La Presse Bisontine 62 - Janvier 2006

BESANÇON

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C ONCERTATION

Un “potentiel” de 2 000 logements Jean-Louis Fousseret fait machine arrière

On ne parle plus de 2 000 logements à réaliser, mais “d’un potentiel de 2000 logements.” En présentant le projet d’urbanisation des Vaîtes sous un angle plus conditionnel, Jean-Louis Fousseret cherche à calmer une grogne popu- laire à l’Est de Besançon qui prend de l’ampleur.

J ean-Louis Fousseret était atten- du au tournant. Le 6 décembre, à l’I.E.S.Fontaine-Argent oùse tenait une réunion d’information sur le pro- jet d’aménagement du quartier des Vaîtes, le maire a tenté de tranquilli- ser une assemblée de plus 300 per- sonnes. Car depuis que la ville a affi- ché ses ambitions d’urbaniser le secteur Est de l’agglomération en envisageant la construction de 2 000 logements sur 40 hectares, les habitants des Vaîtes “voient rouge.”Et ils lemontrent en ce moment en placardant des calicots en limite des propriétés où fleurissent les slogans, et en habillant l’extérieur de leur domicile de longs rubans de cette couleur.Pas questionpour euxde béton- ner ce poumon vert. En tout cas pas dans les proportions annoncées par la municipalité et sous certaines condi-

re à la disparition d’habitations. Les élus ne s’attendaient sans doute pas à une telle fronde de la part de ces Bisontins qui leur demandent des comptes par rapport à leurs intentions.

tions. Regroupés en association qui porte le nomduquartier,ilsagissent pour contre- carrer le projet des élus. En quelques semaines, le mouvement de contesta-

Résultat, le 6 décembre, Jean-Louis Fousseret a vou- lu désamorcer les inquié- tudes en martelant “que 2 000 logements,c’est unpoten- tiel. Çane veut pas dire qu’on en fera 2 000.” C’est une manièred’arrondir lesangles de parler de potentiel plu- tôt que d’objectif à atteindre.

tion a pris une ampleur éton- nante. Le front des Vaîtes s’organise et fait reculer la municipalité à coup d’arguments-pharesqui visent à démontrer que cette urba- nisationmassive est inadap- tée aux besoins de logements actuels,jusqu’à la rendrepour certains impopulaire.

“Tous les dossiers représentent un risque politique.”

Le maire a rappelé aussi que le projet “n’est pas ficelé. On a lancé la concer- tation préalable. Il y aura des études. Si on pose la première pierre en 2008, çane veut pasdire que tout sera construit en 2010. C’est une opération qui pren- dra un certain nombre d’années. Je ne serai sans doute plus maire de Besan- çon quand elle arrivera à terme.” Il ras- sure et affirme que d’ici là, il revien- dra revoir les habitants desVaîtes. En clair,lamairie veut travailler en concer- tation. “Je n’ai aucun intérêt à mécon- tenter une partie de la population. Je suis né àBesançon il y a bientôt 59 ans. Croyez-vous que Jean-Louis Fousseret veut attacher son nomà la destruction d’un quartier ou à quelque chose de moche !” a terminé le leader politique local. Lemaire accorde d’un coup une atten- tion toute particulière à ces habitants en “nous disant finalement ce qu’on voulait entendre” regrette l’un d’eux à la sortie de la réunion du 6 décembre, peu convaincu par le propos. Mais en tentant la conciliation, Jean- Louis Fousseret se met aussi à l’abri

L’association a même créé son propre site internet, où l’on peut suivre en direct l’avancée du débat avec laVille. C’est aussi une tribune ouverte ou cha- cun peut glisser son témoignage par rapport à ce projet qui devrait condui-

Jean-Louis Fousseret : “Croyez-vous que je veuille attacher mon nom à la destruction d’un quartier ?”

R ÉACTION Le porte-parole de l’association Éric Daclin : “Nous demandons à la mairie de jouer carte sur table” L’association Les Vaîtes va suivre de près la ville dans son projet d’urbanisation. Elle espère être consultée en tant que force de proposition.

pas la seule responsabilité de la mai- rie de Besançon, mais d’autres collec- tivités. Alors dans l’échec comme dans la réussite, les torts et les lauriers sont partagés. Par contre, on aurait pu citer le dos- sierT.G.V. et l’emplacement de la futu- re gare, un chantier structurant sur lequel Jean-Louis Fousseret s’est tota- lement engagé en consultant les Bison- tins. On se souvient qu’il s’en était tiré par l’organisation d’un référendum pour, finalement, ne pas tenir compte de l’avis de la majorité des habitants. On attend donc la suite qui sera don- née auxVaîtes, où lamairie prône dia- logue et démocratie. T.C.

d’un dérapage politique qui pourrait lui coûter cher à trois ans des prochaines élections municipales. Une fois enco- re, l’association desVaîtes a démontré en peu de temps ses capacités à com- muniquer et à mobiliser. Pour préser- ver son image, le maire n’a donc pas intérêt à se laisser embarquer dans une confrontationau risque d’organiser son impopularité à l’est de Besançon. Le dossier des Vaîtes représente un danger politique potentiel pour Jean- Louis Fousseret. “Mais tous les dossiers représentent un risque politique. Pre- nez par exemple le cas du contourne- ment de Besançon” rétorque un proche du maire. À la différence près que ce projet d’aménagement routier n’engage

