La Presse Pontissalienne 221 - Mars 2018
L’INTERVIEW DU MOIS
La Presse Pontissalienne n° 221 - Mars 2018
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TERROIR
Le président du G.P.P.R.
“Je défends le modèle
Michel Renevier, vice-président de la Chambre régionale d’agriculture est aussi le président de Gastronomie et Promotion des Produits régionaux (ex-C.P.P.R.), de retour de Paris où les producteurs de la région n’ont glané pas moins de 382 médailles au concours général agricole. Une moisson inédite. d’une agriculture à taille humaine”
L a Presse Pontissalienne : Faut-il relativiser cette performance au prétexte que le G.P.P.R. rassemble désormais les deux ex-régions Bourgogne et Franche-Comté ? Michel Renevier : C’est une perfor- mance exceptionnelle même si en effet, sur ces 382 médailles, 289 concernant les vins, pour la gran- de majorité de Bourgogne. Ceci dit, les vins du Jura ont obtenu d’ex- cellents résultats. Le domaine de Savigny à Château-Châlon a même obtenu un prix d’excellence, au même titre que le salaisonnier Mor- teau Saucisse. Sur le plan natio- nal, il y a eu que 14 prix d’excel- lence qui récompensent une qualité exceptionnelle dans la durée. Les fromages et produits laitiers, essen- tiellement francs-comtois, totali- sent 39 médailles. Une excellente performance. L.P.P. : Quelle valeur a ce concours géné- ral agricole ? M.R. : Au-delà du caractère symbo- lique, ce concours organisé par le ministère de l’Agriculture a une véri- table valeur aux yeux des produc- teurs pour qui ce genre de médailles est très valorisant. Et sur le plan commercial, l’impact est loin d’être négligeable. Quand un client a en face de lui deux produits dont l’un a une étiquette de médaillé, la plu- part du temps, il choisira celui-ci.
tion. Sur la trentaine de filières membres du comité, près de la moitié sont des bourguignonnes. C’est pour l’ensemble de ces filières bourguignonnes et franc-com- toises que l’on travaille désormais depuis un an à travers les grandes manifestations comme le salon de l’agriculture, la Foire comtoi- se ou la foire gastronomique de Dijon. Autour de Marie Beneux la directrice du G.P.P.R., cinq per- sonnes s’attachent à remplir la mission principale du G.P.P.R. qui est la promotion collective des produits du terroir. L.P.P. : Certaines grosses filières déjà bien organisées n’ont sans doute pas besoin du G.P.P.R. pour se développer, comme le comté ou les vins de Bour- gogne ? L.P.P. : Sans doute, car elles sont suffisamment structurées, mais cela ne les empêche pas de coti- ser au G.P.P.R. par solidarité. Beaucoup de filières, moins struc- turées car ayant moins de moyens, sont très attachées à cet orga- nisme de promotion. L.P.P. : Quel est le budget annuel du G.P.P.R. ? M.R. : Il est de 500 000 euros annuels, dont 100 000 euros de cotisation environ. Le reste pro- vient de partenariats à l’occasion de manifestations ponctuelles pour lesquelles nous assurons l’organisation partielle. Par exemple, le week-end gastrono- mique du Chat Perché à Dole où on vend notre prestation à l’as- sociation organisatrice. Le reste du budget provient du Conseil régional et des partenaires ins- titutionnels. L.P.P. : Ce changement d’échelle et d’ap- pellation était également là pour faire oublier les errances de l’ex-C.P.P.R. où l’ancien directeur avait tendance à confondre ses intérêts personnels avec ceux du comité ? M.R. : Tout cela est en effet der- rière. L’équipe du G.P.P.R. avec sa directrice a largement été renouvelée, avec des nouveaux collaborateurs, et on regarde désor- mais devant nous. L.P.P. : Le temps des grands salons à l’étranger, coûteux et à l’impact incer- tain, est également terminé ? M.R. : Avec le nouvel exécutif régio-
Bio express
l Michel Renevier est agriculteur à Charcenne en Haute-Saône, où il partage son exploitation entre polyculture et élevage de charolaises. Après avoir été à la tête de la chambre départementale d’agriculture de Haute-Saône, puis président de la chambre régionale d’agriculture de Franche-Comté, il occupe aujourd’hui les fonctions de vice-président de la Chambre Régionale d’Agriculture de Bourgogne- Franche-Comté et de Président du comité “Gastronomie et Promotion des Produits Régionaux” (G.P.P.R.) Bourgogne- Franche-Comté.
