La Presse Pontissalienne 289 - Février 2024

Mouthe - région des lacs 25

La Presse Pontissalienne n°289 - Février 2024

LA CLUSE-ET-MIJOUX Une pollution persistante depuis dix ans Encore des débordements intempestifs dans le ruisseau de Fontaineronde À chaque montée des eaux importantes, les

“On n’éprouve plus aucun plaisir à venir pêcher à cet endroit”, expliquent Aurélien Dutal et son père Jean-Pierre qui dénoncent ces pollutions

habitués des lieux constatent des pollutions liées à la saturation des réseaux d’assainissement qui se déversent 100 mètres avant la confluence du ruisseau de Fontaineronde dans le Doubs. Face à la colère des pêcheurs, le Grand Pontarlier annonce le lancement d’un vaste programme de travaux qui sera engagé cette année. Explications.

“M aintenant à chaque fois qu’on constate ce phénomène de pollution, on alerte les médias, les collectivités, les administra tions concernées. Plus qu’un réflexe de pêcheurs, c’est une vraie démarche citoyenne. Cela fait dix ans que cela dure et on est est toujours au même point. Cette pollution est connue et signalée. Elle se produit plusieurs fois par an” , déplore Aurélien Dutal. Ce pêcheur et naturaliste fré quente depuis plus de vingt ans le ruisseau de Fontaineronde dont la qualité des eaux ne cesse de se dégrader. Après avoir constaté la disparition progres sive des truites, il observe une amplification du phénomène. “Cela ne touche plus unique ment les espèces sensibles à la qualité de l’eau mais tend à se généraliser. On assiste à une véritable désertification des milieux qui concerne d’ailleurs la plupart des rivières com toises.” Quelle est plus précisément la nature du problème ? Et pour quoi est-il si compliqué de trou ver des solutions efficaces et rapides ? Plusieurs réseaux d’as sainissement convergent à cet endroit, en provenance des Ver rières, des Fourgs, et des hameaux de La Cluse-et-Mijoux. C’est aussi ici qu’arrive en sens opposé le réseau d’assainisse

ment des communes autour du lac, sous compétence de la C.C.L.M.H.D. Un vrai carrefour. “Il existe encore des réseaux de type unitaire aux niveaux des quartiers du Frambourg et de la Tuilerie ainsi que sur le ter ritoire de la commune des Ver rières-de-Joux. Certains réseaux sont aussi en zone inondable. Conséquences, à chaque crue, il y a beaucoup d’eaux claires qui parasitent les réseaux d’assai nissement. À la connexion avec le réseau du lac, deux flux se per cutent et tout finit par ressortir au niveau des regards” , décrit Alexandre Potier, le responsable exploitation au service eau et assainissement du Grand Pon tarlier. D’autres facteurs expliquent aussi pourquoi ces débordements sont de plus en plus fréquents. “Ces réseaux datent des années soixante-dix, explique Daniel Defrasne, vice-président de la C.C.G.P. en charge de l’eau et de l’assainissement. Ils ne cor

récurrentes depuis des années.

Et ce qui ressort n’est jamais reluisant.

enregistre parfois des apports d’eaux claires qui dépassent 6 000 m 3 , soit l’équivalent de la consommation d’eau potable de plusieurs jours pour une ville comme Pontarlier.” La com’com a engagé depuis deux ans la réactualisation de son schéma directeur d’assai nissement. Des campagnes de mesures ont été réalisées pour identifier tous les secteurs pro blématiques à traiter comme à La Cluse et aux Verrières. “On effectue des diagnostics à l’in térieur des réseaux d’assainis sement par inspection télévisée. À l’échelle de la C.C.G.P., cela représente chaque année 30 km de réseau visualisés chaque année. L’inspection complète du réseau intercommunal sera ter minée dans dix ans” , souligne Alexandre Potier. Ces campagnes permettent de vérifier l’étanchéité des réseaux.

Un travail indispensable avant de programmer la mise en sépa ratif des réseaux dans les quar tiers encore équipés en réseau unitaire. Le passage en réseau séparatif impose aussi une mise en conformité des habitations dans un délai de deux ans. “Glo balement, cela se passe plutôt bien. Si rien n’est fait dans le délai imparti, on passe en pro cédure de mise en demeure.” La C.C.G.P. et la com’com des Lacs et Montagnes du Haut Doubs travaillent de concert pour trouver des aménagements évitant la saturation des réseaux au point de connexion. Sur les communes de La Cluse-et Mijoux et des Verrières-de-Joux, on compte 30 km de réseaux d’assainissement dont 4 km en unitaire et qui passeront en séparatif dans les années à venir. “Cela représente près d’1,4 mil lion d’euros” , illustre Alexandre Potier. La C.C.G.P. devra également investir au niveau de la station d’épuration de Doubs pour y réaliser un vaste bassin d’orage en prenant en compte les contraintes d’une station construite sur une nappe phréa tique très proche de la surface. “Notre intérêt, c’est de trouver les meilleures solutions pour réduire au maximum en amont ces apports d’eaux claires, ce qui permettra de dimensionner au mieux le bassin d’orage. La moti vation, les compétences sont là. Il ne reste plus qu’à trouver beau coup d’argent et le temps néces saire pour mener ce vaste chan tier” , observe Daniel Defrasne sans ignorer qu’il faudra aussi

respondent plus au besoin d’un territoire qui a beaucoup gagné en population grâce à l’écono mie frontalière. Ils ne sont plus adaptés pour absorber les fortes précipita tions liées au changement cli matique. On

“C’est une vraie démarche citoyenne.”

associations environnementales et aux pêcheurs. De quoi infor mer sinon apaiser la colère d’Au rélien Dutal et de son père Jean Pierre. “L’évolution de l’état des rivières n’est pas du tout en phase avec la réactivité des adminis trations. On ne comprend pas pourquoi on ne sanctionne pas autant les collectivités respon sables de pollution que les agri culteurs. C’est désespérant d’avoir toujours le sentiment de se heurter à un mur. En tout cas, on ne lâchera pas l’affaire” , assène Aurélien Dutal. n F.C.

trouver des solutions pour le traitement des boues qui ne pourront plus être épandues ou compostées sur les terres agri coles de l’A.O.P. comté. La réactualisation du schéma directeur d’assainissement au niveau du Grand Pontarlier sera finalisée fin 2024. Ce document a été présenté aux autorités administratives. “Le programme de travaux sur le secteur du ruisseau de Fontaineronde débu tera cette année et s’étalera sur deux ou trois ans. Une réunion sera organisée au printemps pour présenter ces projets aux

1,815 million d’euros au budget primitif assainissement en 2024 La facture d’entretien et de rénovation du réseau d’assainissement continue à s’alourdir en 2024. “Le montant des investissements avait déjà augmenté de 50 % l’an dernier. C’est en partie lié à la hausse des coûts de l’énergie, des matériaux, des produits de traitement des boues”, explique Alexandre Potier. 1,815 million d’euros sont inscrits au budget primitif 2024 dont 650 000 euros pour Pontarlier, 1 million pour les autres communes du Grand Pontarlier et 165 000 euros de dépenses imprévues. n

À chaque crue, les eaux usées se déversent

dans la nature.