La Presse Pontissalienne 145 - Novembre 2011

VALDAHON - VERCEL

La Presse Pontissalienne n° 145 - Novembre 2011 34

Le soldat Guy Bruchon est mort lors du conflit algérien, il a été inhumé à Oran. Sa dépouille revient le 10 novembre à L’Hôpital-du-Grosbois grâce à un élan de solidarité. L’État français avait refusé de rapatrier le corps. L’oubli est effacé. L’HÔPITAL-DU-GROSBOIS Élan de solidarité 52 ans après, il retrouve sa patrie

Le soldat Guy Bruchon, abandonné, retrouve sa terre d’adoption après maints tracas administratifs.

À L’Hôpital-du-Grosbois, un secret jusque-là bien caché “renaît” cin- quante-deux ans après. En 1959, Guy Bruchon est âgé de 21 ans. C’est un enfant sans famille, placé à la D.D.A.S.S., qui travaille comme com- mis de fromagerie au village. Robert Saintot, âgé de 88 ans aujourd’hui, le prend sous son aile comme tuteur légal. Arrive le conflit d’Algérie où Guy Bru- chon est mobilisé en 1959. Placé en base arrière (jour de repos) au bord de la mer, le jeune homme se

baigne et se noie. L’armée prend contact avec la municipalité de L’Hôpital-du- Grosbois de l’époque qui ne juge pas nécessaire de le rapatrier. L’État de son côté ne prend pas le rapatriement du défunt à sa charge sachant qu’il “n’est pas mort la France.” Guy Bru- chon sera enterré à Bone puis ré-exhu- mé et enterré au carré militaire d’Oran. Les années passent, la mémoire du jeune avec, jusqu’à ce que Jean-Clau- de Grenier,maire de L’Hôpital-du-Gros- bois, ne mette son nez dans les archives

municipales. “En 2009, j’ai été contac- té par l’Union nationale des combat- tants (U.N.C.) du canton d’Ornans pour célébrer le 50 ème anniversaire de samort, car Guy Bruchon est inscrit au monu- ment aux morts. Nous avons organisé une célébration. J’avais prévu de dépo- ser une gerbe sur sa tombe… mais il n’y en n’avait pas !” se souvient l’édile. Il fouille les archives et s’aperçoit que le corps est… en Algérie. Il fait de cet oubli un objectif de son mandant : “À l’heure où l’on parle de symboles de la République, je trouve que l’État a failli à sa tâche en laissant cet enfant là- bas. Je me suis fixé un objectif : rapa- trier le corps” dit-il. Le défi du maire semble réussi après de nombreux tracas administratifs, “ballotté” ça et là par l’ambassade de France en Algérie ou au ministère. Même au sein du village, les langues des anciens ont eu du mal à se délier : “Certains avaient un sentiment de cul- pabilité d’avoir laissé cet enfant là- bas” évoque Jean-Claude Grenier. Le ministère de l’Intérieur algérien a

autorisé vendredi 28 octobre l’exhumation du corps après deux longues années de discussions. Le 10 novembre, le défunt retrouvera sa terre où une cérémonie lui sera dédiée. Elle s’annonce très suivie. Pour rapatrier le corps et n’engager aucun frais, la mairie a lancé une souscrip- tion qui a connu un véritable succès : près de 360 donateurs se sont mobili-

sés si bien que L’Hôpital-du-Grosbois a récupéré la somme de 9 000 euros, largement plus que le coût nécessai- re au transfert. L’union nationale des combattants d’Ornans l’utilisera pour la réfection du carré du militaire, la cérémonie et les œuvres sociales. Oublié, Guy Bruchon revient en “héros”. Belle leçon. E.Ch.

Son nom était inscrit sur le monu- ment aux morts. Mais sa dépouille n’était pas là.

