La Presse Pontissalienne 179 - Septembre 2014

La Presse Pontissalienne n° 179 - Septembre 2014

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Anciens combattants Jean-Yves Monnin

L’O.N.A.C.-V.G., vecteur du devoir de mémoire L e premier Office a été créé en 1916, au cœur de la Première Guer- re mondiale. Il s’appelait alors l’Office national des mutilés et réfor- més, chargé de rendre hommage, de reconnaître l’engagement, le sacrifice, la souffrance de ces milliers de soldats qui combattaient pour la liberté de la France. Mais bientôt ce seul Office ne suffit plus. En 1917, l’État décide de créer un second Office : l’Office des Pupilles de la Nation chargé, celui-ci, de prendre en charge les milliers d’enfants devenus orphe- lins au cours de ces années de guerre. Aujourd’hui, l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (O.N.A.C.-V.G.) est l’opérateur majeur de la politique de mémoire combattante du ministère de la défense. Il est chargé de la déclinaison locale des thématiques liées au calendrier com- mémoratif. Dont évidemment le centenaire de la Grand Guerre. Question au directeur départemental, Jean-Yves Monnin.

L es deux derniers poi- lus francs-comtois sont décédés en 2003. Henri Cornu, né en 1899, avait été appelé en mai 1918, faisant donc partie d’un des derniers contingents mobilisés. Émile Porcherot, né en 1897, avait lui été mobili- sé en janvier 1916 et envoyé dans la Somme où il sera bles- sé au visage et au bras. Ces deux soldats avaient été déco- rés de la Légion d’Honneur en 1963 pour le premier, en 1980 pour le second. Une distinc- tion qui n’a pas été si “rapide” pour tous les anciens poilus… Il faudra attendre un décret pris en 1995 par Jacques Chi- rac pour voir les derniers poi- lus décorés de la Légion d’Honneur. Une reconnais- sance pour le moins tardive qui fera réagir le dernier d’entre eux, décédé en 2008, Lazare Ponticelli : “Je refuse des obsèques nationales. Ce n’est pas juste d’attendre le der- nier poilu. C’est un affront fait à tous les autres, morts sans avoir eu les honneurs qu’ils méritaient. On n’a rien fait pour eux. Ils se sont battus com- me moi. Ils avaient droit à un geste de leur vivant… Même un petit geste aurait suffi.” Une cérémonie nationale simple, dédiée aux morts de la Pre- mière Guerre mondiale, aura finalement lieu aux Invalides avant que le dernier poilu soit enterré dans le caveau fami- lial. Les derniers poilus Zoom

La Presse Pontissalienne : Quel est votre rôle dans le département du Doubs ? Jean-Yves Monnin : La mission mémoire de l’O.N.A.C.- V.G., c’est avant tout préserver et trans- mettre aux plus jeunes la mémoire et les valeurs républicaines des anciens combattants. L’idéal de paix et les valeurs qui ont guidé leur engagement sont aujourd’hui encore au cœur de l’apprentissage civique des jeunes géné- rations. Connaître le passé et sauve- garder l’héritage de nos aînés, c’est aussi une manière d’apprendre à être citoyen. L.P.P. : Quels sont vos objectifs ? J.-Y.M. : On peut résumer en trois mots : célébrer, partager et transmettre. Célé- brer et commémorer les grandes dates et les événements qui ont fait notre histoire récente, partager une mémoi- re européenne et internationale des conflits passés pour promouvoir la Paix, et transmettre enfin des valeurs de civisme, de respect, de solidarité, d’engagement et de courage aux jeunes générations. L.P.P. : Mais les témoins de l’histoire ont dis- paru… J.-Y.M. : La rencontre avec les témoins de l’histoire reste au cœur des initia- tives mémorielles des services de l’O.N.A.C.-V.G. Leur disparition impo- se cependant de repenser sans cesse les vecteurs de transmission de leur mémoire. C’est pourquoi, nous imagi- nons et mettons en œuvre des opéra- tions pédagogiques et culturelles

empruntant tous les vecteurs possibles : expositions pédagogiques, théâtre, sport, promotion des porte-drapeau, voyages sur les hauts lieux de mémoi- re, conférences, ateliers et concours scolaires… Recueilli par D.A. Se souvenir et transmettre, ce sont les missions de l’office national des anciens combattants et victimes de guerre.

Économie

En pleine guerre

Quand Pontarlier saoulait la France… Alors que Besançon donne l’heure au pays grâce à son industrie horlogère, Pontarlier vit au rythme de ses distilleries. Les détracteurs de cette production d’absinthe disent même que la capitale du Haut-Doubs saoule la France et veulent y remédier.

E n 1906 déjà, une pétition est lancée par la Ligue Natio- nale Contre l’Alcoolisme pour inciter le gouvernement à interdire l’absinthe. Elle recueille 400 000 signatures : “L’absinthe rend fou et criminel, elle provoque l’épilepsie et la tuberculose et elle tue chaque année des milliers de Français. Elle fait de l’homme une bête féroce, de la femme une martyre, de l’enfant un dégénéré, elle désorganise et ruine la famille et menace ainsi l’avenir du pays. Des mesures de défense spé- ciales s’imposent impérieusement à la France, qui boit à elle seule plus d’absinthe que le reste du monde.” Bien entendu, la campagne est sou-

lose, de la violence conjugale, de la folie et de la baisse de la natalité. Ainsi, en 1914, la guerre contre l’absinthe s’amplifie jusque dans les arguments, les opposants proposant le texte suivant : “Les médecins et les politiques, face à l’alcoolisme,

s’inquiètent de la qualité de la race (dégénérescence) et de l’avenir de la famille, base de toute société.” La loi d’interdiction est promulguée en mars 1915, un coup dur de plus pour l’économie du Haut-Doubs, prin- cipal producteur de la Fée verte.

tenue par le lobby viti- cole qui voit en elle la fin potentielle de son rival sur le marché français. La lutte contre l’absinthe s’organise. En effet, la consommation ne cesse de croître et la Fée ver- te devient le symbole de l’alcoolisme. Les ligues de moralité deviennent des adversaires achar- nés de l’absinthe. Elles y voient le signe de la cri- minalité, de la tubercu-

Un coup dur pour le Haut- Doubs.

Août 1914, la mobilisation générale est déclarée.

Les usines Pernod étaient parmi les fleurons de la production d’absinthe avant l’interdiction.

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