La Presse Bisontine 268 - Octobre 2024
4 L’interview du mois
La Presse Bisontine n°268 - Octobre 2024
C.H.U. DE BESANÇON
Thierry Gamond-Rius
“Nous sommes complémentaires des autres hôpitaux, pas concurrents” Arrivé il y a dix-huit mois à la tête du C.H.U. de Besançon, Thierry Gamond-Rius veut mettre en lumière les projets en cours qui dynamisent l’hôpital public, notamment les postes partagés. Il n’esquive pas moins les difficultés de recrutement qui tendent pourtant à s’alléger. Entretien.
L a Presse Bisontine : Thierry Gamond Rius, lors de votre prise de poste en février 2023, les équipes étaient épui sées par la crise sanitaire et des sous effectifs. Dix-huit mois plus tard, quelle est la situation au niveau des recrutements ? Thierry Gamond-Rius : Lors de ma prise de fonction, l’hôpital était en phase de tran
200 nouveaux professionnels en plus. De quoi développer des activités nou velles. Nous avons également une poli tique de résorption de l’emploi précaire. D’ici la fin de l’année prochaine, 300 professionnels seront titularisés, y com pris sur des métiers spécifiques comme les psychologues qui sont souvent contractuels. En 2026, nous allons pro poser la titularisation d’un professionnel dans un délai de 6 mois après l’em bauche. Nous visons notamment les emplois les moins bien rémunérés pour qu’ils puissent bénéficier de mesures d’intégration rapides comme éviter ou simplifier le concours, quand c’est pos sible. Et nous mettons un accent par ticulier sur les internes, nous avons intérêt à les inciter à venir travailler chez nous et à rester. Nous insistons sur l’intérêt géographique du C.H.U., central en Franche-Comté. L.P.B. : Dans quelle mesure l’inquiétude nationale autour du manque de médecins internes concerne-t-elle le C.H.U. ? T.G.-R. : Nous aurons cette année une quarantaine de postes d’internes en moins. Cela est dû à une réforme des études médicales qui est en cours. Cer tains ont fait le choix de redoubler a vu des incertitudes. Il y aura un trou d’air pendant un an. Mais dans un an, nous aurons une quarantaine d’internes de plus qu’habituellement. En atten dant, nous allons répartir les internes entre les différents services. À Besançon, nous comptons 700 internes, pour 700 médecins, sur 7300 salariés. Attirer des internes qui resteront en Franche Comté est un enjeu majeur. L.P.B. : L’une des réponses à la problématique de recrutement, notamment de professionnels ultra-spécialisés, est le recours aux postes partagés. Quel en est le principe ? T.G.-R. : C’est une conviction profonde chez moi. Le principe est d’aider les autres plateaux techniques (Pontarlier, Dole, Lons-le-Saunier, etc.) en permet tant aux professionnels de santé, notam ment ceux ultra-spécialisés, d’exercer dans les autres hôpitaux, plus petits. Nous sommes dans la complémentarité, pas la concurrence. On aurait pu faire le choix de tout centraliser. Mais les activités réalisées dans les autres hôpi taux permettent de soutenir l’établis sement, d’éviter le déplacement des patients et de laisser du temps au C.H.U.
sition avec les équipes épuisées et des difficultés de recrutement. L’année der nière a été plutôt positive avec une belle attractivité. 200 professionnels ont été recrutés, 200 postes en plus pour accompagner des projets et remet tre à niveau certaines équipes. Cette tendance se confirme avec, cette année,
Puis, il nous faudrait dans les deux ans, être en capacité d’ouvrir une ving taine de lits de médecine polyvalente pour peu qu’on trouve des profession nels. L’idée est d’un service de médecine polyvalente en aval des urgences qui ferait le lien avec la médecine de ville, les établissements médico-sociaux pour accélérer les sorties. Il faut travailler la sortie d’hôpital car trop de patients qui ne nécessitent plus d’hospitalisation occupent un lit, faute de solution à la sortie. On a du mal à faire ressortir les personnes des urgences, notamment les personnes âgées. L.P.B. : Quelles solutions préconisez-vous pour pallier ce problème d’engorgement des urgences ? T.G.-R. : Chez nous comme ailleurs, il y a un problème d’effectifs, on ne fait pas le plein d’urgentistes. Et puis, il y a ce problème d’aval. Sur ce point, on par ticipe à l’organisation du territoire dans la réponse à apporter au vieillissement de la population. On travaille avec les autres structures comme les établisse ments médico-sociaux, la Ville, etc. Je rêve d’un pont avec le portage des repas, le C.C.A.S., notamment pour repérer des personnes âgées qui commencent à être en difficulté. Ceci afin d’aider à une prise en charge à domicile, une hos pitalisation quand c’est nécessaire, dans des conditions convenables et en pro grammant les soins. Les gériatres aujourd’hui passent plus de temps à courir pour trouver des places à leurs patients. Au C.H.U., on sait qu’on manque de lits de médecine, une ving taine. Nous ne sommes pas en capacité d’en ouvrir du fait des travaux dans la tour Minjoz. En 2026, nous aurons une vingtaine de lits en sorties d’urgence. Nous sommes également en train d’ef fectuer un rapprochement avec les éta blissements d’Avanne, Bellevaux, les
pour la recherche et ses missions de recours. En Franche Comté, nous avons le très bel exemple de l’I.R.F.C. (Institut régional fédératif du cancer). Ce modèle fonctionne depuis 15 ans. Il garantit d’avoir un praticien, une qualité de soins qu’on n’a pas tou jours du fait des pro blèmes de recrute ment, un délai de prise en charge plus rapide notamment
Thierry Gamond-Rius, directeur du C.H.U. de Besançon, et également directeur par intérim de l’hôpital de Pontarlier.
“Attirer des internes qui resteront en Franche-Comté est un enjeu majeur.”
entre la chirurgie et la chimiothérapie. Ce modèle montre une réactivité au plus près de la population. Aujourd’hui, nous étendons ce modèle à toutes les disciplines. La Franche-Comté compte 222 postes partagés. L.P.B. : Outre le recrutement qui tend à s’amé liorer, quelle est la situation au niveau de l’accueil des patients ? T.G.-R. : Aujourd’hui, on ne refuse pas de patients. Sur un an, nous avons rou vert une quarantaine de lits avec un focus sur la cancérologie et la gériatrie. Il y a eu une reprise de l’activité en chirurgie, le développement de l’am bulatoire. Idéalement, on devrait rouvrir une vingtaine de lits supplémentaires mais nous sommes confrontés à des problèmes de locaux. Le dispositif Ser vice d’accès aux soins (S.A.S.) de la médecine libérale permet en outre d’évi ter que des patients arrivent aux urgences faute de rendez-vous en ville. Le centre d’enseignement et de soins dentaires a ouvert en septembre. En 2026, le nouveau bâtiment de psychia trie sera opérationnel avec la remontée des services de Saint-Jacques.
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