La Presse Pontissalienne 171 - Janvier 2014

LE PORTRAIT

43 La Presse Pontissalienne n° 171 - Janvier 2014

LES VERRIÈRES

Un artiste anti-conformiste

Benjamin Locatelli, le graffeur repenti Ce jeune artiste graffeur originaire de Pontarlier avance dans la vie comme dans son art : avec enthousiasme, créativité et la volonté de casser les clichés.

S on parcours semble désor- mais engagé sur les bons rails. À 24 ans, il a même tout l’avenir devant lui mais rien n’est logique ou évident chez Benjamin Locatelli. Avant de s’exprimer dans le street art, il a d’abord donné dans le sport. “J’ai fait beaucoup de ski de fond et de B.M.X. Le graffiti était à la mode quand je suis arrivé au lycée. À partir de là, cela ne m’a plus lâché.” Les études, ce n’est pas vraiment son truc. L’élève Locatelli est plutôt cal- me mais pas franchement studieux. Parce qu’il le faut bien, il se forme à

la vente, sans plus. Il montre beau- coup plus d’enthousiasme dans l’art du graffiti qu’il pratique alors en tou- te discrétion avec la volonté que le résultat lui, soit bien visible. Pas vu, pas pris. Le jeu dure un certain temps avant que la maréchaussée le sur- prenne en flagrant délit. À 16 ans, le graffeur en herbe est poursuivi pour vandalisme. Une leçon qu’il n’oubliera jamais. Quelques sueurs froides plus tard, il se met en quête de rattraper le coup et organise à 17 ans sa première ani- mation graffitis à la M.P.T. des Longs Traits. “Un déclic, explique Benja-

Benjamin Locatelli a trouvé sa voie dans le graffiti.

min. La plupart des gens estiment que c’est encore un truc de voyous alors qu’il s’agit d’un mode d’expression à part entière.” Et ce jeu- ne Pontissalien de 24 ans de citer les influences de cet art qu’on retrouve dans les plus brillantes civilisations, que ce soit enAmérique du Sud, dans les pays arabes ou en Europe avec la calligraphie. Il fera ses premiers pas dans la vie active en exerçant en usine, en scie- rie, en commerce alimentaire et même dans l’horlogerie suisse. Le graffeur autodidacte a trouvé depuis quelques années un rythme à sa convenance, alternant entre la création et l’animation. Avec Céline Queste, sa compagne vitrailliste, ils vivent aux Verrières suisses. “On a saisi l’opportunité en mars 2012 d’occuper une ancienne ferme qui nous sert de logement, d’atelier et d’espace d’exposition. C’est plus simple de s’installer en Suisse sur le plan admi- nistratif.” Au départ de leur migra- tion helvétique, le couple recevait des artistes en résidence avant d’abandonner la formule pour s’investir pleinement dans leurs acti- vités. “On travaille souvent en Fran- ce notamment dans l’animation. La création serait plus du ressort de la Suisse si l’on devait faire la distinc- tion.” Benjamin Locatelli a déjà exposé aux Annonciades ou à Frasne. En dehors des animations dans les structures du type maison de quartier, il répond également aux propositions des col- lectivités ou d’organismes à la recherche d’artistes pour monter ou encadrer des événements culturels. “On est intervenu en maison de retrai- te dans le cadre d’animations inter- générationnelles” , explique le graf- feur qui en garde un très bon souvenir. L’art du graffiti se décline dans dif- férents styles. Certains se spéciali- sent dans les signatures, d’autres

préfèrent le tag ou encore le lettrage. Fidè- le à ses paradoxes, Ben- jamin Locatelli se décrit comme un touche-à- tout. “J’évolue dans toutes les formes, sur tous les supports : toi- le, porte de camion, mur…” Le couple envi- sage même la fusion artistique. Ils ont conçu “vitagraff ”, associant architecture, vitrail et graffiti. “C’est un concept novateur et rigolo qui a le mérite de casser les étiquettes. Actuellement, on s’investit beaucoup dans cette démarche de couple même si chacun reste aussi dans son art.” Toujours en quête d’inspiration, Benja- min Locatelli a beau- coup appris par lui- même tout en appréciant le travail de graffeurs références comme le français

Quelques sueurs froides.

Woshe ou le suisse Dare. Il prend son pied en intervenant auprès des jeunes qui ne l’épargnent pas. “Ils sont enco- re très critiques. Pour moi, c’est l’occasion de transmettre quelques valeurs sans éviter le sujet délicat du vandalisme. Le graffiti reste et res- tera je pense une signature revendi- catrice. L’animation correspond bien à l’optique de mon parcours. C’est un peu ma contribution à la société.” Le hip-hop a forcément droit d’écoute aux Ateliers d’artistes où l’on appré- cie aussi d’autres sonorités. Benja- min n’a jamais été adepte du cloi- sonnement, en musique comme en peinture. F.C.

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