La Presse Pontissalienne 117 - Juillet 2009

MOUTHE - RÉGION DES LACS

La Presse Pontissalienne n° 117 - Juillet 2009

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ENVIRONNEMENT Dans la vallée du Doubs Renouée du Japon :

ENVIRONNEMENT Des conséquences négatives Les grands tétras restent au parc Un éleveur suisse espérait lâcher quatre grands tétras dans le Val de Travers, non loin du massif du Mont d’Or. Demande refusée. “Sage décision” selon Marc Montadert, chargé de mission “grand tétras” côté français. Explications.

la bête noire des botanistes

Sur les berges des rivières, au bord des routes, dans les jardins,

les prairies et les tourbières,

L es randonneurs qui empruntent les chemins du Mont d’Or ne croi- seront pas de sitôt des grands tétras, ce gallinacé en voie de disparition aus- si bien sur notre massif que dans les Vosges. Un éleveur suisse espérait lâcher quatre de ces oiseaux dans la région du Creux-du-Van (canton de Neuchâtel), un cirque rocheux d’environ 1 400 mètres de large pour 150 mètres de haut au cœur d’une réserve natu- relle de 15,5 km 2 . Ce lâcher devait se faire avec le sou- tien d’HelvetiaNostra qui milite notam- ment pour la protection des animaux. Or, l’Office fédéral de l’environnement (O.F.E.V.) a rejeté sa demande d’autorisation. L’Office estime que le lâcher était une “mesure inefficace” , d’autant qu’elle n’a pas été retenue dans le “Plan d’action grand tétras Suis- se” , édicté en 2008. Pourquoi cette décision ? La réponse est tranchée côté helvétique : “Le bio- tope n’est pas suffisamment bon.” Pour Marc Montadert, chargé de mission “grand tétras” à l’Office national de la faune sauvage (O.N.C.F.S.) - D.I.R.E.N. Franche-Comté et Rhône-Alpes, le pro- blème est plus complexe : “Réintroduire

des grands tétras d’élevage donne une réussite nulle. Des études enAllemagne l’attestent. En élevage, le grand tétras est un poulet pas bien malin dont le taux de survie ne dépasse pas un an.” Avec une vingtaine de grands tétras présents en Suisse, ce lâcher n’aurait donc pas eu de conséquence. Pire, “elles auraient pu être négatives” estime le professionnel. Et d’expliquer : “Les ani- maux d’élevage véhiculent des mala- dies sans compter l’aspect génétique.” Pour le canton de Neuchâtel,MarcMon- tadert confirme que cette région ne fait “pas trop d’effort en matière d’habitat pour le gallinacé.” Cette décision d’interdire les lâchers est “une sage décision” conclut l’expert dont la mis- sion se terminera en 2010. Son rôle : comptabiliser la population sur l’arc jurassien français. “On estime aumaxi- mum à 300 le nombre de ces gallina- cés” comptabilise le Haut-Doubiste. Le gros problème demeure le développe- ment du tourisme et la quiétude de ces animaux. “C’est en hiver que le touris- me pose le plus de problème notamment en raison du développement des balades en raquettes”. E.Ch.

Les feuilles de renouée ont une taille qui varie de 20 à 40 cm.

