La Presse Pontissalienne 289 - Février 2024

18 Le dossier

La Presse Pontissalienne n°289 - Février 2024

Précarité : une année de misère dans le Haut-doubs

Si l’année 2023 n’a pas été facile à traverser pour les classes moyennes avec l’inflation, l’envol des coûts de l’énergie, des taux d’intérêt, des loyers, que dire des publics précaires qui peinaient déjà à joindre les deux bouts ? Qui plus et, dans ce Haut-Doubs qui transpire les signes extérieurs de richesse et où, par conséquent, les pauvres sont plus pauvres qu’ailleurs.

l Précarité

Témoignage

“Ici, quand on n’a pas d’argent, on n’est rien !” Originaire du Pas-de-Calais, Patrick, 60 ans, avait déjà vécu pas mal de galères avant de venir s’installer dans le Haut-Doubs en 1989. Aujourd’hui au chômage, ce passager régulier de l’association Travail et Vie, aspire à retrouver la santé et une situation sociale plus stable pour voir l’avenir de façon plus heureuse.

Conscient de ses fragilités mais toujours optimiste, Patrick, le Ch’ti, attend avec impatience la retraite pour donner corps à des projets artis tiques et des envies de voyage.

E nfant de la D.D.A.S.S., ce Ch’ti a grandi dans une famille d’accueil très aisée avec qui il a eu la chance de beaucoup voyager un peu partout dans le monde. Ce qui explique sans doute ce côté globe-trotter qui ne le quittera jamais. Titulaire d’un C.A.P. de maçon gros œuvre, il commence par travailler dans le bâtiment puis se perfectionne dans le bri quetage thermique industriel. Ne tenant pas en place, voire instable, il mène alors une vie de saltimbanque qui le conduit en 1989 dans le pays de Mont béliard où il restera pendant une quinzaine d’années en travaillant chez Peugeot. “Je faisais un peu

de tout mais j’étais déjà en proie à des addictions avec l’alcool ou la drogue. Je n’arrivais plus à tenir” , explique celui qui décide alors de venir dans le Haut-Doubs en 2004. À Métabief plus préci sément avec l’espoir d’y trouver du travail. Sa croisade aboutira deux ans plus tard à Pontarlier où il retrouve un emploi de maçon. Ses fragilités sont toujours là. Il est souvent contraint de changer de travail. “Je viens à Travail et Vie depuis deux ou trois ans et je partage avec un autre passager un petit logement mis à disposi tion par l’A.D.D.S.E.A. Je suis au chômage depuis un an et aujourd’hui, j’aimerais retrouver

un emploi et un logement pour moi seul.” Un beau projet, encore faut-il trouver l’appartement et avoir les moyens de régler un loyer mensuel. C’est déjà com pliqué quand on est en meilleure situation que lui.

avoir le temps de s’ennuyer, ayant la chance de fréquenter beaucoup de monde notamment sur les réseaux sociaux où il trouve des amis et des tas d’informations. “Dans mon malheur, j’ai toujours eu la chance de croiser des per sonnes qui m’ont sorti la tête de l’eau” , apprécie celui qui aujourd’hui s’étonne du rajeu nissement de la précarité. “Je dis avoir beaucoup d’amis. Je connais du monde mais des vrais sur les quels je peux compter, il y en a une dizaine au maximum. Je me répète, mais il faut absolument

aider l’association Travail et Vie. Ils sont formidables.” S’il ne se plaint pas trop de son sort, assumant ses excès, il se sent parfois mal à l’aise dans la rue. “À Pontarlier, on est assez mal vu. J’ai parfois l’impression qu’on nous prend pour les rebuts de la société. Je ne ressentais pas cela à Montbéliard. Ici, quand on n’a pas d’argent, on n’est rien !” Dès qu’il ira mieux, il compte bien se remettre au vélo de route et se voit déjà faire un tour de France. n F.C.

humaine qui lui manquait. “Ils font un sacré boulot, aussi bien le personnel que les bénévoles. Travail et Vie, c’est mon oxygène. Sans eux, je ne pense pas que je serais encore de ce monde” , explique le passager qui va aussi déjeuner au Restos du cœur. À 60 ans, Patrick attend impa tiemment d’être officiellement en retraite pour renouer avec des passions comme la photographie ou le vélo. “J’adorais faire de la photo en studio, du shooting, et j’aimerais faire des expositions.” Même au chômage, il dit ne pas

À force d’avoir abusé d’un peu de tout, Patrick a fini par être rattrapé par des soucis de santé. Il ne tarit pas d’éloges sur l’as sociation Travail et Vie où il a trouvé de quoi se nourrir et la chaleur

Il ne tarit pas d’éloges sur l’association Travail et Vie.

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