La Presse Pontissalienne 172 - Février 2014

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La Presse Pontissalienne n° 172 - Février 2014

POMPIERS Une campagne de promotion “Inutile d’être un super-athlète pour devenir pompier volontaire” Le recrutement des sapeurs pompiers volontaires est désormais une priorité dans toutes les casernes. Un souci récurrent comme s’en explique le capitaine Benoît Delon, chef des pompiers de Pontarlier et adjoint chef au Groupement sud du S.D.I.S. 25.

L a Presse Pontissalienne : Peut-on parler d’une crise du volontariat chez les pom- piers ? Capitaine Delon : Le constat est simple. En France, le nombre de sapeurs pom- piers volontaires a diminué de 12 000 en huit ans. Au cours de cette pério- de, le taux de renouvellement dans le Doubs est d’environ 10 %, ce qui est énorme. La carrière d’un sapeur-pom- pier volontaire dure en moyenne une dizaine d’années. Les pompiers sont forcément impactés par les change- ments de la société, lamobilité…Consé- quence, les chefs de centre de secours doivent être sensibles et attentifs en permanence à l’effectif de sapeurs volontaires. Il faut anticiper les départs, les changements de situation profes- sionnelle et familiale si l’on ne veut pas se retrouver au pied du mur. Au niveau du groupement sud, les arri- vées compensent encore les départs avec même un solde légèrement posi- tif.

C.D. : Oui. Il y a toujours des candidats prêts à s’engager. Certains se décla- rent de façon assez spontanée, d’autres ont suivi la filière des Jeunes Sapeurs Pompiers. On a affaire soit à des jeunes plutôt disponibles en dehors de leur cursus de formation. À cet âge-là se pose une grosse incertitude sur la durée d’engagement car les sollicitations sont multiples. On accueille aussi des per-

L.P.P. : D’où l’importance d’élargir la base de recrutement ? C.D. : Le S.D.I.S. 25 comprend 75 casernes dont 64 fonctionnent uniquement sur la base du volontariat. Certaines man- quent d’effectif. D’autres ont le nombre mais manquent d’encadrement inter- médiaire. Dans chaque centre de pre- mière intervention, il est nécessaire d’avoir un effectif type avec des chauf- feurs d’ambulance ou de véhicules qui nécessitent le permis poids lourds. Chaque chef de centre a pour obliga- tion de garantir la capacité opéra- tionnelle de sa caserne en quantité et qualité. Le nerf de la guerre aujour- d’hui, ce sont les ressources humaines avec l’objectif de maintenir en per- manence l’effectif. L.P.P. : Comment devient-on sapeur-pompier volontaire ? C.D. : Le cursus de base comprend 240 heures de formation. On peut fai- re tout d’une seule traite sous réser- ve d’être disponible en juillet-août ou opter pour une formule fractionnée le week-end qui s’étale de 6 à 18 mois. Un sapeur-pompier volontaire (S.P.V.) qui veut progresser dans sa carrière mettra environ six ans pour accéder au grade de sergent. Dans le Doubs, tous les S.P.V. sont formés de la même manière. Ce qui facilite les échanges et la mobilité entre les casernes. Cer- tains pratiquent même un double enga- gement partagé entre la caserne proche leur domicile et celle près de leur lieu de travail. L.P.P. : La question de la disponibilité est essen- tielle dans cet engagement ? C.D. : Tout à fait et on en est pleine- ment conscient. On a aujourd’hui des outils qui facilitent la gestion des pom- piers volontaires. Le service Dispotel permet à chacun d’annoncer ou de modifier ses disponibilités en temps réel et en dehors des astreintes. Ces mises à jour remontent au logiciel Arte- mis qui englobe l’ensemble des dispo- nibilités. C’est une façon d’assouplir les contraintes imposées aux volon- taires. La qualité du service rendu à la personne reste identique sur l’ensemble du territoire, ce qui néces- site aussi des exigences. Dans les 64 casernes composées uniquement de volontaires, chacun est soumis aux mêmes devoirs et se retrouve d’astreinte 12 à 13 semaines par an. Dans les 9 casernes mixtes intégrant des profes- sionnels s’ajoutent les gardes postées où il faut être présent physiquement pour une durée de 6 à 24 heures. Ce dispositif s’applique généralement en zone urbaine. Au centre de secours principal de Pontarlier, les pompiers volontaires prennent au moins trois gardes par mois de 12 à 24 heures. L’avantage d’une garde postée, c’est plus de sorties et plus d’interventions. L.P.P. : Comment et qui planifie les astreintes ? C.D. : Elles sont déterminées par chaque chef de centre qui a pour seule obli- gation d’assurer la capacité opéra- tionnelle. À partir de là, il a toute lati- tude pour gérer son planning. C’est toujours intéressant d’avoir un volon- taire disponible même pendant une heure. Notamment les jours de semai- ne où c’est plus complexe d’avoir l’effectif.

sonnes plus établies dans la vie avec une pérenni- té d’engagement plus longue. Aujourd’hui, la cible de recrutement, c’est le pompier avec une situa- tion professionnelle et familiale stabilisée. On a besoin de fidéliser l’engagement des pom- piers volontaires pour garantir la sécurité du service et leur permettre d’évoluer dans leur par- cours pour qu’ils puissent prendre des responsabi- lités.

