La Presse Pontissalienne 121 - Novembre 2009

DOSSIER

La Presse Pontissalienne n° 121 - Novembre 2009

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APRÈS LE DRAME Les risques encourus À Pontarlier, la chasse continue Les circonstances de l’accident mortel sont plus claires. Le défunt chasseur a reçu un plomb mortel dans le cœur alors que son chien fut criblé de la tête aux pattes.

ment, la mort d’autrui est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. En cas de violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, les peines encourues sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende. Une peine pour le président ? Au regard de la loi, il est pénalement respon- sable (amende et prison avec sursis). Au regard des circonstances, sa responsabilité est limitée. À la justice de trancher. Déjà en mal de présidents, les associations de chasse du Doubs n’avaient besoin de cette publi- cité. Les A.C.C.A. (associations communales de chasse agréée) sont en effet toutes confrontées au problème de la succession du président sor- tant. Tant de responsabilité pour un bénévole, c’est lourd à porter. La fédération l’a bien com- pris et voudrait conférer plus de pouvoir à ces derniers. En clair, un président pourrait sanc- tionner un comportement dangereux. Une nou- velle ligne de mire qui ne fait pas l’unanimité.

Président de chasse, chasseurs et acteurs éco- nomiques de ce microcosme sont tenus de gar- der le silence. Pendant ce temps, la chasse conti- nue sur les crêtes du Larmont où les bécasses - en migration - sont arrivées. Ici, la plaie est enco- re béante et loin d’être refermée d’autant que ces deux chasseurs étaient amis. Le premier a appuyé sur la détente sans respecter des consignes de sécurité. Le second est tombé. “Point barre, déclare un chasseur pontissalien. Que l’on arrê- te…Sur la route, il y a bien des morts et on n’arrête pas de rouler pour autant. Je connais les deux chasseurs, le président. Maintenant, passons à autre chose” dit-il. Quelle peine pour le tireur ? Le chasseur est placé sous contrôle judiciaire pour “homicide involontaire”. Le fait de causer, par maladresse, imprudence, inattention, négli- gence ou manquement à une obligation de sécu- rité ou de prudence imposée par la loi ou le règle-

C e n’est pas une balle qui a enlevé la vie à un chasseur de Pontarlier et son chien mais du plomb de taille numéro 4. Cet- te précision ne change rien au destin tra- gique du retraité et de son compagnon tombés à la sortie d’un fourré non loin d’un parcours de santé à Pontarlier mais accable un peu le chas- seur qui appuyé sur la détente. En effet, ce der- nier prétendait viser un chevreuil. Or, utiliser ce type de munition (des billes de plomb) pour abattre cette espèce est formellement interdit dans le Doubs. Si ce coup mortel semble acci- dentel, l’intention première est à inscrire dans le registre du braconnage d’où la “colère” de la fédération départementale des chasseurs du

Doubs qui a largement condamné ce drame au motif qu’aucune règle de sécurité n’a été res- pectée. Aujourd’hui, ce fait divers est en cours d’instruction par le Procureur de la République de Besançon et le tireur placé sous contrôle judi- ciaire. Rien ne doit filtrer même si ce drame relè- ve - selon toute vraisemblance - de l’accident. La fédération départementale des chasseurs du Doubs a largement condamné ce drame au motif qu’aucune règle de sécurité n’a été respectée. Aujourd’hui, ce fait divers est en cours d’instruction par le procureur de la République de Besançon et le tireur placé sous contrôle judiciaire. Rien ne doit filtrer même si ce drame relève - selon toute vraisemblance - de l’accident.

RÉPRESSION

POLICE DE LA CHASSE Avec Emmanuel Renaud “Le téléphone a bouleversé les habitudes de chasse”

Contrôle dans le Saugeais

Mission coup-de-poing, sans K.-O. Vaste opération de sécurité menée dans le Saugeais par l’O.N.C.F.S. et la gendarmerie le 25 octobre. Pas d’infractions notables.

L’Office national de la chasse et de la faune sauvage (O.N.C.F.S.) verbalise de plus en plus tout en s’adaptant aux nouveaux modes de braconnage. Un nouveau phénomène ? R esponsable de l’Office natio- nal de la chasse et de la fau- ne sauvage, Emmanuel Renaud évoque sonmétier de “poli- ce de la chasse”. Chef du service départemental basé à Vercel, il dirige onze personnes, toutes habi- litées à la même tâche : faire res- pecter la loi en matière de chas- se et de protection de l’environnement. L’environnement, un thème devenu prépondérant. Entretien. La Presse Pontissalienne :Avec l’accident mortel survenu à Pontarlier, allez-vous multiplier les contrôles auprès de chas- seurs du Doubs ? Emmanuel Renaud : Non, nous n’augmenterons pas le nombre de contrôles même si une opération a étémenée dans le secteur de Pon- tarlier etVille-du-Pont le dimanche 25 octobre (lire par ailleurs). L.P.P. : Pourquoi ? E.R. : Depuis plusieurs années, nous travaillons en étroite collaboration avec la Fédération départementa- le des chasseurs du Doubs (F.D.C.) et cela est presque unique en Fran- ce. La fédération fait un gros tra- vail enmatière de sécurité en inci- tant ses chasseurs à suivre des formations de tirs et de sécurité. D’ailleurs,il n’y a pas eu d’accidents de chasse en 2007 dans le Doubs, deux en 2008, malheureusement un cette année. L.P.P. :On a souvent décrit les jeunes chas- seurs comme les plus dangereux. Or,