VALDAHON

Le “Géotrouvetout” local

L’inventeur aux mains d’or Routier à la retraite, Jean Cachod a créé de toutes pièces un orgue de barbarie, reproduit un bateau à vapeur ou des scies à échelle réduite. C e qu’il touche, Jean Cachod le transforme et le refait revivre. Avec du cuivre, du bois, du métal, il confectionne la réplique exacte du “Mississippi”, bateau à vapeur. Avec du bois, un pied à coulisse et des milliers d’heures de travail, deux années exactement, il recrée un véritable orgue de barbarie. À l’écrire, cela paraît simple. Mais techniquement, ses réalisations sont des prouesses, d’autant que l’homme n’utilise aucun plan. Il regarde, comprend puis se lance. Passionné par le bois, il a reproduit des scies que l’on retrouvait dans les scieries du Haut-Doubs. Toutes fonction- nent. “Le plus dur est de comprendre le mécanisme. Celle-ci est sortie de la fonderie d’Ornans en 1905. Elle est entraînée par une crémaillè- re et bat à 180 tours” , explique-t-il. L’une de ses plus dures réalisations est selon lui le moteur oscillant à double effet.

TRADITIONS Le patois local La “Ticlette” ferme la porte Le fameux journal trimestriel des patoisants a bouclé son dernier numéro en octobre. Il était le garant de la tradition. Les membres continueront de se retrouver.

Une scie de 1905 reproduite.

Chauffeur de poids lourds à la retraite, notre profes- seur Tournesol de Valdahon présentait ses œuvres lors d’expositions de miniatures. Il n’y participe plus : “Déplacer toutes mes pièces, assez lourdes, devient trop fatigant” dit-il. Outre le virus, Joseph a transmis à son fils et ses petits-enfants la rigueur de la méca- nique et de la précision. L’un d’entre eux est en effet ingénieur en mécanique. Son épouse sourit lorsqu’on lui demande le temps nécessaire à la réalisation de l’orgue de barbarie. Plus de deux ans.

Le groupe de patoisants ne lira plus la Ticlette mais continuera de se retrou- ver pour évoquer les souvenirs d’antan.

I l n’y aura pas de numé- ro 45 de “La Ticlette”. Le journal trimestriel édité par des habitants du Pays de Pierrefontaine-les-Varans, Vercel,Valdahon et plus géné- ralement du Haut-Doubs, cesse toute activité pour des questions de manque de per- sonnes capables de rédiger des articles. “Nous arrêtons car la relève n’est pas là. On est à un âge où les rêves doi- vent finir” déclare Roland Vittot. Dans les colonnes de la ticlette, on retrouvait notamment des phrases en patois.Malgré des recherches, personne n’a voulu reprendre ce journal édité depuis 2000.

Originaire de Chaux-les-Pas- savant dans le canton deVer- cel, c’est Roland Vittot qui fut à l’origine de la renais- sance du patois du Doubs, dialecte purement local qui peut différer selon si on habi- te dans le “Haut” ou dans le “Bas”. Tout a commencé au cours de l’hiver 1995, époque où l’homme choisit de pas- ser avec son épouse sa retrai- te à Chaux-les-Passavant après avoir longtemps demeu- ré dans le Jura. Il se rend compte qu’il connaît plus per- sonne : “Vu que je parlais patois pour m’amuser lors de soirées, j’ai demandé à l’association Randonnée Loi-

Distribué à environ 500 exem- plaires, le journal consacrait une page au patois, le reste à l’histoire, aux objets que les générations de la seconde guerre mondiale utilisaient lorsqu’elles travaillaient dans les champs. Si le journal ne sera plus édité, les passion- nés continueront à évoquer leur jeunesse. La troupe a retrouvé des objets perdus, victimes de la modernité à l’instar du pres- se-purée, du tire-foin, le panier pour essorer la sala- de, le boulet. Il est possible de retrouver les éditions pas- sées. E.Ch.

sirs Culture (R.L.C.) de créer une section patoisant. Nous étions huit la première année…” Ils sont une cinquantaine de personnes, en majorité des retraités, à faire vivre et revivre le patois en le parlant

et en couchant les mots sur le papier depuis neuf ans. “On s’est aperçus que nous parlions mais que nos mots partaient en fumée !” Du coup, le groupe a créé un journal : “La Ticlette”.

“Un âge où les rêves doivent finir.”

Joseph Cachod a par exemple recréé de toutes pièces une scie à taille réduite.

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