La Presse Pontissalienne 143 - Septembre 2011

DOSSIER

La Presse Pontissalienne n° 143 - Septembre 2011 23

SUISSE VOISINE Mission Catholique Italienne L’immigration de chaque côté de la frontière

BELLEHERBE Le maire est Italien C’est François Franchini qui a installé en 1925 la famille du même nom sur le plateau de Belleherbe et de Pierrefontaine. La famille est ori- ginaire de Bergame. Souvenirs du petit- fils, premier magistrat de Belleherbe. L’ Italie, Philippe Franchini la connaît pour y passer ses vacances en famille. S’il ne renie pas ses ori- gines italiennes, le maire de Belleherbe (582 habi- tants) confie qu’il se sent avant tout du Plateau, large- ment intégré par ses fonctions publiques et professionnelles. C’est son grand-père François qui a quitté Bergame avec sa femme (Carminati de son nom de famille) pour débar- quer à Pierrefontaine-les-Varans. “Comme les autres, il est venu pour trouver du travail. C’était dans les années vingt” dit son petit-fils. Il sera maçon et bûcheron. Un de

François Zosso, historien suisse, a consacré 10 ans de travail à la réalisation de trois ouvrages portant sur l’immigration italienne à La Chaux-de-Fonds. Pour lui, les migrants étaient semblables, en tout point, de chaque côté de la frontière.

ler et Mussolini a terminé de mettre au ban de la cité les fascistes, qui pourtant avaient pris la main sur la vie des immi- grés. Quant aux communistes, puisque la scission entre eux et les socialistes est consommée, les autorités locales tentent de mettre à distance les forces marxistes italiennes. Cependant, la plupart des pro- tagonistes de cette époque ont préféré l’ou- blier. “Quand j’ai voulu les interroger, ils se sont murés dans leur silence” avoue le Suisse. Désormais, les descendants des immigrés italiens sont intégrés dans la vie locale, comme c’est le cas dans le Doubs. La Mis- sion Catholique Italienne qui organise la vie de la communauté est toujours à l’œuvre. Cependant, son rôle n’est plus le même pour une population vieillissante qui n’a plus forcément des besoins d’assimilation. Les noms italiens sont alors devenus des noms chaux-de-fonniers. T.M.

F rançois Zosso est parti d’une seule information : un nom aux consonances italiennes. Son travail de recherche et la collaboration avec Giovanni Emilio Mar- sico et Giovanni Spoletini ont fait le reste. Il a pu ainsi écrire trois volumes sur l’im- migration transalpine à LaChaux-de-Fonds : “Les bâtisseurs d’espoir (1675-1914)”,“Les Bâtisseurs dans la tourmente (1914-1945)” et “Le retour des bâtisseurs”.Ainsi, il retra- ce la vie de la communauté italienne dans les montagnes neuchâteloises du XVII ème siècle à nos jours. Les titres de ses livres font, bien évidemment, référence aumétier des immigrés : la maçonnerie. Quand le courant migratoire a commencé à prendre de l’ampleur au début du XIX ème siècle, mais surtout à partir de 1875, les Suisses ont très vite accepté la présence italienne. “Ils n’avaient pas envie de se salir les mains, ils préféraient l’horlogerie. Ils ont laissé volon- tiers leur place dans le bâtiment” explique l’historien, lui-même d’origine italienne. Dès la fin du XIX ème siècle, les migrants transalpins possèdent 90 % des entreprises du bâtiment. L’ancien professeur d’histoire estime qu’il s’agit des mêmes personnes qui ont fait le voyage depuis la Botte jusqu’aux deux côtés de la frontière. “On retrouve les mêmes noms de chaque côté de la frontière.D’ailleurs, le dimanche, beaucoup la traversaient pour aller à Morteau, retrouver des connais-

sances.” Comme en France, les émigrés, du côté helvétique, venaient majoritairement du Nord de la péninsule, du Piémont, de la Lombardie ou de la Vénétie. Les régions du centre ont aussi envoyé de leurs res- sortissants, mais plus tard, au début du XX ème siècle. Ceux du Sud ont aussi tenté leur chance, ils étaient cependant saison- niers le plus souvent. Bien intégrée dans la vie chaux-de-fonnière, il semblerait tout de même que la période fasciste ait isolé la communauté italienne. Dans la cité hor- logère, alors socialiste, les déchirements entre fascistes et communistes rendaient les relations compliquées avec les habi- tants suisses. L’alliance passée entre Hit-

ses cinq fils, lui aussi prénommé Fran- çois, embrassera également le métier de maçon. Quasiment un siècle après l’arrivée du grand-père, Philippe Franchini pour- suit l’aventure du bâtiment avec son entreprise de peinture. “L’intégration s’est faite naturellement par le travail pour ma famille comme pour les autres familles italiennes” , avoue Philippe Franchini. D’autres ont suivi le même chemin, à l’instar des familles Salvi ou Pellegri- ni : “Ils sont arrivés en même temps que mon grand-père et venaient également de Bergame.” Ces derniers sont égale- ment spécialisés dans le bâtiment tout comme la famille Personeni. Une vraie épopée.

Et les autres : Personeni, Pellegrini, Salvi.

François Zosso, historien suisse, auteur

d’une série de livres à propos de

l’immigration italienne à la Chaux-de- Fonds.

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