La Presse Pontissalienne 208 - Février 2017
20 DOSSIER I l Doubs
La Presse Pontissalienne n° 208 - Février 2017
Maison médicale
Deux jeunes médecins candidats à l’installation Préparant actuellement leur thèse, Guillaume Feillet et Mathieu Vuillez ont succombé aux charmes du Haut-Doubs où ils ont prévu d’exercer dès qu’ils seront docteurs. Soulagement.
A près un temps maussade, le baromètre médical sur Doubs vire franchement à l’optimisme. Si tout se concrétise, les habitants devraient bénéficier d’une offre de soins aus- si dense sinon plus qu’avant. La commune a sans doute eu raison d’encourager la construction d’un bâtiment qui abritera sous unmême toit la pharmacie propriétaire des lieux et lamaisonmédicale. La situa- tion l’imposait avec un médecin par- ti en Suisse et l’autre sur le point de prendre sa retraite. Après validation du projet, il res- tait encore à trouver des médecins intéressés pour venir pratiquer dans cette maison médicale de 320 m 2 sur deux niveaux dont le premier sera occupé par la nouvelle officine et cinq cellules destinées aux pro- fessionnels de santé. Certains sont rebutés à l’idée de venir s’établir dans ce Haut-Doubs montagneux au climat rude. D’autres, et c’est
tant mieux, pensent le contraire. Originaire de Chalon-sur-Saône, Guillaume Feillet a d’abord étudié la médecine à Lyon. À l’issue de la sixième année, il choisit de venir faire son internat en Franche-Com- té. “J’étais attiré par la montagne et la campagne. Je pense que j’ai fait un bon choix. Le coin est sympa et cela répond à nos attentes” , explique celui qui vit désormais avec son épouse dans le Haut-Doubs.Mathieu Vuillez, son futur confrère et asso- cié a grandi et fait sa médecine à
teurs attitrés alors en droit de s’ins- taller. Ils ont fait connaissance lors d’un stage effectué il y a deux ans et demi à Montbéliard. Même pas- sion pour la médecine générale, même attirance pour le Haut-Doubs, même objectifs de travailler de pré- férence en structure groupée. Assez vite informés du projet de création d’une maison médicale à Doubs, ils prennent contact avec les propriétaires des lieux et la mairie de Doubs. “Ce projet nous plaisait. On a vite confirmé notre envie de venir exercer ici” , complète Mathieu Vuillez. La nouvelle pharmacie ouvre le 13 mars. La maison médicale va accueillir un infirmier et un ostéo- pathe courant avril, mai. Les cinq cellules sont déjà presque toutes réservées. Aussi paradoxal que cela puisse paraître et si tout se concrétise, Doubs s’apparenterait presque à une oasis médicale. n F.C.
Besançon. “J’ai tou- jours aimé la région et c’est ici que j’ai pré- vu de m’installer depuis le début.” Tous les deux accom- pliront cet été leur dernier stage et pré- parent leur thèse qu’ils soutiendront cet automne avec l’espoir de devenir des doc-
“Ce projet nous plaisait.”
Guillaume Feillet et Mathieu Vuillez, les futurs docteurs s’installeront à la maison médicale de Doubs d’ici la fin de l’année.
l Levier Ouverte depuis fin 2015 De l’importance
l Médecin frontalier
Ses motivations
Un crève-cœur pour une vraie source d’épanouissement médicale Désabusée par l’évolution du cadre de la médecine générale, Valérie Debusne est partie exercer en Suisse où après un premier échec elle a trouvé son bonheur dans un cabinet d’indépendants.
du “travailler ensemble” Comme on pouvait s’en douter, la Maison de santé de Levier qui ne faisait que formaliser des habitudes historiques de travail en commun donne entière satisfaction.
