La Presse Pontissalienne 113 - Mars 2009

La Presse Pontissalienne n° 113 - Mars 2009

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ARC-ET-SENANS

Seul contre tous

Cet habitant d’Arc-et-Senans qui n’avait aucune possibilité d’être relié au réseau électrique, n’a eu d’autre choix que d’installer lui- même un système de cogénération. Il produit lui-même l’électricité et l’eau chaude sanitaire de sa maison. L’autonomie énergétique a un prix Q uand la tempête sévit sur le secteur d’Arc-et- Senans et que le villa- ge est plongé dans

re Schepens n’avait d’autre choix. En novembre 2004, il se porte acquéreur d’une maison nichée à l’orée d’une forêt, au bout d’un chemin de terre, à l’entrée du village. La bâtisse était habitée, au XIX ème siècle, par le garde forestier du château de Roche, situé à quelques centaines de mètres de là. Le projet du nou- veau propriétaire, Pierre Sche- pens, consiste à transformer l’édifice bâti en 1811 en maison d’habitation. Reste à régler la question du raccordement au réseau électrique. Il se renseigne auprès d’E.D.F., il en aura pour 15 000 euros. C’est là que les ennuis commencent : la mairie d’Arc-et-Senans refuse catégo- riquement de lui accorder un permis de construire, sans motif apparent. Déterminé à mener son projet à bien, Pierre Sche- pens frappeà laportede laD.D.E., même refus. Il s’adresse alors à l’architectedesbâtimentsdeFran- ce, Marc Wattel, qui “a sauvé le projet affirme M. Schepens. Per- sonne ne peut empêcher quelqu’un d’habiter et de rénover une mai- son existante.M.Wattelm’a signé un permis en blanc que j’ai pu déposer à la mairie.” Lâché par la commune qui refu- se tous travaux sur son domai- ne public destiné à raccorder la maison forestièreauréseauE.D.F., PierreSchepenspeut alorsdémar- rer son projet, seul, qui consiste à installer un système de cogé- nération (production simulta- née de chaleur et d’électricité), devant lui assurer une autono- mie totale enmatière d’éclairage et d’eau chaude sanitaire. “J’avais contacté 5 installateurs diffé- rents qui m’ont envoyé 5 devis radicalement opposés. Devant ce flou, j’ai décidé de tout faire moi- même.” Le propriétaire se plon- ge dans des formations très poin- tues en électricité,il se rapproche des rares fournisseurs de maté- riels et s’engage dans le monta- ge de ce système qui, contraire- ment à une cogénération “classique” consiste, là, à “fabri- quer l’électricité et pour renta- biliser l’électricité fabriquée, la récupérer pour produire de la chaleur.” Son électricité est produite grâ- ce à deux groupes électrogènes. Le courant alternatif de ces groupes passe ensuite par des chargeurs-onduleurs qui trans- fèrent ce courant en courant

continu. Le tout est relié à un ensemble de 12 batteries qui accumulent l’énergie électrique, gérées elles-mêmes par un contrô- leur de batterie qui analyse le courant entrant et sortant. Lorsque le niveau de charge est atteint, ce contrôleur comman- de à nouveau les groupes élec- trogènes pour recharger les bat- teries. Tout est automatisé. La production d’eau chaude se fait, elle, grâce à la chaleur des gaz d’échappement des groupes fonctionnant au gasoil. Cette chaleur est alors récupérée dans un échangeur de chaleur relié à un faisceau de tuyaux dans les- quels circule l’eau, qui est alors chauffée puis stockée dans une cuve de 1 000 litres. L’eau, il la capte grâce à des conduites déjà existantes, à trois sources situées en amont. Impropre à la consommation, cette eau a dû passer par un sys- tème de filtre à paille de céra- mique que M. Schepens a éga- lement installé lui-même. “Ce système filtre l’eau au 100 ème de micron.” Après quatre ans d’efforts et de rebondissements, le systèmemis en place par Pierre Schepens est quasiment opérationnel. Qua- siment, car le propriétaire a dû subir une nouvelle embûche dans ce parcours du combattant avec l’incendie accidentel, début jan- vier, du local où étaient instal- lés les groupes électrogènes. Encore quelques semaines de travail et le dispositif sera à nou- veau opérationnel à 100%, assu- rant au futur occupant de cette maison encore en travaux, une totale autonomie en matière énergétique. Mais cette autono- mie à un prix : financier d’abord (40 000 euros), un temps fou consacré par le porteur de pro- jet, pas mal de tracas adminis- tratifs et aucune subvention à la clé. Pour Pierre Schepens en fait, cette autonomie n’avait jus- tement pas de prix. Mais l’essentiel est peut-être ailleurs :si Pierre Schepens avait dû dimensionner son installa- tion pour sa consommation habi- tuelle, elle aurait été deux fois plus grosse, et deux fois plus chè- re. Résultat : en choisissant ce mode de production, il a, de fait, divisé sa consommation quoti- dienne par deux. J.-F.H.

l’obscurité,privé de courant,Pier- re Schepens observe, narquois, depuis samaison forestière bien éclairée et chauffée. Il est, dans cette situation, le seul habitant à toujours être “branché”. La rai- son est simple : il est depuis cet- te année totalement autonome en matière d’électricité et d’eau chaude sanitaire. Son secret : la cogénération. Cette indépen- dance a un coût - 40 000 euros - mais qu’à cela ne tienne, Pier-

Pierre Schepens a acquis début 2005 l’ancienne

maison fores- tière d’Arc-et- Senans.

