La Presse Pontissalienne 133 - Novembre 2010

ÉCONOMIE

La Presse Pontissalienne n° 133 - Novembre 2010

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CARBURANTS Les prix vont-ils baisser ? Essence :

qui a profité de la crise ? Jean-Michel Ducrot, le président du groupe pétrolier pontissalien Thévenin-Ducrot, explique le mécanisme qui a provoqué une hausse sensible des prix de l’essence pendant la crise.

L a Presse Pontissalienne :Les prix de l’essence se sont envolés pendant la période de pénurie. Qui en a pro- fité ? Jean-Michel Ducrot : Il faut remettre les choses en perspective. Avant même les manifestations sur les retraites, les employés du port auto- nome de Marseille se mettaient en grève. 4 millions de tonnes de brut et une centaine de bateaux étaient bloqués à Fos-sur-Mer. Là dessus arrivent les blocages de raffinerie. Habituellement, on livre nos sta- tions de l’Est de la France depuis Fos, via Dijon. Quand on est obligé d’aller chercher des produits à Liè- ge, forcément on nous fait payer le prix du transport. On avait alors deux solutions : soit on fermait nos stations, soit on approvisionnait nos clients coûte que coûte et c’est notre métier.On a choisi la deuxième solu- tion. L.P.P. : Donc vous avez augmenté le prix dans toutes vos stations ?

J.-M.D. : Non, nous avons lissé nos prix. Il aurait été inconcevable de maintenir un prix “normal” dans les stations approvisionnées depuis Dijon et de fixer un prix très élevé dans les autres. On a donc lissé la différence, si bien que dans certaines stations nous avons vendu à perte et dans d’autres on a équilibré pour que toutes nos stations affichent le même prix. Après, on ne maîtrise pas les prix dans les stations que nous livronsmais que nous ne gérons pas en direct. Certainement que cer- tains gérants en ont profité comme en région parisienne où j’ai vu le litre de gasoil à 1,69 euro ! Après, cela relève de la liberté de l’entrepreneur. L.P.P. : Les prix vont-ils rebaisser ? J.-M.D. : Le problème, même si tout se débloque, c’est que les armateurs vont nous faire payer des “suresta- ries”, c’est-à-dire les charges qu’ils ont subies quand les bateaux n’ont pas tourné. Nous n’avons pas enco-

re d’idée précise sur la manière dont ça va nous être facturé. Nous essaie- rons comme toujours d’être raisonnables dans la répercussion des prix. L.P.P. : Donc ils ne vont pas rebaisser tout de suite… J.-M.D. : Il y aura encore un certain délai avant une possible baisse en effet. L.P.P. : Et à plus long terme ? J.-M.D. : Il est évidemment

Pour trouver qui a profité de la crise récente, il faut plutôt se tourner vers les compagnies pétrolières.

impossible de lire dans le marc de café. Beaucoup de paramètres nous échappent. La crise économique aurait dû logiquement faire baisser sensiblement les prix des carburants parce qu’il y a moins de consom- mation. Seulement, les fonds sou- verains et spéculatifs se sont repor- tés durant cette crise sur les produits pétroliers. Alors que la demande était en baisse et malgré la loi de l’offre et de la demande, les prix n’ont

31 décembre 2008, il était redes- cendu à 30 euros. L.P.P. : Ce n’est pas pour autant que le prix à la pompe avait été divisé par trois ! J.-M.D. : Vous savez que sur un litre de super, il y a 85 % de taxe préle- vée par l’État et que par conséquent l’élasticité de la répercussion du prix est relativement faible, que ce soit à la hausse ou à la baisse. Propos recueillis par J.-F.H.

pas baissé dans les proportions aux- quelles on pouvait s’y attendre. Du fait de ces nouvelles pratiques spé- culatives, nous, distributeurs, avons moins de prise sur les prix. L.P.P. : Un litre de gasoil à moins d’1 euro, c’est quelque chose qu’on ne reverra jamais ? J.-M.D. : On ne peut pas le dire non plus. Souvenez-vous : le 14 juillet 2008,le baril de brut était à 147 euros. Moins de six mois plus tard, le

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