La Presse Bisontine 58 - Septembre 2005

I NFLUENCE Reçus par le préfet Maçonnerie et politique font-ils bon ménage ? 14 LE DOSSIER On leur attribue un grand pouvoir qu’ils n’ont certainement pas. Pour- tant, ils sont une organisation incontournable. On les dit aussi proche du monde politique et institutionnel. Est-ce le cas à Besançon ?

NOUVEAUX HORAIRES du lundi au vendredi de 8h à 12h et de 14h à 18h + LE SAMEDI MATIN

N°1 EN EUROPE CONTROLE TECHNIQUE AUTOMOBILE

Le contrôle est technique, notre service est humain Profitez de notre offre spéciale avec “LE FORFAIT PASS” BOUSSIÈRES 25, route de Vorges 03 81 56 62 29

R éseau d’influences, cercles d’amitié, sociétés philo- sophiques, organisations philanthropiques, la franc- maçonnerie est souvent affu- blée de tous ces noms. Qu’en est-il vraiment, à Besançon, comme ailleurs ? “Le réseau de fraternité existe indéniablement, commente un maçon local. Si

Pour ce qui est des rapports entre la franc-maçonnerie et les institutions de laRépublique, ils existent, indéniablement. Dans le Grand Besançon aus- si. “Quand on est franc-maçon, on est un citoyen engagé, est plus enclin à s’impliquer ensui- te dans la vie de la cité, qu’elle soit associative ou politique. Beaucoup demaçons sont impli- qués dans les conseils munici-

je cherche du travail, cela me sera plus facile si je suis franc- maçon. Mais ce qui crée parfois des problèmes, c’est quand des maçons profitent du système pour faire du trafic d’influences et qu’ils profitent de la confian- ce des autresmaçons. Enmaçon- nerie, on a toujours nos mou- tons galeux” poursuit-il.

franc-maçonnerie ou estmembre d’une loge bisontine, relève de la pure spéculation. On a sou- vent dit l’ancien maire Robert Schwint franc-maçon, on dit aujourd’hui régulièrement de l’actuel maire Jean-Louis Fous- seret qu’il est un frère. L’inté- ressé est catégorique : “Je ne suis pas franc-maçon et je ne souhaite pas l’être. J’estime que le maire d’une ville ne doit pas être impliqué dans un tel mou- vement.” Voilà qui aura aumoins le mérite d’étouffer tous les bruits de couloir à ce propos. O J.-F.H.

Le travail d’un franc-maçon en loge peut aussi resurgir sur son implication dans la cité. Le meilleur exemple local est sans doute l’action de l’ancien adjoint au maire Henri Huot, à l’origi- ne de la création du C.C.A.S. à Besançon et instigateur, sur le plan national cette fois, d’une mesure qui aura marqué la décennie 80 : le R.M.I. Lemaçon Henri Huot a été également un des fondateurs de la plus récen- te loge bisontine, “Pierre-Jose- ph Proudhon”. Savoir enfin, si tel ou tel hom- me politique local fréquente la

nisé des réceptions officielles et privées à cette occasion, racon- te ce membre de la loge Pierre-

Joseph Proudhon. Mais c’est uniquement au titre du protocole habituel car aux yeux des autorités fran- çaises, le grandmaître duG.O. a toujours été u n e a u t o r i t é publique.” “Il y a tou- jours eu un rapport institutionnel entre la

paux des communes” dit ce frère de la péri- phérie bisontine. Avec les institutions de la République, les rapports sont plus ou moins étroits. “Il y a quelques années, le grand maître du GrandOrient est venu donner une conféren-

“Préfecture et mairie ont organisé des réceptions officielles.”

République et les représentants du Grand Orient” reprend ce frère du G.O.

ce à Besançon. J’étais chargé de faire le lien avec la préfec- ture et la mairie qui ont orga-

Détail d’un tablier maçonnique.

P HÉNOMÈNE En pleine expansion La maçonnerie bisontine se conjugue au féminin Une trentaine de femmes se réunissent au sein d’une loge 100% féminine à Besançon. Tout aus- si discrète que son alter ego masculin, la franc- maçonnerie féminine est pourtant très active.

R ÉACTION Aux éditions Albin Michel “La maçonnerie est devenue un moulin à eau tiède” Reporter à Libération, Renaud Lecadre a écrit avec la journaliste politique Ghislaine Ottenheimer “Les frères invisibles”. L’ouvrage met le doigt sur les dérives de la franc-maçonnerie. Commentaires.

