La Presse Pontissalienne 208 - Février 2017

JURA VOISIN

La Presse Pontissalienne n° 208 - Février 2017

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SOCIÉTÉ

Quand le rêve vire au cauchemar “Je voudrais juste récupérer ma maison !” Lorsqu’en 2007 Christine Mateus acheta un vieux corps de ferme pour lequel elle avait eu un véritable coup de cœur, elle ne doutait pas que 10 ans plus tard, elle serait en pleine bataille judiciaire pour récupérer son bien.

Du rêve de Christine, il ne reste plus qu’un tas de ruines.

C hristine avait un rêve : celui d’être famille d'ac- cueil pour enfants défa- vorisés et posséder des animaux de ferme. En 2007, lors- qu’elle visita cette vieille bâtis- se de 1778 située à Supt, près de Censeau, elle comprit immé- diatement que ce serait ici que

frère et la sœur à réparer la toi- ture et à la consolider. Le mon- tant des travaux est alors esti- mé à 60 000 euros. Face au danger que représentait un toit prêt à s’effondrer, lamairie signe un arrêté de mise en péril sur lequel elle s’engage à commen- cer les travaux si les voisins ne le faisaient pas dans les 2 mois suivants. Christine est priée de quitter les lieux sur-le-champ, en laissant ses meubles et tous ses souvenirs. Elle s’installe chez

son rêve se réaliserait. Elle ache- ta la partie avant de la maison, séparée en deux par la poutre faîtière. Elle entreprit des tra- vaux elle-même : plomberie, élec- tricité, rénovation… “Il y avait énormément de travaux à faire mais j’aimais tellement cet endroit que rien ne me faisait peur” déclare la propriétaire des lieux. Un frère et une sœur vivaient de l’autre côté. Lorsque leur père mourut en 2008, la fratrie quit- ta rapidement les lieux, refu- sant l’héritage immobilier lais- sé par les parents. C’est à partir de ce moment-là que les ennuis commencent. Au cours de l’hiver 2008-2009, le toit s’écroule en partie dans la partie demeurée vide de la ferme. Lamairie du village prend les choses enmain en dépêchant un expert en octobre 2010. Sui- te à cela, le tribunal adminis- tratif de Besançon condamne le

tement saisie de son avocat et a porté plainte contre sa mai- rie. Aujourd’hui, elle est en atten- te de jugement. La jeune maman de trois enfants est une femme fatiguée, affaiblie par des années de lutte et ressentant une pro- fonde injustice. “Je ne deman- de qu’une chose aujourd’hui : être libérée de cet enfer. J’ai enco- re près de 70 000 euros à rem- bourser pour une maison qui ne m’appartient plus depuis 7 ans. Je voudrais ne plus sentir ce poids sur mes épaules et ne plus en faire souffrir ma famille.” Évelyne Comte, maire de Supt, n’a pas souhaité répondre aux questions relatives à cette affai- re, “cette dernière étant actuel- lement entre les mains de la justice” dit-elle. n M.R.

bout de nerfs, la jeune femme se met en relation avec un avo- cat pour qui la faute incombe à la municipalité. Le dossier ne cesse de s’épaissir et en 2016, après trois passages à la pré- fecture du Jura, Christine se voit attribuer la somme de 75 000 euros, acceptée par la mairie de Supt pour le rem- boursement de son bien et des travaux effectués. Du moins, c’était ce qu’elle croyait carmoins d’unmois après cette décision, elle reçoit une lettre de la Communauté de Communes de Champagnole qui lui donne l’ordre de procéder à la réparation de son toit. Si elle ne se soumet pas à cette déci- sion, elle recevra une amende de 50 000 euros et sera passible d’un an d’emprisonnement. Christine s’est alors immédia-

L’hiver s’écoule…et le devis pas- se de 60 000 à 160 000 euros. Convoquée à la préfecture, la mairie décrète ne pas posséder cette somme et refuse alors d’en- tamer les travaux. De plus, Christine se voit refuser l’accès à sa propre demeure. Elle n’avait plus le droit d’y récupérer ses effets personnels. Afin qu’elle ne soit pas tentée de pénétrer chez elle, des gendarmes font des rondes régulières. Au prin- temps 2011 cependant, avec l’ai- de des forces de l’ordre, elle peut retourner dans sa maison pour y récupérer un maximum d’ef- fets personnels. Entre 2011 et 2014, Christine a déposé 6 plaintes pour van- dalisme et vol. Les assurances ne la suivent plus et, en 2015, le toit qui couvrait sa partie de maison s’écroule à son tour. À

son petit ami, bien que la municipa- lité ait été tenue de la reloger : “Je ne voulais pas les déranger, admit- elle dans un sou- pir. Je me suis donc installé chez mon ami, persua- dée que cela ne serait que provi- soire.”

Elle recevra une amende de 50 000 euros.

Derrière un sourire de façade se cache une profonde désillusion.

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