“Un risque logique de saturation.”

Zoom Bilan 2013 : forte augmentation du secours à la personne Lʼ activité globale progresse de 3,5 % à lʼéchelle du Groupement sud dont les limites se superposent à celle de lʼarrondissement de Pon- tarlier en excluant les casernes de Valdahon et Pierrefontaine. Lʼensemble englobe 25 casernes et 600 pompiers. “Les interventions se déclinent en quatre grandes familles. Les accidents sur la voie publique sont stables par rapport à 2013. On enregistre une baisse de 10 % des incendies et de 21 % des opérations diverses. Ce chiffre sʼexplique en grande partie par le fait que nous nʼintervenons plus sur les nids de guêpes sauf en cas dʼurgence. Les secours à personnes, soit ceux qui impliquent le déplacement dʼune ambu- lance, progressent de 10 %” , détaille le capitaine Benoît Delon. Cette aug- mentation récurrente du secours à personne se justifie en partie par la caren- ce du secteur privé et par le recours assez systématique au secours pour le moindre incident.

L.P.P. : Le métier reste donc attractif ?

tous au centre des villages.

L.P.P. : Êtes-vous confronté à la problématique du pom- pier frontalier ? C.D. : Au niveau du grou- pement sud, le phéno- mène des frontaliers amplifie le problème de disponibilité. À Pon- tarlier, il s’avère néces- saire de recruter des sapeurs pompiers volontaires. En situa- tion normale, l’effectif de S.P.V. varie entre 55 et 72 et aujourd’hui on est juste sous la barre. Les S.P.V. en place sont obligés d’intervenir davantage avec un

L.P.P. : L’image du pompier super-héros véhi- culée par les médias peut aussi décourager les bonnes volontés ? C.D. : Effectivement. Cet effet vitrine n’est pas du tout représentatif. On pas- se parfois pour le secours de l’ombre mais qui est bien le secours de tous les jours. Inutile d’être un super-athlète pour devenir pompier volontaire. Il faut juste se dire que cela peut être moi demain. Le recrutement est simple. Après un entretien avec le chef de centre, le candidat passe une visite médicale et un test physique.Au cours de l’entretien sera pris en compte le facteur proximité. Le principe étant de pouvoir intervenir en moins de 8 minutes entre l’alerte et la montée dans le véhicule d’intervention. En garde postée à Pontarlier, ce temps se réduit à 4 minutes. L.P.P. : La porte des pompiers est donc gran- de ouverte ? C.D. : Bien sûr. On peut considérer qu’il s’agit d’un engagement citoyen où cha- cun peut trouver matière à s’épanouir à travers le sport, la formation, les interventions. La notion du collectif est très importante chez nous. Inver- sement, le pompier volontaire appor- te des compétences qui enrichissent la vie du groupe. L.P.P. : Comment va se dérouler cette cam- pagne de promotion ? C.D. : Des volontaires vont aller affi- cher et distribuer nos supports dans les écoles, les commerces, les cabinets médicaux, sur les lieux de passage. Propos recueillis par F.C.

“Il s’agit d’un engagement citoyen.”

risque logique de saturation.On s’efforce de respecter dumieux possible les prio- rités : famille, travail, pompier qui ryth- me la vie de nos volontaires. L.P.P. : Quels sont les moyens mis en place pour susciter de nouvelles vocations ? C.D. : On assiste depuis quelques années à une réelle prise de conscience des enjeux. Cette démarche se traduit par l’ouverture de plusieurs bureaux de développement du volontariat. Le dis- positif s’appuie sur un réseau d’ambassadeurs qui ont pour mission de recruter et d’aller démarcher les employeurs avec des conventionne- ments. Toute cette organisation s’inspire d’une étude sociologique qui a permis de clarifier le volontariat et de définir des actions appropriées. On doit être désormais plus accessible vis-à-vis de la population. On conseille par exemple aux responsables de petits centres d’effectuer les manœuvres à la vue de

“Au niveau du groupement sud, le phénomène des frontaliers amplifie le problème de disponibilité”, observe le capitaine Delon, chef du centre de secours principal de Pontarlier.

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