La Presse Pontissalienne 218 - Décembre 2017

PONTARLIER 16 CHASSE

La Presse Pontissalienne n° 218 - Décembre 2017

La grogne des agriculteurs Le sanglier pointe durablement son groin dans le Haut-Doubs

Favorisé par des conditions très favorables, l’animal commence à s’installer durablement sur les hauteurs du département. Ce qui ne va pas sans irriter les agriculteurs locaux peu habitués à subir des dégâts qu’ils estiment insuffisamment indemnisés au regard du préjudice subi.

tiques dont celle des impacts sur le monde agricole. Personne ne conteste la recrudescen- ce des dégâts de sangliers dans le Haut- Doubs tout comme dans d’autres sec- teurs du département. Plus de dégâts sous-entendent plus de sangliers. “Cet- te recrudescence est essentiellement liée à une très bonne reproductivité du san- glier sur la saison 2017. Tout est parti d’une très bonne fructification forestiè- re à l’automne 2016 qui a optimisé la réussite des portées. Les jeunes femelles sangliers sont fécondables quand leur poids varie entre 30 et 40 kg. Comme l’automne 2016 était riche en nourri- ture, elles ont donc atteint plus vite leur maturité sexuelle. À cause du gel au printemps 2017, il y avait très peu de faînes au sol. Les compagnies de san- gliers sont sorties des bois pour se nour- rir dans les champs, ce qui a entraîné plus de dégâts. Le phénomène reproduit cet automne” , décrit Jean-Maurice Boillon, le président de la Fédération de chasse du Doubs. S’ajoute aussi l’in- contournable réchauffement climatique et la douceur des hivers propice à la survie du gibier. Dans certains coins du Haut-Doubs comme à Chapelle-des-Bois ou dans les alpages, la surpopulation s’explique par l’abondance de chasses privées, d’une surface supérieure à 40 hectares où l’on tire très peu le sanglier, préférant de loin la bécasse ou le lièvre. “C’est assez culturel, rappelle Guy Scalabrino. Les chasseurs du Haut-Doubs chassaient peu le grand gibier qui était beaucoup moins présent qu’aujourd’hui.” La proximité de la Suisse où la saison de chasse au sanglier est beaucoup plus tardive participe aussi à cet effet réser- ve où le sanglier se réfugie sans deman- der son reste ni présenter ses papiers d’identité. Dans ces circonstances, la Fédération n’a pas trop les moyens d’agir sinon d’inciter les propriétaires à renforcer la pression de chasse sur le grand gibier. Quand la situation empi- re, elle passe alors le relais à la D.D.T.

“L e problème est récurrent et les dégâts ne cessent de s’am- plifier d’une année sur l’autre. On a encore été bien touché cet automne” , lâche Johan Bez, producteur de lait à comté installé au lieu-dit Les Cerniers sur la commune de Pontarlier.Au printemps 2015, cela représentait pratiquement 4 hectares de trous, soit 10 hectares de prairies dégradées, soit une perte de production de 5 000 litres de lait par mois à une période où les bêtes sont à l’herbe et le lait est facile à produire. “Le préjudice réel est bien supérieur au montant de l’indemnisation dont le mode de calcul a été défini sur des zones de cultures, ce qui n’est pas adapté aux régions her- bagères. Sur des dégâts en prairie de fauche, on n’a guère d’autre choix que de labourer. Quand ils se produisent dans les pâtures, la remise en état s’ef- fectue manuellement.” S’il est sceptique sur la réalisation du plan de chasse sangliers sur son sec- teur, Johan Bez fait quand même par-

tie des cellules de veille composées d’agriculteurs et de chasseurs locaux qui servent de sentinelles des dégâts de sangliers à l’échelle d’une unité de gestion cynégétique. “À chaque cas, on fait remonter les informations à la Fédé- ration qui dépêche sous huitaine un estimateur sur le terrain.” Guy Scala- brino, représentant les agriculteurs de la F.D.S.E.A. auprès de l’administra- tion et de la Fédération de chasse croit beaucoup à l’utilité de ces équipes de terrain. “C’est important de régler les problèmes en direct. De toute façon, on

est condamné à s’en- tendre avec les chas- seurs” , note celui qui est aussi membre de la commission départe- mentale de chasse et de la faune sauvage. Laquelle se réunit tous les deuxmois à laD.D.T. sous la responsabilité du préfet pour évoquer différentes probléma-

Le prélèvement a été fixé à 4 500 sangliers.

habilitée à prendre des mesures : bat- tues administratives, battue de décan- tonnement, tir de régulation… “Ce qui a été fait cet automne sur Chapelle-des- Bois” , note Jean-Maurice Boillon. L’outil de régulation le plus efficace res- te encore le plan de chasse. Cette sai- son, le prélèvement a été fixé à 4 500 sangliers sur le département, un chiffre jamais atteint dans le Doubs. “Le pré- lèvement varie habituellement entre 2 500 et 3 500 sangliers.Après troismois de chasse, on compte 2 403 sangliers prélevés, on devrait donc atteindre l’ob- jectif fixé.” Sur la question de la méthode d’esti- mation des dégâts qui serait inappro- priée aux zones herbagères, Jean-Mau- rice Boillon un rien agacé rappelle qu’il s’agit d’une loi et encourage le monde agricole à s’adresser aux bonnes ins- tances pour ajuster les textes. “Toutes les indemnisations agricoles sont déjà à la seule charge des chasseurs. Je ne cherche pas àminimiser les dégâts mais il faut comprendre que ce n’est pas à la

