La Presse Bisontine 96 - Février 2009

La Presse Bisontine n°96 - Février 2009

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HISTOIRE Les Suisses précurseurs La grande épopée du ski dans le massif jurassien Les premières traces de ski dans les neiges jurassiennes remontent à plus d’un siècle. Le phénomène se propage sous l’impulsion de vision- naires, de fabricants connus ou méconnus, de promoteurs dynamiques, de clubs fédérateurs. Il fluctue aussi au gré des évolutions de la société.

La mode des sports d’hiver débute timidement au lendemain de la guerre 14-18 avec le développement des lignes ferroviaires et de l’hôtellerie.

O riginaires de Scandinavie, les premières “planches” sont signalées en France et plus spécifiquement dans les Alpes vers 1880. Ce mode de locomotion rudimentaire appa- raît dans notre massif dès la fin du XX ème siècle. Il ne fait guère de doute qu’il soit arrivé par la Suisse où nos voisins avaient déjà une bonne vingtaine d’années d’avance dans la pra- tique. L’histoire du ski jurassien com- mence à peu près simultané- ment dans le Haut-Doubs et le

personnage charismatique montre beaucoup d’intérêt quand il voit un officier anglais des- cendre la Dôle “monté sur de longues et étroites planchettes et appuyé sur un long bâton muni d’une rondelle.” L’élu saura tirer profit de ses observations pour lancer cette nouvelle pratique allant jusqu’à effectuer lui-même la tournée du facteur lors de l’hiver 1904-1905. L’usage d’abord utilitaire prend très vite un caractère ludique et sportif, voire clandestin pour quelques adeptes de la contre- bande qui sévissaient du côté de Chapelle-des-Bois. Les forces industrieuses de la montagne jurassienne vont également équi- per les skieurs locaux qui n’avaient, pour la plupart, pas les moyens d’importer des lattes scandinaves. Très vite menui- siers, charrons, boisseliers du Haut-Doubs au Haut-Bugey se mettent à confectionner des planches avec des réussites diverses. Beaucoup ne résiste-

ront pas à l’avènement des tech- niques modernes comme le contrecollé ou les matières plas- tiques qui s’imposeront peu à peu au cours des années soixan- te-dix. On se souvient surtout des Lacroix, Grandchavin ou encoreVandel qui restent incon- testablement les plus grandes marques du ski jurassien. En parlant technique, l’usage des bâtons est déjà mentionné lors d’un concours à Morez en 1909. Cette époque marque aus- si la création des premiers clubs. Après la guerre 1914-1918, on assiste aux prémices des sports d’hiver. Ces débuts sont favori- sés par le développement de l’hôtellerie et des lignes ferro- viaires qui desservent les gares de Pontarlier,Morez, La Chaux- de-Gilley. Anecdote, en 1924, la commune des Fourgs dépose un projet de “skidrome” équipé de remontées mécaniques mises en mouvement par traction ani- male. Les tremplins se multi- plient au cours des années tren-

te, qu’on peut considérer com- me celles rattachées à la décou- verte du ski. Il prendra son véri- table essor au cours des deux décennies suivantes grâce aux remontées mécaniques. En 1937, Camille Gresset ins- talle un télé-traîneau au pied du Mont d’Or. Un certain Mau- rice Lagier ne tarde pas à l’imiter en implantant la même année une remontée sur 150 m aux Hôpitaux-Neufs. Ce Pontissa- lien inventif sera le pionnier des remonte-pentes et télésièges dans le Haut-Doubs. Après le coup d’arrêt lié à la Seconde Guerre Mondiale, l’épopée du ski jurassien repart de plus belle, encouragé par la montée en puissance de la civi- lisation des loisirs. Cette dyna- mique aboutit à la naissance des grandes stations jurassiennes : Mijoux-Lélex, Les Rousses et Métabief. En 1953, le plus grand domaine skiable du Doubs a sa télébenne. L’équipement avant- gardiste remporte un succès

considérable. Plus de 7 000 skieurs l’empruntent dès la pre- mière saison. Le massif jurassien n’échappe pas à la grande vague populai- re du ski initiée après les J.O. de Grenoble en 1968 et qui connaîtra son apogée dans les années quatre-vingt-85. Cer- tains spécialistes attribuent beaucoup d’importance à cet évé- nement olympique qui fut selon eux à l’origine même de cette démocratisation. D’autres esti- ment qu’il s’agit tout simple- ment de la résultante d’une socié- té avide de retour aux sources. La vérité est peut-être entre les deux. Cette période cruciale se traduit par la remise au goût du jour du ski nordique. Après des débuts prometteurs jusque dans les années trente avant de céder ensuite le pas à son homologue alpin, le fond retrouve enfin ses lettres de noblesse en terre juras- sienne. Le modèle de dévelop- pement rural suivi à Chapelle- des-Bois ou à La Pesse illustre

bien ces connivences entre cet- te pratique et ce massif qui lui va comme un gant. L’itinéraire de la Grande Tra- versée du Jura inauguré en 1979 dans le Doubs participe à ce retour en grâce.On va alors assis- ter à la multiplication des sites nordiques. C’est le temps des grandes courses populaires.3 000 coureurs au départ de Mouthe- Pontarlier en 1981. Le record sera battu 3 ans plus tard par la Transju. Le temps aussi de l’instauration de la redevance et des premières plaintes. Sans s’en douter, le ski jurassien tra- verse alors ses plus belles heures de gloire populaire. Les problèmes d’enneigement, l’évolution des mentalités qui mettront en lumière les raquettes par exemple, l’avènement du skating boudé par les touristes, cette conjonction de facteurs fra- gilisera considérablement la dynamique du ski nordique qui ne s’en est toujours pas remis. F.C.

Haut-Jura si l’on s’en réfère aux gazettes locales. Elle aura peut- être davantage d’écho aux Rousses avec son ambassadeur historique, à savoir le maire Félix Péclet. Au cours de l’hiver 1899-1900, ce

Un officier anglais descend la Dôle.

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