I nterroger le Docteur Pier- re-MariePhilippe sur le bien- fondé d’une Maison de san- té à Levier, c’est enfoncer une porte ouverte. “C’est vrai- ment un outil de travail très inté- ressant avec de la place et des locaux bien adaptés.” Ce projet porté par la C.C.A. 800 s’orga- nise sur deux niveaux avec les médecins au rez-de-chaussée et les professionnels de santé à l’étage. À savoir : orthophonis- te, sage-femme, infirmière de santé publique et l’équipeAres- pa qui assure l’organisation des parcours de soins. “Sans Mai- son de santé, on n’aurait jamais pu attirer une orthophoniste à Levier.” Au-delà du confort de
travail propice également à l’ac- cueil de jeunes internes, le Doc- teur Philippe apprécie tout par- ticulièrement la facilité demettre en œuvre l’interdisciplinarité dans une structure groupée. “Le bilan global est positif même si, pour autant, ce mode de fonc- tionnement implique un inves- tissement supplémentaire de la part de chacun avec les contraintes des gardes, les ques- tions de gestion collective, les réunions de coordination. Heu- reusement, il y a plus d’avan- tages que d’inconvénients. Je pense que ce type de structure est vraiment la solution aux déserts médicaux.” La Maison de santé ne peut se réduire à
un simple investissement immo- bilier. Il faut impérativement qu’elle soit aussi portée par une dynamique professionnelle. “Le “travail ensemble”dans les jeunes générations, c’est porteur.” À Levier, ils sont cinq généra- listes à consulter sur un terri- toire dont les frontières tendent à s’élargir dans ce Haut-Doubs en souffrancemédicale. Les pro- babilités de réussite du projet lévitien étaient d’autant plus grandes qu’elles reposaient sur des antécédents favorables. “C’est presque l’aboutissement de 30 ans d’habitude de travail en cabinet groupé. Les solutions doivent toujours prendre en compte les spécificités locales. Cinq médecins dans un bourg comme Levier, cela peut sembler beaucoup mais le secteur d’in- tervention comprendaussi quatre établissements de soins comme l’E.H.P.A.D. ou L’Éveil à Ville- neuve-d’Amont. Chaque terri- toire doit modeler son projet en fonction de ses particularismes locaux.” Autre changement induit par la Maison de santé, le patient n’a plus unmédecin attitrémais un groupement de médecins. Aujourd’hui, sur les cinq prati- ciens, deux s’approchent genti- ment de la retraite. “On en est conscient et il faudra absolu- ment que la structure garde sa dynamique médicale qui lui confère toute son attractivité.” n
L a Presse Pontissalienne : Qu’est-ce qui a motivé ce départ en Suisse ? Valérie Debusne : D’abord l’évo- lution très négative de la qua- lité d’exercice en France aussi bien sur plan de la valorisation que du poids des charges admi- nistratives alors qu’on aspire seulement à exercer son métier au mieux. Avec toutes ces contraintes, on n’a plus le temps d’écouter ses patients. Dans ces circonstances, on cherche tou- jours à se regrouper pour pou- voir échanger nos avis et se don- ner les moyens d’embaucher du personnel en secrétariat. J’étais donc partie prenante du projet de maison médicale à Pontar- lier mais rien n’a bougé pen- dant des années. Je pense qu’on aurait peut-être dû nous pro- poser une solution groupée pro- visoire. Il y avait donc trop de décalage dans la réalisation et c’est la seconde raison qui m’a poussé à partir. Cette décision a été longuement réfléchie car c’est terrible de laisser des patients mais je me retrouvais trop démunie par rapport à la charge de travail. L.P.P. : Comment s’est passée l’ins- tallation en Suisse ? V.D. : D’abord par une expérience très négative en cabinet de grou-
pe où j’étais salariée. J’ai vite démissionné. En Suisse, il y a toutes sortes de manières d’exer- cer la médecine. Il faut relati- viser. Le cadre est très strict, le parcours de reconnaissance des diplômes est assez long. Ils ont les mêmes soucis de démo- graphie médicale que nous. Après cet échec, j’ai eu la chan- ce d’intégrer un cabinet de grou- pe. On est cinq indépendants
donc ? V.D. : Oui, épanouie dans l’exer- cice de ma profession comme il y a vingt ans lors de mon ins- tallation en France. J’ai retrou- vé ce que j’ai perdu. On béné- ficie d’une tarification valorisante. En Suisse, il y a une notion de coût réel de la santé. Les personnes viennent consulter pour de bonnes rai- sons. On sent un respect et une vraie valeur de l’acte médical. Cet épanouissement compen- se largement les contraintes inhérentes aux trajets. L.P.P. : Sous réserve d’une place en maison médicale, seriez-vous prête à revenir exercer en France ? V.D. : Je suis Française et res- te attachée à la France mais, sincèrement, par rapport à l’ac- cueil qui m’a été réservé là où j’exerce, ce ne serait pas du tout honnête. Mon seul regret, ce sont mes anciens patients que je revois encore. En Suisse, on ressent beaucoup moins de stress et on a plus de temps à consacrer à sa famille. On n’au- ra sans doute jamais cette qua- lité de vie en France même si j'espère l’inverse pour les nou- velles générations de généra- listes. n Propos recueillis par F.C.
avec en com- mun une struc- ture de locaux et des assis- tantes qui sont à la fois secré- taires et infir- mières. On bénéficie d’une belle dyna- mique de grou- pe et les méde- cins sont libérés des tâches hors médical. Là, c’est l’idéal par rapport à mes attentes. Je ne suis pas partie pour l’argent mais pour trou- ver le temps et la qualité de travail.
“Je ne suis pas partie pour l’argent.”
Le Docteur Pierre- Marie Philippe a suivi de très près l’évolution du projet où il exerce désormais avec quatre confrères médecins
(photo archive L.P.P.).
L.P.P. : Épanouie
Made with FlippingBook - Online magazine maker