L a Presse Bisontine : La franc- maçonnerie serait, selon vous, étroitement associée aux “affaires”. Renaud Lecadre : La plupart des maçons sont sincères et hon- nêtes. Mais au fil de notre enquête, nous nous sommes aperçus que dans de nombreux scandales (Elf, Crédit Lyon- nais, A.R.C., Urba, etc.) des francs-maçons étaient impli- qués. Ceux qui témoignent le plus dans le livre sont en géné- ral des dissidents, des maçons dégoûtés de ce qui se passait et du fait que les directions des obédiences concernées par les scandales n’aient pas fait le ménage en leur sein. L.P.B. : Vous évoquez notamment la G.L.M.F. comme étant une des plus impliquées dans des “affaires”. R.L. : Pour être admis à la G.L.N.F., il fallait avoir un casier judiciaire vierge. Ce verrou a sauté. C’est révéla- teur des dérives qu’a connues cette obédience qui a trop long- temps refusé de voir le mal qui la rongeait. En témoignent notamment les affaires révé- lées sur la Côte d’Azur, avec Michel Mouillot et consorts.

particulier. Sur les grands sujets de société, elle semble en panne d’idées. La maçon- nerie est devenue un moulin à eau tiède. L.P.B. : La franc-maçonnerie serait- elle donc sur le déclin ? R.L. : Paradoxalement non car il y a actuellement un vrai regain ésotérique. Il n’est qu’à

Le paradoxe, c’est que jamais la G.L.N.F. n’a autant recru- té qu’aujourd’hui. L.P.B. : La franc-maçonnerie est- elle un tremplin pour ses membres ? R.L : Les obédiences compor- tent beaucoup de magistrats, de policiers, de chefs d’entre- prises. Beaucoup d’entrepre- neurs et d’hommes d’affaires

S ur le plan national, la G.L.F.F. (grande loge féminine de France) compte 11 000 membres. C’est la première obédience intégralement fémi- nine (qui n’accepte donc pas

nos réunions. La franc-maçon- nerie, c’est l’art de se construi- re pour mieux construire la société.” Toujours le même argumentaire. Et concrète- ment ? “Exemple d’un de nos travaux pour lequel nous avons fait un compte-rendu qui nous l’espérons pourra influencer les politiques : la question de l’excision des femmes origi- naires d’Afrique” illustre la responsable. Quant à savoir si la loge est un véritable réseau d’influences, la repré- sentante affirme qu’il “n’y a jamais eu de passe-droit au sein de notre loge. Mais il est clair qu’à niveau égal, quand il s’agit de privilégier quel- qu’un dans un entretien d’em- bauche par exemple, on a ten- dance à donner le coup de pouce à la personne qui est franc-maçonne.” Plus qu’un réseau d’influence ou de conni- vence, la maçonnerie fémini- ne est à l’image de son pen- dant masculin, un vaste réseau d’informations entretenues entre “connaissances”. O J.-F.H.

ment dans leur travail. Je pen- se sincèrement que l’on me regarderait différemment, qu’on se méfierait peut-être de moi si je disais que j’étais franc- maçonne” ajoute la respon- sable, professionnellement reconnue sur la pla- ce bisontine.

la mixité). En Fran- ce et à l’étranger, on dénombre 355 loges se revendiquant de la G.L.F.F. L’obé- dience féminine a même son émission

La question de l’excision des femmes.

voir le phéno- mène Da Vinci Code. La maçonnerie attire beaucoup actuellement pour le net inté- rêt intellectuel

viennent en maçonnerie. La franc-maçonne- rie est devenue un véritable facilitateur de carrières. Elle est aussi un

La loge féminine de Besançon a été créée en 1967. La plus jeu- ne de ses membres a 25 ans, la plus âgée

“Il y a actuellement un vrai regain ésotérique.”

82. “Cela va de l’agricultrice à la diplômée d’université. Nous avons une grosse recru- descence de nouveaux membres depuis l’an dernier.” La loge a initié 7 nouvelles femmes depuis l’an dernier. Un record. De quoi sont faites leurs “tenues” ? Comme ses frères maçons, la représentante de la loge bisontine affirme “tra- vailler au perfectionnement moral et spirituel de l’huma- nité, en soutenant notamment des œuvres caritatives.” En même temps, “on cherche à tirer les gens vers le haut à travers les débats qui animent

de radio, une fois par trimestre sur les ondes de France Cul- ture. À Besançon, il existe une loge féminine “composée d’une tren- taine de membres” selon sa responsable qui tient à gar- der l’anonymat. Comme ses “frères”, elle ne tient pas à dévoiler son identité. “Per- sonne ne sait que je suis franc- maçonne sauf ma famille très proche, explique-t-elle. Il est regrettable de ne pas dire qu’on est franc-maçon car de nos jours encore, ça peut être mal perçu. Beaucoup de personnes peuvent être ennuyées, notam-

vers l’ésotérisme qu’elle véhi- cule. On peut tout de même dire que le mérite de la franc- maçonnerie, c’est qu’elle encadre l’ésotérisme par un certain nombre de règles et qu’elle permet ainsi de pro- téger contre les dérives “sec- tisantes”. O Propos recueillis par J.-F.H.

grand carrefour d’informa- tions. Il n’y a pas de bonne loge sans un flic, un avocat, un entrepreneur de travaux publics et… un cuisinier. L.P.B. : Maçonnerie et politique font-ils toujours bon ménage ? R.L. : Les rapports entre la maçonnerie et la politique semblent être moins consan- guins qu’avant. Dans l’actuel gouvernement, il n’y a pas plus de 4 ou 5 maçons. La maçonnerie n’est plus por- teuse d’un projet politique

Made with FlippingBook - Online catalogs