Michel Renevier préside le G.P.P.R. depuis deux ans. Il avait succédé à Joseph Parrenin.
nal, il y a eu une grande clarifi- cation des missions de chacun. Quand il s’agit d’accompagner des entreprises à l’étranger, c’est le rôle de la Chambre de com- merce régionale avec son volet export. Le G.P.P.R. n’a pas voca- tion à accompagner telle ou tel- le entreprise en particulier, mais des filières. Quand il y a une opé- ration à l’étranger, on ne s’inter- dit pas d’intervenir, mais ce n’est pas notre vocation. Par exemple, si les vins du Jura font une opé- ration à Londres, on peut appor- ter un peu de notre logistique. Mais ça s’arrête là. L’important est d’éviter les doublons ou les dépenses inutiles. La Région sou- haitait cette clarification, elle a eu lieu et c’est tant mieux. L.P.P. : Vous êtes également vice-pré- sident de la Chambre régionale d’agri- culture et vous-même exploitant. Qu’at- tendez-vous des états généraux de l’alimentation et des discussions entre les producteurs et les distributeurs ? M.R. : On en a beaucoup parlé pen- dant le salon et il y a une atten- te forte de la profession agricole. On avait eu l’impression que la grande distribution donnait un signal positif en s’engageant mora- lement pour que les producteurs soient mieux rémunérés par les éventuelles hausses de prix. Mais en même temps, on ne peut que rester dubitatifs sur la volonté de voir l’agriculture monter en gamme et voir les discussions autour du Mercosur (le marché
commun du Sud) qui annoncent une ouverture du marché à des pays qui n’ont pas les mêmes standards de qualité que nous. Il y a une forme de contradiction qui nous échap- pe un peu. L.P.P. : Sur un plan plus régional, com- ment entrevoyez- vous la suite ? M.R. : Il y a une vraie volonté sur le plan régional, réaffirmée par la
L.P.P. : Quel modèle d’agriculture défen- dez-vous ? M.R. : Je défends le modèle d’une agriculture à taille humaine, avec des produits de qualité - notre région est bien placée de ce côté- là - et qui doit toujours recher- cher la montée en gamme. Bien sûr les regroupements d’exploi- tations restent souvent néces- saires notamment pour des rai- sons sociales et quand on est dans des produits conventionnels où la compétitivité en termes de prix est primordiale. Mais nous avons la chance d’être ici dans une région où de nombreuses productions sont valorisées. Il faut jouer sur cet atout indéniable. L.P.P. : Ne pensez-vous pas qu’avec les scandales récents comme Lactalis, les consommateurs perdent de plus en plus confiance envers l’agroalimentaire ? M.R. : Il y a une grosse différence entre quelques affaires très média- tisées, à juste titre, et la réalité du terrain. Globalement, la confiance est toujours là et si l’on compare avec il y a une trentai- ne d’années, la sécurité alimen- taire est beaucoup plus stricte aujourd’hui. Seulement mainte- nant, avec les réseaux sociaux et la médiatisation, on ne laisse plus rien passer. Jamais les consom- mateurs ont eu autant d’impor- tance et c’est une bonne chose. Consommateurs comme produc- teurs, on a tous à cœur d’aller vers le haut. n Propos recueillis par J.-F.H.
“50 % de l’approvi-
L.P.P. : Depuis un an, on ne parle plus de “comité de pro- motion des produits régionaux” (C.P.P.R.) mais de “gastrono- mie et promotion des produits régio- naux (G.P.P.R.). Au- delà du sigle, qu’est- ce que cela change ? M.R. : Le C.P.P.R. était unique- ment franc-com- tois et ce modè- le franc-comtois a été dupliqué pour l’adapter à la nouvelle échel- le régionale Bourgogne- Franche-Comté. À cette occasion, des filières bour- guignonnes ont rejoint l’associa-
sionnement en produits locaux.”
“Globalement, la confiance est toujours là.”
présidente Marie-Guite Dufay, d’atteindre d’ici la fin de sonman- dat les 50 % de l’approvisionne- ment des cantines des lycées et des collèges en produits locaux, dont 20 % en bio. Je pense que c’est jouable. Nous sommes en train de travailler avec les entre- prises de logistique notamment pour réorganiser les choses. Cela se joue également dans les appels d’offres : plutôt que de faire de grosses commandes auxquelles les producteurs locaux ne pour- raient pas répondre, il faut rai- sonner en allotements. On peut y arriver. C’est d’ailleurs dans l’esprit du monde agricole régio- nal que de fonctionner en écono- mie circulaire.
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