La Presse Pontissalienne 134 - Décembre 2010

ÉCONOMIE

La Presse Pontissalienne n° 134 - Décembre 2010

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ÉNERGIE

Il floue ses partenaires et clients

Chômeur devenu lauréat des entrepreneurs en 2007, le patron de la société Environia basée dans le Grand Besançon a berné son monde en encaissant les acomptes des clients sans jamais les livrer. Collectivités et salariés ont perdu gros. Plainte est déposée au tribunal. Arnaque au photovoltaïque

L’ histoire était belle. Sans doute un peu trop ! En septembre 2007, le Franc-Comtois Denis Nicolas, alors chômeur, crée une société de conseil et d’installation d’équipements de chauffage et d’économies d’énergie. L’entreprise s’appelle Enviro- nia. Très vite, le patron obtient la confiance des banquiers puis celle du réseau “Entreprendre et agir” qui le nomme lauréat

du réseau entreprendre en 2007 et lui alloue un prêt à taux zéro de 25 000 euros. Mieux, la banque lui valide un prêt de 100 000 euros. L’entrepreneur apporte 25 000 euros de sa poche et la société démarre, le genre de départ sur les chapeaux de roue puisqu’en moins de deux ans, l’effectif passe à 72 sala- riés. Environia se développe dans le Nord et le Sud-Ouest de la Fran- ce. La presse nationale, à l’instar du Figaro, se fait même l’écho de la réussite fulgurante de cet ex-chômeur présenté comme un autodidacte.L’homme pose volon- tiers pour l’image. Petit à petit, l’histoire vire au cauchemar. Les salariés entre- voient des arriérés de salaires, puis ils ne sont plus payés dès 2009. Le turn-over est énorme. Une procédure est engagée au conseil des prud’hommes. Les clients vont également déchanter : retards de livraison, panneaux photovoltaïques non posés, fausses promesses d’avantages fiscaux : en moins de deux ans, les dégâts sont ter- ribles et “on se demande encore pourquoi il a fallu si longtemps à la justice intervenir” s’emporte la Bisontine Corinne Lapierre qui a perdu dans l’affaire 5 250 euros. Elle rembourse aujourd’hui un prêt de 15 000 euros pendant quatre ans (environ 400 euros par mois) sans avoir reçu la moindre mar- chandise ! “Comparez à d’autres, j’ai peu perdu” relativise-t-elle. Le 20 janvier 2009, elle passe commande de quatre panneaux photovoltaïques pour équiper sa maison située auxTilleroyes. “L’entreprise, nous l’avons connue au salon de l’habitat, se remé- more-t-elle. On a fait confian- ce. Après avoir signé notre contrat en janvier, on nous a assuré que nos panneaux seraient posés avant juin. Le premier acomp- te (30 % de la somme finale, soit 5 250 euros) a été débité rapi- dement. On s’en est étonné auprès du directeur commercial mais il nous a rassurés” relate la Bisontine flouée. Puis la société tente de modi- fier le bon de commande en vou- lant livrer non pas des panneaux photovoltaïques de marque alle- mande comme cela était conve- nu mais des panneaux chinois.

“Il y avait soi- disant rupture de stock.On a appris que la marque allemande ne les livrait plus car Environia ne payait pas. On a refusé les autres panneaux.” Un bras de fer s’engage. Les lettres recom- mandées et les injonctions de payer demeurent

“C’est E.D.F. qui nous a conseillés !”

Environia devait poser quatre panneaux photovoltaïques sur le toit de Corinne Lapierre. La Bisontine n’a rien vu venir. Elle a perdu 5 250 euros dans l’affaire.

sans réponse. À l’heure actuel- le, “nous ne savons plus quoi fai- re. La liquidation a été pronon- cée et l’entreprise, à part quelques ordinateurs, n’avait rien. Je ne crois pas revoir mes 5 250 euros” conclut cette ancienne cliente. D’autres ont décidé de ne pas en rester là, à l’instar d’Yvette Larrieu qui a déposé plainte au tribunal de Besançon. Dans l’affaire, Environia l’a dépossé- dée de 15 000 euros : “Je suis en contact avec une douzaine de clients. L’objectif est d’en retrou- ver. Beaucoup se sentent seuls car ils sont dispersés dans la France entière. J’ai déposé plain- te auprès du procureur de la République de Besançon” explique cette dame qui habite dans le Sud-Ouest de la Fran- ce. Le 1 er juillet, elle a reçu une réponse négative du procureur. Habitante à Hazebrouke dans le Nord de la France, Virginie Douliez a perdu de son côté 5 000 euros dans la commande d’une pompe à chaleur : “Le plus fou est que cette boîte était par- tenaire Bleu Ciel E.D.F.. C’est E.D.F. qui nous a conseillés ! C’est fort” s’emporte-t-elle. Bref, Environia a frappé dans toute la France, de Souraide (Pyrénées-Atlantiques) jusqu’à Yenne (Savoie) sans que l’on connaisse le nombre exact de créanciers. “Dans le domaine de l’énergie, ce genre d’entreprise est heureusement minoritaire, c’est environ 1%. Environia, c’est un de nos plus gros dossiers. Ils ont fait du mal” constate Joël Mercy du Groupement des Par- ticuliers Producteurs d’Électricité Photovoltaïque (G.P.P.E.). Aujourd’hui, les chances pour les personnes flouées de retrou- ver leur argent sont faibles. E.Ch.

La décision du tribunal Lors de lʼaudience du 15 mars 2010, la S.A.S. Environia été pla- cée en liquidation judiciaire. Le Tribunal de commerce de Besan- çon a constaté “une situation catastrophique de la société qui a fait apparaître un passif de plus de 3 millions d’euros avec un effectif de 72 salariés alors que la trésorerie est totalement exsangue.” Pire, Denis Nicolas nʼa pas pu présenter à lʼaudience la comp- tabilité pour lʼannée 2009. Le Tribunal a relevé “une situation sociale désastreuse et le mauvais traitement des clients de l’entreprise, qui a encaissé des acomptes ou émis des factures en faisant miroiter des avantages fiscaux, sans pour autant exé- cuter leurs prestations ni être en mesure de rembourser les sommes encaissées.”

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