La Presse Pontissalienne 118 - Août 2009

JURA VOISIN

La Presse Pontissalienne n° 118 - Août 2009

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MIGNOVILLARD 800 hectares Martelage dans la forêt du Prince Survivance des propriétés des comtes de Châlon, ce domaine forestier de 800 hectares d’un seul tenant fait l’objet d’une gestion en futaie jardinée depuis plus de 150 ans. Découverte.

Le bûcheron martèle l’arbre

en trois points :

deux fois à hauteur d’homme et une fois juste au-dessus des racines.

Chargé du pointage, Daniel Lambey est le garde privé du domaine. Son père et son grand-père exerçaient aussi

Une futaie jardinée L e sapin et lʼépicéa sont les espèces domi- nantes dans la forêt du Prince où lʼon trouve également du hêtre et de lʼérable. Cʼest lʼexemple caractéristique dʼune gestion en futaie jardinée. Le principe étant dʼassocier un mélan- ge de bois de toutes les grosseurs sur une même parcelle. “Ce mode de gestion permet d’avoir tou- jours un taux de boisement équilibré sans coupe rase. Pour le propriétaire, c’est l’assurance d’avoir des revenus réguliers et de pouvoir s’appuyer sur des prévisions assez précises. Le domaine est divi- sé en 99 parcelles martelées environ tous les 8 ans. On passe 12 à 13 parcelles en coupe chaque année” , explique lʼexpert forestier Fabien Rebeirot. 12 lots de résineux, soit 2 000 à 2 400 m 3 , ont été mis en vente à lʼautomne dernier à destination des scieries locales.

Représen- tant des

la même fonction.

propriétaires du domaine, Alain de Laguiche assiste à toutes les séances de martelage.

“S apin 130”, “Épicéa 140”, “Feuillu 80”. L’identification des arbres par les deux bûcherons qui officient au martelage n’a rien d’une partie de plai- sir. Du moins pour le spectateur peu habitué à suivre de ce type de séance rondement mené. Au pupitre, Fabien Rebeirot, l’expert chargé de gérer ce massif. Cet ingé- nieur forestier précède les bûcherons. À lui de déterminer d’un coup d’œil avisé quels sont les arbres à marteler, de les désigner ensuite aux bûcherons. Pas de bavardages inutiles. Quelques

mots de repérage. La complicité entre ces hommes habitués à évoluer dans le même milieu joue à plein. Le bûche- ron passe à l’action. En quelques coups, le tronc est martelé deux fois à hau- teur d’homme et une fois juste au début des racines.À chaque entaille, il retour- ne la hache à marteler pour y apposer le blason du propriétaire. Le diamètre est ensuite mesuré à l’aide d’une équer- re. L’opérateur annonce ensuite à voix haute le résultat aussitôt enregistré sur un carnet par le garde privé Daniel Lambey. C’est le pointage. L’homme connaît son affaire. Son père

Sur l’autre face de la hache à marteler, on trouve le blason du propriétaire.

et son grand-père occupaient déjà la même fonction que lui. Le dernier per- sonnage, et non des moindres, à par- ticiper à l’opération n’est autre que le comte Alain de Laguiche. Secrétaire du groupement forestier de la Haute- Joux, il participe à tous les martelages. À l’écoute des consignes prodiguées par l’expert, il suit discrètement mais sûrement la séance, s’imprègne des explications et n’hésite pas au besoin à imposer son point de vue non sans en avoir débattu avec le reste de l’équipe. “On pratique depuis plus de 150 ans une gestion en bon père de famille qu’on désigne aujourd’hui ges- tion patrimoniale ou durable. Cette façon de travailler traduit juste la volonté de maintenir un capital fores- tier” , conclut le propriétaire des lieux. F.C.

Fabien Rebeirot, l’expert forestier chargé

d’identifier les arbres à marteler.

L’héritage des comtes de Châlon E n 1825, le prince dʼArenberg reprend le château dʼArlay et les propriétés de sa grand-mère la comtesse de Laurageais, héritière légitime des comtes de Châlon. Il se retrouve à la tête dʼun vaste massif forestier de 1 500 hectares aux contours mal définis et dont la surface est finalement réduite à 760 hec- tares après moult procès. Le domaine est plus ou moins laissé à lʼabandon jus- quʼà lʼarrivée du régisseur Georges Tournier qui au lendemain de la Première guerre Mondiale entreprend de réaliser le réseau de dessertes (24 km) qui sera achevé après la Libération. La plus grande forêt résineuse du Jura appartient aujourdʼhui à un groupement forestier qui réunit les 30 associés.

La circonféren- ce est mesurée à 1,5 m du sol

avec une équerre.

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