Fédération de faire en sorte que les mon- tants augmentent.” En année “normale”, la Fédération du Doubs verse entre 250 000 et 280 000 euros d’indemnisation aux agriculteurs. “Cela peut monter jusqu’à 380 000 euros, ce qui devrait sans doute être le cas quand on bouclera la saison en juin 2018. On n’a jamais dépassé le plafond de 400 000 euros dans le Doubs. Il faut savoir que le Doubs reste l’un des dépar- tements les moins touchés en France.” Le président insiste sur la nécessaire entente entre chasseurs et agriculteurs pour maintenir un bon équilibre. Car si les populations de sangliers se por- tent plutôt bien c’est loin d’être le cas de leur seul prédateur. Le nombre de chasseurs a baissé de 20 % en dix ans dans le Doubs, passant de 10 000 àmoins de 8 000 aujourd’hui. “Moins il y aura de chasseurs, plus il y aura de sangliers et de dégâts” , affir- me sans trop se tromper leur président dans le Doubs. n F.C.

Les dégâts sont particulièrement importants cet automne dans certains coins du Haut-Doubs comme ici à la ferme du Cernier située aux Étraches sur la commune de Pontarlier.

ASSOCIATION Mobilisation L’Esperluète saisie par une brise d’optimisme D’un avenir incertain il y a un an, ce café littéraire s’appuie désormais sur un groupe plus étoffé soucieux de faire vivre les lieux autour de l’échange et du partage.

L’Esperluète accueille régulièrement des auteurs comme ce fut le cas

dernièrement avec Philippe Forest venu échanger avec le public dans le cadre des Petites Fugues.

R appel des faits. Fin d’an- née 2016, Martine et Jean-Bernard qui assu- raient alors l’essentiel des permanences depuis l’ou- verture de l’Esperluète en 2014 annoncent qu’ils sont prêts à jeter l’éponge. Une conclusion avancée alors sans regret avec la satisfaction d’avoir tenté quelque chose qui leur tenait à cœur. Elle rêvait depuis long- temps d’ouvrir “un lieu de débat ouvert où les gens puissent venir discuter, s’exprimer, lire.” Des rencontres littéraires étaient alors organisées en partenariat avec la librairie Rousseau. C’est toujours le cas en 2017.

L’Esperluète est tenue par l’as- sociation Rencontres autour d’un café et d’un livre. Sauf qu’on ne se bousculait pas par- mi les adhérents pour assurer les permanences ou apporter des idées d’animation, de dis- cussions sur tel ou tel thème d’échange : un auteur, un fait de société, l’art, la politique, l’environnement, les Droits de l’Homme…À l’écart de l’agita- tion de la Grande rue, le café littéraire de la rue Vannolles peine aussi à attirer un public à la recherche d’un lieu calme pour discuter, méditer, travailler ou se reposer. De quoi se poser des questions.

Fallait-il se résoudre à voir dis- paraître le seul café littéraire du Haut-Doubs ? Certains ont estimé que non. Un groupe d’une quinzaine de personnes com- posé d’habitués des lieux et de nouveaux s’est manifesté pour reprendre le flambeau des per- manences. “C’est le premier objectif à tenir” , explique Gérard Voinnet, adhérent à l’associa- tion. Comme lui, ils sont une quinzaine à se relayer du mar- di au samedi pour assurer une présence dans cet espace ouvert de 10 heures à 12 heures et de 14 heures à 18 heures “On tour- ne par demi-journée avec le ren- fort ponctuel d’amis.” Ce dispo-

sitif est en place depuis janvier. Le service reste inchangé et cha- cun peut venir déguster un café, un thé, un chocolat chaud, un sirop, des cookies. L’autre chan- gement notoire s’apprécie dans la décoration avec des toiles d’auteur qui recouvrent les murs. “On souhaitait accueillir des expositions sans que cela fasse double emploi avec les Annon- ciades. Seule exigence, que chaque exposition soit honorée de la pré- sence de l’artiste pour un temps d’échange.”

Sans savoir encore si cela a eu un impact sur la fréquentation des lieux, cette ouverture artis- tique a indéniablement appor- té un surcroît de notoriété pour ce café littéraire qui le mérite sans doute. L’Esperluète a récem- ment laissé à voir les œuvres de David Graux, auteur de sur- prenantes toiles réalisées au stylo à bille. Le peintre-paysa- giste bisontin Pascal Lombard s’affichait en novembre. Il est aujourd’hui remplacé par Domi- nique Sosolic, graveur. “On peut

quand même se féliciter d’avoir des artistes de renom. En février, la section arts plastiques du lycée Xavier-Marmier viendra expo- ser ici.” Un souffle de jeunesse ne nuit jamais dans les cafés littéraires. La musique a toujours droit de citer à l’Esperluète avec la pro- grammation de quelques concerts, récitals… “On voudrait décloisonner le petit monde des associations pontissaliennes, fai- re en sorte qu’elles sortent de leur cocon.” Vaste chantier. n

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