La Presse Pontissalienne 289 - Février 2024

La Presse Pontissalienne n°289 - Février 2024 22 Le dossier l Le P’tit Panier Entre 180 et 200 familles accueillies chaque semaine La précarité s’installe durablement La fréquentation à l’épicerie solidaire a pratiquement été multipliée par cinq depuis la création de l’association en 2009 et rien n’indique qu’elle diminue. Augmentation des jours de distribution, rationnement des denrées en pénurie : pas d’autres choix que de s’adapter à la situation.

E n 15 ans, Martine Nor mand la présidente du P’tit Panier en a vu pas ser des familles dans le besoin. “On a commencé en juin 2009. À l’époque, on ouvrait deux jours par semaine et on aidait une quarantaine de familles. On est passé à trois jours d’ouverture en 2014 puis à quatre avec la crise du Covid. On accueille désormais entre 180 et 200 familles par semaine, ce qui repré sente entre 240 et 250 familles inscrites.” L’épicerie solidaire fonctionne en étroite concertation avec tous les services sociaux -C.C.A.S., C.M.S., A.D.D.S.E.A., A.D.A.P.EI., C.A.F. pour identifier et accompagner les familles dans le besoin. Ce sont les travailleurs sociaux qui définissent les sommes attribuées. Elles varient de 20 euros par semaine pour une personne seule jusqu’à 60 euros par semaine pour les grandes familles. “Rappelons que les bénéficiaires règlent 10 %

mais réduit d’autant ce qui était donné au profit de l’aide alimen taire. “La disponibilité des pro duits varie. En novembre, on man quait de pâtes, de conserves. Globalement, on est toujours cruel lement en déficit de protéines: viande, poisson, fromage. On en achète une partie et on pallie en distribuant des boîtes de thon et de sardines. On réduit les quan tités de café, sucre et de produits d’hygiène. L’État s’est engagé à nous fournir plus de produits en 2024” détaille la présidente.

de ce qu’ils achètent.” Le P’tit Panier est approvisionné par la Banque Alimentaire en charge de la ramasse dans les supermarchés du coin. Ces pro duits s’ajoutent à la collecte natio nale organisée en novembre der nier. L’association du P’tit panier compte une trentaine de béné voles. L’effectif a connu un creux suite au Covid avant de retrouver quelques fidèles. “Le forum des associations a permis de récupérer trois ou quatre personnes qui avaient envie de rendre service et qui viennent aussi pour tisser du lien social.” Une façon comme une autre d’échapper à la soli tude. La quantité de produits récupérée par la Banque Alimentaire est en forte baisse car les commer çants essaient eux aussi de vendre davantage les denrées en date limite de consommation avec des offres à - 40 %, - 50 % à J - 2 et J - 1. Cette stratégie profite sans doute aux familles dans le besoin

Le P’tit Panier accueille entre 35 et 50 familles à chaque après-midi de distribution.

mestre de l’année 2023 avec des semaines à 200 bénéficiaires puis la fréquentation s’est stabilisée à 180. L’activité est indexée sur le coût de la vie. On constate aussi que les gens viennent plus régu lièrement qu’avant” , poursuit Mar tine Normand, contrainte d’or ganiser un planning d’accueil strict pour maîtriser les flux. Cette exigence s’applique aussi aux bénévoles qui doivent respecter leurs engagements. “J’ai besoin au minimum de six personnes pour assurer les après-midi de distribution.” Les bénéficiaires trop âgés ou qui ne peuvent pas se rendre à l’épi cerie solidaire peuvent être appro visionnés grâce à la Croix Rouge qui organise des tournées de livraisons dans différents cen tres-bourgs du Haut-Doubs. n F.C.

grâce à la mise en place de ce nouveau local. Plus vaste, plus accessible, mieux chauffé, il offre des conditions d’accueil incom parables avec la petite salle des casernes Marguet. “On avait clai rement indiqué qu’on ne referait pas une année supplémentaire dans ce lieu ouvert aux quatre vents. On s’est beaucoup plaint mais aujourd’hui on est vraiment satisfait.” Le nouveau local a déjà connu plusieurs destinations: police municipale, micro-crèche, il servait encore de centre de dépistage du Covid jusqu’en novembre 2022 au moment de l’arrivée de l’épicerie solidaire. Les bénéficiaires sont majoritai rement des femmes, souvent des mamans isolées avec des enfants. Les seniors représentent 7 à 8 % du public. “On a enregistré des pics d’affluence au premier tri

tent la conservation des produits surtout en période estivale. “La Ville de Pontarlier met à dispo sition les locaux et prend à sa charge les coûts de chauffage et d’éclairage. On touche aussi une aide du C.C.A.S. et d’une trentaine de communes du Haut-Doubs forestier” , résume la présidente toujours sensible à ces témoi gnages de solidarité. Elle n’oublie pas de mentionner l’implication des jeunes des lycées Xavier-Mar mier, Jeanne-d’Arc et des Augus tins qui viennent toujours donner un coup de main, notamment au moment des collectes. Certains viennent dans le cadre du S.N.U. et d’autres participent au dispo sitif facilitant l’accès au permis de conduire sous réserve d’effec tuer quinze jours de bénévolat. Si le P’tit panier est toujours là et peut faire front, c’est aussi

L’activité est indexée sur le coût de la vie.