L a Presse Bisontine : Votre mouve- ment prend de l’ampleur. Ne pensez- vous pas qu’une récupération poli- tique soit faite de cette histoire ? Éric Daclin : On y prend garde. Dès le début, nous avons affiché notre volon- té de ne pas tomber dans un débat politique. Ce qui nous intéresse, c’est ce qui se fera aux Vaîtes. C’est vrai que plusieurs personnes de l’opposition municipale, et même des gens qui ne représentent pas le conseil, ont cher- ché à nous rencontrer.Mais nous pre- nons de la distance par rapport à tout cela. L.P.B. : Avez-vous trouvé Jean-Louis Fous- seret crédible le 6 décembre ? É.D. : J’ai le sentiment qu’il a cherché à montrer qu’il écoutait les habitants des Vaîtes. Il y a un vrai changement de ton de la part du maire.Mais nous ne sommes pas dupes.

L.P.B. : Quel est votre objectif désormais ? É.D. : Nous sommes les porte-parole des gens du quartier. L’objectif est d’arriver à une réelle discussion avec la ville. Chacun a pu noter que le mai- re a souhaité nous rencontrer fin décembre ou début janvier. J’espère que cela va déboucher sur des actions concrètes et des plans.Car l’association a clairement le sentiment que projet d’urbanisation des Vaîtes tel qu’il nous est présenté aujourd’hui, exis- te depuis longtemps. Il est à notre avis très bien préparé. C’est une intui- tion. Nous demandons à la mairie de jouer carte sur table. On a donné les clefs au maire pour qu’il désamorce les inquiétudes des habitants. Il ne les utilise pas. Le mouvement s’arrêtera dès que nous aurons trou- vé des solutions. S’il n’y en a pas, alors la mobilisation se poursuivra. Propos recueillis par T.C.

E RREUR Tout était défini La municipalité est dans l’embarras

Jean-Louis Fousseret et son équipe n’ont pas sorti le projet d’aménagement des Vaîtes d’un chapeau. Contrai- rement à ce qui est dit, tout est planifié depuis 2002.

ans pour les Vaîtes. Main- tenant, elle n’a guère d’autre alternative que de tenir compte de l’avis de l’association qui veut s’imposer “en tant que for- ce de proposition dans ce dossier.” “Il y a un haut niveau d’exigence pour nous de construire un vrai quar- tier. Et un haut niveau d’exigence de la part de cet- te associationqui est un inter- locuteur avec lequel on peut dialoguer” indique le cabi- net de Jean-Louis Fousse- ret. Mais jusqu’où ira le dialogue sachant qu’au sein même de la majorité municipale, les vues divergent sur ce dossier. Selon un proche d’ÉricAlauzet,le leader vert, “la volonté est véritablement de concentrer 2 000 loge- ments aux Vaîtes, sur un minimumd’emprise fonciè- re.” L’action de l’association serait donc le grain de sable qui vient gripper les plans de l’équipe Fousseret.

“C e n’est pas une bal- le qu’on s’est tirée dans le pied, mais une rafale.” Jean-Louis Fous- seret fait au moins preuve de clairvoyance sur la com- munication de la ville par rapport au projet d’urbanisation des Vaîtes. Les élus devaient bien s’attendre à quelques réac- tions des habitants du sec- teur en publiant dans le document sur le Plan Local d’Urbanisme intitulé “Des- sinons ensemble la ville de demain”, une carte en trois dimensions sur les aména- gements à venir. Pour tem- pérer et calmer les esprits, la mairie ne cesse de rap- peler qu’il ne s’agit que d’une image et que le projet d’urbanisation des Vaîtes est soumis à la concertation.

prêt, cette annonce légale parue dans le quotidien régional en décembre 2002. C’est une consultation lan- cée par la ville. “Objet du marché : il s’agit d’une mis- sion d’étude, pour la com-

C’est le bon moyen de lever les inquiétudes. Comme si cette infographie était jus- te un élément virtuel trans- mis à la population pour qu’elle ait une vague idée des intentions de la muni-

cipalité dans le secteur Est de Besançon. Curieux ! Les citoyens des Vaîtes en tout cas ont du mal à y croire. Pour eux, tout est mûre- ment réfléchi et s’ils n’étaient pas

position d’un quartier nouveau dans le secteur dit desVaîtes. L’étude d’urbanisme défi- nira la composi- tion, la forme urbaine, l’identité, l’intégration fonc- tionnelle de ce nou- veau quartier. Elle

Au sein même de la majorité municipale, les vues divergent.

Éric Daclin est porte-parole de l’association Les Vaîtes.

montés au créneau pour dénoncer le programme, il est probable que le projet serait passé “comme une lettre à la poste” déplore un riverain. La preuve que tout était

tiendra compte de l’évolution programmée des infra- structures de transport en commun.” La ville ne planche donc pas sur la question depuis hier. Elle a fixé le cap il y a trois

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