelier Courbet
qu’a fait Courbet.” “Les forêts et les grottes imaginaires d’Éva Jos pin dialoguent avec les mondes observés et éprouvés des peintures de Courbet” , éclaire le Pôle Cour bet. Dans cet atelier, vide de par son histoire - seuls subsistent du tra vail de Courbet, deux décors peints (la Seine près de Bougival et L’Escaut se jetant dans la mer) qui ornent le plafond de l’atelier originel - la plasticienne a sou haité occuper le centre avec ses sculptures. “L’espace central était occupé par le peintre et son maté riel, sa présence physique. On va se mouvoir dans l’espace du corps de Courbet.” Ses installations et sculptures de grande taille sont réalisées à partir de carton. “Le fait d’utiliser du carton me permet d’aller vers d’autres formes. C’est toujours une transposition. La façon dont est fait le carton avec des couches correspond à ma façon de tra vailler. Au début, le fait de choisir le carton était un geste de liberté,
La Chambre d’écho entre en résonance avec celle du musée Paysages de marche. Carte blanche a été donnée à l’artiste plasticienne Éva Jospin. Six œuvres inédites ont été réalisées à cette occasion.
P our la première fois depuis sa rénovation, l’Atelier Cour bet a donné carte blanche à une artiste. Si son nom est connu, ce n’est pas en raison de la car rière politique de son père, ancien Premier ministre. Artiste plas ticienne à la renommée interna tionale, Éva Jospin se distingue par la récurrence du motif unique de la forêt et du paysage. Obser vatrice du travail de Courbet, elle a imaginé six œuvres iné dites. Intitulée Chambre d’écho, l’ex
position présente des sculptures en carton, œuvres brodées en fil de soie ou encore dessinées. “J’aime le titre Chambre d’écho donné à l’exposition car c’est vrai ment l’idée d’un écho : comment le fait de regarder le travail de Courbet fait évoluer le mien” , sou ligne-t-elle. L’artiste cite notam ment un bas-relief de forêt : “C’est quelque chose que je ne fais jamais. Je représente la forêt mais jamais le portrait d’un arbre. Là, j’ai eu envie d’aller travailler le portrait, l’essence d’un arbre, ce
La Chambre d’écho d’Éva Jospin est à expérimenter dans l’Atelier Courbet.
je peux faire des grandes œuvres sans jamais être contrainte par la question du coût du matériau. Et avec un matériau qui ne fait pas école, on avance sur son propre
chemin.” L’une des œuvres d’Éva Jospin intégrera les collections du musée. n L.P.
Benjamin Foudral a donné la première carte blanche dans l’Atelier à Éva Jospin.
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