La petite épicerie a reçu l’an dernier des aides excep tionnelles de l’État et une belle sub vention d’Em maüs Les Fins, ce qui a permis à l’as sociation d’acqué rir des armoires réfrigérées et vitrées qui facili

l Haut-Doubs Le premier vice-président du Conseil départemental “Le nombre de personnes en difficulté est stable, mais les besoins augmentent”

aide s’élevait à 120 000 euros en 2022.

L.P.P. : Et sur le plan du logement, que faites vous ? L.F. : On a mis en place le dispositif “Le logement d’abord” auprès des ménages pour favoriser l’accès au logement et prévenir les expulsions. En 2023 sur le Haut-Doubs, 102 ménages sont pas sés au tribunal dans le cadre d’une mesure d'expulsion. Le Département a accompagné 220 ménages menacés d’expulsion. 387 ménages ont également bénéficié d’aides financières par le biais du Fonds Solidarité Logement ou pour surmonter l’envolée des coûts de l’énergie. Certains ménages ont reçu jusqu’à 600 euros pour régler leur fac ture énergétique. Au total, cela repré sente 220 000 euros L.P.P. : Les ménages dans la précarité sont ils en augmentation ? L.F. : Non, il n’y a pas plus de demandes. C’est le montant global des aides qui évolue à la hausse. L.P.P. : Tous les acteurs de la précarité travaillent en concertation ? L.F. : On organise plusieurs fois par an des conférences territoriales de l’action sociale, ou C.T.A.S. C’est l’occasion de réunir tous nos partenaires : com’com, associations, acteurs économiques pour continuer à collaborer. Ces conférences sont souvent ciblées sur une théma tique. n Propos recueillis par F.C.

tiny house déployé avec les entreprises pour pouvoir loger rapidement des jeunes dans de bonnes conditions avec des loyers variant entre 350 et 400 euros par mois. L.P.P. : Le Département attribue-t-il des aides financières ? L.F. : Oui, bien entendu. Il existe diffé rents fonds : aide sociale à l’emploi, le fonds insertion, le fonds de solidarité logement… En 2023, 1 073 ménages du Haut-Doubs ont bénéficié d’un sou tien pour se nourrir ou dans les actes de la vie quotidienne. Cela représente plus de 150 000 euros. Tous ces ménages ne sont pas forcément au R.S.A. Il peut y avoir des travailleurs pauvres qui poussent la porte d’un C.M.S. par obte nir des chèques-services, du numéraire, des paiements à tiers. On travaille tou jours en étroite collaboration avec les associations d’aide alimentaire : Croix Rouge, Banque alimentaire, Secours catholique, Restos du cœur… En 2023, le Département a versé 220 000 euros de soutien à l’aide alimentaire pour répondre à l’augmentation de la demande et à la raréfaction des appro visionnements. Rappelons que cette

Si le Haut-Doubs offre plus de possibilités de retour à l’emploi qu’ailleurs, c’est aussi un territoire plombé par le coût de la vie et qui traverse une crise du logement sans précédent. Face à ces contraintes qui pèsent sur les ménages les plus pauvres, le Conseil départemental muscle son accompagnement et renforce sa contribution financière. Explication avec Ludovic Fagaut, 1 er vice-président, en charge du retour à l’emploi, de l’insertion et de l’action sociale.

hon. 50 personnes dans le Haut-Doubs entre chaque mois dans le dispositif R.S.A. Pour chacun, le C.M.S. concerné propose un accompagnement indivi dualisé. L.P.P. : Y a-t-il plus d’entrants que les années précédentes ? L.F. : Non, c’est assez stable. En revanche, depuis octobre ou novembre dernier, on enregistre plus de sorties que d’en trées. Cela signifie que l’accompagne ment vers le retour à l’emploi semble assez efficace. On a aussi certaines personnes qui sortent car leur situation a évolué et elle ne correspond plus aux critères d’éligibilité. Sur le Haut-Doubs, on met l’accent sur l’accompagnement à l’emploi et à l’information des per sonnes notamment pour le logement. On peut rappeler d’ailleurs le dispositif

contraints de s’éloigner de la bande frontalière pour trouver des logements disponibles à des prix abordables. Bien sûr, dans le Haut-Doubs comme ail

La Presse Pontissalienne : Comment définir la pauvreté en France ? Ludovic Fagaut : Au niveau national, le seuil de pauvreté est de 965 euros ou de 1 158 euros par mois selon qu’il est fixé à 50 % ou à 60 % du niveau de vie médian. C’est l’Observatoire des iné galités qui publie ces différents seuils. La pauvreté ne se caractérise pas seu lement par un manque d’argent. Il existe d’autres indicateurs : précarité énergétique, alimentaire, voire numé rique. Le Haut-Doubs occupe une place assez particulière dans ce contexte. Il bénéficie d’une situation économique plutôt favorable avec un taux de chô mage inférieur à 5 %, soit plus de 2 points sous la moyenne nationale qui avoisine 7,4 %. Ce territoire est aussi en très forte tension au niveau du loge ment. On voit beaucoup de gens

leurs, les familles sont aussi impactées par la hausse du coût de la vie. L.P.P. : Combien y a-t-il de bénéficiaires du R.S.A. dans le Haut-Doubs ? L.F. : On compte 1 061 ménages, dont 600 accompagnés par France Travail et le reste par les quatre Centre Médico-Sociaux du Haut-Doubs implan tés à Pontarlier, Mor teau, Maîche et Valda

“1 073 ménages du Haut-Doubs ont bénéficié d’un soutien.”

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