I l ne faut pas se fier aux appa- rences. Avec ses larges feuilles, ses tiges rougeâtres semblables à des cannes de bambou, et ses petites fleurs blanchâtres, la renouée du japon (la plus courante des trois espèces de renouée présentes en Franche-Comté), est une grande plan- te vigoureuse qui a d’ailleurs long- temps été utilisée pour l’ornement des jardins. Mais cette espèce végé- tale originaire d’Asie est devenue un cauchemar pour les botanistes. La reynoutria japonica est invasive. Elle ne se cantonne pas seulement aux jardins des particuliers, mais colo- nise les talus des bords de route et les berges des rivières. Elle contri- bue à “l’érosion des berges” et favo- rise “le lessivage des sols” stipule le conservatoire botanique de Franche- Comté. À la fois dense et haute (3 à 4m) elle peut provoquer des embâcles qui gênent l’écoulement du cours la renouée du japon colonise les milieux naturels et les perturbe. vente en Suisse L a renouée pose problème en Suisse. Cette espèce végétale est présente partout sur le territoi- re national. En 2008, les autorités helvétiques dans une ordonnance sur la “dissémination des organismes dans lʼenvironnement”, ont interdit la commercialisation de cette plan- te au même titre que onze autres espèces. “Elle ne peut plus être ven- due comme plante ornementale. Désormais, quand on travaille avec cette plante, cʼest pour la détruire” indique la commission suisse pour la conservation des plantes sau- vages. Lʼéradication de ce végétal rebelle et robuste qui étouffe le milieu quʼil colonise nʼest pas envisageable mal- gré les recommandations de la Confé- dération. “La lutte qui relève de la responsabilité des cantons est très difficile. La renouée colonise le bord des cours d’eau. Dans ces milieux, il est interdit d’utiliser des herbicides.” Le centre international de recherche de Délémont (C.A.B.I.) dont le siège est enAngleterre a proposé un moyen de lutte biologique. Des insectes et un champignon (mycosphaerella) permettraient selon cet organisme dʼenrayer lʼexpansion de lʼespèce. Pour lʼinstant, le moyen de lutte le plus efficace pour limiter la prolifé- ration de la renouée est lʼinformation et la sensibilisation du grand public. La renouée interdite à la

ont cette plante dans leur jardin doi- vent être vigilants lors de la taille. “Il ne faut pas jeter ses déchets verts n’importe où. L’idéal est de les mettre dans une poubelle ou de les laisser en compost.” Il suffit d’une racine même déchaussée du pied d’origine pour que se “forme un nouveau foyer d’infestation.” Dans ces aménagements routiers, le Conseil général du Doubs oblige que les remblais utilisés soient dénués de tout rejet de renouée. Cette espè-

d’eau. Des études ont montré “que de nombreux insectes disparaissent des secteurs envahis du fait de la mono-spécificité du milieu.” Aujourd’hui, la renouée du Japon a colonisé toute la vallée du Doubs. Elle est aussi présente autour du lac Saint-Point, un des foyers principaux du Haut-Doubs. Sa prolifération est telle qu’il n’est pas imaginable de tenter de l’éradiquer d’autant qu’elle est très résistante aux moyens de lutte. “Une invasion biologique, c’est un peu comme un feu de forêt. Dans les premières secondes, il suffit d’un verre d’eau pour l’éteindre.Dixminutes après il faut un Canadair” explique François Dehondt, directeur du conservatoire botanique. Les moyens de lutte traditionnels ne sont guère efficaces. “La renouée sup- porte plusieurs fauches annuelles, même l’herbicide a peu d’effet. On peut réussir à l’éradiquer sur un sec- teur très localisé, mais à grande échel- le ce n’est pas imaginable ou alors au prix de moyens très importants.” C’est la raison pour laquelle le conser- vatoire préfère la prévention à l’éradication. “Il faut tout d’abord éviter de la planter” conseille Fran- çois Dehondt. Les particuliers qui

ce fait partie d’une cin- quantaine de plantes qui ont été soumises au jugement du législateur pour qu’elles soient reti- rées de la vente. Sur ce lot, seulement deux ont été retirées du com- merce. Nos voisins suisses rencontrent des problèmes identiques avec la renouée. Mais eux sont, paraît-il, à la pointe de la lutte. Pour commencer, ils propo- sent aux particuliers des espèces de substi- tution. T.C.

Selon Marc Montadert (à gauche), il resterait environ 300 grands tétras dans le massif jurassien (photo archive L.P.P.).

“Éviter de la planter.”

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