La Presse Pontissalienne 144 - Octobre 2011

PONTARLIER ET ENVIRONS

La Presse Pontissalienne n° 144 - Octobre 2011

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FINANCES

Emprunts dits toxiques Le franc suisse plombe les comptes des collectivités

Les collectivités qui ont contracté un emprunt dont le taux d’intérêt est indexé sur le taux de change entre le franc suisse et l’euro font grise mine aujourd’hui. Le montant de leurs remboursements grimpe en flèche.

I l y a encore cinq ans, le franc suisse était certifié stable et inattaquable. Beaucoup de collectivités qui en étaient convaincues fulminent aujour- d’hui. Ce sont celles qui ont contracté un emprunt dont les taux sont amarrés aux indices de change entre la monnaie hel- vétique et l’euro. Un change qui était plutôt stable avant que la crise ne passe par là et que l’euro ne finisse par dévisser pendant que le franc suisse devenait valeur-refuge.

port monétaire a une consé- quence immédiate sur le taux d’intérêt de leur contrat de prêt. Ce taux est financièrement très avantageux, mais son principal défaut est qu’il est variable. Il est inférieur à 2 % (soit aumoins 2,5 points de moins par rapport à un prêt à taux fixe), si le cours du change reste stable aux envi- rons de 1,40 C.H.F. pour un euro. En revanche, passée cette cote, le taux d’intérêt grimpe de façon spectaculaire. Selon nos infor- mations, si le change varie entre 1,10 et 1,20, ce qui est le cas en ce moment, le taux d’intérêt se met à fluctuer de 15 et 20 % ! Résultat : c’est le montant des remboursements qui s’envole pour les collectivités dont beau- coup n’avaient pas mesuré l’ampleur du risque.Après tout, depuis la création de l’euro, le franc suisse était resté stable. Le pari n’était pas franchement scabreux aux yeux des élus et de leurs services. La communauté de communes du Pays d’Ornans qui pour l’instant a évité ce scénario croi-

se les doigts pour qu’il ne se réa- lise pas. Elle a contracté un emprunt de 3 millions d’euros à un taux inférieur à 2 %. Ce taux sera bloqué jusqu’en 2014. Mais à cette date, il s’indexera naturellement sur le taux de change du jour. La collectivité espère que d’ici là le franc suis- se aura retrouvé son niveau d’antan, 1,45 C.H.F. pour un euro. Alors seulement, la com- munauté de communes du Pays d’Ornans pourra envisager com- me elle ne l’exclut pas, de se débarrasser de ce prêt toxique “invendable” aujourd’hui comp- te tenu de sa configuration, pour revenir à un emprunt à taux fixe moins avantageuxmais aus- si moins risqué. Au printemps dernier, en Fran- ce, les élus de collectivités pla- cées dans une situation finan- cière délicate à cause d’un emprunt devenu indésirable ont décidé de se constituer en asso- ciation pour dénoncer le refus des banques de renégocier ces prêts.

Alors qu’il fallait en moyenne 1,5 C.H.F. pour obte- nir un euro, les deux monnaies sont arrivées à une parité presque parfaite durant l’été. Ce qui fait le bon- heur des tra- vailleurs fronta- liers est aussi le cauchemar des collectivités. Car le nouveau rap-

Le taux fluctue de 15 à 20 %.

De nombreuses collectivités envisagent de revenir à des emprunts classiques.

PONTARLIER

Explications du maire

Prêt “toxique” de la Ville : le risque estimé à 200 000 euros Pontarlier a aussi eu recours à des emprunts plus ou moins “toxiques” mais de façon plutôt modérée. Pas de quoi s’affoler.

“P our la ville de Pontarlier, le risque est très limité” , expliquait Patrick Genre aux élus pontissaliens lors du dernier conseil municipal. Le maire s’est sans doute senti obligé de fournir quelques précisions suite aux articles de presse qui mentionnaient Pontarlier dans la fameuse liste des 5 500 communes ayant souscrit des emprunts “toxiques”. Il justifie d’ailleurs ce choix. “À l’époque, les banques ne propo- saient que ça ou alors des prêts à taux fixe très élevés.” À la différence d’autres collectivités mal en point, Pontarlier n’a pas succombé aux sirènes “toxiques”. La structure de la dette com- munale montre que 70 % des emprunts sont souscrits à taux fixe contre seulement 10 % à taux structuré, soit la somme de 1,8 mil- lion d’euros. Le taux moyen appliqué sur l’ensemble des prêts est de 3,27 %. “C’est l’un des plus bas de la région Franche-Com- té” insiste le maire. La Ville rembourse actuellement 7 emprunts structurés. Le risque est pratiquement nul pour 5 d’entre eux car il ne reste plus que du capital à régler. Les deux autres prêts sont plus déli- cats, notamment un qui est potentiellement toxique. La partie variable de cet emprunt dont la durée d’amortissement s’étale jus- qu’en octobre 2014 est indexée sur la pari-

té dollar-franc suisse. La toxi- cité de ce produit n’est pas linéaire. Elle sera surtout pré- gnante dans les deux années à venir. Le risque ou surcoût estimé à ce jour est de 200 000 euros sur 2012-2013 si le taux de change entre le dollar U.S. et le franc suisse n’évolue pas. “On a étudié la piste du recours au conten- tieux mais ce n’est pas pro- bant.” Le maire, le secrétaire géné- ral et le service financier tra- vaillent pour essayer de trans- former ce taux variable en taux fixe. L’envolée du franc

Pas succombé aux sirènes “toxiques”.

suisse que personne n’avait prévu à un tel niveau éclaire d’un jour nouveau ces emprunts structurés. Les conséquences n’ont pas toujours été si dramatiques. “Ce type d’emprunt a permis à la Ville d’économiser 937 549 euros. Ce qui correspond à la som- me qu’on aurait dû dépenser si on avait sous- crit les mêmes prêts à taux fixe, juge utile de rappeler Patrick Genre. On doit conti- nuer à gérer l’équilibre entre taux fixe et taux variable. Mais on n’ira plus sur des taux indexés sur la parité des monnaies.”

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