L a chasse aux chasseurs-fraudeurs n’a finalement rien donné. Réunis le dimanche 25 octobre autour d’une même opération de police de la chas- se, services de gendarmerie de Pontarlier, de l’Office national de la faune sauvage, de l’office national des forêts (O.N.F.), de l’Onema (poli- ce de l’eau) et de la D.D.E.A. ont mené un vas- te contrôle de la chasse dans le secteur du Saugeais sans enregistrer de véritables fraudes.

remarquer le capitaine Bailet, de la gendar- merie de Pontarlier. C’est une manière de montrer aux hommes des bois qu’ils sont sur- veillés, même un dimanche. Ce jour-là, la majorité des chasseurs était partie traquer le lièvre à l’instar de Franck Rufenacht, chasseur àVille-du-Pont.Mais au lieu de revenir avec un “capucin”, l’homme a rapporté un sanglier de 90 kg. Un beau mâle qu’il a conduit à son domicile sur le toit de sa remorque à chiens après avoir rendu les hon- neurs à l’animal en plaçant une branche de sapin dans sa gueule. Philippe Renaud, res- ponsable de l’O.N.C.F.S., a profité de l’occasion pour s’assurer que tout était règle. Et effec- tivement, la bande de trois chasseurs avait respecté la procédure en baguant la bête noi- re à la bonne date et au bon poids. Au-delà de 50 kg, un sanglier doit être porteur d’un bracelet “adulte”. En deçà de 50 kg, un bra- celet “jeune” doit être apposé. Chaque socié- té a un quota fixé par la fédération à respec- ter et réévalué au cours de la saison de chasse. À partir du 6 novembre, cette dernière effec- tuera une deuxième attribution de bracelets. Ce contrôle dans le Saugeais a porté ses fruits au niveau de la prévention. Petit bémol, peu de pratiquants ont suivi la formation de sécu- rité conseillée par la fédération. “Faites-le avant qu’elle ne devienne obligatoire (lire en première page du dossier)” , rappela Emma- nuel Renaud, de l’O.N.C.F.S.

Emmanuel Renaud, responsable départemental de l’O.N.C.F.S., contrôle si un bracelet a bien apposé au sanglier.

Que ce soit à Ville-du-Pont, Bugny ou Maisons-du-Bois- Lièvremont, les disciples de Saint-Hubert ont montré pat- te blanche lorsqu’il fallut pré- senter à 23 personnes asser- mentées le permis de chasser, l’arme ou le gilet fluorescent. Idem pour les zones de chas- se (réserve), les parkings ou encore le contrôle alcoolémie et l’ouverture des coffres qui n’ont rien révélé d’anormal. Quelques écarts au règlement ont tout de même été notifiés à l’instar du défaut de pré- sentation de permis. D’envergure, cette opération - menée de 9 heures à 13 heures - n’a selon les res- ponsables “aucun lien avec l’accident de Pontarlier” fait

dangereux. Les braconniers sont en général des non-chasseurs et ça mobilise beaucoup de temps et de filature de notre part mais nous arrivons toujours à trouver des indices. L.P.P. :Les braconniers ont désormais des outils performants avec les canons silen- cieux ou des lunettes infrarouges. Votre métier est-il plus difficile à exercer ? E.R. : Non, car nous aussi nous nous sommes adaptés auxnouvelles tech- niques. Le braconnage reste un marché économique. L.P.P. : En tant que force de police, rele- vez-vous plus d’infractions de chasse qu’avant ? E.R. : Nous avons un très bon bilan policier. L’augmentation des pro- cédures n’est pas due aux infrac- tions de chasse mais par rapport à la protection de l’environnement. Nous sommes au chevet de la natu- re. L.P.P. :Avez-vous des difficultés à contrô- ler les chasseurs ? Coopèrent-ils ? E.R. : Le chasseur est assez res- ponsablemais je ne vous cache qu’il nous arrive de rencon- trer des gens belliqueux, qui par- fois ont bu. Mais cela reste très minoritaire. Propos recueillis par E.Ch.

l’accident mortel de Pontarlier a impli- qué deux personnes expérimentées. E.R. : Nous avons environ 10 000 chasseurs dans le Doubs et la pyra- mide des âges ne cesse d’augmenter. En nombre, les anciens sont plus nombreux. Mais il nous est arrivé récemment de contrôler des jeunes qui allaient à la chasse juste pour “ferrailler” sans respecter le gibier. L.P.P. : La chasse aux sangliers est à la mode. De plus en plus de chasseurs uti- lisent leur voiture ou leur portable pour rattraper le gibier. Est-ce vrai ? E.R. : C’est un fléau que nous ten- tons de combattre au même titre que la sécurité.La voiture et le télé- phone ont bouleversé les habitudes de chasse. C’est une dérive mais le délit est difficile àmatérialiser. Les chasseurs s’exposent à une contra- vention de classe 5 (jusqu’à 3 000 euros d’amende). Le gibier n’a plus aucune chance. Le deuxiè- me sujet, c’est l’incursion dans les réserves de faune, pas forcément des chasseurs,mais des chiens.Cela peut constituer une infraction. L.P.P. :Le braconnage est-il fortement pré- sent ?Dans quel secteur du département ? E.R. : Il y a du braconnage mais je ne peux pas vous dire où. Je peux vous dire que nous avons interpellé une personne qui posait des collets dans la forêt de Chailluz (proxi- mité de Besançon). C’est illégal et

“Défaut de présentation de permis.”

Le capitaine de la gendarmerie de Pontarlier - au centre - et Emmanuel Renaud (à gauche) contrôlent un chasseur qui vient de prélever un san- glier de 90 kg à Ville-du-Pont. Tout est en règle.

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