La Presse Bisontine 67 - Juin 2006
BESANÇON
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O PHTALMOLOGIE Glaucome, cataracte… Michel Montard : “La rétine n’est pas faite pour vivre 120 ans” Chef du service d’ophtalmologie du C.H.U. de Besançon et administrateur de la Société Fran- çaise d’Ophtalmologie, Michel Montard fait le point sur l’avancée de la recherche dans le traitement des pathologies de l’œil.
H OMMAGES
Peut-être une maison Victor Hugo
Rendez-vous sur place des grands hommes délaissés
U ne jeuneAnglaise se laisse pho- tographier devant à lamaison des frères Lumière. La scène est anecdotique et pourtant… “C’est là que sont nés les inven- teurs du cinéma” répond-elle avec enthou- siasme dans un français approximatif quand on lui pose la question. C’est vrai ça ! Nous Bisontins l’aurions presque oublié. C’est avec la même insouciance de l’habitude que l’on passe au pied de lamaison de Vic- tor Hugo sans sourciller. C’est ainsi. Il n’y a qu’à se retourner pour passer de la demeu- re des Lumière à celle de Hugo. Les façades des maisons bordent la petite place qui porte le nomde l’illustre écrivain avec sur chacune d’elle une plaque com- mémorative et c’est tout ! Un peu maigre comme reconnaissance. Misérable. Com- me si nous nous étions faits à l’idée que finalement, le cinéma c’est Hollywood et “Notre Dame de Paris”, c’est Walt Disney pour le dessin animé tiré de l’œuvre de l’écrivain, et Luc Plamondon et Richard Cocciante pour la comédie musicale qui porte le même nom. Besançon aurait-elle trop de retenue ou de pudeur pour ne pas clamer davantage que c’est dans cette vil- le qu’ont pris racine ces fabuleux destins ? On est en droit de le penser alors que les élus locaux se sont creusé la tête pour créer à Besançon un événement d’envergure populaire, sans jamais songer à exploiter la richesse de ce patrimoine culturel qui La maison des frères Lumière et à côté celle de Victor Hugo. Des destins illustres que la ville n’a jamais vraiment honorés.
L a Presse Bisontine : La durée de vie s’allonge. Mais peut-on espérer vivre longtemps avec une vue correcte ? Michel Montard : L’œil est un orga- ne sensoriel. Le problème est que la rétine n’est pas faite pour vivre plus de 120 ans. D’ailleurs, on constate que la plupart des centenaires ont une rétine très souvent altérée. D’où l’impor- tance aujourd’hui de poursuivre les recherches afin d’aider la rétine à vieillir plus que nos artères et nos veines. L.P.B. : Avec le vieillissement de la population, le nombre de personnes malvoyantes est donc amené à pro- gresser ? M.M. : En effet, à mon sens, un des enjeux de demain est de progresser dans laprise en char- ge des personnes handicapées visuelles. Il faudra aider ces gens atteints d’une pathologie de l’œil pour leur garantir un certain confort de vie. On ver- ra probablement se développer de nouveaux services destinés à ce genre de public. Par exemple, l’expérience a été fai- te d’une bibliothèque sonore. L.P.B. : Y a-t-il un lien entre l’exer- cice d’une profession et le risque de contracter une pathologie de l’œil. On pense notamment aux personnes qui travaillent à l’extérieur ? M.M. : En effet, l’exposition solai- re est un facteur de risque vis- à-vis de la dégénérescence maculaire liée à l’âge et à la cataracte. En ce sens, il y a des professions à risque. Des études l’ont montré. Toutefois l’oph- talmologie est performante dans le traitement de certaines patho- logies comme la cataracte ou la chirurgie de lamyopie. Il est néanmoins nécessaire d’insis- ter sur la prévention qui pas- se entre autres par le port de lunettes solaires.
