La Presse Pontissalienne 192 - Octobre 2015

L’INTERVIEW DU MOIS

La Presse Pontissalienne n° 192 - Octobre 2015

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ARTISANAT

Les chambres de Métiers fêtent leurs 90 ans “On assiste hélas à une paupérisation de l’artisanat”

Bernard Barthod laisse entendre qu’il sera “vraisembla- blement” candidat à un

deuxième mandat de

cinq ans à la tête de la Chambre de Métiers.

interdit aux jeunes apprentis de mon- ter sur un toit ! On ne peut pas dire à des gens de courir un 100 m si on leur met un boulet au pied. La réglementa- tion est de plus en plus contraignante. L.P.P. :Les C.M.A. départementales ont été regrou- pées cette année en une seule entité régiona- le. À quand la fusion dans une grande C.M.A. Bourgogne-Franche-Comté ? B.B. : En même temps que la régionali- sation, nous avons réorganisé les mis- sions de chaque Chambre au niveau départemental. Notre souci a été de main- tenir, voire de renforcer les relations de proximité que nous entretenons avec nos ressortissants. Dans cet esprit, nous venons d’ouvrir une antenne de la C.M.A. pour le Haut-Doubs à Houtaud, dans le bâtiment de la Belle Vie. Nous essayons de recentrer un maximum de moyens sur la proximité et la mutualisation. Nous avons aussi réduit considérable- ment les dépenses liées à nos fonctions supports.Au sujet du regroupement avec la Bourgogne, nous avons pris une déli- bération pour qu’elle soit effective au 1er janvier prochain. Il faudra ensuite se mettre d’accord sur le futur président, le futur secrétaire général et le siège de la C.M.A. Bourgogne-Franche-Comté. Pas simple… L.P.P. : Les 90 ans des C.M.A., c’est aussi une occasion de relégitimer votre action et votre existence ? B.B. : Complètement. Nous allons aller prochainement sur le terrain à la ren- contre de nos adhérents bien sûr mais aussi des élus locaux sur les territoires des communautés de communes ou d’agglomération, à Montbéliard, Besan- çon, Pontarlier, Baume-les-Dames,Ornans et Morteau. Pour se faire connaître car il est souvent utile de rappeler à quoi sert la C.M.A. Cette opération autour des 90 ans, c’est clairement l’occasion de revenir sur le devant de la scène.

Bernard Barthod, le président délégué de la Chambre de Métiers et de l’Artisanat (C.M.A.) du Doubs, explique les raisons de la baisse que subit l’artisanat depuis trois ans dans un contexte électoral qui peut être déterminant pour l’avenir de ce secteur employant plus de 15 000 salariés dans notre département.

L.P.P. : Justement, pour ceux qui se posent la question, à quoi ser- vez-vous ? B.B. : Nos services sont là pour guider les artisans au moment de la création de leur entreprise, pour l’apprentissage, pour la for- mation (tertiaire, commer- cial, ressources humaines, gestion…), pour la trans- mission-reprise, pour

Les chiffres de l’artisanat en Franche-Comté 19 820 entreprises une évolution faiblement positive de son nombre d’entreprises (+ 4 %) par rapport à l’année précédente. Le nombre de salariés augmente de 2 %. Dans le Doubs, c’est 15 684 salariés pour 7 913 entreprises. Entre 2010 et 2014, le nombre d’emplois liés à l’artisanat en Franche-Comté est passé de 42 122 à 36 730. La plus forte baisse a été enregistrée entre 2011 et 2012 où le nombre est passé de 42 689 à 38 679. Le nombre de salariés par entreprise est le plus haut dans l’alimentaire (3 salariés) et le plus faible dans les services (1,6). C’est le secteur du bâtiment qui concentre le plus d’entreprises artisanales (33,28 % du total). artisanales. L’artisanat franc- comtois a connu en 2014

“Un grand Livre blanc sur le rôle de l’artisanat.”