BESANÇON

Une isolation extérieure Priorité aux économies d’énergie Le Bisontin Jean-Pierre Cattelain et sa compagne ont engagé une vaste opéra- tion de rénovation de leur pavillon du quartier de Velotte. La réflexion a été menée avec un seul leitmotiv en tête : les économies d’énergie. J eune retraité de l’Éducation Nationale, Jean-Pierre Catte- lain veut mettre son temps libre

au profit d’un nouveau projet : l’accueil des touristes. Il aménage actuelle- ment à l’étage de sa maison de Velot- te des chambres d’hôtes urbaines. Dès leur arrivée dans ce pavillon acquis en mai dernier, lui et sa compagne décident d’engager d’ambitieux tra- vaux de rénovation, notamment sur la partie isolation, totalement négli- gée lors de la construction de la mai- son dans les années soixante. “À l’étage, il n’y avait strictement aucune isola- tion. Les tuiles étaient totalement appa- rentes. Imaginez les déperditions de chaleur !” présente Jean-Pierre Cat- telain. Ces “militants de l’écologie et de l’économie d’énergie” décident d’opter pour un mode d’isolation qui doit leur permettre de “diviser par 4 la consom- mation d’énergie.” Leur démarche est retenue comme lauréate d’un appel à projets lancé par le Conseil régional et l’A.D.E.M.E. (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie). “Notre maison consommait 350 kWh par mètre carré et par an. L’objectif est de descendre à moins de 96, voire 85” précise M. Cattelain. Premier moyen de parvenir à ce résul- tat : l’isolation. “Nous avions une exi- gence supplémentaire, celle d’utiliser un matériau simple et sain.” Ils choi- siront la laine de bois. Deuxième éta- pe, les propriétaires ont opté pour une isolation extérieure, une sorte d’enveloppe qui entoure la maison, la protège et évite ainsi les ponts ther- miques dus au plancher ou à la dal- le. Coût de cette opération : 23 000 euros. Troisième phase, l’isolation de la sous-dalle, au niveau du plafond du sous-sol. “L’idée est vrai- ment de faire un manteau autour de l’espace de vie.” Première difficulté à laquelle se sont confrontés ces éco- citoyens : trouver le bon artisan. “Cer- tains me disaient : “On vous met du polystyrène, ça fait 25 ans qu’on fait comme ça !” La démarche écologique n’est pas encore vraiment entrée dans les mœurs” déplore le propriétaire qui

Sur la véranda seront installés des panneaux solaires.

a décidé d’anticiper les normes actuelles : “Pour l’isolation des combles, la R.T. 2005 préconise une épaisseur d’au moins 20 cm, nous en avons mis 30 cm de laine de bois.” La démarche “économies d’énergie” s’est poursuivie par la création d’une vaste véranda au Sud de la maison, “qui fera tampon et accumulateur de chaleur.” Sur le toit de la véranda seront installés des panneaux solaires destinés à produire l’eau chaude sani- taire. “L’idée est de pouvoir éteindre totalement la chaudière pendant 5 mois, de juin à octobre.” Détail com- plémentaire : la prise d’air de laV.M.C. sera installée à l’intérieur de la véran- da, l’air frais prélevé sera déjà pré- chauffé avant de circuler dans la mai- son. Coût de la véranda : 25 000 euros, auxquels il convient encore d’ajouter 10 000 euros pour les panneaux solaires et la réorganisation du circuit d’eau chaude dans la maison. Les travaux ont démarré en octobre dernier, ils seront terminés au prin- temps. Si le couple ne regrette en aucun cas de s’être engagés dans la démarche, quelques bémols viennent cependant atténuer leur enthousias- me : des délais de réalisation toujours plus longs que prévu (mais c’est le lot de toute opération de rénovation,“éco-

logique” ou pas), un manque de recul évident par rapport aux prix prati- qués et une difficulté notable à trou- ver des professionnels disposés à tra- vailler “autrement”. “Nous avons un peu l’impression d’arriver au pire moment. Je pense que la filière n’est pas tout à fait prête mais que dans quelques années, notre démarche devien- dra tout à fait banale” ajoute Jean- Pierre Cattelain. Exemple type du décalage existant encore entre les discours officiels prô- nant la démarche écologique et la réa- lité : la laine de bois vient, non pas de Franche-Comté comme l’étendue des forêts régionales pourrait le laisser supposer, mais d’Allemagne ! Le choix du couple Cattelain est d’abord philosophique, voire politique. Il est sans doute aussi précurseur. Mais avoir de l’avance sur son temps peut parfois coûter plus cher et ce, même si les partenaires publics encouragent par certaines aides financières ce gen- re de démarche éco-citoyenne. Le couple attend avec impatience la fin de ces travaux pour pouvoir ouvrir les portes de leur pavillon de Velotte à qui le voudrait. Car à travers cette maison, ils veulent aussi faire passer un message. J.-F.H.

Un système de 12 batteries accumule l’électricité nécessaire au fonctionnement quotidien de l’habitation.

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