permet-il de dire que dans un ave- nir plus ou moins proche, on soi- gnera des pathologies aussi lourdes que le glaucome ? M.M. : Nous ne connaissons pas aujourd’hui la cause intime du glaucome. Il est plurifactoriel avec une base génétique. Il serait plus convenable de par- ler des glaucomes. Nous serons à l’avenir enmesure d’assurer un dépistage génétique de cet- te pathologie. Nous sommes capables actuellement de frei- ner son évolution et de la sta- biliser en agissant sur le tonus oculaire. Il reste cependant des glaucomes qui évoluent vers la cécité. L.P.B. : Il existe à Besançon une for- mation à ces nouvelles formes de prise en charge ? M.M. : C’est vrai, nous avons créé à la faculté de médecine de Besançon une licence pro- fessionnelle, unique en Fran- ce, réservée aux opticiens et les orthoptistes. Son but est de donner des outils à ces profes- sionnels pour analyser et prendre en charge les personnes atteintes d’un handicap visuel. L.P.B. : Vous êtes un des adminis- trateurs de la Société Française d’Oph- talmologie. Quel est le rôle de la S.F.O. ? M.M. : Tout d’abord la S.F.O. est la deuxième société aumonde. Avec plus de 7 000 membres, elle est juste derrière la socié- té américaine d’ophtalmologie. Elle rayonne sur toute la Fran- ce et les pays francophones. La S.F.O. représente l’ensemble de la profession. Son but est de proposer aux ophtalmologistes des formations continues, de proposer aux jeunes chercheurs des bourses et des prix de recherche sur tous les thèmes concernant la pathologie ocu- laire. Propos recueillis par T.C.
Seule une plaque rappelle la maison natale de Victor Hugo.
Pascal Coupot pour qu’il réalise uneœuvre intitulée “l’arroseur arrosé” (114 926 euros) en hommage aux frères Lumière. Elle sera livrée au cours du second semestre 2006. L’image de Victor Hugo n’est guère plus valorisée au-delà de cette simple plaque et de la statue d’Ousmane Sow qui trône devant la mairie. Ailleurs dans le monde, les réactions sont bien différentes. Cuba
crue de 1910 qui a fait de terribles dégâts” raconte Gaston Bordet. L’historien confirme cependant que le pro- jet demaison Victor Hugo revient à l’ordre du jour. Fervent défenseur de ce dossier, il prétend avoir trouvé une oreille atten- tive en la personne deBernardFalga, direc- teur général adjoint du service culturel de la mairie. Gaston Bordet a une idée assez précise de ce qu’il faudrait mettre en œuvre le cas échéant. “Il y a une volonté de toucher tous les publics. On trouverait dans cette mai- son l’œuvre complète de Victor Hugo, une salle de travail, une salle où les enseignants pourraient venir avec leurs élèves. Un espa- ce vidéo serait créé dans lequel serait dif- fusé l’ensemble des films qui ont été réali- sés à partir de sonœuvre. Ce serait à la fois un centre culturel et une bibliothèque” dit- il, convaincu que ce projet tirerait parti des 250 000 visiteurs qui montent chaque année à la Citadelle. T.C.
par exemple a sa maison Vic- tor Hugo, depuis que l’auteur a pris la défense des femmes cubaines. Luxembourg a éga- lement une maison Victor Hugo, ville où l’écrivain a vécu. Elle fut détruite pendant la
leur tendait les bras. Pour- quoi ne pas avoir réfléchi depuis longtemps un festival de cinéma, du début de l’his- toire du cinéma par exemple ? D’autres villes l’ont fait com- meCognac,Deauville, Cannes,
Le cinéma, ce n’est pas qu’Hollywood.
guerre puis reconstruite. On peut citer éga- lement Guernesey ou la place des Vosges à Paris. Mais Besançon n’a toujours pas de mai- son Hugo. Pourtant, au début du siècle, la mairie avait eu l’idée d’un tel projet. “Mais tout l’argent qui était dédié aumusée Hugo a été donné aux gens nécessiteux suite à la
Gérardmer, Cabourg, oumême Pontarlier, la ville d’adoption de Bernard Blier où le ciné-club organise “les rencontres inter- nationales de cinéma.” Sûr que Besançon aurait pu trouver sa place sur ce créneau, comme en témoigne la réaction de la jeu- ne Anglaise. Et bien non. Cependant, la ville a récemment missionné le sculpteur
L.P.B. : L’état actuel de la recherche
Le 27 avril, en compagnie de Claire Schwartz et Claude Rousse, ophtalmologistes, et du professeur Bernard Del- bosc, Michel Montard a animé la première rencontre patient-ophtalmologistes organisée à Besançon.
La ville aurait-elle tourné le dos à Victor Hugo ?
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