L a Presse Pontissalienne : Les Chambres de Métiers fêtent leurs 90 ans actuelle- ment. Comment se porte l’artisanat dans notre région ? Bernard Barthod : L’artisanat en Franche- Comté, c’est 19 800 entreprises et 44 600 salariés. Pour le Doubs, c’est 7 900 entre- prises et 15 700 salariés (soit en moyenne 2 salariés par entreprise). Le constat est net : entre 2010 et 2014, nous avons per- du 5 400 emplois à l’échelle de la Franche- Comté. Surtout dans le B.T.P., mais cette baisse touche tous les secteurs d’activité et notamment aussi les services. L.P.P. : Qu’est-ce qui explique cette fragilité du sec- teur de l’artisanat ? B.B. : L’augmentation du nombre d’autoentrepreneurs, renommés les “micro- sociaux” fragilise beaucoup l’artisanat car ces créateurs sont hélas souvent fragiles en termes de qualification. Même si la légis- lation a évolué récemment dans le sens que nous souhaitions - obligation de déclara- tions, exigence de qualifications profes- sionnelles -, les autoentrepreneurs repré- sentent la moitié des nouvelles immatriculations par an et si on enlève les reprises d’entreprises, ils représentent les deux tiers des nouveaux immatriculés. Or, ces gens-là ont bien souvent des projets assez faibles, peu fiables. Ils représentent aujourd’hui près de 20 % des 19 800 entre- prises artisanales du Doubs mais la moitié d’entre eux ne déclarent aucun chiffre d’affaires ! On assiste hélas à une paupéri-

sation du secteur artisanal. Le résultat financier pour la Chambre en Franche-Com- té, c’est 7 % de produit fiscal en moins, soit 200 000 euros en moins dans le budget. L.P.P. : L’apprentissage, grande cause du gouver- nement, est aussi en baisse ? B.B. : En parlant de gouvernement, j’ai trou- vé scandaleux que les Chambres de Métiers n’aient même pas été conviées aux récentes visites officielles du Premier ministre en juillet à Besançon et plus récemment du président de la République à Vesoul. Com- me si on ignorait totalement nos préoccu- pations et que l’artisanat ne concernait pas nos jeunes… En ce qui concerne l’apprentissage, nous avons subi une bais- se de 20 % du nombre d’apprentis depuis trois ans. Mais il semble qu’en cette ren-

l’investissement. À chaque fois qu’une entreprise a un projet, on est là pour l’aider à le formaliser. Au sujet de la reprise, il y a actuelle- ment environ 400 entreprises artisanales à transmettre en Franche-Comté. L.P.P. : Les élections régionales approchent. À ce propos,vous avez préparé un Livre blanc à l’attention des candidats. Quelles sont vos revendications ? B.B. : Nous avons en effet travaillé sur la réalisation d’un grand Livre blanc sur le rôle de l’artisanat et ce qu’on attend des élus régionaux qui seront concernés au premier chef par cette question. Car par- mi les missions premières des Régions, il y a l’économie et la formation. C’est donc pour nous un enjeu vital d’avoir des rela- tions constructives avec la Région. Le pre- mier point que nous mettons en avant, c’est le maintien de la proximité sur les ques- tions d’apprentissage. Concernant l’emploi, ce sont des revendications comme l’aide à la première embauche, le financement des formations aux dispositifs de validation des acquis de l’expérience et des bilans de compétences. Au sujet de la création d’entreprise, c’est le développement des avances remboursables, etc. Nous avons listé une cinquantaine de points précis. Et en fonction des réponses que nous appor- terons les candidats, nous pourrons nous faire un jugement. Propos recueillis par J.-F.H.

trée 2015, l’hémorragie soit stoppée. Cela est dû je pen- se au fait que le gouverne- ment qui avait supprimé l’aide aux maîtres d’apprentissage dans les entreprises de moins de 10 salariés est revenu sur sa décision. Une des explica- tions de cette baisse depuis trois ans, c’est bien sûr la conjoncture, mais aussi les problèmes d’une régle- mentation qui est de plus en plus contraignante : il est difficile d’apprendre le métier de couvreur si on

“Une nouvelle

antenne de la C.M.A. à Houtaud.”

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